samedi 30 septembre 2017

Movie Challenge - Étape 3

J'en ai parlé pour la première fois fin janvier. J'ai ensuite joué le jeu jusqu'à proposer deux bilans intermédiaires, le 31 mars et le 30 juin. Pour l'heure, je n'ai pas encore terminé le Movie Challenge, ce défi ludiquo-cinématographique initié par Tina et son amie Lily. Je crois qu'il me faudra être rusé pour en venir à bout dans le délai imparti...

À toutes fins utiles, je vous laisse relire mes premières explications. Voici la liste des objectifs que j'ai atteints lors du trimestre écoulé...
14. Un film que j'aime bien secrètement,
Cible émouvante

17. Un film engagé,
120 battements par minute

20. Un film qui m'a fait pleurer de rire,
A serious man

21. Un film d'un réalisateur que j'adore,
Ce qui nous lie

28. Un film ayant obtenu un Oscar,
Twenty feet from stardom

33. Un film avec un mariage,
Ava

36. Un film que je veux voir depuis des années sans occasion,
Jeux dangereux

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Voici également l'ensemble des dernières cases que je dois cocher...
4. Un film sorti l'année de mes dix ans,
5. Un film avec un acteur ou une actrice que je déteste,
7. Un film qui se passe dans le milieu sportif,
8. Un film de procès,

13. Un film qui a marqué mon enfance ou mon adolescence,
19. Un film qui m'a fait pleurer,
26. Un film que mon père adore,
40. Un film qui n'est pas sorti en salles en France.

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Et maintenant ?
Je ne le touche pas encore, mais je vois le bout de ce long tunnel cinéphile. Mieux, j'ai quelques petites idées pour boucher les trous ! Promis, comme je l'avais déjà annoncé, je publierai ma liste complète dès que j'aurai terminé. Je mise une fois de plus sur votre patience...

jeudi 28 septembre 2017

Fiers et déterminés

Vous en avez sans doute entendu parler: lui-même ancien militant d'Act Up, Robin Campillo évoque ses souvenirs dans 120 battements par minute. Ce très bon travail n'est pas exactement la biographie filmée de certains de ses ex-compagnons de lutte, mais il s'inspire clairement d'hommes et de femmes "réels". En changeant les noms...

Une précision pour celles et ceux d'entre vous qui l'ignoreraient encore ou auraient pu l'oublier: émanation associative de la communauté homosexuelle, créée à la toute fin des années 80, Act Up vise à faire entendre la parole des personnes séropositives dans la sphère publique, au-delà des cabinets médicaux. Pour cela, ses membres décident ensemble d'actions à mener, très souvent spectaculaires. D'ailleurs, dès le début de 120 battements..., la caméra s'infiltre dans les coulisses de l'une des nombreuses opérations coup-de-poing présentées tout au long du métrage. Mais je voudrais dire également que, comme l'illustre ma première image, le film est empli d'énergie !

Parmi les choses que j'ai appréciées, il y a aussi le fait que le récit s'appuie sur des têtes inconnues. À savoir qu'exceptée Adèle Haenel que vous aurez, je l'espère, reconnue ci-dessus, les comédien(ne)s choisi(e)s ne sont en rien des stars du grand écran ! Je vous rassure tout de suite: ils sont tous très bons, pour ne pas dire excellents. Compte tenu de leur (relatif) anonymat, il est assez facile et naturel de s'identifier à eux, même en étant peu concerné par les méthodes militantes de leurs personnages. 120 battements... est un film bouillonnant, plein d'une vie impossible à canaliser. Le paradoxe apparent n'en est pas un: le Sida tue, mais ces jeunes le combattent !

Leur fierté et leur détermination nous interpellent et nous invitent évidemment à réfléchir au sens à donner à leurs actes, plus encore qu'à leur engagement. Les choses ont pu évoluer dans le bon sens aujourd'hui, mais à l'époque, la maladie était un tabou, au mieux. Frontalement, le film rappelle qu'elle était encore souvent considérée comme "le cancer des homos", expression alors chargée de mépris. L'intelligence de 120 battements... est de nous montrer un collectif soudé, qui ne classe pas ses membres selon leurs préférences sexuelles ou leur statut sérologique, mais les réunit tous à égalité. Politiquement, on peut aussi y voir une petite leçon de démocratie...

Je ne veux pas tout dévoiler, mais vous pouvez sûrement imaginer que, puisqu'il est question de Sida, il est également question de mort. Je vous le confirme: 120 battements... n'élude pas les conséquences de la maladie. Cela dit, bien que très explicite, il ne nous place jamais dans la position du voyeur: c'est l'un de ses grands mérites. Sachez-le par ailleurs: quelques séquences purement contemplatives secouent assez fort - à partir de très belles idées de cinéma, en fait. Petit à petit, le scénario se resserre autour d'un nombre plus restreint de protagonistes, tout en défendant la force du groupe. Une claque qui peut aider à (r)éveiller les consciences et à prolonger le combat...

120 battements par minute
Film français de Robin Campillo (2017)

Je n'ai pas vu Les nuits fauves, le film français culte, qui évoquait franchement le Sida dès le début des années 90. Je me souviens assez vaguement de Philadelphia, qui, en 1993, valut à Tom Hanks le premier de ses deux Oscars consécutifs. D'autres films plus récents sont aussi passés sans que je m'y arrête (pour l'instant, en tout cas). Celui que je viens de présenter mérite bien plus qu'un simple détour ! 

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J'en profite pour avancer dans mon Movie Challenge...
L'objectif n°17 - "Un film engagé" - me semble atteint aujourd'hui.

Et je termine avec deux petits liens extérieurs...
Ils vous relieront aux chroniques (enthousiastes) de Pascale et Tina.

mercredi 27 septembre 2017

Tromper l'ennemi

Ne tergiversons pas: je n'ai que moyennement aimé Jeux dangereux. Depuis le temps que, chez mes amis blogueurs et autres, j'entendais du bien du cinéma d'Ernst Lubitsch, il fallait quand même me lancer ! Une fois ce grand classique dans mon viseur, je ne l'aurais manqué pour rien au monde. Mais oui, je le confesse: il ne m'a pas emballé...

