samedi 30 août 2008

Gansta samouraï

Il faudrait sans doute que j'en voie d'autres pour me faire une idée plus juste, mais j'ai l'impression que les films de Jim Jarmusch proposent souvent un univers bien particulier, comme pour garantir un profond décalage avec la vraie vie. Dernièrement, c'est en tout cas ce que j'ai pensé en revoyant Ghost Dog, sorti en 1999. L'histoire ? Celle d'un tueur à gages solitaire, un Afro-Américain interprété par Forest Whitaker. Un porte-flingues aussi redoutable que mutique. Ses commanditaires le contactent par pigeon voyageur et lui aime à s'imaginer samouraï, occupant son temps libre au milieu des oiseaux, à lire des ouvrages de philosophie japonaise médiévale.

J'aime autant vous le dire tout de suite: s'il comporte bien entendu quelques coups de feu, Ghost Dog déroule son histoire sur un rythme très lent, les scènes étant généralement entrecoupées de fondus au noir, quand ce n'est pas de lectures de passages des livres lus par le héros. Sans doute faut-il véritablement "entrer" dans ce film pour l'apprécier à sa juste mesure. J'oserai d'autant plus dire que cela peut réclamer un effort que je n'avais pas forcément été très séduit par cette oeuvre étonnante la première fois que je l'ai vue. La deuxième vision m'a permis de rassembler les bribes éparses de mes souvenirs. Elles étaient à vrai dire peu nombreuses.

En somme, Ghost Dog est un long métrage à la tonalité étonnante, qui ne ressemble pas à aucun de ceux dont je peux me souvenir sur la même thématique. Du coup, c'est certainement une sorte d'expérience à tenter pour tout amateur de film noir. Il m'a également paru assez intéressant de me pencher quelques instants sur le casting de Jarmusch, composé d'acteurs très majoritairement inconnus à mes yeux. Dans l'ambiance, tous s'en sortent magnifiquement bien et donnent à l'oeuvre du réalisateur américain un cachet unique. Au final, j'ai le sentiment que j'aurais encore des choses à analyser et à découvrir lors d'un éventuel troisième visionnage. Une sensation qui, cette fois, n'est étrangement pas désagréable. Oui, je reste donc sur une vraie bonne impression.

mercredi 27 août 2008

Une agréable supercherie musicale

Rien de nouveau sous le soleil ? Non. J'aime toujours autant les films en costume. Profitant d'être véhiculé lors d'un trajet en voiture récent à destination de la banlieue parisienne, j'ai revu Farinelli, film musical (français) apprécié au cinéma il y a déjà de cela quelques longues années. L'histoire ? Celle d'un castrat du 18ème siècle, Carlo Broschi. Ah ! Peut-être que certains d'entre vous ignorent ce qu'est un castrat. On peut fort heureusement en parler au passé: les castrats étaient des hommes doués pour le chant lyrique, qu'on émasculait alors qu'ils étaient encore enfants, afin de préserver la pureté de leur voix. Autres temps, autres moeurs, n'est-ce pas ?


Carlo Broschi - alias Farinelli - a réellement existé. Son frère Riccardo, présenté ici dans la peau d'un compositeur à l'inspiration aléatoire, également. Le film évoque la manière dont les deux collaborent, Riccardo exploitant d'abord clairement le talent vocal de son cadet pour tutoyer la gloire... mais aussi, et surtout, les jolies femmes de la noblesse. Historique ? Pas vraiment. Pour intéressante que soit l'oeuvre de Gérard Corbiau, elle s'appuie tout de même presque exclusivement sur la fiction. L'intrigue est clairement inventée, même si elle donne au personnage de Joseph Haydn un rôle central, ce qui, pour le coup, serait assez conforme à la réalité. Disons que le réalisateur a brodé sur un canevas réel.

Et alors ? Le film est réussi. Amadeus (de Milos Forman) le laisse évidemment loin derrière, mais, à mon avis, c'était difficile de faire mieux, voire aussi bien. Non, si on ne fait pas de comparaison hasardeuse, je pense qu'on peut dire sans rougir que Farinelli tient la route. Peut-être que le petit bémol vient justement du fait que la musique n'y tient pas une place centrale et qu'elle semble s'être glissée dans le film à titre d'illustration, plus que de personnage principal. Il n'en reste pas moins que le résultat est plaisant, beau à regarder et plutôt agréable à entendre. Soyez rassurés pour la virilité de Stefano Dionisi, l'acteur principal: les parties chantées sont une pure création électronique, mélange subtil de la voie du contre-ténor Derek Lee Ragin et de la soprano colorature Ewe Malas-Godlewska. Une supercherie, peut-être, mais qui ne m'a pas choqué les oreilles.

mardi 12 août 2008

La destinée du robot

La Terre n'est plus qu'un gigantesque champ de détritus. Les hommes ont disparu. On découvre qu'ils ont en fait foutu le camp, très probablement pour rejoindre un vaisseau spatial gigantesque stationné à des années lumière de là. Bref, quoiqu'il en soit, il n'y a plus âme - humaine - qui vive à l'horizon. Les derniers "rescapés" ? Une sorte de blatte et un petit robot qui, seul, compacte les déchets éparpillés un peu partout, pour mieux les empiler ensuite. Le but de la manoeuvre ? Difficile de le savoir, tant la besogne paraît vaine. Vaine et pourtant sans cesse répétée.

