lundi 31 janvier 2011

Sous l'oeil des caméras

Une chronique de Martin

Je suis encore loin d'avoir vu tous ses films, mais je crois devoir dire que j'apprécie de plus en plus Jim Carrey. L'occasion m'étant donnée de découvrir l'un de ses best sellers (merci Cédric !), j'ai une fois encore apprécié son jeu dans The Truman show. Celui qui s'est fait connaître par l'élasticité de son visage dans un projet "cartoonesque" livre ici une très belle prestation. Pour ceux qui n'en sauraient rien treize ans plus tard, j'annonce que cette production hollywoodienne d'inspiration australienne raconte la vie d'un homme qui ignore complètement qu'il est aussi... la grande vedette d'un soap opera. Depuis sa naissance et avec la complicité de prétendus amis, Truman vit constamment sous l'oeil des caméras. Et son destin d'homme ordinaire scotche littéralement toute la planète devant le petit écran. Toute ressemblance avec des personnes ou situations... bla bla bla...

Miracle du cinéma: la situation n'est jamais ridicule. Elle est même, par moments, froidement crédible ou, à tout le moins, pousse encore la logique voyeuriste du monde occidental réel. Toute l'intelligence est de faire passer un message en douceur, par le rire et la tendresse à l'égard de ce personnage incongru qu'est Truman. Il pourrait aussi bien s'appeler Candide: The Truman show débute donc à son insu. Malgré une blessure intime née de la mort du père, le garçon a plutôt une vie heureuse. C'est quand il se décide à dépasser cette routine que les choses se compliquent: le scénariste du feuilleton qu'il fait vivre n'avait pas spécialement prévu que son héros rêve d'un départ vers les îles Fidji. Beaucoup trop raisonnable pour ça, enfin !

Il faut retenir le rêveur Truman ! Le plus important, c'est bien sûr qu'un épisode 10.910 succède à l'épisode 10.909 de cette vie scénarisée. Et pour cela, pas question de dévoiler le plus petit détail pratique au principal intéressé. Imaginez qu'il ne veuille faire autrement et ne plus se prêter à ce jeu dont on ne lui a jamais expliqué les règles: une vraie catastrophe potentielle pour l'audimat. Je n'ai aucune intention de vous raconter par le menu la manière dont évolue le personnage principal de The Truman show. Voyez vous-mêmes et j'imagine qu'après coup, comme moi, il est probable que vous vous reposiez quelques questions sur le pouvoir de l'image et ce qu'on a pu appeler la société du spectacle. Ce film que j'ai découvert sur le tard est pour moi une grande réussite: j'aime tous ces films qui font réfléchir tout en divertissant. En voilà un exemple.

The Truman show
Film américain de Peter Weir (1998)
Jim Carrey dans un film sur le pouvoir de la télé: dans un genre similaire, mais malgré tout basé sur une toute autre histoire (vraie), je ne saurais trop vous conseiller de voir ou revoir l'impeccable Man on the moon de Milos Forman. Mais si j'ai particulièrement apprécié le long-métrage présenté aujourd'hui, c'est également pour lui-même et comme extrait de la filmographie de son réalisateur. Je commence également à m'intéresser de près à Peter Weir, que je trouve déjà d'un éclectisme (trop) rare et très souvent d'une grande pertinence. En attendant de vous parler peut-être de sa prochaine sortie en salles et/ou de quelques-uns de ses films les plus connus, je vous invite cordialement à relire ici la chronique d'une oeuvre qu'il a tournée dans les 70s, un film comme lui australien: La dernière vague.

dimanche 30 janvier 2011

Les détails qui tuent

Une chronique de Martin

Un petit message de transition pour rendre à César ce qui appartient à César. Vous vous souvenez de cette chronique où j'avais choisi d'évoquer Retour vers le futur 2 ? Mais si ! Même que j'avais parlé de l'anecdote selon laquelle, malade, une actrice avait cédé sa place entre le premier et le deuxième opus de la trilogie ! C'est bon, là ? Oui, ça vous revient ? J'en retouche un mot aujourd'hui pour dévoiler ma source: il s'agit d'une émission du site Allociné, grand diffuseur des horaires de cinéma et spécialiste d'autres services associés. Présentée par Michel et Michel, baptisée Faux raccord, cette perle d'Internet présente les gaffes de mise en scène qu'on peut découvrir dans une longue série de films cultes. Étonnant et drolatique !

Allergiques à cet humour résolument potache, d'aucuns jugent toutefois que la démarche tend à nuire à la magie du cinéma. Je suis d'un avis exactement inverse: quand je découvre enfin les boulettes qui m'avaient échappé une première fois, j'aime le septième art encore plus fort. Si j'ai fait si peu attention, ça veut sûrement dire que j'étais happé par ce qui se passait à l'écran plutôt qu'à la chasse aux détails qui tuent. Que d'autres les débusquent à ma place me fait rigoler ! Je vous encourage à aller voir ça de vous-mêmes. Notez bien que Retour vers le futur 2 n'est pas seul: une trentaine de films ont déjà été passés au crible depuis maintenant un peu plus d'un an. Et, après un best of en fin d'année dernière, c'est parti pour durer !

vendredi 28 janvier 2011

Une princesse qui s'ignore

Une chronique de Martin

Parce que ses longs cheveux s'illuminent et soignent les blessures quand elle se met à chanter, la petite Raiponce a été kidnappée alors qu'elle est était encore bébé. Fille d'un couple royal, elle vit désormais cloîtrée dans un haut donjon, enfermée à quadruple tour par une espèce de sorcière égoïste qui prétend être sa maman légitime. La demoiselle, inconsciente de la supercherie, respecte donc la consigne de la mégère: pas question de mettre un pied dehors, dans ce monde si dangereux pour les blondinettes inexpérimentées. Oui, mais voilà: passant par là, et même si c'est d'abord à l'insu de son plein gré, un voleur un peu crétin va tout bouleverser. Ainsi commence réellement le tout dernier dessin animé de Walt Disney, 50ème opus sorti de l'emblématique studio. Je vais le dire tout de suite: en le découvrant au cinéma un bon moment après sa sortie, sur un écran encore convenable, je me suis ré-ga-lé ! Les deux petites heures de projection sont passées à toute allure. Aucun ennui ! Ce n'était pas très long, mais pas trop court non plus. C'était juste bien, emballant, à la hauteur des espoirs que j'y avais placés. Et très franchement, au coeur de l'hiver, ça fait du bien !