Le scénario nous emmène en Pologne, un peu avant le déclenchement de la seconde guerre mondiale. L'une des troupes de théâtre locales répète une pièce, dont le personnage principal est Adolf Hitler ! Quand la Wehrmacht envahit Varsovie, les comédiens se retrouvent interdits de spectacle et n'ont d'autre choix que de retenir un texte beaucoup plus consensuel: le Hamlet de Shakespeare. Ils emploieront bientôt leur talent au service de la Résistance: un rebondissement décisif... que je n'ai même pas vu venir, ce qui m'étonne beaucoup. Jeux dangereux: le titre français du long-métrage se  justifie alors. Je suis persuadé que certain(e)s d'entre vous y prendront du plaisir...

En fait, je crois que je suis victime d'un malentendu: j'ai pris le film pour ce qu'il n'est pas. Je m'attendais véritablement à une comédie débridée. Or, si la subtilité est de mise et si quelques séquences prêtent effectivement à sourire, il n'est pas question de gaudriole ! Disons que, derrière une apparence de légèreté, on nous offre plutôt un suspense digne d'un bon roman d'espionnage que des arguments pour rire de la situation. Attention, les ami(e)s: je ne vous dis pas que cela m'a déplu, mais que, faute d'avoir su repérer d'emblée le fil narratif, il est simplement possible que je me sois un peu perdu. Jeux dangereux méritera sans aucun doute une autre chance, un jour ou l'autre. D'ici là, je vous incite à le voir aussi, pour vous en faire une idée plus juste. Et je ne ferme pas la porte à d'autres Lubitsch...

Jeux dangereux
Film américain d'Ernst Lubitsch (1942)

Malgré les réserves que j'ai émises ci-dessus, l'année de sortie du film me fait dire qu'il est important dans l'histoire du cinéma américain. Maintenant, c'est un fait: pour nous parler de résistance de manière détournée, Le dictateur et Casablanca ont toujours ma préférence. Côté français, non sans audace, je veux citer Les visiteurs du soir. Nés des heures sombres, ces films ont gardé une force peu commune.

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Des précisions pour être complet...

1/ Je passe l'étape n°36 du Movie Challenge: "Un film que je veux voir depuis longtemps sans en avoir l'occasion". Et le bout se rapproche...

2/ Jeux dangereux est aussi connu sous son titre originel, emprunté évidemment à la plus célèbre réplique de Hamlet: To be or not to be.

3/ Le film a connu un remake en 1983: une production... Mel Brooks !

4/ "L'oeil sur l'écran" offre à lire une chronique (positive) de l'original.

mardi 26 septembre 2017

Madrid sanglante

Avis aux amatrices et -teurs: la (relative) vitalité du cinéma espagnol contemporain passerait de plus en plus par le polar ! Serait-ce donc pour surfer sur cette vague supposée que ses distributeurs en France n'ont pas traduit le titre de Que Dios nos perdone ? C'est vrai aussi que ce n'est pas non plus la désignation la plus compliquée qui soit...

Bref... pour dire deux mots de l'intrigue, je voudrais d'abord souligner que le film oppose, de manière assez classique, deux flics associés dans leurs enquêtes, mais franchement très différents l'un de l'autre. Javier Alfaro représente la force brute, capable aussi bien de courir derrière un suspect dans des rues bondées que de "péter les plombs" pour une contrariété quelconque. Luis Velarde, lui, paraît travailler selon des méthodes quasi-inverses, avec une patience et une minutie dans la recherche d'indices confinant à la maniaquerie. Sur ce plan précis, Que Dios nos perdone fait preuve d'efficacité, mais demeure d'une originalité discutable. Ce qui résumerait bien mon avis global...

Oui, j'ai passé un bon moment devant ce thriller au goût gaspacho. Effectivement, j'ai bien accroché à son atmosphère à la fois chaude et poisseuse, l'exact opposé de cette soupe froide des plus agréables lors des longues journées d'été. Non, je n'ai pas vraiment été choqué par l'intrigue principale, qui consiste à suivre l'investigation criminelle menée pour retrouver un serial killer et violeur de grands-mères. Beaucoup ont insisté sur un point: Que Dios nos perdone s'inscrit dans la Madrid de 2011, en pleine montée du mouvement des Indignés et alors que le pape Benoît XVI arrive en visite officielle. J'ai trouvé pour ma part que ce contexte intéressant était un peu sous-exploité. Dommage: il aurait pu pimenter encore ce long-métrage très correct. Dans le genre, j'ai bien vu un film réussi... mais pas un chef d'oeuvre.

Que Dios nos perdone
Film espagnol de Rodrigo Sorogoyen (2016)

La référence la plus évidente - et la plus immédiate - pour s'intéresser au renouveau annoncé du thriller espagnol reste La isla minima. Entre les deux films, des différences existent, d'époque et de cadre géographique, mais un aspect glauque les rapproche sensiblement. Tout cela va bien au-delà du Tesis dont je vous ai parlé récemment. Maintenant, si vous avez d'autres (bons) exemples, je suis preneur...

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Vous voulez d'autres avis sur le film ?

C'est possible: vous pourrez en trouver chez Pascale, Dasola et Tina.

lundi 25 septembre 2017

Un monde sans pitié

Les films nous inspirent des pressentiments plus ou moins favorables. Quand j'ai choisi de regarder The major, je me suis dit par avance que je n'allais pas rigoler. Cela s'est confirmé ensuite, avec la mort accidentelle d'un enfant dans les cinq premières minutes. Le metteur en scène l'a heureusement laissée hors-champ, mais tout de même...