Avant d'entrer dans un cinéma, ou plus généralement avant de voir un film, j'aime autant en savoir le minimum sur l'intrigue. J'espère donc ne pas vous avoir livré trop d'informations sur Wall-E, le dernier dessin animé de chez Pixar, que j'ai vu hier après-midi. Sincèrement, je ne pense pas: ce dont j'ai parlé en introduction correspond aux dix premières minutes, peut-être même seulement aux cinq premières. Je n'avais pas de chrono en mains, bien évidemment. Ce dont je suis sûr, c'est que je n'ai rien dévoilé de fondamental. J'aime beaucoup la phrase d'accroche présente sur l'affiche du film: "Pendant 700 ans, il a fait ce pour quoi il avait été construit. Maintenant, il va découvrir ce à quoi il était destiné". Comme le "héros", vous aurez donc beaucoup d'autres choses à découvrir et, à mon avis, vous y prendrez une bonne dose de plaisir.

Résumons. Avec Pixar, pas de surprise: la technique est tout simplement irréprochable. C'est bien simple: les personnages deviennent presque humains, même s'ils sont - donc - robots. Ensuite, bien sûr, il faut accrocher à l'histoire et aux idées qu'elle développe. Pour ma part, j'ai trouvé très plaisant de savourer les différents niveaux de lecture de cette aventure futuriste. Je pense même que, de toutes les autres oeuvres du studio américain, ce dessin animé est certainement la plus profonde, la plus "engagée". Un bien grand mot qui ne doit toutefois pas vous effrayer: même s'il délivre un message, j'ai d'abord trouvé ce film d'une grande poésie. Croyez-moi: ce n'est pas la moindre de ses qualités. Mon conseil final tient donc en quelques mots: ouvrez les yeux et laissez-vous séduire.

lundi 11 août 2008

Cinq jours en famille

Il y a les parents, Robert et Jeanne-Marie. Il y a également les enfants, Albert, Raphaël et Fleur. Au départ, il y a même le chien, Ulysse. C'est une famille ordinaire et, bien sûr, il lui arrive essentiellement des choses ordinaires. Est-ce que les histoires simples peuvent suffire à créer un univers intéressant au cinéma ? J'aurais tendance à répondre oui, surtout après avoir vu, hier, le deuxième film du réalisateur français Rémi Bezançon: Le premier jour du reste de ta vie. Avant d'entrer dans la salle, je n'avais guère d'autres repères que ce titre, m'évoquant simplement une des chouettes chansons d'Etienne Daho. Pour la forme, j'avais jeté un oeil rapide sur Allociné, le temps de lire deux malheureuses lignes de résumé et de découvrir un casting méconnu - à l'exception notable de Jacques "Robert" Gamblin et Zabou "Jeanne-Marie" Breitman.
Je dois admettre que je suis allé vers ce film à reculons. Je ne sais pas pourquoi, mais le fait est que je ne sentais pas trop Gamblin sur ce coup-là. Breitman, elle, me servait même de repoussoir, un peu plus objectivement, dans la mesure où je m'étais vraiment ennuyé devant L'homme de sa vie, deuxième oeuvre de sa filmographie en tant que réalisatrice. N'étant pas allé au cinéma depuis longtemps, je me suis tout de même laissé convaincre par mes parents qui, eux, souhaitaient visiblement laisser sa chance à ce film français. Ils ont bien fait d'insister: j'ai pris du plaisir à découvrir cette histoire, bien plus que je n'avais imaginé de prime abord. Je l'ai déjà dit: c'est pourtant le récit ordinaire de la vie d'une famille ordinaire. Deux aspects font néanmoins de ce film une oeuvre particulière: les émotions y sont bien mélangées sans être complexes et la réalisation apporte un regard nouveau sur une intrigue somme toute classique.

Niveau émotions, Le premier jour du reste de ta vie se développe sur toute la gamme. Certaines scènes fonctionnent très bien autour d'un comique de situation, d'autres sont au contraire poignantes dans des moments plus difficiles de la vie des personnages. Ces personnages, je m'y suis vraiment attaché, d'autant plus, peut-être, qu'ils ne sont au fond que cinq et qu'on apprend à bien les connaître. C'est d'ailleurs là qu'à mon sens, l'idée originelle du réalisateur prend toute sa valeur. Pas de linéarité: Bezançon a fait le choix de suivre les Duval sur douze ans et, de ces douze ans, de ne retenir au fond que cinq journées seulement. Chacune d'entre elles est marquante pour l'un des membres de la famille. Expliqué ainsi, cela peut paraître confus. A l'écran, au contraire, c'est limpide et - mieux - cohérent. Cette belle fiction me semble délivrer un message optimiste: par les temps qui courent, je trouve que ça fait du bien.

