vendredi 30 avril 2021

Un peu d'introspection

Que le temps passe vite ! Nous voilà déjà au tiers de l'année 2021 ! C'est ma 64ème chronique du millésime et, sachant que les cinémas restent fermés, j'ai eu envie de la consacrer à un petit questionnaire déniché sur le Web il y a quelques mois. Ah ! Si l'envie vous prenait d'y répondre à votre tour, je vous suggère de ne surtout pas hésiter...

Quel est votre meilleur souvenir en salle ?

C'est difficile à dire. L'un des plus marquants est resté ma découverte de Melancholia, dont la conclusion m'avait laissé scotché au fauteuil. Dans mes souvenirs, c'était dans un cinéma de Lille, avec mon papa. Ma dernière expérience avec Lars von Trier. La seule sur grand écran.

La séance la plus surréaliste que vous ayez vécue ?
J'en ai déjà parlé ici. 23 novembre 2018: l'association de cinéphiles dont je faisais alors partie a invité Paul Vecchiali, grand réalisateur méconnu. On projette l'un de ses derniers films: Les 7 déserteurs. Plus de son après 24 minutes. Le cinéaste prend le relais ! Frissons... 

Le film que vous auriez aimé voir sur grand écran ?
Sans hésitation, le premier qui me vient à l'esprit est Paris, Texas. Lors d'un séjour parisien, j'avais le choix entre une séance de cinéma et la visite de Beaubourg. J'ai choisi le musée ! Des regrets ? Non. Mais, après mon rattrapage sur petit écran, l'envie d'un Wenders XXL.

L'horaire idéal pour aller au cinéma ?
J'ai longtemps ciblé la séance du dimanche matin (au tarif réduit). Maintenant, je vise plutôt la fin d'après-midi ou le début de soirée. L'idéal étant d'en profiter à plusieurs, avant un petit resto en groupe !

La place idéale dans la salle ?
Au centre. Ni trop près, ni très loin de l'écran. Option B, quand la salle est petite: tout au fond ! Avec ma nostalgie... du bruit du projecteur.

Avant-programme... ou non ?
Bonbons, eskimos, chocolats ? D'accord. Bandes-annonces ? Mouais. Réclames ? Le moins possible. Mais il faut bien que les salles vivent...

Débat après le film... ou digestion en solo ?
Je préfère, non pas le débat, mais au moins un temps de discussion. Mais parfois, le silence s'impose pour me remettre de mes émotions. C'est aussi pour cela que je ne bouge souvent qu'à la fin du générique.

Le film que vous attendez le plus en salle ?
Côté cinéma français, à ce jour, je dirais sans doute Kaamelott. Maintenant, pour le cinéma dans sa globalité, je vais retenir le Dune de Denis Villeneuve. NB: je suis à l'arrêt depuis le 24 octobre dernier. Du coup, le film que j'attends le plus, c'est simplement... le prochain !

Quand je vais au cinéma...
Je suis heureux. Impatient que ça démarre. Un peu triste et pressé d'y retourner quand c'est fini. Curieux de voir ce qui viendra ensuite. Ravi, dans l'intervalle, d'en (re)parler à mes proches, famille et amis mélangés ! Autant de moments dont je peine vraiment à me passer...

Votre première séance ?
C'est loin: elle remonte évidemment à mon enfance. Il est possible que ma mère m'ait emmené voir une série de courts dessins animés. Vers 7-8 ans, j'avais vu La guerre des boutons avec ma grand-mère. Et, au Grand Rex, le Robin des Bois du studio Disney avec ma tante !

----------
Fini ! On se retrouve demain ?

Je sais: ce sera la Fête du travail et donc LE jour férié de l'année. J'aurais pu attendre lundi. Mais j'ai envie de rebondir dans la foulée...

mercredi 28 avril 2021

Lyrique et sanglant

Dario Argento avait-il des comptes à régler avec le monde lyrique ? Peu avant qu'il ne tourne Opéra, le maestro italien avait été contacté par l'organisateur d'un festival, disposé à lui confier la mise en scène du Rigoletto de Verdi. Problème: il fut finalement écarté du projet. Comme si son commanditaire avait jugé ses images trop "baroques" !

De retour au travail, Argento rêve d'un film tourné à la Scala de Milan. Les lieux étant très occupés, l'opiniâtre Dario se rabat sur un théâtre moins connu: celui de Parme. Il s'y installe avec son univers effrayant et fantasmagorique, pour composer l'un de ses thrillers rouge sang. L'histoire tourne autour de Betty, jeune cantatrice que l'on charge soudain de remplacer au pied levé une diva victime d'un accident. Surprise pour elle: le soir de la première, la jeune femme triomphe. Elle semble avoir vaincu la malédiction supposée planer autour du rôle de la terrible Lady Macbeth (tel qu'imaginée par Verdi, tiens donc !). L'image que j'ai utilisée ci-dessus vous montre qu'elle déchantera vite: aussitôt après la représentation, un assassin entre dans sa vie et, après l'avoir attaquée et ligotée, la force à contempler le meurtre de plusieurs de ses proches. En un mot: Opéra vire au cauchemar. Sordide, la réalité rappelle à Betty une fragilité psychologique innée...

Face à pareil spectacle, il est difficile de ne pas grimper au rideau. Explicite, le film ne nous épargne pas grand-chose des supplices infligés aux personnages et nous plonge dès lors dans une atmosphère viciée, souvent irrespirable. Une précision: plus que la violence extrême qui surgit périodiquement, c'est bien l'angoisse qui domine. Les symboles du mal qui apparaissent à l'écran percutent la rétine avec force, mais les frissons viennent aussi de ce que l'on sent arriver ou même... de ce qui n'arrive pas. On pourra bien entendu déplorer que le long-métrage use d'effets "faciles", tous issus de la grammaire ordinaire des petits et grands cinéastes de l'épouvante: c'est vrai. Pour ma part, je n'y vois pas un réel problème: cette patte graphique m'apparaît plutôt comme une signature (ou une marque de fabrique). Le cinéma italien des années 60-70-80 y a repris un certain souffle. Bon... Opéra est peut-être arrivé un peu trop tard pour devenir culte. Longtemps inédit en France, il est aussi remis à l'honneur aujourd'hui grâce à la sortie - assez récente - d'une copie de sa version intégrale !