Dans The major, donc, un flic pressé sur la route percute un gosse imprudent et le tue sur le coup. Face à ce drame effroyable, il laisse ses collègues agir, lesquels montent rapidement un plan pour reporter la faute sur la mère, très vite accusée d'avoir manqué de vigilance. Face à cette injustice flagrante, notre bon ami le pseudo-policier respectable sera bien saisi de remords, mais il sera trop tard alors pour faire valoir la sinistre vérité. Bref... tourné dans des décors enneigés, le long-métrage nous expose froidement les mécanismes quasi-criminels d'une administration corrompue. Toute ressemblance avec les réalités actuelles de la Russie n'est pas forcément fortuite...

Un mot sur ce point précis: le film est bien russe, mais le drapeau qu'il porte n'est pas un étendard. Je veux dire que le récit ne donne jamais de lieu ou de date pour nous encourager à poser le contexte politique contemporain sur les images. Choix intelligent, je trouve. Clairement, ce qui nous est montré pourrait se passer ailleurs, hier, aujourd'hui ou demain... et ce n'est pas très important de situer l'intrigue. Le scénario est bien assez édifiant dans cette imprécision ! Tout au plus pourra-t-on regretter une certaine prévisibilité: je dois dire cependant que, sans parler de rebondissements, la narration nous offre quelques montées de tension franchement efficaces. Quand on a l'habitude des thrillers venus d'Amérique, le changement de cadre apporte aussi un regain d'intérêt. Je ne vous prétendrais pas que The major est meilleur qu'une palanquée d'autres films du genre vus jusqu'à aujourd'hui. Je dis juste qu'il peut valoir un petit détour...

The major
Film russe de Yuri Bykov (2013)

Présenté à Cannes, lors de la Semaine de la critique, le long-métrage précède L'idiot !, déjà évoqué sur ce blog. Il ne serait pas indécent d'affirmer que Yuri Bykov s'implique dans son travail: non content d'être ici réalisateur, scénariste, monteur et auteur de la bande originale, il tient également un second rôle tout à fait important ! Après, on peut aussi préférer Andreï Zviaguintsev et son Léviathan...

samedi 23 septembre 2017

Georges le magicien

Pour bien terminer cette semaine, je voulais vous parler aujourd'hui d'un grand monsieur du cinéma français. J'ai tenu à en dire deux mots après avoir vu, à Cannes, une petite expo qui lui était consacrée. Sans doute la méritait-il, lui qui a laissé son nom dans les livres d'histoire comme l'un des pionniers du septième art. Merci, Georges !

Peut-être l'aurez-vous reconnu: Georges Méliès - puisque c'est bien lui dont il s'agit - est né à Paris, avant le cinéma, le 8 décembre 1861. Son père, un industriel de la chaussure, lui laisse un héritage important, qu'il consacre à racheter le théâtre de feu Robert Houdin, un célèbre illusionniste. Notre homme est lui-même prestidigitateur ! Son premier contact avec le cinéma est précoce, puisqu'il fait partie des invités de la première réception privée de projection, organisée par les frères Lumière fin 1895. Bingo ! L'enthousiasme de Méliès pour ce qu'il découvre est si fort qu'il cherche à acquérir les brevets. On l'en dissuade alors, en lui parlant d'une technologie "sans avenir"...

A-t-on été sincère avec lui ? Ou a-t-on, à l'inverse, cherché à écarter une concurrence potentielle ? Il n'est plus possible d'avoir de certitude. Reste que Méliès s'acharne et qu'à partir d'autres procédés, il fabrique bientôt ses propres images en mouvement: Une partie de cartes circule ainsi dès le printemps 1896. Un an plus tard, l'artiste inaugure à Montreuil le tout premier studio de cinéma, un bâtiment aux murs constitués de vitres, de nature à laisser passer la lumière naturelle. Là, il est à la fois producteur, réalisateur, scénariste, acteur, etc. Inspiré par ce qui existe pour la photo, il a même installé un atelier pour coloriser ses films. L'adage dit vrai: on n'arrête pas le progrès...

Apparu en 1902, Le voyage dans la Lune reste le film le plus connu de cette époque. D'une durée d'un quart d'heure environ, il révèle l'incroyable talent de Méliès, qui, dès lors, séduit aussi de l'autre côté de l'Atlantique. Il faut dire que les titres de beaucoup de ses oeuvres résonnent comme une invitation au rêve: Le royaume des fées, Faust aux enfers, Le voyage à travers l'impossible, À la conquête du Pôle... et j'en passe ! Ainsi, jusqu'en 1914, près de 600 films sortent de l'imaginaire du maître. C'est plutôt sur le plan technique que ce dernier souffre, un début de procès mené par le groupe Edison l'accablant comme un vulgaire contrefacteur. Bien plus productives encore, d'autres sociétés de cinéma lui font une rude concurrence. Méliès ne s'intéresse guère aux chiffres. Il se laisse ainsi dépasser...

Ce n'est pas encore la fin. L'ancien magicien monte des spectacles dans un studio transformé en théâtre, avec l'aide de sa famille. Vaillant, il fait même de sa propriété un cabaret dédié à l'opérette ! C'est en 1923 que le vent tourne presque définitivement: un créancier oblige alors le saltimbanque à quitter sa maison et à vendre ses films à des marchands forains. Une partie du stock est détruite, de la main même du génial créateur ! Une autre vie démarre... assez différente.

Méliès retrouve et épouse Charlotte Faës, que l'on connaît également sous le pseudonyme Jeanne d'Alcy, l'une de ses anciennes actrices. Ensemble, ils tiennent une petite boutique de sucreries et de jouets installée à Paris, dans la gare Montparnasse. En 1929, un journaliste reconnaissant, Léon Druhot, les fait quelque temps sortir de l'oubli. Celui qui avait imaginé - et conçu - tant d'univers fantasmagoriques sera finalement emporté par un banal cancer, en 1938. Ses cendres reposent au cimetière parisien du Père Lachaise. Charlie Chaplin a dit de lui: "C'était l'alchimiste de la lumière". Je ne vois rien à ajouter...

