vendredi 30 septembre 2016

Avis de festival

C'est arrivé plusieurs fois déjà, je sais, mais, sans intention lucrative aucune, je souhaite à nouveau vous parler d'Arte. La petite chaîne franco-allemande prend aujourd'hui une initiative qui me réjouit pleinement: avec divers partenaires, elle lance un festival du cinéma européen ! Tout est expliqué sur un site: www.artekinofestival.com...

Si j'ai tenu à relayer cette initiative, c'est qu'elle concerne également les citoyens connectés de 44 des 51 pays de notre continent ! L'idée première est de s'inscrire (facilement) pour ensuite pouvoir regarder tout ou partie des films sélectionnés, en ligne. Après avoir découvert un long-métrage, l'internaute lambda a la possibilité de lui attribuer une note, contribuant ainsi à l'attribution finale d'un Prix du public. Tout est gratuit, démarre aujourd'hui et dure jusqu'au 9 octobre. J'ignore encore si je pourrai vraiment en profiter: je le ferai volontiers, en fonction de mon temps disponible et... de la qualité fluctuante de ma connexion Internet ! Je précise qu'il a fallu anticiper quelque peu pour réserver des droits d'accès aux films. Il est possible qu'il en reste et tout devrait être "libéré" à partir de mardi prochain...

Et voici la sélection complète des films retenus - en vous précisant aussi que, selon les pays, certains seront toutefois indisponibles...
- A good wife / Mirjana Karanovic (Serbie)
- Bella e perduta / Pietro Marcello (Italie)
- Fatima / Philippe Faucon (France)
- I tempi felici verranno presto / Alessandro Comodin (Italie)
- La jeune fille sans mains / Sébastien Laudenbach (France)
- John from / João Nicolau (Portugal)
- La mort de Louis XIV / Albert Serra (Espagne)
- Safari / Ulrich Seidl (Autriche)
- Suntan / Argyris Papadimitropoulos (Grèce)
- Wild / Nicolette Krebitz (Allemagne)

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Un mot sur mes intentions...

J'espère voir quelques-uns de ces films, en fonction donc des facteurs extérieurs déjà cités. Si j'y parviens, j'en reparlerais, bien entendu. Possible aussi que je fasse un bilan global de mon expérience d'internaute autour du Festival, après sa clôture. À suivre, du coup...

mercredi 28 septembre 2016

Une partie à risques

Depuis quand n'avez-vous pas fait une partie de jeu de société ? Personnellement, je n'ai pas calculé, mais ça remonte, pour sûr ! Néanmoins, je sais encore ce qu'est un jeu de l'oie, ce qui m'a permis d'apprécier Jumanji sans le moindre problème de compréhension. C'est rassurant, en réalité: le film n'a jamais que 21 ans, après tout...

Dans Jumanji, donc, deux enfants - Judy et son petit frère Peter - jouent ensemble à un jeu du même nom que le film. Un jeu mystérieux que les deux mômes ont découvert au fin fond du grenier de leur nouvelle maison (je vous passe quelques détails, d'accord ?). Mais rapidement, il s'avère que la partie risque de très mal tourner. Chaque lancer de dé provoque en effet une calamité, l'invasion soudaine de moustiques géants n'étant que la première de la liste. Heureusement, les mioches auront bientôt du renfort, en la personne d'un dénommé Alan Parrish. Leur aventure ne fait que commencer ! Cela dit, moi, je ne veux pas en dévoiler davantage sur le scénario...

Un mot sur les acteurs, du coup: le long-métrage nous permet notamment de retrouver le regretté Robin Williams, aussi généreux et gentiment excentrique qu'il pouvait l'être au top de sa carrière. Autour de lui, une troupe impliquée, mais pas véritablement de stars hollywoodiennes, si ce n'est Kirsten Dunst, alors âgée de 13 ans ! Techniquement, Jumanji propose de très nombreuses scènes à effets spéciaux, franchement réussis d'ailleurs pour un film de cette époque. Le récit lui-même s'adresse plutôt aux plus jeunes, mais je veux dire également que j'ai suivi toute cette histoire sans le moindre déplaisir. C'est un programme on ne peut plus recommandable pour une soirée plateau-télé en famille. J'ai lu qu'on annonçait une suite cette année. Qu'ajouter ? Elle aura sans doute du mal à receler le même charme...

Jumanji
Film américain de Joe Johnston (1995)

Une précision: le long-métrage est l'adaptation d'un livre pour enfants de l'auteur américain Chris van Allsburg, sorti en 1981. Je voudrais pouvoir citer d'autres films du même genre, mais j'en connais peu. Max et les maximonstres - que j'aime bien - est beaucoup plus dur. Ma mère, qui m'a conseillé Jumanji, m'a assuré qu'il lui rappelait quelque peu Les Goonies. Pas convaincu... je préfère cet autre film ! 

mardi 27 septembre 2016

Des vues au sud

Il me faut être honnête: L'Africain n'est pas d'une grande modernité. Voir un autre film de Philippe de Broca me tentait, c'est tout. J'ai eu quelque difficulté également à résister au charme du duo chic et choc formé par Catherine Deneuve et Philippe Noiret. On n'écrit plus guère de telles histoires, mais bon... la nostalgie, c'est bien aussi, parfois !

Charlotte bosse pour une agence de voyages parisienne. Elle débarque en Afrique avec l'idée d'ouvrir un nouveau club pour touristes blancs et fortunés. Manque de chance: pour la transporter sur un site possible, elle ne peut compter que sur son mari, Victor, un aviateur privé qui travaille aussi comme épicier, sur les bords d'un fleuve ! Vous l'aurez déjà compris, je suppose: L'Africain du titre, c'est lui. S'ensuit une gentille petite comédie "à l'ancienne", à grands renforts de disputes au fond de la jungle et de réconciliations temporaires. Notez qu'il y a aussi un méchant, ce qui offre au long-métrage l'occasion de montrer des éléphants - et d'évoquer le trafic d'ivoire...