Opéra
Film italien de Dario Argento (1987)

D'abord destiné au marché américain, cet opus fut tourné en anglais et, chez nous, sortit tardivement sous le titre Terreur à l'opéra. Mouais... j'ai bien aimé, mais je le trouve tout de même plus faible que d'autres Argento: L'oiseau au plumage de cristal et Suspiria. J'avoue: je n'ai vu aucune des sorties récentes du genre horrifique. J'oserai donc, tout au plus, un parallèle avec le sépulcral Black swan !

----------
Pour trouver matière à un débat plus long...

Vous pourriez aussi (re)découvrir le bout d'une chronique de Vincent.

lundi 26 avril 2021

Au moins la fille

Elle a pris sa retraite cinématographique en mars 2018. Lui continue et a progressivement acquis une notoriété internationale, a fortiori depuis qu'il est passé dans les rangs des maîtres Jedi. Cameron Diaz et Ewan McGregor avaient 25 et 26 ans quand les salles ont accueilli mon film d'aujourd'hui: Une vie moins ordinaire ! Titre prometteur...

Modeste agent d'entretien, Robert est viré quand son patron décide soudain de le remplacer par un robot. Celine, la fille dudit patron, vit des jours tranquilles, lézarde au bord d'une piscine et se transforme parfois en Guillaume Tell féminin pour tirer sur une pomme plantée sur la tête du domestique option garde-chiourme placé à son service. Ces deux-là ne se seraient jamais rencontrés si, dans une rage folle après avoir été renvoyé sans préavis, Robert n'avait pas enlevé Celine pour se venger. Pour lui, c'est le début d'une autre forme d'existence ! On verra cependant qu'il existe des kidnappeurs bien plus "efficaces" que ce pauvre bougre. Et, de ce fait, on s'attachera à lui, peut-être...

J'avais un assez bon et vague souvenir d'Une vie moins ordinaire. Cette revoyure bientôt 24 ans après m'amène désormais à relativiser. Divertissant, le film n'a rien de très emballant: sa petite originalité repose surtout sur les deux personnages secondaires de la photo ci-dessus, O'Reilly et Jackson, joués par Holly Hunter et Delroy Lindo. Ensemble, ils traquent Cameron et Ewan pour une poignée de dollars. Et qui sont-ils, au juste ? Un indice chez vous: ce n'est pas un hasard si leur première apparition nous les montre tout de blanc vêtus. Serez-vous assez curieux pour découvrir le reste ? À vous de décider. Le film n'avait attiré qu'un peu moins de 294.000 spectateurs français lors de sa sortie cinéma - je m'attendais à un chiffre bien supérieur. Ce fut un échec économique: ses recettes de billetterie américaines n'ont même pas couvert la moitié de son budget. Mais aucun regret pour moi de l'avoir revu: c'est évidemment la nostalgie qui s'exprime !
 
Une vie moins ordinaire
Film américano-britannique de Danny Boyle (1997)

Révélé par Petits meurtres entre amis et Trainspotting, le cinéaste anglais s'exilait ici pour la première fois aux States, ses techniciens avec lui et ses convictions sous le bras. Bilan: un flop (ou presque). Pour le côté road movie, je préfère Thelma & Louise, d'assez loin. L'enlèvement ? C'est en général un sujet plus lourd au cinéma: un film comme Prisoners en témoigne aisément ! La piel que habito aussi...

----------
Et si jamais vous souhaitez prolonger le débat...

J'ai pu dénicher une autre chronique du film, à lire chez l'ami Laurent.

dimanche 25 avril 2021

Et les Oscars ?

C'est l'une des conséquences de la crise sanitaire: la plupart des films en lice pour les Oscars la nuit prochaine me sont totalement inconnus. Je zappe la cérémonie: mes heures de sommeil sont trop précieuses. Comme d'habitude, je mettrai à jour ma liste des lauréats, à droite. Faire un compte-rendu détaillé ne me fait pas très envie, cette fois...

Cette année comme en 2019, le film qui compte le plus grand nombre de nominations est une production exclusive Netflix: Mank, un biopic du grand scénariste américain Herman J. Mankiewicz (1897-1953). J'admets qu'a priori, je préférerais voir Nomadland, le nouvel opus de Chloé Zhao, six fois nominé et présenté tel le voyage dans l'Ouest américain d'une femme - Frances McDormand - après la crise de 2008. Bon... pour ce long-métrage, la cinéaste chinoise a déjà été honorée du Golden Globe du meilleur film dramatique et du Lion d'or à Venise. Pour l'instant, sa sortie en France est annoncée le 21 mai prochain. Cela nous laisse le temps de nous pencher sur le reste de la sélection !

----------
Une mise à jour (lundi, 8h50)...

Avec trois statuettes, Nomadland est vu comme le grand vainqueur de la cérémonie: meilleur film, meilleure réalisatrice pour Chloé Zhao et meilleure actrice pour Frances McDormand ! J'ai aimé le discours de la seconde: "Je vous demande de bien vouloir aller voir notre film sur le plus grand écran possible, a-t-elle dit. Et un jour, très bientôt, d'emmener toutes celles et ceux que vous aimez dans une salle sombre, serrés les uns contre les autres, pour regarder tous les films qui ont été présentés ce soir". Moi, j'y serai, à coup sûr... et vous ? Un constat: l'Académie a récompensé de nombreux films cette nuit. Mank, lui, obtient les Oscars de la direction artistique et de la photo !

vendredi 23 avril 2021

Parcours de réinsertion

J'aime bien le travail de Pierre Salvadori et ses personnages abîmés. D'aucuns présentent le réalisateur comme le meilleur auteur comique du cinéma français d'aujourd'hui. Avec son bon casting, En liberté ! m'inspirait confiance, mais disons-le aussitôt: il m'a (un peu) déçu. Comme si ce qui se passait à l'écran ne m'impliquait pas franchement.