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Bon... est-ce que je peux compter sur vous ?

Je n'ai dit qu'assez peu de choses sur l'oeuvre de Méliès en elle-même. Ma chronique ne donne pas forcément toute la mesure de son talent et parle à peine de l'héritage. Je vous invite donc à l'évoquer aussi...

Et pour une autre référence cinématographique...
Je vous rappelle que Martin Scorsese a rendu hommage au père fondateur du cinéma français par Hugo Cabret, un film sorti en 2011.

jeudi 21 septembre 2017

Revoir Hiroshima

Je l'affirme tout net: je ne pense pas que nous serons très nombreux à être allés voir Lumières d'été. Je n'ai d'ailleurs repéré ce petit film qu'assez tardivement... et il ne sera resté qu'une semaine à l'affiche du cinéma qui le programmait dans ma ville. Il fut une découverte agréable, à vrai dire. Je vais donc tâcher de l'aborder avec subtilité...

L'histoire se déroule dans une ville connue du Japon: Hiroshima. Réalisateur audiovisuel exilé en France, Akihiro est revenu au pays pour tourner un documentaire sur les souvenirs des derniers témoins vivants de la bombe atomique. Les confidences d'une vieille dame très digne, enfant en cette funeste journée d'août 1945, le touchent tellement qu'elles le laissent KO debout. C'est ainsi, lors d'une pause dans son travail, qu'il rencontre la jeune Michiko, qui va lui révéler d'autres facettes de la tragédie. Tout cela est filmé sur un rythme assez lent, à partir d'un scénario franchement pauvre en péripéties. Est-ce un problème ? Non. Compte tenu du sujet, je ne le pense pas...

Lumières d'été prend son temps pour dévoiler toute sa nature. C'est un film pudique, qui cache longtemps l'un de ses éléments importants et pourrait finir par vous cueillir, par surprise. À l'image du héros lui-même, je me suis d'abord senti un peu perdu, sans comprendre véritablement où le récit voulait m'emmener. C'est bien sur la durée que la jolie Michiko s'est avérée un guide aussi imprévisible qu'agréable et que, comme Akihiro, j'ai compris le but de ce voyage. Désormais, je suis heureux de l'avoir fait, même si je peux concevoir que certain(e)s d'entre vous pourraient rester sur le bord du chemin. Ma conclusion sera dès lors que cela vaut au moins le coup d'essayer !

Lumières d'été
Film franco-japonais de Jean-Gabriel Périot (2017)

D'un certain point de vue, cela m'a rappelé Vers l'autre rive, le film de Kiyoshi Kurosawa présenté ici même il y a bientôt deux ans. J'ignore si le réalisateur nous ramènera au Japon, mais ce serait probablement intéressant d'y retourner avec lui, son immersion artistique nous y ayant déjà conduits loin sous la surface des choses. Plus explicite, La maison au toit rouge n'avait pas cette puissance... 

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Une précision utile...
Ma séance a démarré avec un court-métrage, 200.000 fantômes. Également réalisé par Jean-Gabriel Périot, ce mini-documentaire consiste en une série de photos du Dôme de Genbaku, un bâtiment construit à Hiroshima en 1915 et resté debout malgré la bombe atomique. Ses ruines constituent à présent un mémorial pour la paix !

Et un petit lien pour finir...
L'occasion de saluer Pascale, qui a su titiller ma curiosité pour le film.

mercredi 20 septembre 2017

L'apprenti justicier

Je ne suis pas un dingue des films de super-héros, mais j'avais envie cependant de voir Spider-Man : Homecoming. Après une longue série d'aventures télévisées, trois films de Sam Raimi et deux autres encore signés Marc Webb, l'homme-araignée change une nouvelle fois et redevient... un adolescent ! Je pense qu'il faut que je m'explique...

Ce sixième opus cinéma peut se voir isolément des cinq précédents. C'est sûrement préférable, même, pour mieux découvrir les aventures d'un Peter Parker qui n'est pas (encore ?) devenu jeune reporter photo au Daily Bugle, mais qui est toujours au lycée, en stage de fin d'année précisément, dans la boîte de Tony Stark - Iron Man pour les intimes ! Bref... avant de devenir un super-héros à part entière, il va lui falloir démontrer son talent et son goût à combattre le crime. Un méchant ne va pas tarder à apparaître dans cette histoire: avis aux amateurs des comics Marvel, ce sera cette fois Adrian Toomes, dit le Vautour. Une victime de la crise économique qui a salement pété les plombs...

C'est ma foi sympatoche de revoir Michael Keaton dans un autre rôle d'homme-oiseau, ainsi que Robert Downey Jr. (ci-dessus) en mentor pour apprenti justicier. Cela dit, du haut de ses 21 ans, Tom Holland leur sert lui aussi une réplique efficace, dans ce qui demeure objectivement une production lambda, destinée à un public conquis d'avance. Cela dit, j'ai plutôt bien aimé Spider-Man : Homecoming ! Le côté immature de son personnage principal a en fait quelque chose d'assez rafraîchissant dans cet univers parfois beaucoup trop sérieux. Après, si vous êtes allergiques aux arachnides et autres bestioles susceptibles de sauver le monde, les quelques vannes disséminées dans ce nouvel épisode ne devraient pas vous faire changer d'avis. L'action débridée prend très vite le dessus pour satisfaire les geeks...

Spider-Man : Homecoming
Film américain de Jon Watts (2017)

Vous voulez revenir aux sources ? Il ne vous reste plus qu'à lire la BD originelle ou... ma chronique du premier Spider-Man sur grand écran. Quinze ans plus tard, dans les studios américains, on parle clairement de Marvel Cinematic Universe, ce qui nous promet bien d'autres films du même tonneau, avec des personnages qui se croiseront souvent. Est-ce que le cinéma y gagne réellement ? Le débat est déjà ouvert...

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On trouve d'autres analystes sur la toile...

