mercredi 31 mars 2010

Une bible !

Brève chronique aujourd'hui pour évoquer la sortie d'ici la fin du mois prochain d'un livre tout dédié au septième art: L'Annuel du cinéma. Comme son nom l'indique, ce lourd volume recense et présente l'ensemble des longs métrages (de fiction ou documentaires) sortis dans les salles françaises l'année dernière. D'après ce que je peux lire sur le site de l'association qui édite l'ouvrage, il en a eu 610 au total, soit 34 de plus qu'en 2008. Impressionnant, ce chiffre, non ? J'ai fait le calcul: pour les visionner tous, en plus d'être voyageur, il faudrait donc en retenir cinq tous les trois jours. C'est là un rythme impossible à tenir. Ou bien plus soutenu que le mien, en tout cas.

L'Annuel du cinéma, c'est en quelque sorte l'outil idéal de la session de rattrapage du cinéphile. J'ai tout lieu de penser que le format retenu pour l'édition 2009 sera reconduit, ce qui me laisse anticiper quelques bons articles sur les dernières tendances de la production cinématographique internationale. Pour ce qui est ensuite des films eux-mêmes, ils sont tous disséqués et traités de la même façon. Chacun a droit à une page pleine, avec des infos plutôt exhaustives sur la distribution et l'équipe technique, un résumé et des précisions sur le dénouement, ainsi qu'un commentaire critique. Cette somme documentaire s'adresse plutôt aux plus passionnés d'entre nous. Personnellement, j'assume le côté dévorant de ma passion: je vais probablement me ruer sur l'ouvrage dès qu'il sera sorti. Et j'ai hâte !

dimanche 28 mars 2010

Un cauchemar paranoïaque

Et de quatre ! En choisissant Leonardo di Caprio pour le rôle principal de Shutter Island, Martin Scorsese signe sa quatrième coopération avec le comédien. Une bonne idée ? Oui, plutôt, car l'acteur se tire plutôt bien d'un rôle pas franchement facile. Il joue ici le marshall Teddy Daniels, un policier qui débarque sur une île américaine transformée en asile-prison pour des déments criminels. Tout juste descendu du ferry un jour de brouillard avec son équipier Chuck Aule, le flic est chargé de percer un mystère: comment est-il possible qu'une des patientes-prisonnières, une dénommée Rachel Solando, soit parvenue à échapper à la vigilance de ses gardiens et dès lors à... disparaître ? Il lui faut résoudre cette énigme très rapidement. Sur place, une tempête menace en effet de s'abattre à tout moment.

J'ai vite voulu voir Shutter Island, en fait dès le moment où j'ai découvert sa bande-annonce. Une relative surprise, dans la mesure où je n'ai pas toujours apprécié le travail de Martin Scorsese: j'ai quelques (grands ?) films à rattraper, certes, mais la sourde violence qui parcourt sa filmographie de bout en bout me met souvent franchement mal à l'aise. Attention: les lieux que le réalisateur propose d'arpenter cette fois n'ont rien du pays des Bisounours. Maintenant, et en dépit de certaines scènes sanglantes, parfois même outrancières, c'est d'abord l'angoisse qui risque de vous saisir dès les premières images de ce long métrage. Il semble en tout cas que tout est fait pour ça, en images et sons, entre les intempéries météorologiques à l'écran et les violoncelles saturés en fond musical. Après, c'est une question de goût: cette rude approche formelle pourrait évidemment rebuter. Pour ma part, elle m'a aussitôt plongé dans le scénario. D'emblée, un très bon point pour le cinéaste !

Le grand plaisir que j'ai eu à voir ce film, c'est aussi pour avoir compris qu'il était bien autre chose que ce que sa bande annonce m'avait laissé entrevoir. Polar de facture classique, Shutter Island est d'abord un thriller. Pour peu qu'on s'immerge dans les entrelacs multiples de cette histoire tordue et que sa conclusion ne s'impose pas comme une évidence avant le générique final, je pense qu'il y a là de quoi vivre un vrai grand moment de cinéma. Sur le plan strictement formel, je l'ai déjà suggéré: c'est parfait ou presque. Pour ce qui est du fond, je crois effectivement que les conclusions ultimes de l'enquête du marshall Daniels pourront en surprendre plus d'un. J'ajoute pour être franc que mon ami Philippe, qui a vu le film avec moi, l'a beaucoup moins apprécié, car il avait tout deviné rapidement. Plus que jamais, je crois donc utile de garder le silence sur les tenants et aboutissants de l'intrigue, vous laissant le bonheur de les découvrir seuls. Deux petits mots complémentaires, toutefois, et d'abord pour souligner le jeu des acteurs, avec notamment l'excellent Mark Ruffalo et un Ben Kingsley que j'étais ravi de revoir dans un rôle de médecin assez ambigu. Et je rappelle aussi à ceux qui manqueraient la projection que le long métrage est l'adaptation (fidèle) d'un bouquin de Dennis Lehane, que j'ai lu dans la foulée immédiate, et qui m'a beaucoup plu aussi. Double satisfaction, donc.

mercredi 24 mars 2010

Premier round

Vendre du rêve aux Américains: c'est l'ambition d'Apollo Creed, champion du monde des poids lourds qui affronte Sylvester Stallone dans le premier Rocky. J'ai vraiment découvert le film il y a à peine 25 jours et rappelle pour mémoire qu'il est sorti sur les écrans courant 1976 - obtenant l'Oscar du meilleur film l'année suivante. Apollo Creed, donc, est un boxeur qui, confronté au forfait de tous ses adversaires à l'heure de remettre sa ceinture en jeu, décide finalement de sélectionner lui-même celui qui montera sur le ring pour le défier. Le choix se porte donc sur un dénommé Rocky Balboa. Ce loulou naïf et pas franchement méchant est aussi un combattant de troisième zone, ne faisant jouer ses muscles que pour servir d'homme de main à un petit mafioso des bas quartiers philadelphiens. Scénario improbable, mais c'est ça aussi, l'Amérique.