Yvonne (Adèle Haenel) découvre que son mari, flic mort en opération, n'était en réalité qu'un ripou et lui mentait dès lors depuis sept ans. Elle-même dans les rangs des forces de l'ordre, elle s'efforce d'entrer dans la vie d'Antoine (Pio Marmaï), un pauvre bougre sorti de prison après avoir payé... pour ce qu'il n'a pas fait ! Problème: le gugusse paraît pour le moins perturbé par les conséquences de cette injustice flagrante. Il rentre enfin chez lui, mais sa femme (Audrey Tautou) parvient à peine - et difficilement - à calmer son humeur vengeresse. Et on est parti pour deux petites heures complètement loufoques ! Vous cherchiez un film crédible ? Il vaut mieux passer votre chemin...

"Le vraisemblable ne m'intéresse pas", dit Pierre Salvadori, ajoutant qu'il lui préfère la vérité (euh... celle de ses personnages, j'imagine). Le cinéaste s'autorise ici quelques ouvertures poétiques et a confié qu'il aurait volontiers écrit le scénario en vers, si ç'avait été possible. Il y a, oui, quelques jolies choses de cette nature dans En liberté ! Autre aspect: un étonnant jeu de miroirs entre les deux protagonistes principaux, Yvonne et Antoine, qui se courent après sans se trouver vraiment et vont traverser séparément des situations équivalentes. Très bien accueilli par la presse pro, le film n'a conquis qu'un public limité - en salles, un peu plus de 775.000 spectateurs, tout de même. On reste bien au-dessus de l'humour pipi-caca trop souvent pratiqué par mon cher cinéma français. Peut-être vous laisserez-vous tenter...

En liberté !
Film français de Pierre Salvadori (2018)

Le titre est bien choisi: nous avons bel et bien affaire à un cinéma affranchi de la routine ronronnante qui s'immisce parfois au coeur même de la production nationale. Cela dit, d'autres opus salvadoriens m'avaient davantage convaincu: je pense ainsi à Cible émouvante et/ou ...Comme elle respire, voire Dans la cour. Le temps passe ! Pour Pio Marmaï, je conseille aussi Felicità, coup de coeur de 2020...

----------
Notez que les avis sur mon film du jour sont nombreux...

Vous pourrez donc lire ceux de Pascale, Dasola, Laurent, Strum et Lui.

mercredi 21 avril 2021

La possibilité d'une île ?

Tout plaquer et partir vivre sur une île déserte: ce n'est pas mon rêve caché, mais c'est ce qu'a fait Martin Coutances, le héros de mon film de ce mercredi. Bien caché au beau milieu de l'océan, cet ancien "nez" de la parfumerie grassoise pensait être à l'abri des emmerdements. C'était avant que Nelly, une jeune tornade blonde, lui tombe dessus...

Je vous ai déjà dit tout le bien que je pense de Jean-Paul Rappeneau et de sa science du mouvement. Il apporte une (nouvelle) preuve éclatante de ce grand talent dans Le sauvage, son troisième opus. Comédie romantique 100% jubilatoire, le film n'a pas pris une ride depuis sa sortie en 1975. Cette année-là, il avait terminé huitième des longs-métrages français les plus appréciés. Il faut bien admettre que le duo Catherine Deneuve / Yves Montand a du chien et témoigne d'une complémentarité comique fort réjouissante. Les deux vedettes ont bénéficié d'un scénario enlevé, OK, mais leur abattage respectif fait beaucoup pour la sympathie que leurs aventures peuvent inspirer.

Restaurée il y a dix ans, le film est une pure merveille en couleurs. Évidemment, même en plans fixes, le réalisateur n'est pas manchot. Le sauvage a brigué quatre trophées à la toute première cérémonie des César. Qu'il en soit reparti bredouille ne le disqualifie aucunement parmi les très honorables représentants de notre cinéma populaire. Les dialogues de Jean-Loup Dabadie vous séduisent ? Je comprends parfaitement et vous recommande au passage de garder une oreille attentive à la bande originale, virevoltante et signée Michel Legrand. En somme, on a une réussite sur tous les plans, au charme inaltéré. Évoquant la restauration numérique jadis mise en oeuvre pour le son et l'image, Jean-Paul Rappeneau avait dit: "Je crois que le résultat sera magnifique. Le film tel qu'on ne l'aura jamais vu". Un vrai régal !

Le sauvage
Film français de Jean-Paul Rappeneau (1975)

Une surprise ? Non, mais une belle confirmation de mon grand plaisir pris avec les films de ce cinéaste. J'aimerais bien revoir des comédies de cet acabit dans les salles, de nos jours, et vous renvoie volontiers vers La vie de château pour un autre tandem Deneuve / Rappeneau. La screwball comedy américaine (New York - Miami) n'est pas loin. L'emmerdeur s'impose si vous aimez les enquiquineurs au masculin...

----------
Si vous voulez prolonger le plaisir...

Vous lirez un texte court chez Pascale et un autre, plus long, chez Lui.

lundi 19 avril 2021

Soudain le vide

Enfant, je lisais Spirou tous les mercredis, attendant impatiemment que mon père l'achète pour NOUS permettre d'enfin découvrir la suite de tel ou tel feuilleton dessiné. J'y ai découvert Soda, flic new-yorkais caché sous les oripeaux d'un pasteur, et le graphiste Bruno Gazzotti. C'est ce qui m'a conduit vers mon film du jour, Seuls, sorti en 2017...