Raiponce est souvent présentée comme un vrai retour aux sources pour Disney. Après avoir connu quelques sorties de route, la machine à rêves serait repartie dans la bonne direction. Ne pouvant prétendre connaître toutes les oeuvres antérieures, je ne me prononcerai pas définitivement sur ce point. Pas aujourd'hui, en tout cas. Ce qui est sûr, c'est que beaucoup des choses que j'aime dans le cinéma d'animation dit classique se retrouve ici: des personnages sympa, des "seconds rôles" dispensables mais truculents, du mouvement dans la bonne humeur, des rebondissements et, bien sûr, une dose de rigolade pour faire passer le tout. J'en entends forcément aussi qui disent: "Oui, mais y'a des chansons !". C'est vrai: ce dessin animé en compte facilement une demi-douzaine et je peux comprendre également que certaines oreilles aient du mal à les supporter, surtout en VF. Cela dit, pour parler de ce que j'ai ressenti, je soulignerai qu'elles ne m'ont pas spécialement ennuyé. Je crois même savoir pourquoi: en plus des notes et des paroles, quelques chorégraphies particulièrement chiadées scandent l'action. C'est un peu la signature du studio: en musique, comme on peut l'imaginer, les personnages sont plus virevoltants que jamais. En un mot, voilà: ça swingue !

Est-ce que c'est encore meilleur en VO, ainsi que j'ai pu le suggérer quelques lignes plus haut ? Joker ! Je n'ai pas (encore) eu l'occasion de faire la comparaison. Ce qui est en revanche certain, c'est que, dans la langue de Molière, Raiponce s'en sort avec les honneurs. Évidemment, c'est également dû au talent des doubleurs. La tradition qui consiste désormais à offrir ces "rôles" à quelques noms illustres du septième art est respectée. J'avoue que je ne connaissais pas Maeva Méline, la jeune femme qui prête sa voix à l'héroïne, mais force est de constater qu'elle livre ici une très chouette prestation. Avec sans doute un peu plus de jubilation encore, ceux qui aiment reconnaître les acteurs apprécieront particulièrement Romain Duris en voleur au grand coeur et surtout une incroyable Isabelle Adjani dans la peau de la sorcière de service. Après, en plus de notre ouïe, c'est évidemment notre vue qui est sollicitée... et gâtée: sur le plan des images, on tient là une pure merveille. J'ajoute que j'ai aussi vraiment apprécié la 3D, cette fois, pour ma troisième expérience cinématographique avec cette technique. En résumé, merci Disney ! J'ai passé un vrai bon moment et je pense que c'est sans hésitation que j'irai voir leur prochaine production. À suivre, un jour futur...

Raiponce
Film américain de Byron Howard et Nathan Greno (2010)

Vous l'aurez compris: ma première sortie cinéma de 2011 aura été une franche réussite ! Sans pour autant crier au génie, je n'ai trouvé aucun vrai défaut à ce dessin animé nouvelle génération, inspiré d'ailleurs de Rapunzel, un vieux conte des frères Grimm. Il confirme donc le propos de ceux qui affirment que Disney remonte la pente. On ne s'en plaindra pas ! Au contraire, le constat nous permet certainement de réévaluer les autres créations de ces petits génies de l'animation. Souvenez-vous: l'an passé déjà, avec La princesse et la grenouille, je vous présentais une autre de leurs oeuvres récentes qui m'avait beaucoup plu. Partant de là, je n'exclus pas de revenir doucement aux origines. Un plaisir possible à suivre le mouvement...

jeudi 27 janvier 2011

Un coeur simple

Une chronique de Martin

C'est très certainement impossible à déterminer, mais je serai curieux de connaître le nombre de films que la seconde guerre mondiale a inspirés. Rien qu'en France, j'imagine qu'il y en a probablement déjà plusieurs centaines, sur tous les angles possibles et imaginables. Fortunat - pour moi le tout premier long-métrage vu en cette nouvelle année - réussit à parler du conflit en ne faisant tirer que quelques coups de feu. Ils atteignent (sans tuer) un homme fait prisonnier par l'armée allemande et qui tente brusquement d'échapper à ses gardiens sur le chemin de sa prison. Scène inaugurale pour introduire l'idée du pays occupé et de la menace aveugle qui pèse sur une femme, Michèle Morgan à la ville, épouse de résistant et que le maquis veut faire passer en zone libre.

Le rapport avec cette image d'une famille rassemblée et souriante ? La femme dont je viens de vous parler, c'est elle. Les enfants sont les siens. Seul l'homme n'est pas le héros que j'ai évoqué. Il s'agit toutefois du personnage principal du film. L'aurez-vous compris ? Joué par Bourvil, Fortunat - c'est son nom - est celui qui est censé accompagner tout son petit monde à l'abri des persécutions nazies. Le cliché le montre au coeur de sa famille d'adoption quand, l'habitude de la cohabitation prise, chacun achève plus ou moins d'oublier les rigueurs de la guerre et retrouve un semblant de vie normale. Autant dire qu'au cours du déroulé du scénario, les choses ne sont évidemment pas aussi simples que ça. La guerre, quoi...

