lundi 31 juillet 2023

Infamie

La liste de ses films - fictions ou documentaires - et récompenses dépasse de loin celle de beaucoup d'autres grands noms du cinéma. Wim Wenders n'avait pas encore 30 ans quand il adapta un classique de la littérature américaine: La lettre écarlate (publié en 1850). Obligé de tourner en Galice un récit campé... en Nouvelle-Angleterre !

Ce roman éponyme de Nathaniel Hawthorne ? Euh... je ne l'ai pas lu. Son personnage principal est une femme, Hester Prynne, condamnée pour adultère dans le Salem puritain du 17ème siècle, à une époque où l'Amérique "appartient encore aux Indiens", ce qu'une voix off explique dès le début du long-métrage. Présentée comme une putain ou une sorcière, la malheureuse doit porter la marque de son infamie et ainsi constamment arborer un signe distinctif sur ses vêtements. Seule la disparition en mer de son mari lui vaut d'éviter la pendaison !

Wim Wenders adorait cette histoire. Les exégètes du septième art indiquent même qu'il avait dû plancher sur le texte en passant le bac allemand. Délocalisé en Espagne pour raisons financières, le tournage de La lettre écarlate ne sera pas de tout repos, avec des acteurs locaux, coproduction oblige, mais également autrichiens, allemands et suédois. Le résultat n'est pas dénué d'un certain charme vintage. Même inappropriés, les décors sont beaux et l'histoire assez forte pour qu'on y décèle encore une bonne dose de modernité (#MeToo). "Ce fut le plus grand voyage de ma vie, notera ensuite Wim Wenders. Je me suis alors juré de ne plus jamais faire de film d'époque". Franchement affecté par cette expérience douloureuse, le réalisateur aurait même envisagé d'abandonner le cinéma au bénéfice d'une autre de ses grandes passions artistiques: l'écriture seule ou la peinture. Ouf ! D'autres films sont tout de même venus, dès l'année suivante. Peut-être est-il temps de redécouvrir ceux qui furent les premiers. J'imagine que je m'y attellerai un jour ! Et si vous avez des conseils...

La lettre écarlate
Film hispano-allemand de Wim Wenders (1973)

Cinquante ans plus tard, cet opus méconnu de ce cinéaste voyageur qu'est toujours Wim Wenders mérite sans doute bien le coup d'oeil. Le cadre rappelle Sleepy Hollow ou Le village - dans deux registres totalement différents, cela dit. Sur le puritanisme de l'Amérique blanche, il n'y a sûrement pas à creuser loin pour trouver des pépites. Exemple: La lettre écarlate de Victor Sjöström, film (muet) de 1926 !

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Si vous voulez aller plus loin...

Je vous suggère une chronique de la version Wenders chez Benjamin.

vendredi 28 juillet 2023

Un jour, une salle

Mes cinémas à Grenoble ? La Nef, le Club, le Méliès et aussi le 6 Rex. À Nice, c'était le Pathé Masséna, le Rialto, les Variétés ou le Mercury. C'est dans ce dernier établissement que je me suis rendu le 7 juillet dernier, au cours des quelques jours de pause loin de mon cher blog. Désormais, la salle porte un autre nom: celui de Jean-Paul Belmondo !

Non sans constance: le cinéma demeure ainsi la propriété du Conseil départemental des Alpes-Maritimes. J'ai renoué avec la plus grande de ses trois salles - une petite centaine de places, dont cinq destinées aux personnes à mobilité réduite. Je me souviens avec nostalgie d'une séance surchauffée dans la deuxième (de 50 ou 60 fauteuils). J'ai aussi visité la petite, qui n'offre qu'une vingtaine d'emplacements aux cinéphiles les plus aventureux et/ou adeptes des écrans en solo. Sous les blanches arcades de la place Garibaldi, un lieu que les Niçois fréquentent aussi lors des mobilisations sociales, le fameux Mercury n'a guère changé. J'étais content de le retrouver, fidèle au souvenir...