Vous l'aurez compris: avant d'être un film, Seuls est d'abord apparu sous la forme d'une BD, scénarisée par Fabien Vehlmann et dessinée par Bruno Gazzotti. Une BD qu'à vrai dire, je n'ai encore jamais lue. C'est en somme à l'aveugle que je me suis intéressé à ce récit, inspiré d'un tout premier cycle (cinq tomes d'une série de douze à ce jour). J'ai alors rencontré Leïla, puis Camille et Terry, Dodji et enfin Yvan. Cinq adolescents qui, un beau jour, se retrouvent livrés à eux-mêmes dans une ville - la leur - qu'une épaisse fumée encercle de toutes parts et qui s'est... entièrement vidée de ses autres habitants ! Le mystère est total et le danger approche: les gamins semblent être poursuivis par un croque-mitaine expert en armes blanches. Je crois préférable de le révéler sans plus attendre: cette histoire a une tonalité sombre !

J'imaginais découvrir un teen movie: j'ai eu droit à un film de genre musclé. Les plus jeunes enfants ne sont sûrement pas le public visé ! La forme, elle, est particulièrement soignée: un démenti magistral apporté à tous ceux qui considèrent toujours que le cinéma français n'est pas assez fort pour créer des univers futuristes et anxiogènes. Malheureusement, sur cette base, la mayonnaise ne prend guère. Seuls n'est pas mauvais, mais je l'ai trouvé faiblard et décevant. Quelques poussées d'adrénaline ne cachent qu'à peine un scénario assez froid et (dé)cousu de fil blanc. Autre vrai souci: la conclusion n'en est pas une et laisse en fait imaginer que les producteurs du film pensaient à une suite - qui risque de ne pas voir le jour, compte tenu du score de ce supposé premier volet (355.565 spectateurs en salles). Bien sûr, que cela ne vous en détourne pas si le voir vous fait envie ! Qui sait ? Peut-être que les jeunes acteurs sauront vous encourager...

Seuls
Film français de David Moreau (2017)

Au moins le réalisateur est-il cohérent: en interview, David Moreau explique être "un grand amateur de fantastique, de SF et d'horreur". Je reste déçu du résultat, malgré de très belles choses sur le plan visuel. Tout cela m'a rappelé ma frustration devant La 5ème vague. L'angoisse des jeunes est plus prégnante dans L'heure de la sortie. Pour la solitude extrême, Le monde, la chair et le diable est à voir !

----------
Je n'ai pas la science infuse, mais...

L'ami Laurent et moi sommes - à peu de choses près - du même avis.

vendredi 16 avril 2021

Fuir Rome et...

Son titre français - en forme de clin d'oeil à Joseph L. Mankiewicz - aurait pu m'égarer: il semble en fait que La paysanne aux pieds nus soit surtout connu des cinéphiles sous son titre italien (La Ciociara). C'est un film que j'ai découvert par hasard, curieux toutefois de voir comment Sophia Loren jouait avec Jean-Paul Belmondo ! Oui, mais...

Sans vouloir faire offense au Français, il est clair que La paysanne... tourne surtout autour de sa star féminine italienne, dans le droit fil d'un scénario coécrit par l'auteur du roman originel: Alberto Moravia. L'histoire nous ramène en 1943, à Rome, sous les bombardements. Inquiète pour sa fille, Cesira décide de fuir la capitale et de retourner dans le village qui l'a vue naître. La jeune femme et l'adolescente entament un voyage périlleux, toutes seules: on apprend que l'époux de Cesira est déjà mort - l'idée que l'intéressée ait fait un mariage d'intérêt avec un vieil homme est émise dès les premiers dialogues. Bref... tout ce que la caméra nous montre alors, des conséquences tragiques de la guerre à l'opposition villes/campagnes, est crédible. Toutefois, le film n'est pas réellement issu de ce courant néoréaliste qui a tant fait pour la notoriété - et la grandeur - du cinéma italien des années 40-50. L'incontestable beauté de Sophia Loren, alors âgée d'à peine 26 ans, s'impose à l'écran, de manière quasi-ininterrompue. L'actrice obtiendra l'Oscar, ainsi que le Prix d'interprétation cannois...

D'aucuns ont dès lors considéré que la belle éclipsait ses partenaires. Derrière des lunettes, Jean-Paul Belmondo compose un personnage idéaliste et s'en sort honorablement, bien qu'il soit doublé en version originale. J'insiste toutefois: bien qu'assez décisif, ce protagoniste demeure au second plan. Pas sûr que je trouve cela si regrettable ! J'ai été touché par La paysanne... grâce à ce qu'il dit de la condition des femmes. En l'occurrence, je me dis que même le cadre historique pourrait être négligé: les comportements masculins que le film expose existent depuis la nuit des temps... et perdurent, aujourd'hui encore. Le fait que le long-métrage ait deux héroïnes n'a donc rien d'anodin. Bravo à la jeune Eleonora Brown ! Attention: relativement optimiste dans sa première partie, le récit est bien plus sombre en conclusion. Les toutes dernières séquences renversent ainsi violemment l'espoir d'un bonheur retrouvé et le plan final, bien qu'intimiste, frappe fort. Ultime précision: j'ai ici découvert une page très sombre de l'histoire de l'armée française. C'est aussi, je crois, ce que je voudrai retenir...

La paysanne aux pieds nus

Film italien de Vittorio de Sica (1960)
J'aime de plus en plus le grand cinéma italien classique, qui "bataille" avec son homologue japonais pour être le quatrième le plus évoqué sur ce blog. Mon film du jour m'encourage vraiment à aller plus loin. Vous préférez le néoréalisme ? Le voleur de bicyclette reste un must chez Vittorio de Sica (et j'ai également prévu de voir Umberto D. prochainement). Le même cinéaste a été plus mordant avec Il boom !

----------
Pour conclure, un peu de géographie...
Wikipédia indique que la Ciociara est le nom péjoratif qui était donné à une région pauvre de l'Italie, située au sud-est de Rome. Le régime fasciste l'utilisait pour parler de la province de Frosinone. Le terme est tiré de ciocia, qui désigne la chaussure traditionnelle des bergers.

Et vous voulez un autre avis sans attendre ?