Bien évidemment, après quelques tergiversations et autres soucis mineurs avec son entraîneur, celui qu'on surnomme l'étalon italien va finir par accepter le combat. Soyons clairs et nets: le long métrage ne se compose pas d'une série de scènes de sport. Ce qui a visiblement donné à Sylvester Stallone l'envie de conter cette histoire et d'en confier la réalisation à John G. Avildsen, ce serait plutôt l'intention d'évoquer la destinée d'un petit zonard au grand coeur. Entendu, Rocky n'est pas un foudre de guerre. Il a du bon sens, mais ses activités ne mènent nulle part, si ce n'est au devant d'emmerdements. Le garçon vit pour ainsi dire à la petite semaine, drague vaguement Adrian, la soeur timide d'un de ses amis, rêve d'avoir un chien et se contente d'un appartement miteux. Il ne peut laisser passer l'occasion de prouver qu'il est capable d'autre chose.

Dire s'il y parvient ou pas reviendrait à vous dévoiler la fin du film. Je ne le souhaite pas. Parlons plutôt technique, voulez-vous ? C'est incontestable: Rocky a pris un coup de vieux. Si Sylvester Stallone a tourné quatre suites jusqu'en 1990 et une dernière en 2006, ce n'est pas forcément pour des prunes, mais plutôt pour de beaux dollars tout aussi juteux. Ne soyons pas cyniques ! En fait, le premier opus de la série n'est franchement pas mauvais, même s'il manque objectivement d'un certain souffle épique compte tenu des standards d'aujourd'hui en matière de divertissement. Il n'en reste pas moins que le personnage-clé est attachant et qu'on a du coup presque envie de se battre à ses cotés pour montrer que même les perdants ont tôt ou tard une chance de gagner. Quant à l'acteur principal, même s'il a débuté pour 200 billets dans un film érotique, il faut constater qu'il a désormais 40 ans de carrière derrière lui et le respecter, au moins pour ça. Pas sûr en effet que, demain, les jeunes premiers actuellement à l'affiche puissent tous en dire autant. Non mais !

lundi 22 mars 2010

Batraciens et couronnes

Ce soir, retombons en enfance, d'accord ? C'est ce que j'ai fait il y a quelques semaines tout au plus, en allant voir le dernier Disney sorti au cinéma. La princesse et la grenouille démarre comme un conte de fée. Disons simplement que la proposition est un peu inversée. Quand la jeune fille couronnée - qui ne l'est d'ailleurs pas véritablement au début - embrasse la verte créature, elle ne la voit pas se changer en bel et charmant Adonis, mais se métamorphose elle-même en batracien. La situation n'est pas follement originale, mais elle donne bien le ton du dessin animé tout entier: rigolard évidemment et du coup accessible à tous les publics. Il ne faut pas forcément bouder son plaisir pour autant. Dispensable, le film a l'immense mérite de ne pas se vendre pour ce qu'il n'est pas: un chef d'oeuvre. C'est un bon divertissement... et ce n'est déjà pas si mal.

Dernier Disney en date, donc, La princesse et la grenouille a plein de points communs avec les plus grands classiques du studio. Premier aspect: on y chante beaucoup, du jazz en l'occurrence, rien d'étonnant compte tenu que l'action se déroule à la Nouvelle-Orléans. Autre élément: les dessins sont très colorés et d'une lisibilité formelle impeccable. La patte du grand Walt se fait toujours sentir et, j'insiste, il n'est dès lors pas bien compliqué de redevenir un enfant devant pareil long métrage. La question serait alors: cela vaut-il également le coup de faire ce petit voyage dans le passé ? Je réponds positivement à cette interrogation fondamentale. Vous ne verrez rien qui révolutionne le septième art à tout jamais, mais vous pouvez presque être sûrs de passer un bon moment. Le partager en famille peut aussi être la bonne idée qui déclenche tout. Soyez candides !

Les esthètes de l'animation n'auront pas manqué de relever en quoi La princesse et la grenouille se distingue de sa concurrence contemporaine: le dessin animé en est vraiment un, à savoir qu'il est réalisé en deux dimensions seulement, et qu'il ne s'agit donc pas d'une de ces oeuvres modernes en images de synthèse 3D. Incontestablement, c'est cet aspect des choses qui a fait que l'oeuvre est sortie du lot il y a quelques mois, grâce à cette jolie promesse d'un retour aux sources à des niveaux multiples. Je vous le dis comme je le pense: bien qu'un peu passéiste, la technique employée passe très bien. Avec un méchant réussi et d'autres personnages secondaires comme on les aime, à l'image d'un alligator trompettiste ou d'une luciole un peu rasta, je dirais même que le tout est porteur d'une certaine poésie. Allez, c'est à vous de vous laisser entraîner...

samedi 20 mars 2010

Une femme bientôt

Les anglophones parmi vous auront peut-être reconnu le titre francisé d'une chanson culte. L'héroïne du film dont il sera question aujourd'hui a 15-16 ans. Elle s'appelle Mia et habite une cité de béton en Angleterre avec sa mère et sa petite soeur. Le père a disparu, mais, très vite, il est remplacé par un inconnu. Premiers instants autour d'un petit déjeuner improvisé, première confrontation. Sachez-le: Fish tank n'est pas fait pour rigoler. Long métrage marqué d'une tendance sociale très britannique, que je qualifierais volontiers de "loachienne", il n'est pas totalement dénué d'intérêt pour autant, bien au contraire. Cette histoire relativement banale d'une ado en rupture est en fait pleine de charme. Je vous conseille de la découvrir en version originale pour un rendu plus authentique.