Cette fois, ce sont Pascale et Princécranoir qui répondent à l'appel ! 

lundi 18 septembre 2017

Impasse criminelle

Frédéric Foubert n'a peur de rien. Le journaliste de Première est cité en lettres capitales sur l'affiche de Baby driver, pour avoir osé écrire qu'il constituait "probablement le film le plus cool jamais tourné". Vérification faite, à mes yeux, c'est un gentil petit blockbuster, digne d'être vu car (un peu) différent des autres. De là à s'emballer si fort...

Le titre ne ment pas: le fameux Baby - ce n'est pas son vrai nom ! - travaille bien comme chauffeur. La relative originalité de ce statut professionnel vient en fait du patron qui l'emploie: un chef de gang adepte des braquages de banques. Pendant que ses complices opèrent, notre jeune ami attend sagement dans la voiture, déjà prêt à mettre les gaz pour quitter le lieu du crime et échapper aux flics. Comment ? Ce pitch vous dit quelque chose ? Logique: j'y reviendrai. Maintenant, si Baby driver a eu de bons échos, c'est aussi et surtout parce que son premier protagoniste a des acouphènes et qu'il passe tout son temps à écouter de la musique (au casque). Conséquence logique: en bons spectateurs de ses aventures, nous profitons aussi de cette bande-son, d'une efficacité imparable. Elle se veut synchrone avec les images, tantôt frénétique, tantôt beaucoup plus apaisante. Franchement, l'idée est bonne, mais la mise en oeuvre pourrait casser quelques oreilles, adeptes d'autres mélodies. À vous d'entendre, donc.

Entre deux morceaux, vous serez peut-être sensibles à l'histoire secondaire que le récit développe: celle d'une relation amoureuse naissante entre Baby et une serveuse de café. OK, cette sous-intrigue fait avancer le schmilblick, mais elle semble parfois bien trop naïve pour emballer les adultes auxquels le film est prétendument destiné. Ce côté très candide est à mon avis le point faible de Baby driver. Soucieux d'offrir une porte de sortie à son personnage, il souffre donc d'un décalage entre sa coolitude affichée et ses aspects plus sombres. J'en ai vu d'autres, évidemment, mais certaines scènes sont violentes au tout premier degré. On finit par se demander ce que ce gamin fabrique avec de tels compagnons d'arme, la seule explication donnée s'avérant tout à la fois idiote et expéditive. Bon... je dois admettre malgré tout que le film m'a plutôt plu dans l'ensemble, en tout cas dans le rayon ultra-dopé aux hormones des joyeusetés estivales. Serait-ce la naissance d'une énième franchise ? Je ne crois pas. Ouf...

Baby driver
Film américain d'Edgar Wright (2017)

Je reviens en arrière: oui, le pitch est évidemment évocateur ! Impossible de voir ce film sans penser à ses grands frères, à savoir par ordre d'apparition: Driver et... Drive. Je vous laisse juger seuls de cette comparaison (et de la valeur de chacun des longs-métrages). Une chose est sûre: Edgar Wright est bien moins geek qu'auparavant. Et son film de gangsters objectivement moins désespéré qu'un Titli...

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Vous hésitez encore avant de voir le film ?

Très bien: je vous suggère de compléter mon avis avec celui de Tina.

dimanche 17 septembre 2017

Seul

Je m'efforce d'utiliser le mot "héros" avec grande circonspection. Souvent, comme je le fais aujourd'hui, je l'entoure de guillemets prudents pour en atténuer la portée. Je note que les distributeurs français d'Elser, un héros ordinaire, eux, ne se sont pas retenus. Après tout, comme je vais vous l'expliquer, je peux les comprendre...

Sur l'affiche allemande du film, Georg Elser est désigné comme celui qui aurait pu changer le monde ! Aviez-vous déjà entendu son nom ? Comme le film, Wikipédia vous dit l'essentiel: cet homme ordinaire aura été, en 1939, la tête pensante et l'unique exécutant d'un attentat contre Adolf Hitler. Un conseil d'ami: pour apprécier le long-métrage qui lui est consacré, le mieux est d'en savoir le moins possible avant. Attention toutefois: cette leçon d'histoire est vraiment éprouvante. Intelligemment construit, le scénario du film ne nous épargne pas grand-chose des sévices que les Nazis ont infligés à leur "adversaire". Il vaut donc mieux être dans un bon jour pour encaisser ces images...

Cela étant dit, et c'est ce qui le rend intéressant, Elser, un héros ordinaire donne à voir bien autre chose que des séances de torture. Non content de montrer comment tout un pays peut basculer soudain vers le chaos absolu, il décrypte aussi quelques-uns des mécanismes intimes qui poussent un homme à commettre un acte irréparable contre la vie d'un autre. Simple constat: Elser n'a rien d'un fanatique. Vaguement entouré d'amis communistes, c'est un homme peu engagé dans l'action militante, qui pressent toutefois que d'autres voudraient que les choses changent. Ce n'est que petit à petit, en constatant chaque jour ce que nous appellerions des injustices, que cet homme va décider d'agir. Cinématographiquement parlant, cela donne un film au montage alterné, nourri de flashbacks nombreux... et édifiants ! L'académisme de l'ensemble est réel, mais je ne crois pas qu'il altère la portée de ce film-témoignage. Une bonne référence sur son sujet...

Elser, un héros ordinaire
Film allemand d'Oliver Hirschbiegel (2015)

Les films qui parlent de la résistance allemande sont plutôt rares. Dans la lignée historique, j'avais apprécié Le labyrinthe du silence. Je crois qu'il est toujours préférable de regarder les faits en face ! Pour cela, je crois qu'Oliver Hirschbiegel est un cinéaste intéressant. Je l'avais découvert avec La chute, un long-métrage (polémique) consacré aux derniers jours d'Adolf Hitler. J'en reparlerai sûrement... 

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Le film d'aujourd'hui mérite une audience plus large...