J'en ai trouvé deux, pour tout dire assez nuancés, chez Eeguab et Lui.

mercredi 14 avril 2021

Ex-fan des eighties

La fréquence de mon intérêt pour les films popcorn des années 1980 m'incite aujourd'hui à vous en présenter deux d'un coup. Le premier restait un souvenir d'enfance, mais je n'avais jamais vu le second. Sans doute ferai-je encore d'autres séances de revoyure / rattrapage. Cela atténuerait un peu ma morosité quant au sort actuel du cinéma !

Golden child, l'enfant sacré du Tibet
Film américain de Michael Ritchie (1986)

J'en conviens: le pitch de ce truc est tout à fait abracadabrantesque. L'histoire commence par l'enlèvement d'un gamin dans un monastère himalayen. Ledit jeune marmot étant en réalité une sorte de divinité bienveillante, il s'avère que le kidnapping a été commis par une bande de démons à la solde d'une créature infernale plus puissante encore. Bon... si vous avalez ça, vous devriez aussi accepter que le monde puisse être sauvé par un détective californien joué par Eddie Murphy. Que dire de plus ? Que le film est un peu ridicule ? Soit. J'ajouterai que son humour est foireux et que, sur le plan technique, ses effets spéciaux sont ultra-dépassés. Ma note "correcte" s'explique par le fait que j'étais à peine plus vieux que le petit héros quand j'ai découvert ce machin. J'en avais gardé une image: celle d'une canette de Coca transformée en mini-danseur de métal. C'était du Pepsi, en réalité ! Et je me dis que rares sont ceux qui apprécieront la saveur en 2021...

L'aventure intérieure
Film américain de Joe Dante (1987)

Là, pour moi, c'était donc de l'inédit. Je me suis alors rendu compte que j'avais confondu le titre avec celui d'un autre long-métrage américain sorti quelques années plus tard: L'expérience interdite. Bref... ici, il est question d'un jeune officier de marine si arrogant qu'il est détesté par ses collègues et même largué par sa petite amie. Ce qui ne l'empêche pas d'être le cobaye volontaire d'une expérience scientifique devant le conduire à explorer le système vital d'un lapin. Comment donc ? En étant miniaturisé, puis placé aux commandes d'une capsule microscopique et injecté à l'intérieur du rongeur, pardi ! Évidemment, ça ne se passera pas selon le plan prévu: je passe allégrement sur les détails et vais juste souligner le caractère foufou de cette gentille comédie - où Dennis Quaid côtoie la jolie Meg Ryan. Tout cela est très rondement mené... et produit par Steven Spielberg. Conseils: aller lire la chronique de Lui et consulter la vidéo de Vincent.

----------
Bilan: la nostalgie n'est plus ce qu'elle était...

Vous l'avez compris: aucun des deux films ne m'a absolument emballé. Je ne regrette cependant pas de leur avoir (re)donné une vraie chance et reste donc preneur de vos recommandations 100% eighties. Go go !

lundi 12 avril 2021

Un autre Eldorado

"Enfant du soleil / Ton destin est sans pareil / L'aventure t'appelle. N'attends pas et cours vers elle". Si vous n'aviez qu'une dizaine d'années en 1982-1983, il est fort possible que ses paroles résonnent dans votre esprit. Le manga Les cités d'or a rendu l'Eldorado familier à nombre de gosses de ma génération. Et moi ? Je ne l'ai jamais vu...

Cette ouverture en forme de trompe-l'oeil pour vous parler aujourd'hui d'un autre "dessin animé", récent celui-là: Pachamama. Ce joli film d'animation nous conduit tout droit vers l'un des lointains territoires d'Amérique du Sud, au 16ème siècle, sous l'autorité d'un chef inca. L'occasion de faire connaissance avec Tepulpaï et Naïra, deux enfants que la communauté des "grands" de leur village andin doit admettre en son sein, juste après leur participation à un rituel de passage. Dans ce monde harmonieux, ils se doivent d'être dignes d'une divinité nourricière, en lui offrant sans hésiter ce qu'ils ont de plus précieux. Présentée ainsi, la tradition semble brutale, mais le film ne l'est pas. Au contraire, il donne de la vie des gens modestes une image colorée et joyeuse, soulignant que la nature rend au centuple les attentions que les hommes peuvent avoir pour elle. Idéalisme ? Sans nul doute. Destiné aux jeunes générations, le message reste toutefois justifié...

Bien qu'assez doux dans son ensemble, Pachamama a aussi une part de noirceur. Au cours du récit, les deux petits héros croisent la route d'êtres malfaisants, parmi lesquels une troupe de vils conquistadors fraîchement débarqués de leurs vaisseaux. Je me dis que les images dessinées atténuent probablement la violence de leurs exactions et, du même coup, la crainte que de jeunes enfants pourraient ressentir devant pareil spectacle. Pour ce qui est des adultes, la leçon d'histoire n'est pas inutile - et ce d'autant qu'elle est délivrée dans un film français et francophone, certes, mais dont l'auteur est de nationalité argentine. Bon... je vous rassure: tout cela n'est pas sentencieux. Pour preuve, au plaisir visuel s'associe celui du son, avec une musique originale de grande qualité (signée d'un dénommé Pierre Hamon). Résultat: on découvre un bel hommage aux peuples précolombiens. Est-il historiquement fondé ? J'avoue que je ne m'en suis pas soucié...

Pachamama
Film français de Juan Antin (2018)

Un programme familial: je pense qu'il peut favoriser un joli dialogue entre les générations, pour peu qu'on s'intéresse un peu à son sujet. Autre option: se contenter du "bon divertissement" - c'est déjà bien. Je vais être clair: j'ai préféré Le garçon et le monde, qui parle aussi de l'Amérique du Sud, du Brésil pour être précis... mais d'aujourd'hui. NB: sauf oubli, je n'ai vu aucun autre film d'animation sud-américain !

samedi 10 avril 2021

Les nouveaux aventuriers

Qui n'a jamais rêvé d'être riche à millions pour tout plaquer et partir vivre sur une île au soleil ? C'est le fantasme absolu mis en images dans Le ruffian, l'un des jolis succès publics du début des années 80. L'air de rien, c'est l'un des derniers films avec le grand Lino Ventura ! Cela valait sans doute bien ce regard en arrière, un peu nostalgique...