Mon père a pour habitude de dire que Bourvil n'a joué que trop peu de rôles non-comiques et que les réalisateurs qui lui ont fait confiance sont presque tous passés à côté de son talent. Pas mal vu. Toutefois, après avoir considéré le rôle qui lui a été confié ici, j'ai envie de dire que, cette fois, le comédien a trouvé à s'exprimer également dans un registre un peu moins habituel pour lui. Considérez en fait que, si quelques scènes de Fortunat peuvent prêter à sourire, le fonds du propos est tout de même assez sombre. Vous verrez par vous-mêmes ce que vous penserez de la conclusion: pour ma part, je la trouve tout sauf réjouissante. Ce qui ne veut pas dire que nous ayons affaire à un mauvais scénario, bien au contraire. Michèle Morgan apporte elle aussi beaucoup à ce que je qualifierai avant tout de beau film. Anecdote: on y retrouve une Rosy Varte encore jeune et, plus étonnant encore, Frédéric Mitterrand enfant. L'amalgame des acteurs fonctionnant parfaitement, le tout s'avère attachant et bien raconté. J'ai eu un véritable petit coup de coeur.

Fortunat
Film français d'Alex Joffé (1960)

Certes un peu ancienne, mais poignante et bien jouée, cette histoire d'hommes et de femmes ordinaires en temps de guerre mérite qu'on s'y attarde. Pas juste parce qu'elle repose la question: et si ça avait été nous ? Surtout parce qu'il y a visiblement là beaucoup de sincérité de la part de tous les intervenants, réalisateur et bien sûr acteurs. Compte tenu du sujet retenu et de l'âge de cette production, j'ai quelque hésitation à établir une comparaison. Pour reparler d'un film beaucoup plus récent, sur la transformation d'anonymes en héros spontanés de cette période tourmentée, je vous recommanderai simplement à nouveau de voir L'armée du crime. C'est à peu près pour les mêmes raisons que cette oeuvre m'avait marqué, finalement.

mardi 25 janvier 2011

Aime-moi !

Une chronique de Silvia Salomé

Jamais je ne pourrais assez remercier Elia Kazan d’être allé débaucher James Dean des planches de Broadway où il incarnait Bachir, le serviteur marocain dans
L’immoraliste, une pièce adaptée d’André Gide. Direction la Californie, où Dean doit interpréter Cal Trask, un jeune garçon rêveur, maladroit, qui n’entre pas dans les petites cases d’une société entre deux guerres.

Cette histoire est en fait l'adaptation cinématographique d'un livre de John Steinbeck, À l'est d'Eden, ou plus exactement de la quatrième partie du roman (publié en 1952): Adam Trask, un exploitant agricole, vit avec ses deux fils, Aaron et Cal, à Salinas, en Californie, à l’aube de la Première guerre mondiale. Les deux garçons croient leur mère morte, mais le jeune Cal découvre une terrible vérité, qui va accentuer la rivalité entre les deux frères. Aaron est le fils prodigue: parfait et fiancé à la jolie Abra (incarnée par Julie Harris). Cal, lui, est l’enfant rebelle et aventurier, persuadé que son père ne l’aime pas.

Le destin de Cal Trask bascule donc le jour où il apprend, à force de filatures et d’espionnite aigue, que sa mère, qu’il croyait morte, est en fait bien vivante de l’autre côté de la ville. C’est Jo van Fleet qui incarne cette figure maternelle bien particulière: elle tient une maison close et revendique ne pas avoir une once d’instinct maternel, enfin c’est ce qu’elle imagine. Car elle découvre que son fils est comme elle: une personne imparfaite, un être humain qui présente des failles. Cal est rassuré non pas que sa mère soit vivante, mais qu’il existe quelqu’un comme lui. Il se considère comme une mauvaise personne. Sa détresse crève l’écran: il fuit le regard de son père. Peur d’être jugé. Il observe son frère en cachette. Inspiration pour devenir quelqu’un de bien. La scène de l’anniversaire d’Adam est un passage quasi-insoutenable: Cal fait passer le spectateur de l’euphorie la plus totale à une terrible détresse. Son enthousiasme aussi est communicatif: la danse qu’il dédicace à ses graines de haricots pour qu’elles poussent vite et bien est extraordinaire. Son envie de bien faire pour aider ce père qui le rejette est si réelle qu’on se dit: ce n’est pas possible. Adam Trask, immortalisé par Raymond Massey, va finir par se radoucir, va feindre une compassion… mais non ! Enfin, pas tout de suite...


Par la complainte de Cal, sa quête d’amour, son besoin d’être aimé, on a envie de l’aider. Mais comment faire ? Une personne a la réponse et a su l’apprivoiser au détriment de son frère (Richard Davalos): c’est la douce Abra. Une précision quand même: le parcours personnel de James Dean et son histoire chaotique avec son propre père lui permettent d’exprimer son manque d’amour et sa colère face à un mur ! Il ne faut pas non plus oublier que Dean a été, pendant quelque temps, pensionnaire du célèbre Actor's Studio (aujourd’hui devenu le Lee Strasberg Institute), adepte de la fameuse méthode de Stanislavski - elle consiste à cerner un personnage psychologiquement et émotionnellement, à se référer à son passé, à improviser, à insister sur les sensations de la mémoire et à les retranscrire. Les relations avec son père de fiction étaient aussi tendues à l’écran que hors caméra.

À l’est d’Eden
Film américain d’ Elia Kazan (1955)

Au début de l’année 1955, l’Amérique des fifties va découvrir son Petit Prince: James Dean crève l’écran en interprétant Cal Trask, un jeune en mal d’amour et en pleine révolte. À l’est d’Eden est aussi une première pour son réalisateur Elia Kazan: il s’essaye à la couleur et au cinémascope. Et bien lui en a pris car le film est loin d’être passé inaperçu ! Le public des fifties ne s’y est pas trompé en l’acclamant. Les récompenses ont été nombreuses: il a reçu le Prix du film dramatique à Cannes en 1955. Jo van Fleet a été "oscarisée" dans la catégorie des seconds rôles cette année-là. Attention, les filles, après avoir vu son interprétation, vous ne regardez plus jamais vos mains de la même façon ! Et à coup sûr, vous développerez une nouvelle manie ! Ah, la magie du cinéma ! Jimmy n’a pas été en reste non plus… mais à titre posthume, hélas. En 1955, il est nommé aux Oscars pour être le meilleur acteur, mais c’est le Golden Globe du meilleur acteur dans un drame qu’il rafle un an plus tard, en 1956.

dimanche 23 janvier 2011

Régale-toi, médite, ouvre ton coeur

Une chronique de Moko-B

Un samedi soir, une envie de ciné m'avait pris, comme peut nous prendre parfois une envie de Nutella. Et il ne m'en a pas fallu plus pour tenter et réussir à convaincre une amie et son doudou-chéri de m'accompagner voir Mange, prie, aime de Ryan Murphy, papa de Nip/Tuck, avec la sublimissime Julia Roberts, maman du sourire XXL. J'avoue que j'ai été poussée vers ce film plus par une intuition que par une lecture détaillée de son résumé. En gros, je suis allée le voir sans trop savoir pourquoi. Dans la bande-annonce vue le matin même, j'avais aperçu l'Inde, un éléphant, Julia Roberts mangeant une glace, souriante, et Javier Bardem. Suffisant à me convaincre.