Avant de le voir, vous pourrez lire aussi les avis de Pascale et Dasola.

vendredi 15 septembre 2017

Baisers, kilos et citrons

Une chronique de Joss

Eh oui, cette fois, on y est ! L'été nous échappe et la rentrée a bel et bien sonné. On a beau se motiver, dur-dur de remettre le fantôme de ses tongs dans les mocassins vernis. Alors pour apporter une modeste contribution à l'effort collectif, voici une comédie bien tournée aux accents latino dont le style me rappelle Pain, tulipes et comédie (réalisé en 2000 par Silvio Soldini avec Licia Maglietta et Bruno Ganz, bientôt chroniqué sur ce même blog). Mais attention à ne pas confondre Paraíso avec d'autres films du même titre. Celui-ci est une comédie mexicaine, tirée du livre de Julieta Arevalo Contreras.

Carmen et Alfredo - couple obèse entre trente et quarante ans - mènent une vie très satisfaisante à Ciudad Satelite, une jolie banlieue de Naucalpan au Mexique. Ils s'entendent à merveille, entourés d'une famille et d'amis sympas et sincères, une jolie maison avec jardin (Carmen adore les plantes), une chienne affectueuse (et pas d'enfant). Alfredo vient cependant d'accepter une promotion à Mexico même, ce qui les contraint à emménager en appartement, à laisser leur chienne aux parents, et Carmen à abandonner l'activité familiale d'assurances qui se tenait dans la villa de ses parents.

Bref, beaucoup de changements, autant de contraintes. Carmen vit mal le regard dédaigneux des collègues de travail d'Alfredo, mais n'en laisse rien paraître. Le couple reste uni, Carmen s'efforce de se montrer toujours positive, Alfredo tendre et prévenant. Et voilà que Carmen envisage d'entamer un régime alimentaire dans un groupe de stimulation. Elle y entraîne Alfredo. Celui-ci y fait des merveilles, tandis que Carmen s'enlise dans ses kilos superflus. Se sentant de plus en plus délaissée et surtout incomprise, la jeune femme s'inscrit plus allègrement dans un club de cuisine galicienne, tandis qu'Alfredo fond à vue d'œil et gagne en séduction…

Difficile de rester insensible aux gros plans de la scène d'amour des premiers instants. Aucune vulgarité, de la peau, des sourires, des baisers, de l'amour (le vrai) à profusion, dans un décor kitsch à souhait, rempli d'objets enfantins, totalement incongrus chez un jeune couple d'adultes. Le couple est en retard sur son programme, mais heureux: le cadre est posé. Carmen et Alfredo doivent déjeuner chez les parents de la jeune femme avec un passage préalable chez le pâtissier. Ils vont leur confier leur chienne peu habituée aux appartements citadins comme celui, exigu, qu'ils occuperont à Mexico. Le chagrin est présent, mais d'emblée, l'humour prend le relais. Les parents leur offrent leur premier investissement de jeunes mariés d'il y a trente ans: un énorme coffre-fort qu'ils ramènent … sur leur toit d'auto !

La scène du citronnier - que Carmen déterre pour le replanter dans un endroit bien spécifique du parc municipal - vaut aussi son pesant d'or, avec le mérite de faire la démonstration des concessions quotidiennes que peut faire Alfredo pour l'amour de Carmen. Autour de ces petits aménagements à deux remplis de profondeur et de sincérité, le portrait que dresse l'entourage du couple sur la ville de Mexico est tellement caricatural que nous continuons à sourire (un Mexico exclusivement peuplé de rats, de tremblements de terres, et de kidnapping dans les cabines téléphoniques !). Un seul "Fais-moi confiance" d'Alfredo remet les choses en place !

L'emménagement est encore une fresque de gags. Rappelez-vous du "frigo" que le couple doit laisser repartir, faute de n'avoir pu rentrer dans le nouvel appartement, et "remplacé" par le fameux coffre-fort que Carmen surmonte d'un napperon. Ou encore du couple qui trinque dans les mugs de Noël en se souhaitant une jolie vie, tandis qu'attend un repas préparé par Carmen, énorme et déraisonnable, constitué de tout ce qu’ils auraient dû stocker… dans le réfrigérateur ! Ce véritable banquet annonce déjà le talent de Carmen pour la cuisine. Il est aussi le feu d'artifice de complicité et d'humour qui marque la fin d’une période. Tout reste à vivre à Mexico.

À travers la première soirée annuelle organisée par l'entreprise d’Alfredo, la déconvenue solide est amorcée. Suffisante pour briser Carmen dans ce qu'elle est de plus authentique. Remarquable pour ses tenues bariolées prouvant à quel point la jeune femme se moque de ses rondeurs, elle est d'emblée la cible des collègues d'Alfredo, minces, sexy et impitoyables. Cette Carmen est d'autant plus remarquable qu'elle ne cherchera pas à changer de style (on ne s'en plaindra pas).

Tout au long du film, sur fond d'humour, l'émotion nous gagne. La réalisatrice marque les deux chemins parallèles que suivent Carmen et Alfredo, avec la récurrence des plans sur les objets symboliques dans chaque univers: des peluches accumulées par le couple depuis ses débuts jusqu'à la chute fracassante des affaires de celui avec lequel elle commet un adultère, en passant par l'ange blanc seul sur le chevet de la femme triste, la profusion de ses jouets d'enfance qui la suivent quand elle regagne le domicile de ses parents ou encore le couple d'oiseaux romantiques sur la tapisserie des parents de Carmen façon "toile de Jouy" alors qu'elle distille son chagrin sur le canapé.

Le moindre détail posé aussi y est symbolique: la toque de chef cuistot sur le toit de la voiture d'une Carmen revenant du concours de cuisine annonce sa victoire, mais aussi sa revanche sur le passé: la gloriole légère a remplacé le lourd coffre-fort donné par ses parents. Quant au citronnier planté au début, il devient point de rendez-vous. La boucle va–t-elle se renouer avantageusement dans le quotidien de ces deux êtres qui ne méritent guère de souffrir ?