Aldo est très copain avec Gérard, un ancien pilote auto hémiplégique. Gérard, lui, est très amoureux d'Éléonore, une jolie Québécoise venue en France pour les vacances. Il n'y a toutefois pas de rivalité affective entre les garçons, puisqu'Aldo flirte plus ou moins avec la tenancière d'un bar chic, que ses amis - et ses employés - appellent la baronne. Pour subvenir à ses besoins, Aldo travaille dur dans une mine d'or canadienne, bientôt attaquée par un groupe de bandits des griffes desquels il échappe par miracle, en compagnie de deux collègues assez louches. Je vous passe les détails: avant de fuir le continent américain, il a mis plusieurs pépites en sûreté et, de retour sur le sol européen, il veut motiver ses vieux amis à retourner les chercher. Vous l'aurez compris: ainsi que son titre peut le suggérer, Le ruffian tient bien du film d'aventures "à l'ancienne", placé dans des paysages dépaysants. Avec, en cerise, Bernard Giraudeau et Claudia Cardinale !

J'avais tout juste huit ans quand tous ces personnages sont apparus sur les écrans français. Il me semble avoir lu que c'est José Giovanni lui-même qui sut convaincre le réalisateur d'adapter son propre roman d'aventures, intitulé Les ruffians (au pluriel, donc). Une adaptation assez libre, paraît-il, dont on a préservé la belle histoire d'amitié collective. Pour être tout à fait clair, j'aime beaucoup le souffle d'espoir qui parcourt ce long-métrage, bien résumé par une réplique d'Aldo à sa tendre baronne: "
Tu sais, on a toute la vie pour s'amuser et toute la mort pour se reposer". Le ruffian est un film léger, oui. C'est un film qui ne se prend pas au sérieux - et ça fait un bien fou. Dans ce décor idyllique, j'ai par ailleurs été conquis par la bande originale: rien d'étonnant, en fait, puisqu'elle est d'Ennio Morricone. Notre temps paraît avoir renoncé à ce type de récits: c'est dommage. Quelque chose me dit que l'on gagne à revenir parfois à l'insouciance !

Le ruffian
Film français de José Giovanni (1983)

Je reparlerai très probablement un jour du parcours plus qu'étonnant du réalisateur, ex-condamné à mort devenu romancier et cinéaste. Avant cela, j'ai donc vu un film sympathique et fort divertissant. Assez proche dans l'esprit, avec Lino Ventura encore, mais de nature finalement plus sombre, j'avais vraiment apprécié Les aventuriers. Pas étonné d'y retrouver Giovanni, comme auteur du roman originel...

vendredi 9 avril 2021

Une histoire de chiffres ?

"Si c'est vraiment un si mauvais film, tu devrais alors te demander pourquoi autant de gens sont allés le voir !": toute personne qui aime échanger sur le cinéma a un jour ou l'autre entendu cet argument pseudo-définitif. Moi ? Je ne suis pas un grand suiveur du box-office. N'empêche: j'y jette un oeil parfois... dans une dimension historique !

Qu'est-ce qui pouvait attirer les gens dans les salles de cinéma hier ? Quel type de films les motive à présent ? Sans même vouloir revenir sur les effets de la crise sanitaire, je m'intéresse très objectivement à la manière dont les divers longs-métrages ont été "fréquentés" avant de débarquer sur nos petits écrans quotidiens. J'ai constaté qu'après trois années d'existence, le César du public - offert au film français à l'audience la plus large - n'a pas été décerné cette année. J'y vois un snobisme inconsidéré. Un rejet du public par l'institution...

OK, c'est vrai: Raid dingue, César du public 2018, ne m'attire guère. Les Tuche 3, consacré en 2019, pas davantage. Dans le système d'avant la pandémie, leurs succès auront au moins permis de financer d'autres films plus confidentiels (je n'aime pas tellement ce mot...). En 2020, l'Académie des César avait déjà changé la règle: on a voté pour désigner le lauréat du César parmi les cinq plus gros scores. C'est Les Misérables - 3ème sur la ligne de départ - qui a été élu. Tiens, tiens ! Il a doublé avec le César du meilleur film "tout court" ! Drôle de consensus, vous ne trouvez pas ? Le fruit d'étranges calculs. Cela rappelle la vaine opposition cinéma populaire / cinéma élitiste...

Tiens ! Voici la liste des cinq plus gros triomphes du cinéma français en France depuis que Mille et une bobines existe. J'en ai vu... quatre.
1. Bienvenue chez les Ch'tis (2008) : 20,4 millions d'entrées,
2. Intouchables (2011) : 19,4 millions,
3. Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu ? (2014) : 12,3 millions,
4. Rien à déclarer (2011) : 8,1 millions,
5. La famille Bélier (2014) : 7,4 millions.

Est-ce qu'il faut les bouder parce qu'ils cartonnent ? Je ne pense pas...

Je n'ai pas encore franchi le pas, mais il n'est pas exclu qu'un jour prochain, je dote ce cher blog d'une rubrique consacrée au box-office. Comme je le disais au début, c'est au moins à mes yeux un indicateur historique du goût des gens à une époque donnée. Il peut se combiner avec beaucoup d'autres, bien sûr, et dès lors donner matière à débat. J'ai mis une photo de Titanic car, à ce jour, c'est encore ce beau film sorti en 1998 qui domine le classement français "de tous les temps" avec ses 20.634.793 entrées. Je relève que l'Amérique triomphante place ici quatre autres de ses représentants dans le top 10: Avatar pointe à la sixième place, devant Autant en emporte le vent (7ème), Les dix commandements (9ème) et Ben-Hur (10ème), des classiques qui ont certes peu - ou pas - dû subir la concurrence télé et Internet. Je le dis sans aucune nostalgie, car j'aime presque tous les cinémas. Et j'ai même déjà décidé de continuer à vous en parler ! Dès demain !