Au final, même si tout cela sent un peu la poussière, le plaisir demeure assez important pour que l'on passe un bon moment. Inutile d'ajouter que le tandem Deneuve / Noiret fait le job, pas vrai ? J'aimerais plutôt mettre en valeur quelques-uns des personnages secondaires, joués avec talent par Jean Benguigui, Jacques François ou Jean-François Balmer. C'est à la fois inconséquent et amusant ! Les plus esthètes d'entre vous devraient apprécier aussi la bande originale, signée du grand compositeur George Delerue. Sur le plan formel, L'Africain n'apporte que peu de surprises, mais cette musique "colle" aux images. Sans fausse honte, je me suis laissé emporter...

L'Africain
Film français de Philippe de Broca (1983)

L'index des réalisateurs peut à présent vous permettre de retrouver quelques autres films du cinéaste. Celui-là n'est pas mon préféré. J'aime davantage l'un de ses films de capes et d'épées: Cartouche. Maintenant, si vous tenez absolument à vivre de belles péripéties africaines, il me reste à vous orienter vers le cinéma hollywoodien. Au choix: Mogambo côté classique ou Out of Africa pour la passion...

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Et si jamais tout cela ne vous suffit pas...

Je vous conseille également de lire la (courte) chronique de Chonchon.

lundi 26 septembre 2016

Comme une famille

Based on a true story. Inspiré d'une histoire vraie. Je suis persuadé qu'il vous est déjà arrivé de tomber sur cette mention au cinéma. Quand j'ai regardé Les drôles de poissons-chats, je ne savais pas que le film relatait des faits réels. Qu'est-ce que ça a changé ? Rien. Mon plaisir aurait été le même, je pense, si je l'avais su dès le début.

Dans Les drôles de poissons-chats, Claudia Sainte-Luce nous raconte son histoire: celle d'une jeune Mexicaine solitaire qui, hospitalisée pour une appendicite, rencontre une autre patiente, séropositive. Progressivement, une amitié nait entre les deux femmes, la seconde devenant une sorte de mère adoptive pour la première. Or, Martha compte déjà quatre enfants, que Claudia rejoint donc pour constituer une famille de coeur. Un scénario banal ? Pas vraiment, je dois dire. Si elle parvient à nous émouvoir, c'est bien que la jeune réalisatrice film son petit monde habilement - et avec beaucoup de tendresse. Ces images "sonnent" juste, à l'écart de toute emphase larmoyante...

Certains d'entre vous regretteront peut-être que le film reste campé sur ses positions et concentre l'essentiel de son propos sur l'intime. Peut-être y aurait-il eu matière à porter sur les malades d'Amérique latine un regard autre, proche de celui d'un documentaire. Cette piste n'est jamais explorée par Claudia Sainte-Luce, qui signe cependant d'honnêtes débuts derrière la caméra, à 31 ans seulement. L'absence de toute prétention rend l'entreprise attachante, même si le résultat n'est pas aussi maîtrisé que le serait le film d'un cinéaste au talent plus affirmé. Les drôles de poissons-chats a les (petits) défauts d'une oeuvre de jeunesse, mais il dure moins d'une heure et demie. C'est bien: je n'y ai vu aucune scène inutile ou redondante. Quitter ensuite les personnages sans vision de leur devenir, c'est bien aussi !

Les drôles de poissons-chats
Film mexicain de Claudia Sainte-Luce (2013)

Bon... c'est aussi pour sa nationalité que j'ai regardé le long-métrage. Aucun regret au moment du générique final, mais le sentiment plaisant d'avoir découvert un joli film. Il n'est pas facile désormais d'en identifier un autre, pour comparaison. Le côté "tribu d'enfants livrés à eux-mêmes" m'a vaguement rappelé Nobody knows. Le film du Japonais Hirokazu Kore-eda est plus dur et - à mes yeux - meilleur.

dimanche 25 septembre 2016

Un piège ?

Clint Eastwood n'a jamais caché l'importance pour lui de sa rencontre avec Don Siegel. Les proies est la deuxième de leurs cinq oeuvres communes. Cette année-là, à la suite de son mentor, l'acteur passera lui aussi derrière la caméra pour la toute première fois. Je dois dire que j'avais depuis longtemps envie de découvrir le "film-transition"...

Les proies, donc: dans ce (faux) western, Clint est un sous-officier nordiste de la guerre de Sécession. Une certaine ambigüité plane quant à son implication réelle dans le conflit. Médecin, notre homme aime mieux exercer son métier, plutôt que faire la guerre. Logique. Seulement voilà, cette fois, c'est lui qui est blessé lors des combats. Une très jeune fille l'emmène se faire soigner dans un pensionnat isolé. Le voilà à la merci de quelques femmes... du camp ennemi ! Heureusement pour lui, il est plutôt séduisant, avec ou sans barbe. Comme d'habitude, je n'ai pas l'intention de vous dévoiler l'évolution du scénario. On dira que, face au chat, les souris ont du répondant...

Moi qui savais comment tout cela devait finir, je ne peux pas dire véritablement que le film m'a surpris. J'estime toutefois possible d'affirmer que notre ami Eastwood est un tantinet plus "vulnérable" que dans les grands westerns italiens qu'il avait tournés auparavant. Avec un sens consommé du décor, Don Siegel lui offre une aventure étonnante, aux allures de mauvais rêve. Est-ce parce qu'un homme tient la caméra ? Serait-ce plutôt parce que j'en suis un ? Il m'a semblé que Les proies m'embarquait dans son récit au travers du regard fiévreux de son personnage principal - d'où, à vrai dire une tension diffuse, mais bien réelle tout au long du métrage. Il me faut dire aussi que les actrices jouent très bien, qu'elles soient expérimentées comme Geraldine Page ou toutes jeunettes comme Pamelyn Ferdin. Une dernière petite précision: le film ne connut qu'un succès relatif après sa sortie. Ce n'est qu'avec les années qu'il a gagné en notoriété.