Bref, il est donc 19h30 et des poussières et je me cale moelleusement dans mon fauteuil en velours rouge grenat, prête à me laisser envahir de scènes dégoulinantes de romantisme - je cherchais un peu une sensation Ben&Jerry's, mais avec des images, voyez-vous. Je me trompais. Mange, prie, aime n'est pas un film romantique. C'est un voyage initiatique autour de trois étapes clés, dans trois pays différents. Ce voyage débute après que Liz (Julia Roberts) a eu les "couilles" de mettre fin à la vie de couple qu'elle (ne) vit (plus) avec Stephen, son mari depuis huit ans. Liz n'est plus heureuse, elle le sent, elle le transpire, elle le voit.... elle est envahie par cette idée jusqu'à prier Dieu pour la première fois de sa vie en lui demandant secours (quand on en arrive là, effectivement, il est temps de faire quelque chose !). Elle divorce, vit une petite aventure et quelques semaines plus tard, elle décide de quitter New York pour partir faire un voyage d'un an à travers l'Italie, l'Inde et Bali. Notons que cette impulsion est favorisée par une rencontre faite lors d'un précédent voyage à Bali où un shaman, Ketut, lui avait prédit certaines choses (divorce, retour à Bali, bla bla bla...). Et là où ce film aurait pu partir dans un délire n'importekoitesque et parodique de la femme-moderne-revisitant-son-destin, Mange, prie, aime choisit la logique initiatique.


Ainsi en Italie, Julia vit sa liberté retrouvée. Elle mange (beaucoup) et s'amuse en s'imprégnant de la Dolce Vita et du farniente à l'italienne. Elle revit, a bonne mine, l'oeil pétillant et le sourire large. Puis vient l'Inde, où elle intègre une communauté s'inspirant du culte des gourous hindous. Elle sue, elle se fait piquer par des moustiques, elle tente d'apprendre la méditation et le silence... et rencontre un autre grand rescapé de l'amour, Richard, qui la surnomme affectueusement Casse-croûte (Liz continue de manger beaucoup !). Et elle est touchée par le destin tout tracé de Tulsi, une jeune Indienne de 17 ans qui se marie contre son gré. Et puis forte de cet apprentissage karmique, elle (re)part vers Bali et vers Ketut. Entre méditation et vie simple, le temps d'aimer est revenu pour Liz, que le destin (généreux), met sur la route de Felipe (Javier Bardem plus "sensouel" que jamais), autre naufragé de la vie maritale. Comme dans tout bonne histoire d'amour, tout commence sur un quiproquo entre eux, pour finir dans la douceur. Ce que l'on ressent en lisant un livre ou en voyant un film dépend beaucoup de la vie que l'on mène à cet instant précis. Pour moi, Mange, prie, aime a été une claque, une révélation.


Je suis restée par moments clouée en me demandant "Pourquoi je ne fais pas la même chose ?". Sans parler de partir au bout du monde, je voudrais simplement oser franchir le pas de la porte vers la sortie, dire "au revoir" et recommencer. Pourquoi le courage manque-t-il à ce point parfois ? J'aimerais avoir la force de prendre mon destin en main, tout comme Liz. J'aimerais oser me casser la gueule, perdre tout, prendre du poids et me sentir vivante. J'aimerais savoir à nouveau ce qu'est "aimer et être aimée". J'ai cru par moments être seule dans la salle, avec le film me regardant moi en me disant "Voilà ma vieille, c'est un exemple de trucs à faire si tu veux te sortir du pétrin !". Faire la sourde oreille, j'aime ça ...


Mange, prie, aime

Film américain de Ryan Murphy (2010)

Mange, prie, aime ne m'a pas déprimée, loin de là. Ce film offre, à mon sens, un point de vue crédible sur la façon de transformer et reconstruire sa vie, quand ce que l'on a entre les mains n'offre plus rien d'épanouissant. C'est une histoire douce, pétillante, vitaminée et sucrée/salée. Julia Roberts et Javier Bardem forment un joli couple, inattendu et harmonieux. Si vous aimez les films traitant du coeur humain, et du voyage des âmes pleines de vie, allez voir ce film. On peut dire que Ryan Murphy a su nous emmener loin des turpitudes trash de sa série scandaleuse. Manger, prier, aimer... quand je me lancerai, ça ne sera pas forcément ces mots-là qui seront les miens. Quand j'arriverai à me "pardonner" certains moments de ma vie, viendra alors pour moi le temps de vivre, échanger, aimer. Dès que possible, inch'Allah !

vendredi 21 janvier 2011

Une déferlante explosive

Une chronique de Silvia Salomé

1991. Une belle vague envahit nos salles de cinéma : Point break - à la version québécoise Extrême limite, la France préfèrera très vite le titre original. Aux commandes de ce film, Kathryn Bigelow qui voue une véritable passion à l’océan et à son univers, avec son compagnon de l’époque, James Cameron (producteur non crédité du film). Devant la caméra, on retrouve un Patrick Swayze sexy en diable, et un jeune premier qui n’est autre que Keanu Reeves.