À noter, une bande-son à la hauteur de l'optimisme inconditionnel de cette comédie avec Ni tu ni nadie du groupe Alaska y Danarama. En bref, aucune prise de tête, et un réel plaisir garanti pour ceux et celles qui ont besoin de reprendre pied après une rentrée un peu stressante. Gaieté, originalité et simplicité. On les doit à Mariana Chenillo, réalisatrice de quarante ans qui exploite volontiers le thème des quarantenaires sans enfant auxquels tous les espoirs sont permis. Son premier film lui valut le Prix Ariel de la Meilleure première œuvre et celui du Meilleur montage. Pour Paraíso, elle a décroché l’aide du Ministère de la Culture. Un vrai remède contre la sinistrose.

Et comme à mon habitude, je vous quitterai sur une interrogation: la métamorphose physique d'Alfredo ne vous rappelle-t-elle pas une autre performance du même genre sur le plan du maquillage dans un film français ?

jeudi 14 septembre 2017

Au coeur de la saison

Soyez-en sûrs: je n'ai pas encore atteint les limites de ma curiosité pour le cinéma mondial. Aujourd'hui, je vous parlerai d'un film que j'ai choisi parce qu'il me permettra d'ajouter un drapeau à ma collection cinéphile: celui de la Lituanie. Que Summer soit arrivé en France n'est pas si surprenant: sa réalisatrice y vit depuis plusieurs années...

Le scénario nous place en face d'une jeune femme mal dans sa peau. Sangaïlé - c'est son prénom et le titre original du film - est partie passer quelques jours de vacances à la campagne avec ses parents. Introvertie, elle résiste aux garçons et paraît vraiment s'ennuyer. Même les numéros de voltige aérienne d'un club de pilotage local n'arrive pas à la dérider. C'est là qu'elle rencontre Austé, une jolie fille qui est presque, en tout cas en apparence, son exact opposé. L'amitié qui les réunit va petit à petit se consolider, dans ce que je pourrai appeler un récit d'initiation féminine. J'avais tenu à regarder Summer sans a priori: si c'est possible, je vous encourage à faire de même...

Je ne vous promets pas un grand dépaysement, mais une découverte sympa. Honnêtement, le long-métrage ne brille pas par son originalité scénaristique, mais il est aussi doux qu'un film peut l'être. J'ai aimé cette façon d'évoquer l'adolescence et ses tourments, de manière finalement plus concrète qu'il ne peut y paraître de prime abord. Summer a su me surprendre dans la mesure où il propose des images très travaillées - certain(e)s les jugeront sûrement "esthétisantes". Avec la musique de Jean-Benoît Dunckel, du groupe Air, on arpente finalement un environnement familier (ce qui peut aussi rassurer). J'ai su apprécier ce joli petit numéro de cinéma, bien filmé, bien joué et au fond assez sensible. Il est en réalité léger comme une plume ! NB: il a reçu le Prix de la mise en scène au festival de Sundance 2015.

Summer
Film lituanien d'Alanté Kavaïté (2015)

Il y a un peu de Sofia Coppola dans cette mini-chronique adolescente. Fort heureusement, elle est moins plombante que Virgin suicides. Certains ont comparé le film avec La vie d'Adèle, mais il me faut dire que je trouve ce rapprochement un peu forcé. L'émancipation féminine m'est apparue plus touchante dans le méconnu Fish tank. Pour un parcours en duo de filles, je vous suggère aussi John from... 

mardi 12 septembre 2017

Italiens et résistants

Chères lectrices, chers lecteurs, je veux tout d'abord vous informer que cette chronique est pour moi doublement particulière: elle résulte de ma première rencontre avec l'un de vous (ami Eeguab, bonjour !) et elle marquera pile le 1500ème long-métrage présenté sur ce blog. Le hasard faisant bien les choses, il s'agit d'un très grand classique...

Choisi dans la belle - et abondante - DVD-thèque de mon camarade axonais, Rome ville ouverte reste connu comme un film-charnière dans l'histoire du cinéma italien. Il est l'un des premiers représentants d'un courant qui fera les beaux jours de la production transalpine d'après-guerre: le néoréalisme. Volontiers engagé, ce mouvement reposait prioritairement sur la volonté de témoigner d'une époque difficile pour les petites gens, en tournant le plus souvent en décors réels, sur les lieux mêmes de l'intrigue, en opposition avec les idées et méthodes promues par le fascisme. Une approche documentariste qui n'oubliait cependant pas que le septième art est aussi d'essence romanesque, créant les plus belles fictions à partir de faits établis. Certains cinéastes en ont profité pour prendre un "nouveau départ"...

Roberto Rossellini est de ceux-là. Le réalisateur avait été un ami proche du fils cadet de Benito Mussolini, le haut responsable fasciste du cinéma italien. Il travaillera sur Rome ville ouverte dès 1943, date à laquelle le Duce avait déjà été renversé. C'est donc sous l'occupation nazie que les premiers éléments du film seront réfléchis. Le tournage n'aura lieu qu'au tout début de 1945, quand la ville sera enfin libérée. D'une manière assez incroyable et fascinante à la fois, le scénario remonte le temps de quelques mois seulement pour nous raconter l'histoire pathétique de gens ordinaires et de résistants anonymes. Vibrant, le récit s'appuie également sur des faits réels, ce qui le rend d'autant plus bouleversant, et ce malgré les longues années passées depuis lors. Le film a ainsi pu s'exporter en France, aux États-Unis...

La toute première chose qui m'a frappé, c'est justement la force émotionnelle qu'il déploie... avec si peu de moyens à disposition ! Mine de rien, Rome ville ouverte est bel et bien un film fauché. Roberto Rossellini en personne faisait état de son "infernale qualité technique", fruit de conditions de tournage tendues dans le contexte que l'on imagine, renforcé par la mésentente de certains comédiens entre eux - fort heureusement parfaitement indécelable à l'écran. D'aucuns considèrent que les quelques séquences tournées en studio n'ont ni la force, ni la beauté de celles réalisées dans les rues romaines. Fadaises ! Toutes participent d'une même cohérence dramatique, qui échappe résolument aux postures manichéennes. C'est aussi la grandeur du film de montrer que l'ignominie est partout.