Dans sa petite vie pas vraiment tranquille, Mia n'a qu'un seul centre d'intérêt: le hip hop. Quand elle ne va pas bien, elle s'enferme quelque part pour danser, alors plutôt seule que mal accompagnée. Les scènes chorégraphiques qui parsèment le film lui donnent d'emblée un souffle tout particulier, d'autant que c'est finalement autour de la musique (de Bobby Womack !) que l'adolescente rebelle et le nouveau petit copain de sa mère vont se rapprocher. Farouche comme pas deux, la jeune fille ne se laissera pas facilement apprivoiser. Et même quand, en face, l'homme pensera à y être enfin parvenu, il ne sera pas franchement à l'abri d'une volte-face soudaine. La plus grande réussite de Fish tank est peut-être bien son ton, sa grande ressemblance possible avec une certaine vérité. L'aquarium du titre ? C'est probablement l'immeuble à grandes baies vitrées où Mia répète. Comme dans le rêve d'une vie meilleure.

On aurait dès lors pu penser que, pour donner corps à cette réalité brillamment recomposée, Andrea Arnold, la réalisatrice, se serait appuyée sur des comédiens expérimentés. C'est presque l'inverse. Dans le rôle du beau-père qui n'en est pas vraiment un, le plus connu de tous est certainement Michael Fassbender, acteur que je découvre petit à petit et que je trouve vraiment très bon à chaque fois. D'après moi, la performance la plus remarquable reste sans conteste celle de la jeune fille qui joue Mia: selon une rumeur, si Katie Jarvis n'a pas reçu de prix d'interprétation lors du Festival de Cannes édition 2009, c'est juste parce qu'elle fait du cinéma... en amateur. Fish tank marquera-t-il le début d'une carrière ? J'en viens franchement à le souhaiter, tant le naturel de son héroïne m'a bluffé. Une très jolie surprise que ce petit film sans prétention. Les images sont très belles, filmées en partie à l'épaule, je pense, et en lumière quasi-naturelle pour de superbes scènes nocturnes. On notera aussi que le DVD comprend deux courts métrages de la même cinéaste. Dog tourne autour d'un personnage similaire, mais sur une intrigue plus violente encore. Wasp, lui, est le récit d'une jeune mère célibataire à la recherche d'un nouveau flirt. Moins d'une demi-heure générique compris, durée suffisante pour récolter l'Oscar en 2003.

jeudi 18 mars 2010

Une amitié épistolaire

Tant pis pour le scoop ! Même si ce n'est pas nouveau, je constate qu'entre deux films d'abord orientés vers le jeune public, le cinéma d'animation nous réserve de temps à autre des bijoux plus matures. C'est le cas de Mary et Max, que j'avais manqué en salles et que j'ai donc fini par rattraper en DVD. Une oeuvre de l'Australien Adam Elliot qui, pour l'anecdote, est aussi la première venue de l'île-continent que je découvre depuis... janvier 2008 ! C'est une vraie petite pépite qui est parvenue jusqu'à nous. Elle raconte l'étrange correspondance d'une petite Australienne, coincée entre un père ouvrier et une mère alcoolique. Un beau jour, au cours d'une de ses rares sorties, Mary déchire un annuaire américain et, rentrée à la maison, se décide aussitôt à écrire à Max, un homme dans la quarantaine, qui vit seul en plein New York et souffre d'une certaine forme d'autisme.

Rien de très souriant dans ce point de départ, dont le réalisateur annonce d'emblée qu'il est inspiré d'une histoire vraie. Dont acte. Libre adaptation, en vérité: Mary est en fait une projection distancée d'Adam Elliot lui-même, le cinéaste entretenant bel et bien une relation épistolaire avec un Max, américain et autiste. Il sait donc de quoi il parle quand il évoque les conséquences de la maladie. L'intérêt du film ne réside toutefois pas dans la description clinique d'une "quelconque" affection et de l'asociabilité qui en résulte. Mary et Max est avant tout l'histoire de deux êtres qui ne se sont jamais rencontrés et qui, séparés par les mers et leurs différences, parviennent quand même à devenir amis. Si cela peut parfois prêter à sourire, ce n'est pas vraiment drôle, c'est même plutôt curieux. Ponctuellement, c'est aussi, oui, relativement émouvant. Et ce surtout parce que l'on suit finalement cette relation sur des dizaines d'années, jusqu'à un dénouement somme toute assez pathétique...

Je ne vous ai rien dit ! Plutôt que de vous dévoiler d'autres aspects du scénario, parlons plutôt technique. Comme vous l'aurez compris grâce aux images ici publiées, Mary et Max sont deux personnages de pâte à modeler. Je n'ai pas regardé l'ensemble des bonus du DVD, mais j'ai retenu d'une intervention d'Adam Elliot que ce dernier aimait "mettre les mains dans le cambouis". Pas question pour lui d'opter pour une relative simplicité en réalisant un film 3D assisté par ordinateur. La technique qu'il emploie - le stop-motion - suppose de concevoir toute la gamme d'expressions des petits personnages avant de les photographier image par image. Souhaiteriez-vous voir cités quelques chiffres pour mieux mesurer la performance ? Le film a été mis en chantier cinq ans avant sa sortie. Le tournage proprement dit a nécessité le travail en association de 120 artistes pendant 57 semaines. Et chaque jour, seules 30 secondes de métrage étaient obtenues. Le réalisateur estime même à 235 ans (!) le temps qu'il lui aurait fallu pour tout faire tout seul. Au bout de l'effort collectif, il y a ce film, remarquable par bien des aspects. Bravo !