Il avait été rénové dans le courant des années 2010 et son concept reste celui que j'ai connu: accueillir les sorties récentes en toute fin d'exploitation pour ne pas faire de concurrence déloyale aux cinémas commerciaux. Mon ancienne association cinéphile y a son siège social et organise toujours ses séances, un vendredi sur deux, au soutien assumé de films rares, inédits ou patrimoniaux de tous les pays. Amère déception: à deux jours près, j'ai raté la dernière projection de sa saison 2022-2023, consacrée à Fleur pâle (Masahiro Shinoda). Aïe... encore un film que je devrai rattraper, Dieu sait comment. Avant cela, je me dis qu'il pourrait être sympa de vous parler aussi des salles que je fréquente désormais avec une véritable assiduité. C'est une idée de chronique que je garde pour un jour de manque d'inspiration: la semaine prochaine, je vous parlerai plutôt de films. Mon "pèlerinage" récent n'a pas tari mon envie d'en évoquer d'autres !

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À tout seigneur, tout honneur...
J'ai réalisé la deuxième photo de cette chronique depuis mon fauteuil. La première est l'oeuvre de Jérémy Crunchant (de France Télévision).

mercredi 26 juillet 2023

Et quitter Mada...

Il reste sûrement quelques bobines Super 8 d'un voyage à la Réunion que mes parents et moi avions fait lorsque j'étais petit (en 1982 ?). Récemment, c'est grâce au cinéma que je suis allé dans l'Océan Indien pour rejoindre cette fois Madagascar - un pays que je connais mal. Nouveau film de Robin Campillo, L'île rouge nous ramène... en 1971 !

Officiellement indépendant depuis le 26 juin 1960, l'État malgache reste toutefois sous le joug de la France, qui maintient des troupes militaires sur son sol. Une colonisation qui vit ses dernières heures. Tout au long du film, la population locale reste cependant hors-champ et seules les familles blanches "occupantes" sont visibles à l'écran. Presque aussitôt, il apparaît que ce temps sera évoqué à hauteur d'enfant, puisqu'un certain Thomas, dix ans, devient le protagoniste principal au travers duquel la caméra observe ce qui se passe alors. L'île rouge est en fait une fiction directement inspirée de la mémoire affective du réalisateur. "Ce que j'ai essayé de faire, c'est de mettre mes souvenirs en perspective non pas pour trouver une vérité historique ou autobiographique, mais plutôt pour créer un monde sensoriel". C'est foncièrement - et formellement - réussi jusqu'à la fin du métrage où, soudain, on nous ouvrira à un tout autre point de vue.

Je vous dois un aveu: c'est principalement pour Nadia Tereszkiewicz que j'ai voulu voir ce film. Malgré ses 27 ans, elle est très crédible dans son rôle de jeune mère (de trois garçons) et en versant solaire du mari ombrageux qu'incarne le comédien espagnol Quim Gutiérrez. Même si je n'en connaissais que peu, l'ensemble de la troupe d'acteurs joue parfaitement sur l'ambigüité des divers personnages, convaincus d'habiter l'un des plus beaux endroits du monde, mais inconscients pourtant des risques qu'ils encourent du fait de leur comportement dominateur. Attention: je ne dirais sans doute pas que L'île rouge vient s'inscrire dans le septième art comme un énième film politique. J'ai vu une oeuvre réfléchie, qui laisse à son public une totale latitude dans ses choix d'interprétation de ce qu'elle montre. La conclusion pourrait tenir lieu de point de bascule, mais rien n'est alors assené comme un propos incontestable - et c'est très bien ainsi, à mon sens. Autres belles qualités de cet opus: sa photo et sa bande originale. Quand le cinéma français atteint ce niveau, il mérite votre attention !

L'île rouge
Film français de Robin Campillo (2023)

Malgré cette notation en demi-teinte, ce long-métrage ambitieux devrait vous intéresser si vous appréciez les scénarios complexes. Notez bien que je n'ai pas dit "compliqués", hein ? En remontant le fil du blog, je retrouve Twist à Bamako, un autre bon film sur les affres de la décolonisation (mais via le regard des Africains, cette fois). Cette histoire vous intéresse ? J'y reviendrai sans doute tôt ou tard...

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Et, avant de partager d'autres impressions...