En dépit de la noirceur de sa conclusion, les images d'enfants de la fin du film peuvent ouvrir notre esprit à l'espoir d'un meilleur avenir possible. L'oeuvre n'est pas directement politique, mais elle délivre toutefois un message et incite les opprimés d'hier à relever la tête. Digne, à l'opposé du misérabilisme qu'elle aurait pu convoyer, elle dit le prix que certains ont payé pour qu'aujourd'hui, nous soyons libres. Cette fois, les "héros" sont italiens, mais ils sont aussi des personnes comme les autres, ni meilleures, ni nécessairement plus courageuses. Rome ville ouverte nous propose de confronter nos visions du monde avec celles d'hommes et de femmes qui n'aspirent qu'à la paix retrouvée. En fait, ils et elles nous ressemblent: tous n'ont pas l'esprit de sacrifice. Et le propos du film conserve ainsi toute sa modernité...

Rome ville ouverte
Film italien de Roberto Rossellini (1945)

Si ce long-métrage marque une étape très importante dans l'histoire du cinéma, c'est aussi parce qu'il a reçu l'un des onze Grands Prix décernés à Cannes en 1946, année des (vrais) débuts du Festival. Trouver d'autres oeuvres du même niveau n'est pas chose facile ! Pour le côté allemand, je vous recommande vivement Les assassins sont parmi nous, d'une noirceur rare. Comme Le corbeau en France ?

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Une anecdote pour finir...
Censuré, Rome ville ouverte ne fut diffusé en Allemagne qu'en 1961. Le public espagnol, lui, dut attendre jusqu'en 1969 pour le découvrir !

Et du côté des autres blogs...
J'ai cherché en vain une présentation du film sur le site d'Eeguab. J'espère donc que "L'oeil sur l'écran" saura vous contenter, cette fois.

lundi 11 septembre 2017

Sur la plage, abandonnés

Autant le redire d'emblée: je ne suis pas forcément dingue du cinéma de Christopher Nolan. Je suis presque allé voir Dunkerque à reculons. Finalement, je me suis laissé convaincre par mon père, passionné d'histoire et qui connaissait bien cette page de la seconde guerre mondiale. Et je ne peux pas dire que j'ai regretté de m'être déplacé...

Un mot sur les "faits réels". Le 20 mai 1940, les batailles menées jusqu'alors ont conduit une bonne partie des troupes britanniques, canadiennes, belges et françaises à être coincées sur les plages. Soucieux de la suite du conflit, l'état-major britannique décide alors de conduire une grande opération d'évacuation, tandis que l'armée française tente de retenir l'ennemi dans la ville. Deux semaines durant, des bateaux vont venir chercher les soldats et les emmener vers l'Angleterre. Des navires et équipages civils sont réquisitionnés. 338.226 hommes seront sauvés, soit... 7,5 fois plus que prévu ! Dunkerque - le film - donne une petite idée de cet exploit militaire...

L'une des bonnes idées du film, en adéquation parfaite avec une lubie de son réalisateur, consiste à éclater le récit en trois narrations distinctes. On nous invite à suivre ce qui se passe sur les plages pendant une semaine. Juste après, on nous propose de monter à bord d'un bateau parti d'Angleterre et de vivre une journée de son périple. Enfin, on devient le copilote d'un avion de chasse, ce qui nous conduit à traverser une heure de reconnaissance et de bataille aériennes. Bien sûr, à un moment donné, ces sous-intrigues se combinent ! J'aimerais rassurer les sceptiques sur un point précis: Dunkerque demeure toujours très lisible à qui se laissera guider par la caméra...

Beaucoup se sont exprimés avant moi pour dire que ce blockbuster assumé n'était pas vraiment un film de guerre. L'idée est d'expliquer qu'il s'agit plutôt d'un film de survie. Pas faux: cette reconstitution reste très évasive sur le contexte général et préfère nous plonger directement au coeur de la mêlée, aux côtés des simples troufions. Est-ce intelligent ou non ? Chacun jugera. C'est immersif, en tout cas. Tout en nous épargnant le rouge hémoglobine, Dunkerque retranscrit avec force toute la vigueur de la bataille et l'animalité fondamentale de ces situations. Pas (ou trop peu) de temps pour souffler ! On peut regretter toutefois que l'ennemi ne soit jamais montré directement...

L'opération Dynamo, telle que les Britanniques l'ont désignée, s'inscrit pour eux comme un temps fort de la guerre. Or, même s'il travaille aujourd'hui aux États-Unis, Christopher Nolan est lui-même anglais. Cela étant dit, je n'ai pas senti dans son film le patriotisme exacerbé que certains lui reprochent (et je m'en passe, pour être honnête). Franchement, tout est carré, solide et efficace: du vrai bon boulot ! Mais cela pêche un peu du point de vue émotionnel: aussi bien fait soit-il, porté par des images fortes et très bien sonorisé, Dunkerque est un film plutôt froid. Aussi, après coup, aucun de ses personnages ne me manquait vraiment. Je n'en ferai donc pas un incontournable...

Dunkerque
Film américano-britannique de Christopher Nolan (2017)

Comme à beaucoup d'autres cinéphiles, Il faut sauver le soldat Ryan me revient à l'esprit comme un possible long-métrage comparable. Attention: j'ai vu le film de Steven Spielberg depuis trop longtemps pour faire un juste parallèle. Et il ne parle pas de la même opération ! Pour retrouver Dynamo, mais du point de vue des troupes françaises cette fois, je retiens Week-end à Zuydcoote (Henri Verneuil / 1964).

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Le film a en tout cas un vrai succès sur la blogosphère...

Il est chez Pascale, Dasola, Tina, Sentinelle, Princécranoir et Strum.