mardi 16 mars 2010

Le grand blessé

Brothers, histoire d'un destin qui bascule. Sam Cahill est militaire. Entre deux missions, il rentre chez lui pour y retrouver sa femme Grace et ses deux petites filles, Isabelle et Maggie. Sa permission autorise la famille, grands-parents compris, à revoir également Tommy, le frère cadet, tout juste... sorti de prison. Les retrouvailles ne sont pas des plus chaleureuses, mais les frangins parviennent quand même à laisser de côté leurs différences pour donner l'impression que tout va bien ou, au moins, que tout peut très vite aller mieux. Et voilà ce que raconte et illustre l'introduction du film, jusqu'à ce que Sam soit appelé pour un nouveau départ au front. Direction l'Afghanistan, cette fois: malgré les inévitables souffrances nées d'une énième séparation, pas question pour ce bon Américain de se soustraire à son devoir de soldat. Le capitaine Cahill fait donc son baluchon et quitte les siens à peine rassemblés. Quelques jours plus tard, alors qu'il survole les montagnes de l'ex-République soviétique, son hélicoptère est attaqué et abattu. L'équipage complet est laissé pour mort. Fondu au noir très provisoire, car on découvre vite que deux hommes ont survécu, parmi lesquels le drôle de héros de ce film poignant. Et c'est alors qu'éclot l'argument du scénario...

Brothers n'est pas un film de guerre. C'est un film sur la guerre. Disons plutôt sur ses conséquences. L'intrigue veut que Sam disparu et considéré comme décédé, Grace pleure évidemment son époux tombé au combat et, petit à petit, se rapproche de son frère Tommy qu'elle considérait pourtant auparavant comme un moins que rien. Doucement mais sûrement, ce sont les enfants qui lient les adultes, au travers des bons soins que leur oncle leur prodigue, un peu comme le juste complément de l'amour de leur mère. Très vite, la question qui se pose est de savoir jusqu'où se rapprocheront le beau-frère retrouvé et la belle-soeur meurtrie. Où en seront-ils de leur relation quand le mari, dévasté par ce qu'il a vécu, reviendra au foyer ? L'évidence qu'on devine paraît paradoxalement lourde de menaces pour l'harmonie renaissante. Dès lors, si les scènes qui se déroulent aux Etats-Unis paraissent d'une crédibilité touchante, celles qui ont pour théâtre l'Afghanistan peuvent aisément, elles aussi, bouleverser nos sentiments. Au final, on ne distingue plus très bien ce qui est bien de ce qui est mal, le moral de l'immoral, le juste de l'insensé. Oui, d'une certaine façon, je crois résolument que ce film interroge nos consciences à plusieurs niveaux, sur une seule question essentielle: à la place de tel ou tel personnage, que ferions-nous ? Chacun a finalement toutes sortes de raisons d'agir comme il le fait. Du coup, pour peu qu'on soit rentré dans l'histoire, la déflagration émotionnelle générée par le retour de Sam touche en plein coeur.

Si le propos de Brothers résonne avec autant de puissance, je crois que c'est d'abord aux comédiens qui interprètent les personnages principaux qu'on le doit. Femme aimante, solitaire et blessée, Natalie Portman campe très justement une Grace un peu perdue dans son besoin d'amour et parmi ses nombreux visages contradictoires. Beau gosse mi-charmeur mi-sensible, Jake Gyllenhaal est lui aussi tout à fait inspiré dans son rôle de loulou un peu paumé, en quête d'une rédemption par la famille. Et que dire alors de Tobey Maguire ? Loin du rôle d'homme-araignée qui a fait sa célébrité, le jeune acteur s'est investi dans son personnage de la plus belle des façons. Je crois qu'on peut même dire qu'il a payé de sa personne, avec un visage visiblement marqué par l'amaigrissement, ce qui le rend d'ailleurs d'autant plus conforme avec ce qu'il doit représenter. Un grand coup de chapeau pour ce trio, mais on notera aussi les jolies prestations du couple de parents - Mare Winningham et Sam Sheppard - et enfin l'excellence du jeu des deux enfants, Bailee Madison et Taylor Geare. Les cinéphiles parmi vous apprécieront aussi sûrement la réalisation de Jim Sheridan, en notant que le cinéaste signe ici le remake rapide d'un film danois, proposé par Susanne Bier en 2004. Film original que, désormais, j'aimerais découvrir. Une occasion d'y revenir ?

lundi 15 mars 2010

Le choix de Tim

Le saviez-vous ? Ici photographié avec Marion Cotillard, Tim Burton a été décoré aujourd'hui de la médaille de chevalier des arts et lettres. Le réalisateur et producteur américain présidera au mois de mai prochain le 63ème Festival de Cannes. Ses confrères qu'une sélection intéresse ont jusqu'à demain pour présenter leurs travaux aux portes du Palais. On peut imaginer qu'à 57 jours de la montée des marches inaugurale, les premières infos ne devraient pas tarder à tomber. Pour l'heure, la page d'accueil du site de la manifestation fait encore la part belle à son futur premier juré. En fouillant un peu, on apprend que c'est vers la mi-avril que seront présentées la liste des oeuvres en compétition et la composition du jury appelé à les départager. Notons d'ailleurs au passage que ce n'est pas le président qui choisit !

