lundi 30 novembre 2009

Portrait de famille

Ce soir, je vous propose une nouvelle chronique autour d'un film manqué au cinéma et rattrapé en DVD. Qu'elle semble loin désormais l'époque des cassettes vidéo, quand il fallait attendre de longs mois avant de découvrir les films "oubliés" en salles ! C'est à peine plus d'un semestre après sa projection que Still walking est disponible ! Ce petit bijou nous provient du Japon. Je crois qu'il n'en existe pas de version française et c'est une très bonne chose pour l'immersion dans cet univers raffiné. L'intrigue ? Une famille de Yokohama commémore la disparition d'un frère aîné, survenue... quinze ans auparavant. Il y a là les parents, le fils cadet brouillé avec son père et marié avec une jeune veuve, la soeur dont le compagnon n'est pas très apprécié, et finalement le trio des enfants, d'âges variés. L'ambiance n'est pas franchement au recueillement. C'est simplement une réunion au cours d'une chaude journée d'été. Ces gens au deuil plus ou moins partagé parviendront-ils à communiquer ? Peuvent-ils encore accorder leurs différences ? Et, au fond, qui sont-ils vraiment ? Voilà quelques-unes des questions que pose le film comme pour nous encourager, nous spectateurs, à une analyse introspective des sentiments exposés. Une chose m'a frappé: on s'identifie facilement à l'un ou l'autre des personnages et on peut assez vite reconnaître certains de ses parents dans la famille ici montrée.

Still walking en paraît presque réel. C'est une oeuvre de fiction extrêmement réaliste. N'eut été une pudeur légitime, le réalisateur n'aurait pas forcément capté autre chose s'il avait installé sa caméra au coeur d'un vrai groupe familial dans les mêmes circonstances. Précision des plus importantes: cela ne veut certainement pas dire que ce que Hirokazu Kore-Eda montre soit banal ou inintéressant. C'est même le contraire: par cette étude sensible et cette approche au tout premier degré, le cinéaste japonais fait naître une sensation d'empathie pour ces gens. Je l'ai dit: on peut s'y retrouver en terrain connu, dans des situations déjà appréhendées, avec des impressions déjà éprouvées. Cette proximité distante est pour moi l'atout numéro 1 du long métrage. Malgré les différences culturelles majeures qui peuvent venir séparer nos moeurs occidentaux de celles de la société nipponne, je crois qu'on ne peut ni être choqué, ni même vraiment surpris, devant la façon de vivre qui nous est présentée. En ce qui me concerne, j'ai même été plutôt séduit. Il y a là une façon très délicate de montrer certaines situations difficiles. Cela suscite le respect. Oui, à moi qui n'ai jamais véritablement été attiré par le Japon, ce film est de ceux qui ouvrent d'autres horizons et m'incitent à revoir mon jugement premier, un peu simpliste.

Bien sûr, il serait un peu inconséquent de s'en tenir à cette oeuvre japonaise pour prétendre posséder désormais une vision objective d'un peuple tout entier. J'apprécie toutefois ce film comme une porte ouverte sur l'autre, cet autre que je n'aurais pas forcément rencontré aussitôt, ou alors... autrement. Si j'ai donc aimé cette délicatesse dans la manière de filmer, j'ai également trouvé le rythme du film particulièrement bien senti. Ce n'est pas trépidant, mais ce n'est pas non plus ennuyant. Pour un peu, dans ce qui est presque un huis clos, on aurait aussi l'impression d'un tournage en temps réel: l'ensemble ne déroule au fond qu'à peine plus de 24 heures de scénario. Option intéressante aussi: celle d'avoir confié le soin de jouer à un groupe d'acteurs tout à fait inspirés. Bien typés, mais jamais caricaturaux, les personnages connaissent quelques évolutions: il n'en sont pas moins tous crédibles et bien interprétés. Still walking est donc bien un film à voir: la relative tristesse de son thème masque une oeuvre subtile. J'aime aussi ce titre - qu'on pourrait traduire par "Toujours en marchant": c'est à la toute fin, une seconde avant le générique, que l'on peut comprendre ce dont il est question. Bref, sous ses airs classiques, il y a beaucoup d'intelligence dans cette histoire a priori ordinaire. Peut-elle également prétendre à une certaine universalité ? Je ne saurais le dire, n'ayant finalement eu qu'un petit aperçu de vies bien particulières. Disons donc pour conclure que le film donne envie d'en observer d'autres. Qu'elles viennent du Japon ou d'ailleurs.

1 commentaire:

L u X a dit…

Les films asiatiques recèlent bien souvent d'une poésie bien à eux, impossible à imiter dans notre cinéma occidental