Les proies
Film américain de Don Siegel (1971)

Je le répète, ce n'est pas vraiment un western: l'action se déroule essentiellement à huis clos et les coups de feu échangés sont rares. Bref... j'ai plutôt aimé cette atmosphère ouatée, qui a pu inspirer l'ami Clint pour son propre premier film - Un frisson dans la nuit. Notez que, pour la première fois, Eastwood joue un personnage presque négatif. Comme un prélude à L'homme des hautes plaines...

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Une petite anecdote...

Don Siegel avait choisi Jeanne Moreau pour le premier rôle féminin. Un choix finalement rejeté par les producteurs d'Universal Pictures... 

Envie de retourner au pensionnat ?
Vous pouvez lire "L'oeil sur l'écran", ainsi qu'une chronique de Pascale.

vendredi 23 septembre 2016

De l'autre côté

La petite quarantaine de films allemands déjà présentés sur ce blog dit quelque chose de l'amitié que j'ai pour ce pays et son peuple. Aujourd'hui encore, je me trouve parfois obligé de justifier pourquoi. Comme si, au fond, nous étions en 1914 ou 1939. Je ne nierai pas pour autant que je suis souvent attiré par des films comme Frantz...

Autant vous prévenir si vous l'ignorez: Frantz est un film d'inspiration française. Les germanistes parmi vous auront sans doute remarqué un détail révélateur: le prénom-titre est mal orthographié - la langue allemande l'écrit Franz, sans T. Bref... le plus important est ailleurs. L'histoire démarre dans un petit village outre-Rhin, quelques mois seulement après la fin de la Première guerre mondiale. La jolie Anna fleurit chaque jour la tombe de son fiancé et tente de reprendre seule le cours de sa vie, d'autant plus modestement qu'elle vit sous le toit de ceux qui auraient dû devenir ses beaux-parents. Cette existence rangée est soudain perturbée: au cimetière, Anna aperçoit un homme éploré, qui se recueille sur la même sépulture. Et il est... français ! Que veut donc cet Adrien ? Comment ose-t-il braver ainsi la rancoeur tenace de certains anciens combattants allemands ? Le film construit sur ces questions un début de suspense. Je n'en dirai donc pas plus...

Attendez-vous tout de même à quelques rebondissements ! L'énigme première du film est assez vite dissipée, mais c'est aux conséquences de la vérité que nous sommes ensuite exposés - et c'est intéressant aussi. Je dois dire que j'ai plutôt bien aimé le jeu du tandem principal de ce drôle de thriller en costumes: Pierre Niney tient du talent confirmé, c'est vrai, mais l'Allemande Paula Beer est une découverte. Chacun s'exprimant dans la langue de l'autre, le pas de deux mérite les éloges. Je reste un peu plus mesuré sur le reste d'une distribution binationale de qualité, mais trop souvent réduite à jouer les utilités dans l'ombre des vedettes (si ce n'est les caricatures). Autre bémol quant à la forme: l'usage du noir et blanc ne m'a pas semblé apporter grand-chose au propos, d'autant moins en fait que quelques couleurs surgissent ponctuellement, pour appuyer je ne sais quelles idées. Nonobstant ces remarques, Frantz est un film qui m'a plu et surpris. Un bon point: il m'a emmené là où je ne pensais pas qu'il conduirait. Son inclinaison pour le romanesque me parait avoir joué en sa faveur.

Frantz
Film français de François Ozon (2016)

Un long-métrage plein de faux semblants: les habitués du réalisateur seront donc en terrain familier. Vous pouvez désormais aller fouiller dans mon index dédié pour trouver certains de ses opus précédents. Honnêtement, celui-là n'est pas mon préféré, mais ça reste du travail propre et du bon cinéma d'auteur populaire. On reste loin évidemment de la puissance d'un film-pamphlet comme Les sentiers de la gloire...

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Et maintenant, un petit clic ailleurs, voulez-vous ?

Pascale parle aussi du film, qu'elle a pu découvrir en avant-première. Pour un avis (un peu) plus distancié, vous pouvez lire Princécranoir.

jeudi 22 septembre 2016

Histoires d'eaux

Le jour - pas si lointain - où j'ai préparé cette chronique, il faisait encore une trentaine de degrés chez moi. Je cherchais la fraîcheur et, deux soirs plus tôt, j'étais retourné au cinéma avec des amis. L'occasion de participer à la rentrée de mon association, aussi. Soudain, j'ai pensé que ce pourrait être rigolo de parler de piscines...

Je n'ai en tout cas pas envie d'écrire à nouveau sur L'effet aquatique. OK, c'est un fait: j'ai trouvé plutôt malin ce choix de programmation pour les débuts de notre saison 2016-2017, mais ma chronique précédente est bien trop récente pour que j'aie des choses originales à ajouter sur le film. Tant qu'à faire, j'aurais aimé le présenter ! Bref... pour rester raccord avec ma thématique du jour, je confirme qu'il y a bien une piscine au centre du scénario de cette comédie romantico-loufoque - le stade nautique Maurice-Thorez de Montreuil.

Quand je remonte le fil de mes souvenirs, la plus ancienne piscine dont je me rappelle au cinéma est celle vue dans Le grand bleu. D'ailleurs, ma mémoire n'en avait plus qu'une vision floue: je gardais en tête l'image d'un Jean Reno tout à fait immergé, en train de jouer du piano. Erreur: pour la musique, il est encore assis au bord de l'eau. Une fois rendus au fond, Enzo et son copain Jacques (Jean-Marc Barr) trinquent à leur amitié - ce qui n'est pas franchement plus réaliste. Étrangement, la scène m'a marqué, alors que le film me laisse froid...