Cela dit, on va probablement beaucoup parler de Tim Burton au cours des semaines à venir. Son tout prochain film - le très attendu Alice au pays des merveilles - sort sur les écrans français dans neuf jours très exactement, mercredi 24 mars. Il est possible que j'aille le voir. Si c'est bel et bien le cas, il sera donc chroniqué ici en son temps. J'admets avec franchise que, souvent séduit, je n'ai pas pour autant adhéré à toutes les propositions artistiques du personnage. Chose claire: je lui reconnais un vrai talent graphique, en déplorant du coup qu'il ne soit parfois mis au service que de scénarios très simplistes. Autre "reproche": celui de donner parfois l'impression de ne pas toujours se renouveler. Cela dit, je relativise ce défaut qui n'en est pas un, considérant que c'est aussi de cette manière qu'on assume son style particulier et qu'on donne une cohérence à une oeuvre. D'ores et déjà, en un mot, me voilà fort impatient de voir et savoir ce que ça va donner sur la Croisette. Réponse au soir du 23 mai...

samedi 13 mars 2010

Pas si élémentaire...

Un duo qui a de la gueule: sorti de la salle, c'est ce que j'ai d'abord retenu de la dernière aventure de Sherlock Holmes sur les écrans cinéma. Anglais exilé aux Etats-Unis pour se marier avec Madonna, Guy Ritchie n'a pas tout à fait violé Conan Doyle: son film conserve une imagerie indéniablement British. Avoir choisi de confier le rôle du célèbre prince des énigmes à l'Américain Robert Downey Jr n'affecte pas cette qualité-là, au contraire: l'intéressé est tout à fait crédible. Et que dire de Jude Law, dans la peau du fameux docteur Watson ? Personnellement, je l'ai trouvé encore meilleur, sa classe naturelle rendant ici un bel hommage au flegme supposé spontané chez ses compatriotes. Je le répète: l'association du New Yorkais avec le Londonien fait beaucoup pour le charme de ce film de fait attendu au tournant. Casting réussi et première mission accomplie.

Il faut souligner aussi que l'intrigue se déroule dans une Londres merveilleusement reconstituée, ce qui permet de l'aborder immédiatement, presque frontalement. Un peu plus de deux heures durant, on oublie aisément qu'on est assis dans un fauteuil de cinéma et, à condition de ne pas s'endormir (clin d'oeil subtil !), on passe vraiment un vrai bon moment. Mais attention, tout de même ! Sherlock Holmes, c'est du pop corn et rien d'autre. Revenir au héros le plus adapté de toute l'histoire de la littérature attire inévitablement les comparaisons et, à ce petit jeu, Ritchie ne sort pas toujours gagnant. Passez votre chemin si vous souhaitez uniquement voir résolues des enquêtes tarabiscotées. Holmes le fait aussi, oui, mais plutôt à la force de ses poings qu'en faisant marcher son cerveau. En résumé, son bel esprit de déduction est toujours bien présent, mais ce que nous voyons est plutôt un film d'action qu'autre chose de plus malin. On pourra trouver ça dommage.

Encore une fois, c'est dans l'interaction des deux personnages majeurs que j'ai trouvé le plus d'intérêt à ce film. Imaginez notamment un détective geek, enfermé chez lui quand il fait beau, un peu comme un gamin devant ses jeux vidéo. Imaginez aussi l'ami de ce détective, médecin de son état, soucieux à la fois d'abandonner la colocation et d'inciter le fainéant à sortir prendre l'air. "Watson, je ne peux pas, il n'y a rien à faire, à l'extérieur !". C'est avant tout grâce à ces dialogues de vrai-faux couple que j'ai apprécié ce Sherlock Holmes. Ô miracle ! Moi qui n'aime pas franchement les suites, je suis même prêt à en redemander. Et ainsi, je me rends compte d'une chose: finalement, le fil conducteur qui est suivi ici, la course au grand méchant qui veut abattre définitivement le royaume britannique, tout ça n'a plus d'importance. Tant pis, dans le fond, si on s'écarte assez nettement de l'esprit même des bouquins. Je note qu'après la séance cinéma, j'ai eu envie d'en relire quelques-uns. En soi, n'est-ce pas déjà bon signe ?

jeudi 11 mars 2010

Ma seconde immersion

Le grand bleu est probablement l'un des premiers films que j'ai vus au cinéma. Mai 1988: j'avais treize ans et demi quand il est sorti. Après y avoir réfléchi, je me suis vite aperçu que, de cette époque, je n'avais conservé que très peu d'images dans la tête. J'avais gardé à l'esprit la syncope d'un plongeur japonais, les mimiques moqueuses de Jean Reno et la musique d'Eric Serra, que mon ami Rodolphe passait en boucle sur nos baladeurs à cassettes. Je crois aussi m'être endormi dans la salle obscure de Rouen (?) où j'étais venu découvrir cette histoire pour la première fois. Le film de Luc Besson ne m'avait résolument pas passionné. J'ai tout de même décidé de lui redonner sa chance, étant donné que mes goûts ont singulièrement évolué avec le temps et que je crois désormais pouvoir dire que j'aime avant tout le cinéma pour son éclectisme. En somme, l'heure était tout simplement venue de voir si mon jugement pouvait évoluer.

Au final, je constate que c'est bien le cas: ce nouveau regard porté sur l'immense carton de la fin des années 1980 m'a permis d'apporter quelques nuances à mon opinion primitive. Tout d'abord, de manière très pragmatique, j'ai rafraîchi ma mémoire sur ce qu'étaient exactement les tenants et aboutissants du film. Soit Jacques Mayol et Enzo Molinari, deux jeunes garçons, le premier français, l'autre italien, vrais-faux frères ennemis sur les côtes de la blanche Grèce. L'un et l'autre sont très forts pour nager sous l'eau sans reprendre leur respiration, mais Enzo a pour lui un charisme qui en fait un chef de bande, là où Jacques n'est finalement qu'un marmot très solitaire. Je vous passe les détails: devenus des hommes, les deux compères se retrouvent vingt ans plus tard au large de l'Italie, adversaires engagés dans une compétition de nage en apnée. Avec, très vite, une femme amoureuse au milieu. L'occasion d'une complicité retrouvée, mais également de tiraillements et d'incompréhensions face à des différences que le temps n'a pas totalement effacées.

