mercredi 7 février 2024

Son inspiration

J'ai longtemps vécu à proximité du Cannet, où un musée a ouvert pour présenter son oeuvre au début de l'été 2011. C'est à Grenoble que j'ai finalement "rencontré" Pierre Bonnard, à l'occasion d'une expo rétrospective récente - l'une des plus belles que j'ai pu voir à ce jour. Oui, j'ai vraiment a-do-ré ces fascinants tableaux aux couleurs vives !

Martin Provost, cinéaste, raconte qu'un mur de sa chambre d'enfant s'ornait de la reproduction de l'une des toiles - un cadeau de sa mère. Marthe, la femme du peintre, y était représentée, comme elle l'est dans de très nombreuses autres créations. Cette passion artistique est désormais évoquée dans un beau film au nom aussi simple qu'évocateur: Bonnard Pierre et Marthe. C'est à un double portrait que nous faisons face: celui d'un des maîtres postimpressionnistes vient expliciter celui de sa principale muse - et réciproquement. D'emblée, j'ai eu confiance en Vincent Macaigne et Cécile de France pour incarner ce couple: je veux vous dire qu'ils ne m'ont pas déçu. Lui me semble prendre de l'ampleur dans chaque composition nouvelle et elle n'en finit plus de me surprendre dans des rôles complexes. Entouré d'une belle troupe, le duo donne le meilleur de lui-même ! J'espère que, dans un an, l'Académie des César pourra s'en souvenir...

Je n'oublie pas Stacy Martin, venue ajouter du piquant à une intrigue qui, jusqu'alors, n'en manquait pas particulièrement. La progression historique est respectée, malgré quelques libertés et ajustements narratifs. Bonnard n'était pas un ange: on l'admettra en constatant qu'il a aimé plusieurs femmes, mais qu'une seule l'aura accompagné tout au long de sa vie (et ce en lui mentant sur son identité réelle). L'essentiel est ailleurs et réside dans la beauté d'un long-métrage soigné, à la palette finalement proche de celle du génie qui l'a inspiré. Le réalisateur l'a mentionné: "Nous voulions quelque chose de vibrant. De vivant, de charnel". À rebours de certaines critiques, je souligne que lui et Guillaume Schiffmann, le directeur photo, y sont parvenus. Bien assez, en tout cas, pour nous rendre compte de plusieurs amours douloureusement incandescentes, avec toute la flamme nécessaire. Chacun(e) en jugera bien sûr en fonction de sa propre sensibilité. Apparemment, sur grand écran, le film n'a pas connu un succès fou. J'insiste pour dire que c'est regrettable, en espérant vous convaincre !

Bonnard Pierre et Marthe
Film français de Martin Provost (2024)

Les grands peintres n'inspirent pas forcément de grands films. Celui-là est toutefois réussi, ne serait-ce que par ses qualités esthétiques avérées. Son propos est même relativement moderne dans son approche des relations hommes-femmes: un bon point. Renoir, lui aussi, était beau, mais peut-être un peu moins ambitieux. Pour comparer, je vous recommande plutôt L'artiste et son modèle...

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Y aurait-il d'autres pistes à explorer ?

Sûrement ! À vous de chercher - chez Pascale et Dasola, par exemple.

2 commentaires:

Pascale a dit…

Je suis d'accord avec tout ce que tu dis. Je suis ravie d'avoir vu ce film et d'avoir rencontré l'œuvre de ces 2 artistes.
Macaigne est à chaque film un peu plus surprenant. J'ai apprécié malgré sa belle présence qu'il ne tire pas la couverture à lui. Aucun cabotinage chez ce garçon.
La scène incompréhensible des 2 harpies qui s'écharpent verbalement dans l'eau m'a mise mal à l'aise. Ça n'a aucun sens je trouve.

Martin a dit…

Tu as raison de souligner que le film évoque aussi l'oeuvre de Marthe. L'une des bonnes surprises du scénario... et un rappel historique important.

Effectivement, Macaigne ne tire pas la couverture. Je crois d'ailleurs que je ne l'ai jamais vu le faire. Cela renforce l'intérêt et l'affection que je lui porte.

ATTENTION SPOILERS !!!

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Pour ce qui est de la scène dans le fleuve, je dirais qu'elle va un peu trop loin. Cela dit, j'ai aimé qu'elle se termine sur un plan de Monet en train de peindre, à l'abri du tapage. Je trouve par ailleurs qu'elle a l'intérêt de montrer à quel point Marthe est entière. Il n'y avait peut-être pas besoin d'en faire autant pour montrer le côté détestable (et vulnérable) de Misia...