La réalisation de miss Bigelow est époustouflante: les scènes d’action suivent les moments de tension. Ce film est un pur shoot d’adrénaline ! Seuls répits: les moments de contemplation face à l’océan ou encore les ralentis de la caméra qui nous font apprécier des paysages désertiques ou encore l’immensité du ciel ! En effet, on est troublé, lorsque Johnny Utah, incarné par le fougueux Keanu Reeves, découvre les sensations du surf nocturne. Il a l’impression de communier avec l’océan. Il est clair que lorsqu’on a mis une fois ses pieds dans un océan, si on l’a respecté, s’il ne nous a pas rejeté(e), c’est une longue histoire d’amour qui commence. Bien sûr, si cette expérience vous est étrangère, vous passerez sans aucun doute à côté d’une partie du film, certainement la plus philosophique et la plus mystique, enfin pour tous les aficionados de l’océan, dont je fais partie !

Car à côté du film policier, c’est un vrai cri d’amour à la nature que nous propose Kathryn Bigelow. Dès qu’on passe à l’eau, dans le ciel ou sur terre, elle nous montre la beauté de notre environnement. Comment ne pas le respecter ? Il est vrai que dans l’imaginaire collectif, les surfeurs sont de fervents défenseurs de la nature. Alors quels meilleurs hérauts que les dompteurs des vagues pour faire passer ce message ?

Bien sûr, il faudra fermer les yeux sur quelques incohérences. Encore que... nos personnages sont des êtres humains, il est logique qu’ils se contredisent ! Le plus bel exemple, c’est le personnage de Bodhi auquel Patrick Swayze donne magistralement vie. Côté pile, Bodhi est un beau gosse: blond, les yeux bleus, la barbe de trois jours. Il surfe comme un dieu. Il a une mentalité qui fait de lui un super pote et un amant très sollicité ! Lors d’une soirée, il dit sans complexe à Johnny, son protégé: «Tout ce qui est à moi est à toi. Fais comme chez toi !» Côté face, c’est un être bien plus obscur: il prône la non-violence, et pourtant, il terrorise les employés de banque, n’hésite pas à faire enlever son ex-petite amie, se bat fièrement pour défendre ou son territoire ou son ami (dans ce cas précis, on le félicite). Ou encore, il critique ses concitoyens «qui s’entassent dans des cercueils en métal aux péages» alors que lui utilise les phares des pick-up de sa bande pour éclairer le feu de camp de la plage !

Johnny est aussi un personnage très duel car il se retrouve au milieu du trio infernal: passion, amour, amitié. Comment concilier les trois, surtout quand on est un agent fédéral, ou plutôt une nouvelle recrue du FBI du bureau de la Cité des Anges ? Je crois qu’il ne parviendra jamais à le faire. Il ira contre les règles pour venir en aide à celle qu’il aime. Il ne pourra jamais se résoudre à arrêter Bodhi, son mentor. Il lui cèdera encore lorsque le gourou le suppliera : «Laisse-moi juste une vague». Tout comme il ne pourra jamais raccrocher sa planche. Arrivé en retard à son boulot, il lance à son supérieur: «J’ai chopé une déferlante d’enfer ce matin, chef !» À la fin du film, on voit aussi que son personnage a changé de look: tout de jeans vêtu, il s’est laissé pousser les cheveux. Je vous le disais: quand on goûte à l’océan, on ne peut plus s’en passer ! Son geste le plus fort: jeter sa plaque à l’eau en pleine tempête !

Mais ces deux personnages sont très attachants: Bodhi, on a envie de tout lui pardonner. Quoi de plus normal pour un surfeur que de vouloir surfer les meilleurs spots au monde ? Vous me direz qu’il y a d’autres moyens ! C’est sûr. Je vais être l’avocat du diable: ces braquages se font toujours sans effusion de sang (enfin presque !). Et puis rappelez-vous: le surf ne s’est professionnalisé que dans le courant des années 90. Avant Kelly Slater qui a rendu ce sport ultra-populaire, le surf était un milieu très marginal. Les sponsors ne se bousculaient pas au portillon ! Il fallait une solution, la bande à Bodhi a choisi de s’attaquer à un spectre du capitalisme: braquer des banques, vingt-six en trois ans, affublés des masques des anciens présidents des États-Unis, Reagan, Carter, Nixon et Johnson ! Et Johnny nous émeut par sa naïveté, due à son jeune âge, mais aussi par son idéalisme. On a sans cesse envie de lui dire de faire attention à lui, de ne pas trop s’attacher…

Sachez que si ces rôles sont aussi criants de vérité, c’est grâce à leurs interprètes. Par exemple, pour la scène de la chute libre, Patrick Swayze ne s’est pas fait doubler. C’est une discipline sportive qu’il pratiquait. Son corps d’Apollon et ses gestes gracieux sont l’heureuse conséquence des années qu’il a passées sur les parquets des studios de danse. Keanu Reeves, lui, s’est un peu plus préparé physiquement: il a eu la chance d’observer de vrais agents du FBI de Los Angeles en action. Et pour peaufiner son jeu de footballeur américain, des entraîneurs de la prestigieuse université UCLA lui ont dispensé des cours !

Point break
Film américain de Kathryn Bigelow (1991)

Ce film a très nettement marqué son époque, il a aussi très facilement passé le cap de la postérité. Il a permis aux profanes de s’immiscer dans le milieu du surf. Aujourd’hui, il est culte ! Aux MTV Awards, Reeves a été sacré meilleur acteur face à Swayze, qui été aussi nominé. Des années plus tard, en France, on rend hommage à ce surf movie. D’abord dans la cultissime Cité de la peur des non moins cultes Nuls. Alain Chabat reprend une scène, celle où Johnny loupe (volontairement) sa cible et vide son chargeur en tirant en l’air. Plus tard encore, Jean Dujardin, alias Brice de Nice, fait de Bodhi, son unique source d’inspiration dans la vie, allant jusqu’à voir plus de mille fois le film !

mercredi 19 janvier 2011

Oh my god !