Sans vouloir trahir la surprise, je dois avouer que j'ai été marqué aussi par la toute fin de Morse, dans et autour d'un grand bassin. Histoire de nourrir mon anecdote, je dois dire que je l'ai regardée deux fois coup sur coup pour être tout à fait sûr de l'avoir comprise. Le fait est que cette chronique adolescente est assez bizarroïde. Maintenant, à mon avis, c'est justement ce qui fait son intérêt ! Plutôt remarquablement écrit, le scénario amène un élan fantastique dans un quotidien morne. À apprécier, idéalement, en V.O. suédoise.

Pour en venir aux classiques, je ne peux pas ne pas vous parler aujourd'hui de l'immense Boulevard du crépuscule. La piscine n'y est qu'un point de départ, mais quel point de départ, mes ami(e)s ! Quand le film commence, on y repêche un cadavre, qui se trouve être celui... du narrateur du film ! Le génie de Billy Wilder en une scène ! Le long flashback qui s'en suit vaut beaucoup mieux qu'un détour. Objet de culte pour certains, le film est à mes yeux un grand polar d'après-guerre - et oui, bien plus encore. Non, je ne vous ai rien dit...

Je veux demeurer tout aussi évasif sur Le plongeon. Burt Lancaster reste de dos sur le photogramme et c'est bien ainsi. Les cinéphiles adeptes d'un jargon spécialisé parlent de la notion de suspension d'incrédulité, évoquant ainsi la magie du cinéma, qui nous conduit parfois à considérer comme vraies les choses les plus irrationnelles. Oui, je crois bien que c'est ce qui m'est arrivé devant ce grand film ! Qu'un homme rentre chez lui en traversant une enfilade de bassins m'est apparu crédible. À la sortie de l'eau, j'étais glacé, comme lui...

Vous l'aurez compris: des piscines de cinéma, il y en a... beaucoup. Histoire de boucler la boucle, j'aimerais revenir à mon point de départ et découvrir celle de Deep end, l'une des sources d'inspiration revendiquées de Sólveig Anspach pour L'effet aquatique. Je reverrais volontiers L'inspecteur Harry et sa nageuse assassinée, à moins évidemment qu'on me ramène à la Swimming pool de François Ozon. Je me rends compte finalement qu'à l'écran, les bassins sportifs restent des plus discrets. L'eau serait plutôt un objet de fantasmes...

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Maintenant, c'est à vous...
Dites, les ami(e)s, c'est un aussi bon film qu'on le dit, La piscine ? Blague à part, je suis preneur de vos conseils avisés... et aquatiques.

mercredi 21 septembre 2016

Zoom arrière

Le nom de Vivian Maier m'était tout à fait inconnu jusqu'à il y a peu. Encouragé par des échos favorables, j'ai découvert le documentaire qu'un jeune Américain lui a consacré, après avoir remonté le long fil de son existence discrète. Croyez-moi: c'est tout à fait stupéfiant ! L'expression "incroyable, mais vrai" n'a pas toujours été aussi juste...

Vivian Maier était une femme comme tant d'autres, née à New York en 1926 et décédée à Chicago en 2009. Sans jamais les exposer publiquement, sans en parler à beaucoup de monde et sans essayer simplement d'en tirer un revenu, elle réalisa au cours de sa vie quelque 120.000 photos de rue... qu'elle ne put toujours développer ! Le film raconte comme l'un de ses découvreurs, John Maloof, fait l'acquisition en 2007 d'un important lot de films, rouleaux de pellicules et clichés, soucieux d'y trouver de quoi illustrer un livre historique. Quelques mois plus tard, c'est en diffusant certains de ces documents sur Internet et après avoir rencontré un professeur d'art qu'il réalise toute l'importance de sa découverte. À la recherche de Vivian Maier nous plonge alors dans ce que fut la vie de celle qui exerçait simplement le métier de nounou dans les beaux quartiers du New York des années 50-60. Une vie faite d'ombre, mais loin d'être ordinaire...

Moi aussi, à vrai dire, j'ai tâché de rassembler la pelote en un tout conforme à la réalité. Il m'a d'abord semblé qu'il était essentiel d'écrire sur ce film une chronique documentée, appuyée sur des faits avérés. Finalement, la complexité de cette entreprise m'a découragé. Si cela vous intéresse, vous trouverez très facilement, sur Wikipédia notamment, toutes sortes d'infos sur À la recherche de Vivian Maier et sur le parcours de son inspiratrice. La narration du documentaire est assez haletante (et émouvante, oui !) pour que je vous encourage vivement à le découvrir sans trop vous encombrer de renseignements préalables. Chose intéressante: on échappe ici à l'hagiographie béate. Le personnage avait ses côtés sombres: ils sont bel et bien explicités. Bien sûr, le ton reste très clairement positif, de nombreux témoins soulignant d'ailleurs que la "vraie" Vivian Maier en eût été gênée ! L'admiration posthume qu'elle suscite n'en semble pas moins légitime.

À la recherche de Vivian Maier
Documentaire américain de John Maloof et Charlie Siskel (2013)

Pour info, le film a été nommé à l'Oscar, mais s'est finalement incliné face à Citizenfour, une revue des techniques du grand espionnage américain, telles qu'elles furent mises au jour par Edward Snowden. Quoi qu'il en soit, et malgré quelques effets faciles, la matière explorée mérite largement le détour. La force de nombreuses images fixes m'a véritablement sauté à la rétine. Une bien belle découverte !

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Un autre regard ?

