Je suis parti voir True grit sans savoir à quoi m'attendre exactement. Certains présentaient le dernier film des frères Coen comme un western dans la pure tradition, d'autres telle une escapade dans l'Ouest mis à la sauce des frangins, donc décalée des mythes fondateurs d'un genre tombé dans l'oubli. Pour trancher, je dirais finalement que c'est une oeuvre aux couleurs plutôt classiques. Franchement, ceux qui aiment le western pour les grands espaces, les chevaux, les flingues et la poussière s'y retrouveront largement. Rien à voir ici avec les longs silences imposés en nouveaux modèles par Sergio Leone. Au contraire, le film est bavard, peut-être même un peu trop, parfois. Au spectateur attentif qui ne se noiera donc pas dans la liste des personnages et lieux, il offre un arrière-plan qualité premier choix. Les connaisseurs, eux, seront en terrain familier. Rassurez-vous: ce n'est jamais vraiment un obstacle au plaisir. Tout au plus regrettera-t-on l'absence d'Indiens pourtant souvent évoqués.
True grit a été annoncé à tort comme le remake d'un vieux classique avec John Wayne, Cent dollars pour un shérif. S'il raconte largement la même aventure, à quelques détails près, il s'inspire plutôt du roman original, sorti en 1968 et signé Charles Portis. L'histoire est celle de Mattie Ross, jeune fille dont le père a été abattu par un homme qui a pris la fuite. Déterminée à se venger, l'adolescente embauche un marshall tueur à gages, Reuben Cogburn, représentant de la loi bourru et alcoolique. C'est sans l'en avertir ouvertement que l'intéressé passe un accord avec Laboeuf, ranger texan droit dans ses santiags et chasseur convoitant la même proie. Le duo demeure un trio: négligeant consciencieusement les consignes de prudence que sa famille lui adresse, la demoiselle se montre déterminée à chevaucher jusqu'à ce que justice soit faite. Qu'importe si la bête traquée est plus maligne qu'un raton laveur. Pourtant, non, ce n'est pas un pays pour une jeune fille...
J'ai déjà eu l'occasion de le dire: le western est ma madeleine cinématographique, le genre qui, inconsciemment, m'a fait tomber en cinéphilie. Une bonne vingtaine d'années après l'époque mythique où j'en voyais à un rythme régulier, il faudrait que je m'offre également la possibilité de revoir quelques classiques en Technicolor avant toute étude comparative. Ce qui me semble évident, c'est bien que True grit est avant tout un régal pour les yeux et reprend, ainsi que je l'ai dit, de nombreux codes du genre. Le film réveille l'envie de parcourir l'Amérique profonde à dos de cheval. Dans le respect dû aux anciens, les acteurs nous emmènent avec eux. Jeff Bridges est impeccable dans ce rôle de lonesome cow-boy taillé dans la masse, Matt Damon méconnaissable dans celui du héros fier et solitaire. Entre eux, la jeune Hailee Steinfeld a su s'imposer dans un casting géant, à 1.500 têtes. Son aplomb face à ses aînés fait plaisir à voir et nous fait espérer de la retrouver dès que possible dans la peau d'autres personnages. Elle est la vraie âme de cette production.
True grit
Film américain d'Ethan et Joel Coen (2010)
Je ne sais pas ce qu'il en est dans le premier film d'Henry Hathaway, mais celui-ci est parfois d'une violence assez fulgurante. Cela peut déplaire, d'autant que l'héroïne a ici 14 ans, alors qu'elle en avait 21 dans la version de 1969. Bref. Je ne crois pas pour autant qu'il faille parler de rebondissements gratuits. D'après moi, le volonté de Mattie de venger son père tient lieu de parcours initiatique et la conduira sans aucun doute à perdre une partie de son innocence - je retiens une scène où elle se retourne vers des cadavres que Cogburn refuse d'enterrer. Aux États-Unis, le film connaît un vrai succès, avec plus de spectateurs en treize jours d'exploitation que les sept précédents des Coen en... treize ans ! C'est pour moi l'une des belles réussites des frangins, un tout petit cran en-dessous de l'inégalable Fargo.
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