Une chronique de Killaee

Mettre au centre d’un film un lieu unique: une chambre d’hôtel. Voici le pari risqué et osé de Mikael Hafström dans
La chambre 1408. Il réussit avec maestria le défi et c’est avec grand plaisir que je compte aujourd’hui vous parler de l’un de mes tops.

Le genre, classé dans l’horreur et l’épouvante, est beaucoup plus psychologique selon moi. Mike Enslin, auteur réputé de romans d’épouvante, ne croit pas au paranormal. Mais la mystérieuse chambre 1408 de l’hôtel Dolphin va le faire changer d’avis. Ici, de multiples morts inexpliquées, violentes en prime, ont eu lieu. Mike décide alors d’y passer une nuit pour son dernier ouvrage. Et là… seuls trois points d’exclamation !!! me permettent d’exprimer cette nuit de tous les cauchemars.

Réalisation vraiment bien aboutie pour La Chambre 1408. Les effets spéciaux sont à tomber. Quant à l’histoire, je conseille de vous blottir sous la couette avec votre chéri(e) à porter de main, à défaut un doudou, pour supporter les multiples rebondissements. À peine le temps de dire ouf que le cauchemar repend de plus belle. J’y ai aussi versé ma larmichette… mais je ne vous en dis pas plus. Simple petit clin d’œil: Monk alias Sam Farrell y a obtenu un rôle secondaire.

La chambre 1408
Film américain de Mikael Hafström (2008)
Ce réalisateur semble être un adepte des films d’épouvante. Pour preuve, sa filmographie passée et à venir : The drowning ghost, Dérapage (avec Jennifer Aniston, Vincent Cassel et Clive Owen), Evil, The rite… des noms évocateurs. Même si je n’ai vu que La chambre 1408 au palmarès du cinéaste, je pense qu’il est très doué dans ce genre. Je ne saurais donc que conseiller ce vrai bon film.

lundi 17 janvier 2011

2010 dans le rétro, partie 2

Une chronique de Martin

Allez hop, on ne perd pas de temps et on enchaîne sans plus attendre avec le best of des films que j'ai découverts au cinéma l'année dernière. Formule inchangée: douze titres, douze mini-chroniques associées et douze liens. Je vous souhaite une bonne (re)découverte !

1. Des hommes et des dieux / Xavier Beauvois / 2010
Ce grand succès public du millésime me paraît amplement mérité ! En évoquant le destin de moines assassinés en Algérie dans le cours des années 90, le réalisateur frappe fort: il signe une oeuvre ancrée dans la foi, sans pour autant verser dans le prosélytisme bêta. Émerge un message profondément humain, porté par un groupe d'acteurs au mieux de leur talent. Une oeuvre que la critique a saluée à juste titre et sûrement déjà l'un des grands films de la décennie.

2. Hors-la-loi / Rachid Bouchareb / 2010
Je reconnais avoir quelque peu hésité à le placer si haut, mais ai fini par céder à mon intuition première: sous le feu d'une vive polémique lors du dernier Festival de Cannes, le film en est reparti bredouille. S'il ne méritait pas forcément d'obtenir un trophée, il n'est pas pas pour autant à jeter aux orties, tant s'en faut. Cette oeuvre exigeante nous ouvre les yeux sur une certaine image de la France, assurément pas la plus glorieuse. Autour de trois frères, une autre des facettes de notre relation à l'Algérie, évidemment tourmentée.

3. Shutter Island / Martin Scorsese / 2010
J'ai toujours eu un peu de mal à accepter et digérer la violence sourde des oeuvres du maître américain, mais pour une fois, bingo ! Son nouvel opus m'a particulièrement séduit. Ce long-métrage schizophrène s'inspire d'un roman qui l'est tout autant. Je crois même qu'il le transcende encore grâce à des images époustouflantes, ainsi qu'un gros travail sur l'ambiance sonore. Parfait, Leonardo DiCaprio nous emmène avec lui aux confins de la folie. L'adolescent du Titanic est devenu un homme particulièrement tourmenté. Chapeau !

4. Fantastic Mr. Fox / Wes Anderson / 2009
Ou comment rêver avec un peu de chiffon et trois bouts de ficelle. Cette histoire de renard, voleur de poules et meneur de révolte contre l'homme, est bien plus qu'un récit animalier: c'est également une oeuvre d'une grande poésie et d'une efficacité dramatique certaine. Quand, en plus, en VO comme en VF, le casting s'offre quelques jolies voix pour donner la parole aux personnages, le régal est complet. Que l'on soit gamin ou pas, bohème ou non.

5. L'illusionniste / Sylvain Chomet / 2010
C'est l'un des petits miracles de l'année: d'un scénario oublié signé Jacques Tati est né un film d'animation unique, pratiquement muet et pourtant formidablement évocateur. La magie des images joue pleinement pour le succès de cette oeuvre mémorable, qui mélange allégrement scènes à sourire et instants d'émotions. La nostalgie s'impose après avoir rencontré ces artistes d'une époque révolue. Pourtant, le plaisir finit par prendre le dessus. Tout en douceur.

6. Poetry / Lee Chang-dong / 2010
Le cinéma coréen paraît prendre une place de plus en plus importante sur nos écrans. À la vue de cet échantillon, le constat n'est pas fait pour me déplaire. Dans les pas de Mija, vieille dame sensible atteinte de la maladie d'Alzheimer, on part pour un voyage étonnant, lui aussi riche d'émotions contrastées. Il peut s'avérer assez difficile d'en revenir aussitôt. Le sentiment d'un bonheur triste m'a envahi devant le générique final. Et, en fait, objectivement, j'ai aimé ça.

7. Le nom des gens / Michel Leclerc / 2010
Pas besoin de remonter très loin le fil des chroniques: je vous ai parlé de ce film il n'y a pas encore... deux semaines. J'y ai apprécié le joli lien affectif que tissent Bahia et Arthur, duo improbable qu'incarnent Sara Forestier et Jacques Gamblin. La jeune femme paraît éblouissante de beauté et son partenaire parfait dans le rôle de ce personnage un peu moins lunaire qu'il ne veut bien le laisser imaginer. Leurs échanges passionnés nous parlent aussi de la France d'aujourd'hui sur un ton à la fois badin et sérieux. Un cocktail qui fait du bien au milieu de la grisaille d'un certain quotidien.