Oui ! Pour compléter le mien, vous pouvez aller lire l'avis de Pascale.

lundi 19 septembre 2016

À visage humain

Je crois préférable de vous le dire aussitôt: j'ai "aimé" Nocturama. J'utilise des guillemets, car c'est un grand mot, aimer, assez impropre finalement pour dire mon ressenti à l'égard de ce film complexe. Compte tenu des tensions qui parcourent la société française, je crois impossible qu'il fasse l'unanimité. Est-ce grave ? Je ne le pense pas...

Le fait est pourtant que j'ai l'impression de marcher sur des oeufs dans cette introduction. Pourquoi ? Parce que je n'arrive pas à faire comme si de rien n'était et à évaluer le film sur les mêmes critères que les autres. Bon... résumons: pour ceux qui l'ignoreraient encore au moment de lire ce texte, Nocturama pose ses caméras au coeur d'un groupe de jeunes, auteurs d'attentats terroristes - simultanés - dans Paris. Le long-métrage découpe son propos en deux parties opposées, en montrant tout d'abord les quelques heures qui précédent les attaques, puis celles qui les suivent, quand ceux qui sont devenus des criminels se retranchent ensemble dans un grand magasin, fermé pour la nuit. Ce n'est que par petites touches, d'ailleurs incomplètes, que leurs motivations seront évoquées, ainsi que la gravité relative de leurs actes. Le spectateur reste libre de boucher les trous ou pas. Ce qui peut s'avérer, par bien des aspects, tout à fait inconfortable...

Je dirais qu'en fait, le film n'est pas tout à fait exempt d'ambigüité. Parfois, après avoir semblé nous laisser libres de nos jugements définitifs, il nous rattrape par le coude et glisse quelques allusions directes à notre contemporanéité, citant par exemple à deux reprises le nom de Manuel Valls. À d'autres moments, au contraire, j'ai trouvé qu'il tombait dans les clichés pour présenter une jeunesse obnubilée par la vie facile, la drogue et les jeux vidéo, qui dit rejeter la société de consommation pour mieux s'y vautrer à la première occasion. Franchement, c'est le plus gros défaut que j'ai trouvé à Nocturama. Pour le reste, rien à redire: la mise en scène m'a paru remarquable d'intelligence, aussi bien artistiquement que techniquement parlant. En outre, j'ai trouvé toute la distribution excellente et admiré l'audace de ces acteurs, peu expérimentés ou débutants, pour avoir accepté d'endosser de pareils rôles. Le long-métrage a le mérite de parler librement de la France d'aujourd'hui, et ce tout en étant une fiction ! J'estime donc qu'il mérite de faire débat - et pas seulement le buzz...

Nocturama
Film français de Bertrand Bonello (2016)

J'avais mieux "digéré" Le policier (parce que c'est un film étranger ?). Une ultime précision: le film peut très bien faire l'effet d'une gifle. D'aucuns la disent salvatrice, mais je ne suis pas sûr d'être d'accord. D'autres jugent au contraire le propos irresponsable. Moi, je me sens pris d'un sentiment de malaise face aux éléments les plus concrets. Sur la jeunesse de France, on peut certes préférer Les combattants !

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D'autres avis sur la Toile ?

Il y en a, bien entendu, et vous pouvez déjà aller lire celui de Pascale.

dimanche 18 septembre 2016

Kubrick revisité

Depuis que je l'ai vu, il y a - déjà ! - un peu plus de deux ans, je peux comprendre la fascination qu'exerce Shining sur ses admirateurs. J'étais donc prêt pour regarder Room 237: ce (bon) documentaire donne la parole à une dizaine de passionnés, parmi ceux qui fouillent le monument de Stanley Kubrick à la recherche... de ses sens cachés !

Précision importante: pour apprécier ce travail, il vaut mieux avoir vu l'oeuvre originelle, ainsi que d'autres films de ce cher Stanley, avant. Si vous ne l'avez pas fait, je crains que ce décorticage en règle présente un intérêt moindre à vos yeux, voire qu'il vous soit difficile de tout comprendre. Je le dis sans forfanterie, sachant que j'ai eu moi-même du mal à suivre parfois: Room 237 est d'une densité informative importante, qui pourrait bien dérouter plus d'un cinéphile avisé. Le réalisateur s'est bel et bien autorisé des choix audacieux ! Évidemment, la démarche est discutable, mais quelque chose me dit aussi que la qualité d'un long-métrage tient justement à son audace...

Ici, Rodney Ascher a choisi de ne pas montrer le visage des témoins auxquels il tend le micro. Leurs analyses servent en réalité de bandes sonores à d'autres images issues de Shining et de bien d'autres films encore. Cette structure tient debout, mais s'apparente au labyrinthe premier: y entrer est tentant et de fait très facile, mais en ressortir demande une bonne dose de sagacité. Il ne peut être tout à fait exclu qu'en chemin, Room 237 vous ait égaré dans l'un de ses méandres. D'aucuns vous expliqueront que leur film-culte est en fait une allégorie du massacre des Indiens d'Amérique. D'autres le présenteront plutôt comme une évocation de la Shoah. D'autres encore viendront mettre en avant les indices laissés dans les images, démontrant d'après eux la volonté de Kubrick de demander pardon au public pour avoir tourné de fausses images de l'arrivée de l'homme sur la Lune, onze années auparavant. C'est absolument fou... et ça donne envie d'y replonger !

Room 237
Documentaire américain de Rodney Ascher (2012)
Le film ne fait pas l'unanimité ! Leon Vitali, ex-ami et collaborateur de Stanley Kubrick, en parle notamment comme d'un "tissu d'inepties issues de l'imagination fertile d'esprits farfelus". J'ai aimé toutefois sa dimension ludique: à leur façon, on sent bien que les personnes interrogées demeurent toutes respectueuses (et même admiratrices) du travail accompli avant elles. Ce qui justifie aussi ma bonne note.