mercredi 6 août 2008

Cinq garçons de 1975

Si je me souviens bien, j'ai d'abord vu Le péril jeune sur petit écran. Logique: le film est passé à la télé AVANT de sortir au cinéma. Logique encore: il faisait partie d'une série commandée par et diffusée sur Arte, baptisée "Les années Lycée". Le concept, je crois, était donc d'illustrer la vie des lycéens, sur plusieurs générations, des années 50 aux années 90. Comme vous pouvez peut-être l'imaginer au vu de la photo illustrant cette chronique, Le péril jeune aborde les années 70. Grâce à la même méthode, vous aurez également compris qu'il s'attache à suivre le destin de cinq copains.

Au début du film, pourtant, ils ne sont plus que quatre: Momo, Alain, Bruno et Léon sont dans une maternité. Ils attendent l'accouchement de leur copine Sophie. Sophie ? C'est la copine du cinquième larron, Tommasi. Puisqu'on l'apprend dans les cinq premières minutes, je ne trahirai rien de fondamental en dévoilant ici que ledit Tommasi est mort. Le péril jeune est donc avant tout un long flash-back, un retour à l'époque où il était bel et bien vivant, rebelle écorché vif d'une bande de "petits branleurs" (je cite un des personnages secondaires du film). Triste ? Nostalgique ? Pathétique ? Le deuxième long-métrage de Cédric Klapisch est tout ça, mais pas seulement: c'est aussi une oeuvre très drôle, où chacun de nous, quelque soit l'époque où il est allé au lycée, pourrait bien se reconnaître un peu.

Bref, téléfilm devenu film de cinéma, Le péril jeune s'en sort très bien. J'aime beaucoup cette histoire. Le casting est tout simplement au top: Romain Duris sorti d'un casting sauvage pour son premier rôle, Vincent Elbaz, Elodie Bouchez et Hélène de Fougerolles dans l'un des premiers, et puis tous les autres qu'on a guère revus depuis. En somme, c'est une oeuvre modeste qui grandit en touchant le public, un peu comme Bienvenue chez les ch'tis dans un autre registre. Pink Floyd, Jimi Hendrix, Janis Joplin, etc... comme souvent chez Klapisch, la bande originale elle-même est aux petits oignons, même si Steppenwolf remplace Franck Zappa sur le DVD, de manière quelque peu anachronique et pour une bête raison de droits. L'édition "galette" se rattrape avec des bonus intéressants, dont le très chouette Ten years after, nom du groupe qui ouvre le film et du documentaire sur les retrouvailles des acteurs, dix ans après le tournage. Un joli moment de complicité rigolarde et communicative.

dimanche 3 août 2008

Belmondo et une surprise

Jean-Paul Belmondo et Bernard Blier au casting. Michel Audiard comme dialoguiste. Ce n'est pas très fréquent que je regarde un film à la télé, mais, l'autre jour, j'ai été franchement appâté par la bande annonce d'une oeuvre d'Henri Verneuil: Le corps de mon ennemi. Ensuite, j'ai été surpris. Je n'irai pas jusqu'à dire que je m'attendais à un film comique, mais c'est presque ça. Disons en tout cas que je m'imaginais rire de temps en temps autour d'une histoire plutôt loufoque. Une énième aventure de tontons, en somme, où le truand le plus malin ridiculise une brochette d'associés un peu idiots. Je dois admettre que j'avais tout faux...

Le corps de mon ennemi n'est donc pas un film comique. Remarquez, avec un titre pareil, j'aurais également pu m'en douter. L'histoire ? En gros, c'est celle du personnage joué par Belmondo. Double assassin condamné avec des circonstances atténuantes, sorti de prison au début du film, "Bébel" remonte le temps et cherche... à se venger. On comprend vite que, tenancier d'un établissement de nuit quelque peu sulfureux, il s'est fait repasser par ses associés. Ces derniers ont ajouté "fourniture de drogues dures" à la liste des activités du lieu. Et donc fait porter le chapeau à leur naïf partenaire.

Sauf que voilà, naïf, le partenaire ne l'est pas tant que ça. Et que, de nouveau libre, il saura remonter la filière - misant notamment sur l'attirance irrésistible que les femmes ressentent à son égard. Tout cela fleure bon le cinéma d'antan et, à l'écran, on reconnaît sans trop de problèmes les années 70. Démodé, Le corps de mon ennemi ? Je ne l'ai pas dit. Je ne l'ai pas pensé non plus. Il y a une vraie ambiance dans ce film - et donc des dialogues d'Audiard. Oui, c'est sans doute une histoire d'ambiance. Dès lors, soit on accroche à cette ambiance et on passe un bon moment. Soit on aime les films un peu plus animés et, finalement, on décroche assez rapidement. Moi, c'était juste entre les deux: j'ai passé un bon moment, mais tout de même pas au point de porter le film au rang d'incontournable.