8. Tournée / Mathieu Amalric / 2010
Les filles et le garçon du New Burlesque sont de retour ! Une fois apprécié leur passage en France, il pourrait s'avérer encore agréable de revoir ce petit bijou cinématographique qui les y a révélés. Franchement, cette tranche de vie(s) m'a emballé: par son énergie folle, par son entrain à dynamiter les conventions, mais également par ces petits moments magiques et ces grands instants de poésie pure, le quatrième long-métrage du cinéaste français m'a donné envie de découvrir les autres. Je connaissais quelque peu l'acteur. J'aime déjà le réalisateur.

9. Tout ce qui brille / Géraldine Nakach et Hervé Mimran / 2010
Serait-ce l'année des feel-good movies ? Nonobstant certains clichés, en sortant cette fois de la salle de cinéma, j'avais le sourire jusqu'aux oreilles. Emballé d'emblée par une reprise 100% vitaminée d'un tube de Véronique Samson, le métrage déroule sa petite histoire de copines banlieusardes sans temps mort et avec au contraire beaucoup d'entrain. Là aussi, on retrouve une France imaginaire qui nous ressemble pas mal et le mécanisme d'identification marche donc à plein. On peut ne pas aimer, sans doute, mais moi, j'ai savouré tranquillement ce bon moment. Et puis zut, quoi ! Un film qui met également à l'honneur La Chanson du Dimanche, doublette marrante de chansonniers toqués, ne peut pas être tout à fait mauvais.

10. Océans / Jacques Perrin et Jacques Cluzaud / 2010
Documentaire ? Pas vraiment. Film traditionnel ? Pas davantage. L'oeuvre des deux Jacques est un entre-deux, en fait un juste milieu d'une incroyable beauté. Quelques semaines après que je les ai abordées en tant que journaliste, ces images venues nous atteindre depuis toutes les mers du monde ont déclenché en moi une vague d'émotions. La meilleure des réponses à tous ces discours lénifiants sur le triste état de notre planète. En offrant d'admirer la nature dans son plus simple appareil, cette incroyable production en met plein les yeux et parvient à faire passer un message écologique fort... sans jamais vraiment l'énoncer. Remarquable !

11. L'arnacoeur / Pascal Chaumeil / 2010
Que j'aime le cinéma français quand il atteint une telle efficacité dans la simplicité ! Filmée sans la moindre prétention, cette histoire d'amour entre la belle Vanessa Paradis et le très sexy Romain Duris parvient à nous faire rêver en deux temps trois mouvements. Cadre glamour par excellence, la principauté de Monaco en est encore magnifiée. Moi qui connais bien ces lieux, j'avoue que je les ai quelque peu redécouverts grâce à ce véritable carton du box office. Là aussi, je parle volontiers d'un succès mérité.

12. Oncle Boonmee, celui qui... / A. Weerasethakul / 2010
Qualifié de dernière minute pour mon best of annuel, le lauréat 2010 de la Palme d'or mérite mieux que les quolibets qu'il a reçus ici et là après sa distinction cannoise. Je le défends comme le représentant d'une filmographie étrangère éloignée de nos canons occidentaux. Sincèrement, je ne sais pas s'il mérite tout à fait d'apparaître si haut au panthéon, mais j'aimerais qu'il puisse être considéré avec un peu plus de bienveillance. À quelques exceptions près, qui sommes-nous pour dire que cette oeuvre n'a pas d'intérêt ? En voulant donc m'essayer à l'appréhender, j'ai eu le sentiment d'ouvrir une fenêtre sur un autre monde. N'est-ce pas là aussi le sens même du cinéma ?

dimanche 16 janvier 2011

2010 dans le rétro, partie 1

Une chronique de Martin

Hé oui ! Encore une de ces chroniques qui évoquent plusieurs films en même temps ! Seulement voilà, pour le coup, ça se justifie pleinement: après avoir parlé de l'ensemble des longs-métrages vus et revus courant 2010, l'heure est enfin venue d'évoquer les meilleurs de ceux que j'ai découverts. Vous permettrez que, comme l'année dernière, je découpe ce programme désormais rituel en deux parties. Je commence donc aujourd'hui avec mon best of DVD et télé. J'améliore toutefois le processus par la mise à disposition de liens directs vers les messages concernés. À vos marques, prêts, cliquez !

1. Good night, and good luck. / George Clooney / 2005
Chercher dans le passé récent une manière d'évoquer le monde d'aujourd'hui n'est certes pas très original. N'empêche: en réalisant ce noir et blanc chiadé autour d'une équipe de journalistes américains en pleine période de chasse aux sorcières communistes, l'ex-docteur docteur Ross prouve une nouvelle fois qu'il a bien fait d'abandonner les salles d'urgence. Mieux, le fait qu'il soit aussi passé derrière la caméra ne rend pas moins marquante sa présence écran dans un rôle secondaire. Un film que j'aurais plaisir à revoir.

2. Dans la peau de John Malkovich / Spike Jonze / 1999
Une révélation: quelques semaines après avoir découvert une autre de ses oeuvres, j'ai retrouvé le réalisateur américain dans ce qui est peut-être un projet plus loufoque encore. Cette histoire d'Américains moyens enfermés (volontaires !) dans le corps de l'une des têtes d'affiche du cinéma US est un monument de décalage et bien sûr d'auto-dérision pour le principal intéressé. Amis cartésiens, passez votre chemin ! Ou plutôt non, offrez-vous le plaisir de cette oeuvre absolument unique en son genre. De mon côté, il est très probable que je surveille de près les autres propositions du cinéaste skater.