Le grand bleu est-il un bon film ? Sans doute. Est-il un chef d'oeuvre ? Probablement pas. Avec le recul des années, je comprends un peu mieux ce qui a pu plaire dans cette histoire, son romantisme à l'eau de rose, cette évocation de l'exploit, ces échos de mort. Objectivement, dit ainsi, ce n'est pas forcément évident. J'admets donc clairement, sans état d'âme particulier, qu'il y a de jolies choses dans ce film-culte d'une génération. Pourtant, une petite voix insiste pour dire que ce n'est pas une pleine réussite. Pour faire la synthèse de mon opinion, je dirais que je crois surtout que Luc Besson a su tomber à pic, au bon moment et sur le bon positionnement. Son film est de ceux qu'on aime ou qu'on déteste, pour les mêmes raisons d'ailleurs, soit qu'on en soit touché, soit qu'on y décèle une froideur technique incompatible avec la vraie émotion. Moi, 22 ans après, j'ai réussi à trouver un point d'équilibre, porté par la relative efficacité du jeu des acteurs, mais un peu déçu par un scénario qui se déroule trop lentement et de manière somme toute très prévisible. Conclusion: je ne regrette pas d'avoir revu le film, mais je n'en ferais pas l'un des éléments incontournables d'une bonne collection de DVDs.

lundi 8 mars 2010

Le féminin d'Oscar

Le milieu du cinéma est-il macho ? Impossible à dire sans enquête approfondie, mais difficile de passer à côté de l'information du jour selon laquelle Kathryn Bigelow est devenue hier la première cinéaste à obtenir l'Oscar... du meilleur réalisateur ! Grâce au film Démineurs, que je n'ai pas vu pour tout vous dire, il y aura donc bien un avant et un après 2010. Le plus valorisant pour Kathryn Bigelow est que son succès ne s'arrête pas en si bon chemin: en compétition pour neuf statuettes dorées, elle pourra désormais envisager décorer sa cheminée avec six d'entre elles. En effet, au trophée déjà cité s'ajoutent les Oscars du meilleur film, du meilleur scénario original, du meilleur montage, du meilleur son et du meilleur mixage sonore. Rien de moins ! Cerise sur le gâteau artistique: j'ai cru comprendre que la dame avait le triomphe modeste, rendant d'abord hommage aux soldats américains qui ont inspiré son travail. Soyons clairs maintenant: malgré les bonnes critiques lues ici et là, et donc confirmées par la profession hier soir, cette histoire ne m'a jamais vraiment attiré jusqu'à maintenant. Est-ce que ça changera ? Possible. Je me crois sincère si je dis que je ne refuse plus énormément de propositions de découverte cinématographique. Concernant celle dont il est question ici, je viens de plus de relever dans un article du Parisien que tout y est tourné à l'épaule, technique qui a su me plaire dans d'autres productions. Alors, pourquoi pas ?

Un peu de la mythologie des Oscars, c'est qu'il y a de grands gagnants et de grands perdants. Cette année, dans la peau sèche du loser magnifique, les chroniqueurs ont placé Avatar. Anecdote amusante après coup: comme son vainqueur, le film de James Cameron pouvait prétendre à neuf récompenses. Autre ironie du sort: le Canadien est finalement battu par... son ex-femme ! Bon, je suppose qu'il pourra tout de même se consoler avec les résultats du box office. Et si jamais ça ne suffisait pas, l'Académie lui a tout de même attribué trois trophées, pour la direction artistique, la photo et les effets visuels. Rien de surprenant, mais rien d'immérité. Meilleure chance la prochaine fois ? On verra bien. J'ai appris ce matin que le projet de James Cameron d'adapter un livre sur Hiroshima avait du plomb dans l'aile. L'ouvrage n'était en fait pas encore sorti et il est aujourd'hui bloqué chez l'imprimeur, soupçonné de faux témoignages.

Un outsider qui s'en tire avec de vrais honneurs, c'est Crazy heart. Petit clin d'oeil à ma paresse: avant d'abandonner pour fatigue soudaine, j'avais prévu d'aller voir le film... hier ! Je n'y ai pourtant pas renoncé et j'ai maintenant une deuxième bonne raison d'espérer y admirer Jeff Bridges, qui, en tant que personnage principal, décroche son premier Oscar du meilleur acteur (au cinquième essai). Faut croire que sa voix plait également, puisque le film est aussi récompensé d'un Oscar de la meilleure chanson originale.

Maintenant, question: pourrai-je découvrir The blind side en salles ? Allociné me confirme qu'il n'est pas encore sorti sous nos latitudes. Paraîtrait-il aussi qu'il passera directement au format vidéo du côté de la Belgique. Cette histoire d'un Noir joueur de football américain sera peut-être sauvée in extremis par Sandra Bullock, récompensée hier de l'Oscar de la meilleure actrice, juste après son Razzie Award du plus mauvais rôle féminin de l'année pour un autre film. Mouais. Vu mon tout petit intérêt pour l'actrice et l'intrigue, pas sûr du tout encore que ce paradoxe du genre insolite suffise à me motiver...