----------
Pour autant, la discussion sur le sujet n'est pas close...

Je me propose de la poursuivre avec vous en section "commentaires".

mercredi 7 avril 2021

Comme dans un rêve

J'avais depuis longtemps l'envie de me replonger dans la filmographie de David Lynch. C'est donc sans (trop) hésiter que j'ai saisi l'occasion de découvrir l'une de ses oeuvres emblématiques: Mulholland Drive. Présenté à Cannes il y a vingt ans, le film en était reparti avec le Prix de la mise en scène. Il reçut aussi un César du meilleur film étranger !

David Lynch n'a pas pour habitude de livrer des clés d'interprétation pour aider à mieux analyser son travail. Il a dit de Mulholland Drive qu'il s'agissait en fait d'une "histoire d'amour dans la cité des rêves". Parlait-il de Los Angeles ? Le doute est permis. Si l'histoire se déroule là-bas et plus précisément à Hollywood, les images du long-métrage sont presque constamment oniriques ou, en tout cas, peu explicites sur la frontière entre les songes et la réalité. C'est ainsi que le récit nous entraîne d'abord aux côtés de la brune Rita, victime amnésique d'un accident de la route. Puis, nous faisons également connaissance avec la blonde Betty, venue occuper la villa de sa tante en Californie dans l'espoir de passer des castings et de devenir une star du cinéma. Tout n'est-il qu'illusion ? C'est ce que suggère l'un des personnages annexes, tel un porte-parole du magicien caché derrière la caméra. Autant le dire: vous n'êtes assurément pas au bout de vos surprises...

Notre ami cinéaste dit aussi que, comme la musique, le septième art doit - notamment - être appréhendé par les sensations qu'il procure. Les dialogues ne sont pas les uniques outils à utiliser pour décrypter ou simplement apprécier ce qui peut se passer à l'écran. Il s'agit donc d'en utiliser d'autres pour accéder à une "compréhension intime" (sic) de ce qui nous est montré. Bon... ce n'est pas forcément aussi facile ! Mulholland Drive est un film dans lequel on se perd aisément. Interloqué, j'y ai pris un certain plaisir: cela me semble important. Logiquement, étant donné que l'on nous invite à suivre une femme ayant perdu jusqu'à la mémoire d'elle-même, un sentiment d'empathie doit naître chez les spectateurs à l'égard de ce personnage. L'intrigue est beaucoup plus complexe, à vrai dire, et mobilise d'autres cordes sensibles: il arrive que le film inquiète, effraie ou, parfois, fasse rire. Je rejoins bien volontiers ceux qui le présentent comme un puzzle éparpillé, mais j'ajoute qu'il n'y aurait même pas de modèle à suivre. Alors, instrument de prise de tête ou chef d'oeuvre ? À vous de voir...

Mulholland Drive
Film américain de David Lynch (2001)

Je mets une très bonne note au film, avant tout parce qu'il m'a révélé que je pouvais apprécier les mystères lynchiens et donc donné envie d'y retourner encore. Les films incompréhensibles, avec moi, ça passe ou... ça casse: j'ai bien aimé Inherent vice, défendu Oncle Boonmee et mal digéré 9 doigts. Et Les garçons sauvages ? Un rejet total. Pour démarrer "tout doux", côté américain, testez donc Le plongeon !

----------
Et si vous voulez mieux cerner mon Lynch du jour...

Vous trouverez sans mal de nombreux textes d'exégèse sur Internet. Pour ma part, je vous signale juste la chronique de "L'oeil sur l'écran". Mais le film en a aussi hanté d'autres: Pascale, Dasola, Vincent, etc...

lundi 5 avril 2021

La mort en coulisses

Directeur d'un théâtre parisien, Paul Rémi est anonymement accusé d'avoir entraîné la mort de son associé en le poussant d'une passerelle située au-dessus de la scène. Son épouse lui suggère l'internement dans une clinique psychiatrique pour se soustraire aux investigations de la police. Je ne suis pas convaincu que ce stratagème fonctionne...

L'une des - bonnes - raisons de regarder Les intrigantes en 2021 pourrait être d'y voir Jeanne Moreau, 26 ans, dans le rôle de la femme fatale. Elle est le visage le plus connu d'une distribution très décente pour son époque, avec en outre Raymond Pellegrin, Robert Hirsch, Jacqueline Maillan et Louis de Funès, tout en mimiques dans l'habit étriqué d'un auteur capricieux et peu inspiré. Le scénario du film demeure à mon sens trop sage, malgré un point de départ intéressant et deux / trois rebondissements inattendus. Je dois bien vous avouer que je reste sur un léger sentiment de déception: le suspense attendu n'était pas au rendez-vous. Et les frissons, du coup ? Pas davantage...

J'avais espéré davantage de noirceur... et d'autres morts, peut-être. Le problème est que le meurtrier supposé n'inspire guère ni l'effroi véritable, ni la sympathie macabre: n'eut été la petite ambiguïté soulevée par le comportement de sa femme, on serait resté très loin des classiques du film noir. Oui, Les intrigantes est un très bon titre pour un polar, mais ses promesses ne sont pas tenues: toute l'affaire étant résolue en une petite heure et demie, la tension fait long feu. C'est comme si le réalisateur n'avait pas su choisir entre la facette policière de son récit et la possibilité de montrer comment un théâtre fonctionne. Reste une surprise: le film n'est pas dépourvu d'humour. On peut parler de comique de répétition: un personnage secondaire revient régulièrement à l'écran avec l'intention de parler à Paul Rémi. Maintenant, à vous de découvrir en quoi son rôle sera déterminant ! Cela suffira-t-il à vous épargner un ennui (poli) ? Je n'en jurerai pas...

