mardi 27 août 2013

En quête d'éternité

L'anecdote remonte au 12 juin dernier. Invités à prendre la parole devant un parterre d'étudiants, George Lucas et Steven Spielberg disent leurs inquiétudes et se font prophètes... de la fin du cinéma ! Leur argument: les films sont devenus trop chers. Il suffirait donc que, lassé du spectacle, le public se détourne pour que la pyramide des studios s'écroule. Je ne sais pas combien a coûté Le congrès. J'ai toutefois la conviction - et l'espoir, à vrai dire - qu'un avenir radieux du septième art passe surtout par l'inventivité. Et là, j'ai été servi...

De manière explicite, Le congrès parle d'ailleurs lui aussi de l'avenir du cinéma. Soit Robin Wright, comédienne réelle, dans la robe chic d'un personnage qui porte son nom. Un personnage ? Le film s'ouvre sur son visage en gros plan avec, en voix off, celle de son agent. Deux ou trois minutes pour évoquer une carrière et sa possible fin. Une solution se présente, toutefois: Robin pourra être à plein temps la mère parfaite qu'elle s'efforce d'incarner si elle consent à laisser son image faire du cinéma... sans elle. L'idée consiste à scanner l'ensemble de ses émotions pour façonner une sorte de clone chargé de tourner les films à sa place. Au-delà de l'argent, l'actrice oubliée gagnerait aussitôt une part d'éternité, cet incroyable privilège habituellement réservé aux authentiques étoiles. Vous aurez compris que le mythe de Faust n'est pas loin quand le réalisateur Ari Folman lance son histoire à la conquête de notre imagination. J'ajoute juste que cette première partie du film est diablement efficace. On y croit !

Vingt années passent d'un coup et le pacte signé par Robin est arrivé à expiration. Alors que se pose la question de son renouvellement pour - au moins - vingt années de plus, la comédienne est l'invitée d'une réunion virtuelle. Elle bascule alors dans un monde animé. Décalque du nôtre ? Ça, parce que j'ai déjà trop dit, je vous laisserai le découvrir seuls, ainsi que le second enjeu dramatique qui sous-tend le scénario de cette belle seconde partie du long-métrage. L'originalité vient également d'un virage à 180 degrés sur le plan formel: Le congrès devient un film d'animation, en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire. Cette audacieuse volte-face esthétique risque de dérouter certains d'entre vous. Je salue toutefois ce choix courageux - la liberté de choisir, c'est d'ailleurs l'un des grands thèmes du film. Sachez-le: le message n'est pas des plus optimistes. Je dois dire toutefois qu'au final, en allant jusqu'au bout de sa logique maternelle, Robin Wright a bien su m'émouvoir. Mission accomplie !

Le congrès
Film israélo-américain d'Ari Folman (2013)

Un point à préciser: le long-métrage a aussi bénéficié de soutiens luxembourgeois et polonais. Comme Solaris avant lui, il puise l'inspiration de son sujet dans un roman de l'écrivain Stanislas Lem. Les deux films ne se ressemblent pas, cela dit. Je crois même pouvoir dire que Le congrès ne ressemble à aucun autre des films que j'ai vus jusqu'à aujourd'hui. Notez toutefois qu'Ari Folman est un nom connu des cinéphiles pour avoir été le réalisateur du film Valse avec Bachir. Ce documentaire d'animation évoque une intervention militaire israélienne au Liban au printemps 1982. J'en reparlerai probablement.

----------
Est-ce que d'autres internautes ont aimé le film ?
Oui. Pascale en parle d'ailleurs sur son blog, "Sur la route du cinéma".

1 commentaire:

David Tredler a dit…

"Le Congrès" c'est un des grands films de l'année, une expérience cinématographique unique. Ravi que tu en parles, je n'ai malheureusement pas pris le temps de le faire.