L'Oscar du meilleur second rôle masculin, lui, ne me surprendra plus. J'ai déjà parlé ici de la prestation de Christoph Waltz en colonel nazi dans Inglourious basterds. Faut-il que je répète que je l'ai moi aussi trouvée tout à fait convaincante ? Pas sûr. Vous me permettrez juste d'espérer revoir ce comédien jusqu'alors méconnu dans d'autres rôles. Histoire de voir si, en plus du reste, il tient la distance.

Pour ce qui est de Precious, sans avoir vraiment de raison objective, je crois que je vais passer mon tour. Bon, OK, respect pour cette Afro-Américaine qui apprend à lire à seize ans et découvre enfin la vie. Maintenant, je ne suis pas sûr que ça me passionne tant que je lui donne le rang d'une priorité. Et même si le film est reparti avec deux trophées, à savoir celui du meilleur second rôle féminin pour Mo'Nique et celui du meilleur scénario adapté.

Côté animation, c'est Pixar qui décroche cette année la plus grosse des timbales, avec l'Oscar du meilleur film... d'animation (!) et celui de la meilleure musique pour Là-haut. J'ai très largement oublié toutes les notes, mais pas les images: la consécration me paraît donc assez méritée dans l'ensemble. Dans la catégorie court-métrage, d'animation toujours, la statuette dorée est pour Logorama, film inconnu au bataillon, mais qui vient de France. Reconnaissance professionnelle, donc, pour un compatriote: Nicolas Schmerkin.

Le prix du court métrage revient à Joachim Back et Tivi Magnusson. Jamais entendu parler avant ce matin devant la liste des lauréats. Pour marquer le coup, je note tout de même qu'ils repartent couronnés pour The news tenants. Sait-on jamais: si j'ai l'occasion d'en découvrir davantage, j'aurais peut-être également la présence d'esprit de vous en redire un mot. Et en attendant, je reste également preneur de toute information complémentaire.

On en arrive aux accessits techniques, avec pour commencer l'Oscar des meilleurs costumes. L'Académie l'a attribué hier soir à Victoria, les jeunes années d'une reine. Encore un film que je n'ai pas vu. Cela dit, j'aime bien les fresques historiques au cinéma. Autant dire que, s'il me passe sous la main, je pourrais lui donner sa chance. D'ailleurs, les images fixes que j'ai aperçues ici et là m'ont bien donné l'impression d'un travail artistique de très bonne facture.

Voir le nouvel épisode de Star Trek me tente beaucoup moins. Je n'ai jamais été très amateur de science-fiction et le peu que je connais de cette saga ne m'a pas enthousiasmé outre mesure. Je ferai encore un petit effort si cet idiot de Spock daigne réparer la machine conçue pour les téléportations. Sinon, tant pis: je me contenterai juste d'indiquer que ses nouvelles aventures ont été distinguées de l'Oscar du meilleur maquillage. Et hop ! Démythifiées, les oreilles du Vulcain !

Comme nous, lors de leur remise des Prix du cinéma, les Américains jettent un oeil à ce qui se passe ailleurs sur la planète. Je note aujourd'hui qu'ils ne sont pas allés chercher loin leur meilleur film étranger. El secreto de sus ojos (alias Dans ses yeux en français) vient d'Argentine et se présente comme une enquête sur la mort d'une jeune femme et sa reprise comme thème d'ouvrage littéraire. Désolé, mais je n'en sais pas beaucoup plus, si ce n'est qu'il sera possible de le voir dans nos cinémas à compter du 21 avril.

Restent les prix des documentaires. Côté court-métrage, le trophée est revenu à Music by Prudence, qui parle d'une petite fille malade qui se transcende grâce à la musique. En format long, le jackpot doré est allé à The cove, reportage sur le massacre de dauphins orchestré au large d'un village japonais, produit par notre bon vieux Luc Besson national. Je note que le propos fait polémique là-bas et ça m'incite d'emblée à prendre les choses avec précaution. Chronique terminée pour aujourd'hui. Je vous donne rendez-vous: comme vous le verrez la prochaine fois, j'ai prévu de vous reparler de mammifères marins.

dimanche 7 mars 2010

Londres à toute vapeur ?

Je ne donnerai pas tort à ceux qui considèrent que les Japonais sont des maîtres en matière d'animation. Quand l'un d'entre eux propose une histoire sur grand écran, encore faut-il parvenir à l'apprécier, ce qui n'est évidemment pas toujours le cas. Pour ma part, il y a quelques semaines, je suis relativement passé à côté de Steamboy. Un peu piteux, après avoir pourtant réfléchi et trouvé un titre relativement accrocheur, je constate la terne évidence: j'aurais eu du mal à en résumer l'intrigue sans consulter préalablement la notice Wikipedia. En deux mots: le film évoque l'Angleterre besogneuse de la fin du 19ème siècle et la révolution industrielle qu'elle connaissait alors. On a fait connaissance avec Ray, garçonnet qui vient d'obtenir de son grand-père les plans d'une drôle de machine à vapeur...

Lui-même bricoleur à ses heures perdues, le jeune homme comprend vite que ce colis doit avoir une certaine importance. D'autant plus vite, en fait, que d'étranges policiers cherchent à le récupérer. Après quelques péripéties de scénario que j'ai déjà oubliées, Ray s'enfuit donc et se retrouve à Londres, théâtre d'une exposition universelle. Steamboy présente une capitale crédible, à l'urbanité d'autant plus étouffante qu'on y passe près de deux heures. C'est certainement là que j'ai décroché: les images de Katsuhiro Ôtomo sont belles, avec un étonnant mélange de 3D et d'animation traditionnelle, mais toute cette profusion de détails m'a semblé noyer le propos, qu'il n'était déjà pas particulièrement facile de suivre. C'est bien dommage...