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D'autres pistes à étudier ?

À vous d'en décider: il y a bien, au moins, la chronique de Sentinelle !

samedi 17 septembre 2016

L'incomprise

Je ne suis pas assez calé pour le confirmer, mais certains cinéphiles affirment que le cinéma italien n'est plus ce qu'il était. Je constate simplement l'évidence: je vois relativement peu de films transalpins. C'est - notamment - pour découvrir autre chose qu'un grand classique que j'ai regardé Respiro, sorti en 2002. Et je l'ai plutôt bien aimé...

Respiro, c'est un peu comme une vision en couleurs du néo-réalisme cher aux maîtres du septième art italien d'après-guerre. Le scénario nous embarque illico presto sur Lampedusa, cette petite île connue aujourd'hui pour être l'un des points d'arrivée des migrants africains et moyen-orientaux en Europe. Le récit reste toutefois italo-italien. Son axe gravite autour de Grazia, une femme de marin-pêcheur réputée pour son tempérament enflammé. Cette attitude inconstante pourrait amuser: il s'avère qu'elle suscite en réalité une hostilité croissante des villageois à l'égard de la belle. Dans son dos, on parle même d'un internement forcé dans une lointaine clinique milanaise...

Bon... soyons clair: c'est d'un petit film dont je vous parle aujourd'hui. Vous pourrez toujours relever qu'en son temps, il a reçu le Grand prix et le Prix du public à la Semaine de la critique du Festival de Cannes. Une chose que j'ai tout particulièrement appréciée: le long-métrage dérive parfois vers un certain onirisme. Les acteurs étant tous bons pour nous faire croire à cette histoire, le contraste entre le concret des débuts et le côté un peu fantastique du développement m'a plu ! C'était bien senti pour faire passer certaines émotions en douceur. Respiro est un film fin, très digne représentant d'un cinéma populaire dont j'aime tout simplement l'humilité. C'est très reposant, je trouve.

Respiro
Film italien d'Emanuele Crialese (2002)

J'ai fouillé dans mes archives du cinéma made in Italy pour dénicher une comparaison possible de ce film avec Le facteur, Philippe Noiret en moins, mais toute une troupe d'excellents enfants acteurs en plus ! Cela me confirmera au moins qu'il me reste mille autres facettes méconnues à découvrir. Les curieux noteront que mon film du jour rappelle La terre tremble, l'un des premiers Luchino Visconti (1948). 

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Une petite précision de vocabulaire...
Le titre du film signifie bien "Je respire", comme je l'étais imaginé. Mais cela veut dire "Souffle", aussi, et ça semble le sens à retenir ici.

Et pour finir, d'autres citations ailleurs...
Elle et Lui ont aimé le film, en publiant un aperçu assez détaillé. Chonchon a fait court et l'a vite oublié. Tina l'a bien noté, c'est tout !

vendredi 16 septembre 2016

Non ? Mais si !

J'ai peut-être tort, mais je suppose qu'il a pu vous arriver d'être pris pour ce que vous n'êtes pas. Cette situation délicate est le moteur comique de Monty Python - La vie de Brian, deuxième des films tournés par la troupe britannique. En Judée, au tout début de l'ère chrétienne, un type (très) ordinaire passe soudain pour un prophète...

Bon ! Il faut bien dire aussi que notre ami Brian cherche les ennuis avec les Romains, puisqu'il se retrouve embarqué dans un groupe d'activistes contre le pouvoir occupant et qu'il lui arrive, s'il faut sauver sa peau, de faire des grands discours sur l'avenir du monde. Autant vous le dire aussi: la drôlerie à l'oeuvre dans ce film bizarre n'est pas des plus subtiles. Elle ne plaira donc pas à tout le monde. Pour apprécier La vie de Brian à sa juste valeur, je crois sincèrement qu'il faut... débrancher son cerveau et se laisser aller. Il se peut aussi que l'allégorie des religions irrite quelques esprits sensibles. Je dis que l'on peut également en rire et que ça nous fait du bien, parfois...

C'est un fait, quand il est sorti, le film a connu quelques "problèmes". Par exemple, il a été interdit un an en Norvège et huit en Irlande. Onze ans seront passés avant qu'il soit enfin distribué en Italie ! L'athée que je suis vous dira qu'il n'y a pourtant pas de quoi fouetter un chat, même si je conçois très bien que certains d'entre vous jugent qu'il n'y a même pas... de quoi rire. D'ailleurs, La vie de Brian m'amuse par moments, mais, sans me consterner jamais, me laisse indifférent assez souvent aussi. Les Monty Python s'y montrent ouvertement fidèles (euh...) à leur humour absurde et décalé. Maintenant, bien plus que les dieux, ce sont les hommes qui sont moqués dans cette pantalonnade. A kind of joke, comme on l'entend dans l'un des dialogues. Ouais, tout cela n'est en fait que du cinéma...

Monty Python - La vie de Brian
Film britannique de Terry Jones (1979)

Les blagues qui émaillent le récit sont toutes tellement... incroyables qu'il me faut vous recommander d'apprécier aussi Le sens de la vie pour vous faire une meilleure idée de cet humour très particulier. Maintenant, je confesse que je préfère les oeuvres comiques tardives du duo rescapé John Cleese / Michael Palin, à savoir Un poisson nommé Wanda et Créatures féroces. Sans parler de Terry Gilliam...

mercredi 14 septembre 2016

Une vie à refaire

Et hop, le retour de Joss ! Comme d'habitude, j'ai juste choisi le titre et les photos, après l'avoir laissée libre de choisir le film chroniqué...

Lors de ma première chronique sur ce blog au printemps dernier, j'avais collé à la fois à l’actualité des nouvelles sorties et au thème d'un tournant dans la vie d'une femme, allant de pair - tout à fait par hasard - avec un retour personnel à Paris.