Je vous conseille de parcourir également celles de notre amie Pascale.

lundi 24 juillet 2023

D'eau et de feu

Me revoilà, les ami(e)s ! J'espère que vous êtes prêts pour la reprise. Avant peut-être un autre break en août, je reviens parler de cinéma !

Le retour des Pixar Animation Studios sur grand écran, en référence mondiale du cinéma d'animation, constitue toujours un événement. Cette année encore, je me réjouis du choix de la Disney Company d'offrir au film une sortie en salles: Élémentaire le mérite, je trouve. Pour l'été, il y a là de quoi ravir petits... et grands enfants. Mais oui !

Flam et Flack vivent dans la même (grande) ville: Element City. Logiquement, ils ne devraient pas se fréquenter: elle est composée de feu et risque l'extinction, tandis que lui, constitué à 100% d'eau liquide, est menacé de bouillonnement excessif et d'évaporation. Comme vous l'avez sûrement deviné, c'est d'abord par un accident soudain que ces deux personnages se rencontrent. Et leur opposition naturelle ne durera pas: ils tomberont amoureux et, successeurs improbables de Juliette et Roméo, voudront vivre leur idylle à l'air libre, sans guère se soucier des règles édictées par leurs familles. Relativement audacieux, le film dévoile également leurs origines sociales et, d'une manière subtile, évoque le sujet des migrations. Sincèrement, je n'en attendais pas tant: une (bonne) surprise, donc...

De manière plus classique chez Pixar, le film déploie un imaginaire visuel d'une grande richesse et assure une animation impeccable. Vous aimez le doublage ? Élémentaire s'appuie sur la performance vocale de comédiens inspirés, au premier rang desquels on retrouve, en VF, l'épatante Adèle Exarchopoulos et le joyeux Vincent Lacoste. Bon... tout bien considéré, j'ai déjà vu de bien meilleurs films d'animation, venus des États-Unis ou d'ailleurs, mais je vous le dis sans juger que ce soit une raison suffisante pour bouder cet opus. Destiné aux familles, c'est un divertissement de qualité - son mérite étant aussi d'être autre chose que le nouveau numéro d'une franchise. Le succès sera-t-il au rendez-vous ? J'ai l'impression que le box-office est resté relativement modeste au début. Le bilan détaillé attendra...

Élémentaire
Film américain de Peter Sohn (2023)

Trois des quatre précédentes créations by Pixar n'ont pas bénéficié d'une exposition dans les salles françaises et sont restées "coincées" sur la plateforme VOD Disney +: j'espère que la tendance s'inversera ! Avant d'être fixé, je vous invite à découvrir cette proposition originale, même si elle n'est pas à la hauteur de Vice-versa ou Coco. J'en ai quelques autres dans ma musette que je pense voir... bientôt.

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Sans attendre, vous pouvez prendre d'autres avis...

Il me faut bien admettre que celui de Dasola est moins enthousiaste.

jeudi 6 juillet 2023

Je reviendrai !

Cela faisait un moment que j'avais envie de m'éloigner des écrans. Rassurez-vous: je ne suis pas lassé et ce ne sera donc pas définitif. Je crois juste qu'un break vaut mieux qu'une publication en pointillé. Or, j'ai soudain remarqué que le rythme de mes découvertes de films était (un peu) moins soutenu ces derniers temps. J'ai revu Ariane avec plaisir, mais cela ne m'a pas suffi pour "relancer la machine". Mon début d'été 2023 ne ressemble pas au précédent: il est possible que je fasse une autre pause en août, mais je ne veux jurer de rien. Mon idée à ce stade est de vous retrouver en ligne vers le 24 juillet. D'ici là, portez-vous bien... et n'oubliez surtout pas d'aller au cinéma !

dimanche 2 juillet 2023

Au fait...

Un petit mot: je voulais simplement vous rappeler la tenue de la Fête du cinéma. L'idée: jusqu'à mercredi inclus, les cinémas participants proposent un tarif unique à 5 euros (hors suppléments 3D et autres). Ils sont si nombreux... qu'il y en a forcément un à côté de chez vous. Au cours de son édition 2022, l'événement avait su attirer 3,2 millions de spectateurs. Un total qui ne demande en réalité qu'à être dépassé !