3. Vincere / Marco Bellocchio / 2009
Placer un film italien sur le podium me fait particulièrement plaisir. J'avais raté celui-là au cinéma et, grâce à la complicité de la Fnac, j'ai vite saisi l'occasion de le voir en DVD. Ce drame de facture classique s'intéresse à une grande oubliée de l'histoire: la femme cachée du dictateur transalpin Benito Mussolini. Sans jamais tomber dans le pathos outrancier, elle est au contraire illuminée par le jeu d'acteurs réellement au sommet de leur art. Un éclairage marquant sur ce que peut être, aujourd'hui comme hier, la folie des hommes.

4. 1941 / Steven Spielberg / 1979
Les grands réalisateurs ont tous commencé un jour. Si notre homme a lui débuté par d'incontestables succès, il est parvenu à y intercaler un projet plus personnel, assez décrié à l'époque de sa sortie. Il faut dire que cet objet filmique non identifié maltraite sans vergogne quelques-uns des mythes de l'Amérique et fait de l'attaque du Japon sur Pearl Harbour le point de départ d'un film comique... débridé. Écart de conduite, sans doute, au vu de la filmographie du cinéaste. Mais alors, mes amis, des plus jubilatoires qui soient !

5. Fish tank / Andrea Arnold / 2009
Si Katie Jarvis, pourtant donnée favorite, n'a pas eu de prix d'interprétation à Cannes, il se murmure que c'est uniquement du fait que la jeune Britannique n'est pas une comédienne professionnelle. Admettons donc que la Croisette soit passée à côté d'un talent indéniable et tâchons de voir si la demoiselle poursuit sa carrière dans le septième art. Ici, elle est indubitablement la force vive, l'âme forte d'un métrage social assez intense: la vie la conduira à affronter l'âge adulte à vitesse grand V. Le tout sous l'oeil d'une caméra saisissant avec force et beauté les couleurs du jour et de la nuit. Émotion.

6. Julia / Erick Zonca / 2008
J'en avais déjà eu la prémonition, mais ce film me le confirme encore: Tilda Swinton est une des meilleures actrices d'aujourd'hui. La Britannique m'a une nouvelle fois soufflé par son expressivité dans ce rôle classique, mais pas si facile. Elle joue ici une alcoolique (presque) repentie qui tente de refaire sa vie après le kidnapping d'un jeune garçon. Un road movie sans manichéisme qui nous attache fortement à une héroïne ambivalente. Émotion, encore.

7. Bright star / Jane Campion / 2009
Il fallait bien que je distingue un film en costumes ! Si mon choix s'est d'abord porté sur celui-là, c'est qu'il s'avère en fait d'une beauté plastique indéniable et qu'il offre une forte illustration de la poésie de son personnage, le dramaturge anglais John Keats (1795-1821). J'imagine que des libertés ont été prises avec la réalité historique, mais qu'importe: ce drame à l'ancienne a su me saisir tout entier. Vigueur, force simple d'un travail quasi-artisanal: je dis bravo !

8. Mary et Max / Adam Elliot / 2009
Je vous parlerai bientôt d'une histoire de princesse, mais le film d'animation de mon best of 2010 n'a pas grand-chose d'une anecdote pour petites filles. Encore que l'héroïne en est une, de petite fille ! Laquelle, Australienne, correspond avec un homme américain installé dans la force de l'âge et souffrant du syndrome d'Asperger, une forme d'autisme. De cet improbable duo de pâte à modeler, le réalisateur tire un conte moderne assez sombre, mais, paradoxalement, drôle aussi. Une oeuvre particulièrement touchante qui, par sa sensibilité même, nous transporte ailleurs. Et qui laisse une empreinte.

9. Voyage à Tokyo / Yasujiro Ozu / 1952
Je ne suis sans doute pas très original en distinguant ce film au titre de meilleures productions de mon année DVD et télé: l'oeuvre est aussi souvent présentée comme l'un des meilleurs longs-métrages réalisés au cours... de l'histoire du cinéma ! Inscrite par évidence dans la perspective historique du Japon, ce récit de la relation d'enfants avec leurs vieux parents a aussi quelque chose d'intemporel et d'universel. De l'épure du cadre naît une beauté que le temps n'efface pas, presque parfaite. Une véritable référence en soi.

10. Boulevard du crépuscule / Billy Wilder / 1950
Autre vieux long-métrage en noir et blanc, cette perle m'a marqué comme le premier film noir que je découvre signé de ce réalisateur. J'ai ensuite ouvert plusieurs des portes d'entrée qu'il propose: film noir, oeuvre à suspense, mise en abîme d'un pan de l'histoire séculaire du septième art... le plaisir qu'on prend avec ces images est résolument protéiforme. Au contact des stars - réelles ou non - du cinéma muet, cette réalisation a également réveillé mon envie ancienne de m'y plonger enfin. À suivre...

11. Gainsbourg (vie héroïque) / Joann Sfar / 2010
Un autre des films après lesquels j'ai couru. J'ai finalement découvert cet étrange biopic sur un tout petit écran, dans l'avion qui m'a conduit en Chine cet été. Pas de regret: même sans être un amateur éclairé de l'homme à la tête de chou, on ne peut que saluer le travail ici accompli. La biographie du plus célèbre des provocateurs respecte à tout le moins sa poésie décalée... et son amour des femmes. Tantôt ange, tantôt démon, Gainsbarre y est présenté exhaustivement, sous toutes ses coutures, depuis l'enfant juif jusqu'à la star névrosée des années de biture. Parmi les bonnes idées du métrage, une marionnette géante pour appuyer encore le côté sombre du personnage. Atypique, certes, mais franchement réussi.

12. Seule dans la nuit / Terence Young / 1967
Si j'ai encore plein de films d'Audrey Hepburn à découvrir, je sens déjà que celui-là n'est pas le meilleur. C'est prometteur, car je l'ai quand même beaucoup apprécié. La belle Américaine y joue le rôle d'une femme aveugle menacée par de vils trafiquants de drogue. Réaliste ? Peut-être pas. Efficace ? Certainement ! Une certaine idée du suspense à l'ancienne qui, pour théâtrale qu'elle puisse être parfois, n'a pas pris une ride. Une vraie petite leçon de cinéma offerte aux jeunes générations de réalisateurs.