À l'été, j'avais dédié ma deuxième chronique à une saisonnalité haute sur le mercure, via la peinture d'une latitude africaine (je ne croyais pas si bien faire, vu la canicule qui a sévi fin août !) finalement très proche de ma propre adolescence seventies.

Enfin, pour l'aube de l’automne,  l’évocation d'un redoublement  me paraissait  idéale, mais elle aussi cachait bien plus que ça. Jamais je n'avais autant clairement identifié ce besoin de retour en arrière pour expliquer les quatre décennies qui venaient de s'écouler et dont les deux premières chroniques donnaient certains points de départ et d’arrivée. Illusion de refaire son monde, mais au moins oser l’imaginer !… Avoir carte blanche dans ses choix cinématographiques, c'est décidément s'offrir de sacrées bonnes occasions de se connaître soi-même et la joie de le partager.

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Alors, cette Camille ?... Curieusement, le film de Noémie Lvovsky était lui aussi sorti à la rentrée. Celle de 2012. Alors que certains la trouvaient ridicule ou insipide, je réalise à quel point ce type de film ne peut être que porté au pinacle ou descendu en flèche. Et combien il doit correspondre à une quête de soi-même bien particulière (je suis persuadée que ceux qui l'ont apprécié se ressemblent sur des points essentiels). Il est donc grand temps de vous résumer Camille, non ?...

Camille a quarante ans, actrice de seconde zone, unie à Eric depuis ses seize ans et mère d'une grande fille. Au terme d'une minable journée de tournage, Camille voit son mari la quitter pour une jeunette. Poussée par sa propre fille à participer au réveillon de son amie d'enfance, Camille s'enivre (déjà borderline alcoolique) et cette fois, jusqu'à s'effondrer. C'est à l'hôpital qu'elle se réveillera, mais vingt-quatre ans plus tôt, et ce sont ses propres parents (en réalité décédés) qui viendront la chercher pour la ramener au bercail familial. Et voilà Camille à nouveau dans sa peau d'ado, prête à la rencontre avec son propre futur mari… Refera-t-elle les mêmes erreurs ?

Bien sûr, on avait eu Peggy Sue s'est mariée, mais autant alors comparer le film de Francis Ford Coppola au Noël de Mickey (oui, oui, Mickey aussi s'était offert un retour en arrière !). Non, assurément, Noémie Lvovsky n'a pas utilisé la même corde que Coppola, rejetant en bloc les effets spéciaux, leur préférant un simple changement de maquillage et de longueur de cheveux. Simpliste ?... Eh bien pas tant que ça ! Ainsi, dans cet aller-retour aux allures romantiques,  Noémie Lvovsky a su par exemple subtilement glisser une musique du troisième millénaire – connue des jeunes – dans une fête des années quatre-vingts de ses seize ans. Elle s'est également rapprochée d'un casting sans-faute: divins parents, modestes et présents, sans manquer de spiritualité, Michel Vuillermoz et bien sûr, la géniale Yolande Moreau, ou encore Denis Podalydès en professeur-mage…

Quant au personnage de Camille lui-même, il ne dénote pas une seule seconde. L'affiche de Camille sur sa bicyclette, yeux au ciel, est à l'image de tout le film. On y croit ferme, à ses seize ans. Pas légère la Camille, aérienne plutôt. En tout cas pour moi, c'est sûr… et Dieu que l’harmonie a bon goût !... Ce que l'on perçoit « en plus » n'est jamais de trop, tout simplement l'étincelle dans son regard de ce qu'elle sait de l'avenir. Camille essaye de modifier son propre karma, mais y échoue. Alors elle s'accroche au meilleur, enregistrant la voix de sa mère dont elle connaît à la seconde près l'instant de la mort (terrible), jusqu'à accompagner son amour de jeunesse vers d'autres rives et choisir de le conserver comme ami sincère pour l'éternité…  Car là encore, Noémie Lvovsky sait jouer sur les symboles: le couple n'emprunte-t-il pas une barque pour changer… de berge ?... Fraîcheur, profondeur, énergie et aussi un humour dont on ne saurait ici faire l'économie. Comme dans cette irrésistible scène d'initiation sexuelle avec un jeunot de sa classe brusquement et totalement paniqué qui préfère déserter les lieux vite fait.

Alors qu'en son temps, certaines critiques ont attribué au film de dérangeantes longueurs, je les justifie totalement par l'errance légitime vécue par la jeune femme. Un film positif avec un réel éclairage pour l'humanité: on ne revient pas sur le passé, mais ne peut-on le considérer autrement ?... J’ajouterais encore que cette impression d'hésitation relève de la personnalité même de Noémie Lvovsky, à la fois très réceptive aux détails de la réalité et dans l'abstraction d'un présent parallèle. Résultat, au fil de ces purs instants de magie qui m'ont tour à tour serré les tripes, émue et amusée, j'ai résolument trouvé matière à embellir le quotidien.

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Le parti-pris de finir une chronique par une question aux lecteurs m'est tenace ! L'affiche de Camille redouble ne vous rappelle-t-elle pas un autre film ? Ô regard plein d’espoir tourné vers le cosmos !...

lundi 12 septembre 2016

Un amour de père ?

Vous avez le droit de me trouver têtu: je continuerai de m'intéresser au Festival de Cannes, entre autres raisons parce qu'il nous permet chaque année d'approcher quelques films qui, sans lui, seraient restés inédits en France. Toni Erdmann est-il de ceux-là ? C'est possible. J'attendais - impatiemment - la sortie de ce long-métrage allemand...