Les intrigantes
Film français d'Henri Decoin (1954)

Trois étoiles pour le film et une demie en bonus pour le joli casting. Sincèrement, je ne pense pas pouvoir monter plus haut. Le quotidien d'une salle de spectacles en coulisses est beaucoup mieux raconté dans French Cancan, sorti la même année, avec en prime la couleur. Mieux vaut revoir Jeanne Moreau dans Ascenseur pour l'échafaud ! Pour la tension, Le corbeau et Les diaboliques feront bien l'affaire...

----------
Le film est semble-t-il un peu oublié, mais...

Vous en lirez au moins une autre chronique grâce à "L'oeil sur l'écran".

dimanche 4 avril 2021

Isabelle A.

Isabelle Adjani m'est souvent apparue comme un être insaisissable. Lire les grandes lignes de sa carrière - débutée au cinéma dès 1970 - permet cependant d'apprécier à quel point elle peut être une artiste accomplie, active également sur les planches des théâtres, les scènes musicales, les podiums de la mode. À 66 ans bientôt, je dis chapeau !
 
Sa longue présence sur les écrans a déjà fait d'elle l'une des stars françaises les plus honorées: il ne faut pas oublier qu'à son palmarès figurent - entre autres - cinq César, deux Prix d'interprétation cannois et un Ours d'argent (Berlin). De quoi inspirer le respect de ses pairs. Pourtant, je n'ai pas le sentiment qu'elle soit vraiment la plus aimée de nos grandes dames du cinéma - et même parmi sa génération. L'avoir revue, si sincère et si engagée, dans le film que j'ai présenté avant-hier a fait tilt: elle mérite sans doute d'être mieux considérée. Je note au passage qu'elle est tout de même chevalière de la Légion d'honneur et, au surplus, commandeure de l'ordre Arts et des Lettres !

Assurément, je suis encore loin d'avoir vu la totalité de ses films. Pour mémoire, voici une petite liste de ceux que j'ai déjà chroniqués:
- L'histoire d'Adèle H. / François Truffaut / 1975,
- Le locataire / Roman Polanski / 1976,
- Driver / Walter Hill / 1978,
- Nosferatu, fantôme de la nuit / Werner Herzog / 1979,
- L'été meurtrier / Jean Becker / 1983,
- Mammuth / Benoît Delépine et Gustave Kervern / 2010,
- Raiponce / Byron Howard et Nathan Greno / 2010,
- Le monde est à toi / Romain Gavras / 2018.

Cette filmographie est variée: je m'y confronte dès lors avec intérêt !

----------
Pour cela, j'ai besoin de vous...

Tous vos conseils (de films ou d'autres formes artistiques, d'ailleurs) sont bons à prendre. Je vous invite également à m'indiquer ci-dessous si vous auriez pu dire que la comédienne "interprète fréquemment des personnages névrosés" et "est reconnue pour la dévotion totale qu'elle accorde à son jeu et l'empathie extrême qu'elle revendique pour chacun de ses personnages". C'est bien ce qu'affirme Wikipédia !

vendredi 2 avril 2021

À cause des glaçons

Quelle drôle d'idée ! Pour enfin tourner le dos à ses petites combines comme un adulte raisonnable, François / Farès cherche un vrai boulot et entreprend dès lors de devenir le distributeur exclusif au Maghreb de la marque... Mister Freeze, spécialiste des glaçons aromatisés ! Seul souci: sa propre mère a dilapidé l'argent qu'il comptait investir...

À l'évidence, ce n'est pas tous les jours que l'on tombe sur un film français proche de Le monde est à toi, tout à la fois un peu régressif et d'une fraîcheur réjouissante, à l'image finalement de la friandise suscitée. Réalisé par le fils du célébrissime Costa-Gavras, cet OFNI déboule sur les écrans, porté par une distribution forte en gueule(s). Dans le rôle principal, Karim Leklou donne ainsi la réplique à des stars épatantes d'engagement comique: rien de moins qu'Isabelle Adjani, Vincent Cassel, François Damiens et Philippe Katerine, pour ne citer que les plus illustres. En résulte un machin 100% barré, entre pur film de gangsters et escapade aux côtés des petites frappes de banlieue...

Mieux vaut éviter de prendre tout cela trop au sérieux, à mon avis. J'ai noté que le réalisateur disait avoir voulu "jouer avec le genre". Quitte à ruer dans les classiques: "Les malfrats mystérieux, la classe, le code d'honneur... ces notions me donnent envie de me pendre. Très loin de la réalité, c'est selon moi une mythologie que le cinéma a créée de toutes pièces". Romain Gavras dit toutefois s'être inspiré de faits réels, relatés par deux amis, l'un avocat, l'autre journaliste. "L'univers de la petite voyoucratie appelle davantage à la comédie qu'au film noir, a-t-il alors expliqué. C'est au travers de ces histoires qu'un univers bien moins glamour que le cinéma de genre a l’habitude de le peindre a vu le jour". D'où le fait que le principal protagoniste n'aspire pas à imposer sa loi, mais d'abord à mener une vie rangée dans un petit pavillon. Je vous laisse découvrir ce qu'il advient alors de cet idéal et juger du coup de la justesse des moyens mis en oeuvre pour s'en approcher. Je le redis: Le monde est à toi n'est pas un film ordinaire. Et pour être clair, cette originalité fait grand plaisir à voir !

Le monde est à toi
Film français de Romain Gavras (2018)

Depuis La haine et avec aujourd'hui Les Misérables, le regard porté par le cinéma français sur la banlieue me semble teinté de violence. Pas cette fois: en adoptant un tout autre ton, cet opus fait mouche. Cela ne donne pas la comédie du siècle, mais un long-métrage atypique - et qui vaut le détour, donc. Tout ce qui brille et La lutte des classes restent (trop ?) sages ! Et Mercuriales ? À vous de voir...

----------
338.992 spectateurs ont vu le film dans une salle française...

Pascale en fait partie et ne m'a pas attendu avant de vous en parler. Vous verrez: elle évoque "une vraie réussite à ne surtout pas bouder".