Peut-être suis-je désormais trop influencé par l'imagerie américaine des films d'animation. C'est possible: objectivement, même si j'ai quelques références autour du studio Ghibli, je vois plus d'oeuvres Pixar ou Dreamworks que de créations venues du pays du soleil levant. Pourquoi avoir donné sa chance à ce Steamboy ? La réponse est dans la question: pour avoir une nouvelle opportunité d'appréhender, de découvrir "autre chose". Je précise que ce n'est d'ailleurs pas un mauvais film: il ne m'a pas totalement "dépaysé", mais je conçois tout à fait qu'il puisse emballer d'autres passionnés de cinéma. Le DVD fait en outre partie d'un coffret de quatre, autant d'occasions d'aller à la rencontre d'univers encore inédits. Je n'ai pas du tout renoncé à l'espoir que certains me séduisent davantage.

vendredi 5 mars 2010

Son fils et la mer

C'est l'un de mes bons souvenirs de 2009: le journal qui m'emploie m'a donné l'occasion d'interviewer Jacques Cluzaud, le co-réalisateur du film Océans avec Jacques Perrin. Depuis ce jour, je m'étais promis de découvrir le film en salles aussitôt que ce serait possible. C'est ce que j'ai fait il y a un peu moins d'un mois et, autant le dire tout de suite, j'en suis sorti enthousiasmé. Sur le moment, malgré l'extrême courtoisie de mon interlocuteur, les réponses que j'avais obtenues avaient pu me paraître un peu trop emphatiques. Je peux affirmer aujourd'hui qu'elles étaient en fait franchement honnêtes, car les images de ce reportage animalier sont souvent bluffantes. Oui, il y a là, de manière incontestable, du vrai et du grand cinéma !

Faut-il parler d'intrigue ? Disons tout simplement qu'Océans essaye de répondre à une question d'enfant: dis, Papa, c'est quoi la mer ? L'idée de mon titre, bien mieux exprimée dans le film, j'en conviens volontiers. Au-delà de la question, c'est bien évidemment la réponse qui est intéressante, disons même fascinante. Il a fallu deux années de préparatifs et quatre ans de tournage pour réunir ces images. Évidemment, il y en a beaucoup d'autres encore: il m'a été indiqué que la grosse heure et demie "restante" était issue de... 480 heures de rushs ! Autre donnée: les 75 équipes dirigées par Jacques Perrin et Jacques Cluzaud ont visité 50 lieux différents dans le monde ! Rien que ces chiffres m'impressionnent. Il y a de quoi, non ?

Au final, l'intérêt du film réside aussi dans son approche. Il m'avait également été expliqué que l'intention de départ était de transformer le spectateur, je cite, "en poisson parmi les poissons". J'ai trouvé que c'était parfaitement réussi de ce point de vue ! Je n'ai pas honte à dire que ces images m'ont beaucoup ému, et je l'admets, à un point que je ne pensais pas atteindre devant un documentaire. Il faut dire aussi que les commentaires sont assez discrets. Dès lors, et à tous les sens du terme, c'est à une longue plongée dans l'écosystème marin que le public est ici invité. Océans a aussi ceci de particulier que sa réalisation a associé de grands spécialistes du monde animalier et de brillants cinéastes de fiction. Réunies en groupes pluridisciplinaires, les deux écoles ont fait merveille, associant donc leurs codes respectifs pour recréer une exceptionnelle unité visuelle. Je l'ai ressenti, l'ai dit et le répète volontiers: c'est du grand cinéma !

mardi 2 mars 2010

Mexicaine

Sur les photos d'elle qui circulent sur Internet, elle est souvent sexy. Une image un tantinet réductrice, mais dont elle est peut-être aussi pour partie responsable, l'un de ses premiers rôles marquants étant sans doute celui de Santanico Pandemonium, une strip-teaseuse devenue zombie, dans le très dispensable Une nuit en enfer. Heureusement pour elle et pour le septième art, la belle Mexicaine qu'est Salma Hayek a d'autres talents - et pas juste une homonymie avec un célèbre économiste autrichien. De ses atouts, elle dévoile une partie dans Frida, le film dont je vous parlerai aujourd'hui.

Comme son titre le laisse supposer, ce long métrage sorti en 2002 est un biopic consacré à la grande peintre mexicaine Frida Kahlo. Précisons d'emblée que, si j'avais une très vague idée des créations de l'artiste, je ne les avais pas pour autant exactement dans l'oeil. Aussi, le premier plaisir que j'ai eu à regarder Frida, c'est tout simplement celui qui consiste à découvrir une nouvelle inspiration. Dans cette logique, je vous encourage vivement à vous intéresser d'un peu plus près au travail de Kahlo: même sans surprise, le film qui lui est consacré pourra tout à fait susciter votre attention. Raison évidente: au-delà même de ce qui concerne son travail, c'est sur la vie d'une femme des années 30 que le scénario se développe.

Un destin très cinématographique. Inspirée par le surréalisme, dotée d'une palette de couleurs vives, Kahlo était une peintre, mais aussi une femme de tête et une militante communiste fervente, engagée au point d'accueillir et d'avoir une liaison avec Léon Trotski, après que ce dernier a été contrait de fuir l'Union soviétique de Staline. Arrière-plan politique des plus explicites dans le film: la réalisatrice Julie Taymor nous convie à apprendre beaucoup de choses intéressantes, parmi lesquelles également le lien très fort qui unit Kahlo à son mentor et futur mari: le très partisan Diego Rivera. Loin d'être poussiéreux, Frida est comme son sujet: d'une modernité étonnante. Une oeuvre qui invite aussitôt à d'autres découvertes. Unique regret pour ma part: l'absence d'une VO en langue espagnole.