lundi 25 octobre 2010

Ah, le petit vin blanc...

Les chemins du septième art sont parfois tortueux. Je lisais ainsi que Bertrand Blier imaginait Le bruit des glaçons depuis vingt ans quand il a finalement eu l'opportunité de le tourner. Le réalisateur confiait d'ailleurs qu'il aurait tout aussi bien pu le monter au théâtre. C'est en fait après s'être retrouvé en difficulté sur d'autres projets qu'il a pu mener à bien celui-là. Le credo: "Tant qu'à ne rien faire d'abouti, autant travailler sur une histoire qui me plaît vraiment". Voilà donc comment on découvre aujourd'hui une oeuvre cinématographique singulière, entre pantalonnade et évocation frontale d'un grave problème de société. Où Albert Dupontel joue avec jubilation le cancer d'un écrivain raté, abandonné par sa femme et accroché jour et nuit à sa bouteille de blanc, alias Jean Dujardin !

C'est d'abord pour ce duo que j'ai décidé de donner sa chance au film. Le fait qu'il soit court - même pas 1h30 générique compris - m'avait aussi suggéré que je n'avais pas grand-chose à perdre. Les temps changent. Dans d'autres circonstances, ou il y a seulement une paire d'années, je crois que j'aurais fait l'impasse. C'était presque hier. L'époque où je ne connaissais pas encore Dupontel, où je n'aimais pas Dujardin et où j'étais sûr de ne pas supporter les aspects grinçants des pensées de Blier. Et là, j'ai aimé Le bruit des glaçons. Je l'ai même trouvé intéressant dans son développement, axé notamment sur ses deux personnages féminins, décalques décalés des hommes, à leur propre tempo. J'ai aussi (et enfin) su apprécier sa conclusion, décalée, pas si mortifère. Surprise. Plutôt positive.

Bien sûr, ce n'est pas de ce film qu'il faut attendre de l'action trépidante. La bastide qui sert de théâtre à cette intrigue fait naître un huis-clos assez oppressant, encore accentué par l'incarnation cancéreuse. Il nous arrive de rire, évidemment, mais toujours jaune. Qui d'autre que Dupontel aurait pu nous le permettre ? Je ne sais. J'insiste toutefois pour dire que, Dujardin en tête, les autres acteurs sont quasi-impeccables. Les spécialistes vous diront que Le bruit des glaçons est un Blier grand cru. Possible. Je connais encore trop mal la filmographie du cinéaste pour en juger avec pertinence. Détail important, j'ai noté que, pour sa diffusion, le long-métrage a bénéficié du soutien de la Ligue contre le cancer. "Il donne une leçon de vie: le meilleur moyen de combattre la maladie, c'est d'y faire face", estime Gilbert Lenoir, son président. Mon avis ? Là dessus aussi, joker. Je laisse en décider celles et ceux qui y sont confrontés.

Le bruit des glaçons
Film français de Bertrand Blier (2010)

Moqueuse, cynique, noire: comme j'imagine beaucoup des oeuvres signées du même réalisateur, celle-là est tout ça. Ce n'est peut-être pas toujours une qualité, mais ce n'est jamais un défaut. J'ai même l'impression qu'il y a ici un respect de la vie et de ses souffrances qu'on ne retrouve pas toujours dans d'autres films osant aborder pareille problématique. Le souci, c'est que j'ai encore une fois aujourd'hui quelque difficulté à trouver une proposition à conseiller en vis-à-vis. Pour ne pas me défiler, et vous suggérer autre chose sur la thématique de la maladie, je citerai au moins Le scaphandre et le papillon, de Julian Schnabel. En vous prévenant toutefois qu'autour de l'histoire vraie d'un autre homme victime d'un mal incurable, le ton est cette fois bien différent. C'est peut-être au fond ce qui pourra rendre intéressant le petit jeu des comparaisons.

1 commentaire:

Volland Monique a dit…

Le titre original, la qualité de Bertrand Blier, et l’excellence des acteurs m’avait interpellée. Heureuse d’avoir enfin l’occasion de voir ce film, bien calée dans mon fauteuil, face à mon écran, je salivais à l’avance dès le générique que je jugeai sobre et de bon aloi. Les premiers mots prononcés par Dupontel : « Bonjour, je suis votre cancer… » me confortaient dans l’idée que l’allais voir un bon cru. Et progressivement, mon enthousiasme s’est transformé en déception. Certes j’ai apprécié que ce sujet dramatique soit traité de cette manière peu orthodoxe, gommant l’aspect mélodramatique. J’ai moins aimé l’apparition de l’adolescent consolé par Anne Alvaro, scène qui n’apporte rien et dont je cherche encore la signification. La fin bâclée m’a particulièrement déçue. Sans doute Blier ne savait pas comment conclure son sujet. Bref, je tire mon chapeau à l’interprétation de Jean Dujardin, qui n’en fait pas des tonnes, alors que l’alcoolisme aurait pu inciter à une caricature, et à celle d’Anne Alvaro dont les yeux et le visage arrivent à exprimer toute une gamme de sentiments que les mots en seraient incapables ou indécents. Elle a bien mérité son césar du meilleur second rôle.
Par contre, j’ai trouvé Albert Dupontel en-deça de son talent.