Un petit mot du contexte, d'accord ? Bien qu'il soit reparti bredouille de la Croisette au printemps, le film bénéficiait d'un large consensus critique quant à ses immenses qualités. Fustigeant le jury officiel pour ce supposé oubli fâcheux, d'aucuns osaient même le présenter comme une très belle "Palme du coeur". Le mien serait-il trop sec ? J'ai mis beaucoup de temps à entrer dans cette drôle d'histoire. Constant plus ennuyeux, malgré sa durée XXL, je n'ai pas ressenti d'empathie véritable avec l'un ou l'autre des personnages. Je rappelle que le scénario évoque la vie d'une femme, Ines Conradi, consultante allemande d'une entreprise installée en Roumanie, chargée en fait d'élaborer un plan de relance de son activité, licenciements à la clé. Toni Erdmann ? C'est le titre du film, mais aussi le faux nom du père d'Ines, Winfried, inquiet des conséquences de son travail sur l'humeur de sa fille et bien décidée à la dérider (au cours d'une visite-surprise).

Stop ! Je m'arrête là avant de tout vous dire des rebondissements plus ou moins étonnants du récit. Sur le plan technique, je regrette infiniment d'avoir à dire que Toni Erdmann m'a semblé très morne. Même s'il m'a paru jouer, à une ou deux reprises, sur la composition des plans et leur netteté relative, je ne dirais pas que le film sort vraiment de l'ordinaire des prod' cinéma. Ensuite, en vous précisant qu'il dure tout de même 2h42, je crois qu'il n'est pas injuste d'ajouter que je m'attendais à un peu plus d'action. Dès l'instant où j'ai admis ses enjeux, l'histoire a contiué assez platement... et c'est dommage. Je me suis senti frustré, sans aucun doute d'autant plus fortement que de très nombreux médias parlaient également d'un long-métrage hilarant ! Je noterais tout de même, pour la défense du travail honnête proposé ici à nos regards, que le ton employé est assez juste dès lors qu'il s'agit d'évoquer les méfaits du capitalisme sauvage. Honnêtement, ça sauve un peu le tout à mes yeux - heureusement ! Bon, voili, voilou... j'ai vu d'autres films, bien meilleurs, cette année.

Toni Erdmann
Film allemand de Maren Ade (2016)

Un autre atout pour le film, qui justifiera (tardivement) cette note malgré tout honorable: il demeure foncièrement in-clas-sable. Plusieurs fois, je me suis en fait demandé s'il fallait rire, m'émouvoir ou pleurer. D'ailleurs, un peu avant une conclusion que j'ai trouvée relativement ouverte, mais morose, j'ai apprécié une petite touche d'onirisme. Allez dénicher un film similaire avec ça ! Broken flowers ?

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Ailleurs sur le Net....

Je constate que mes camarades Pascale et Dasola n'ont pas adhéré. Sentinelle, elle, a aimé le film et lui a accordé une note très élevée. Quant à Strum, fidèle à lui-même, il a proposé une analyse détaillée.

samedi 10 septembre 2016

Le sang de Rio

Que savons-nous exactement du Brésil ? Je (me) pose cette question sans avoir véritablement de réponse à proposer. Parmi les portes ouvertes vers l'unique pays lusophone d'Amérique, celle du cinéma n'est pas la moins intéressante. Quelques jours après la fin des Jeux olympiques, je suis retourné à Rio pour y découvrir La cité de Dieu...

Arrivé en Europe grâce à une sélection hors-compétition au Festival de Cannes 2002, ce film semble avoir gardé une bonne réputation. Bientôt quinze ans plus tard, il fait toujours son petit effet. Il décrit en effet, sur une période d'une dizaine d'années, les activités criminelles dans les favelas de Rio. Oubliez le Brésil des cartes postales: ce long-métrage monté à l'énergie est un coup de poing ! Complexe mais limpide, l'histoire se fonde sur l'explication en voix off de l'un des innombrables protagonistes: Fusée (Buscapé dans la V.O.) est un jeune différent des autres, dans la mesure où il se tient prudemment loin de la délinquance et rêve de devenir photographe. Autour de lui, c'est le chaos: la force du récit tient à ce qu'il s'appuie sur des personnages qui sont des ados, de jeunes adultes ou même simplement des enfants - ce qui rend la violence tout à fait viscérale. Il vaut mieux se confronter au film en toute connaissance de cause...

"La mise en scène évoque la fureur violente de Scorsese et les effets chocs de Tarantino": l'avertissement était clair, sur l'une des affiches que j'ai trouvées. Je suis d'accord avec le premier parallèle, un peu moins avec le second. Il me semble en tout cas que le sang qui coule tout au long du métrage n'est pas vain: La cité de Dieu ne s'amuse pas avec la sauvagerie et semble au contraire porteur d'un message. Politique ou pas, je l'ignore, mais le film est d'une noirceur assumée. En nous plongeant au coeur de la mêlée, il rend ses personnages fascinants et nous permet de développer pour la plupart d'entre eux une réelle empathie. C'est d'autant plus fort que le bidonville qui sert de théâtre à l'action existe réellement et que certains des comédiens en sont issus - ou de quartiers équivalents. Pas question pour autant d'apparenter ce qui nous est montré à un documentaire: la matière est beaucoup trop brute ! C'est d'ailleurs la garantie de son efficacité.

La cité de Dieu
Film brésilien de Fernando Meirelles et Kátia Lund (2002)

Attention à ne pas confondre cet opus avec son quasi-homonyme sorti dix ans plus tôt: La cité de la joie (dans le bidonville de Calcutta). Maintenant, pour une comparaison appropriée, vous pourrez chercher quelque chose entre Gomorra et Les affranchis. Pour voir également d'autres vies dans un ghetto sud-américain, aux amateurs - avertis - d'un cinéma-vérité, je conseille aussi le remarquable Elefante blanco.

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Si, en complément, vous voulez un autre avis...

Un petit détour s'imposera donc chez mes amis de "L'oeil sur l'écran".