lundi 17 février 2025

Le théâtre en utopie

La guerre, toujours. Le Proche-Orient traverse des heures si terribles que je ne me hasarderai sûrement pas à conjecturer sur son avenir. Je suis allé voir Le quatrième mur, qui nous replonge dans le passé de cette région du monde en évoquant le Liban de 1982 et 1983. Enfant à l'époque, les événements d'alors me sont presque inconnus...

Le quatrième mur
les évoque pour partie, mais ce n'est pas un film historique. C'est une fiction qui imagine qu'un homme de théâtre français décide de rejoindre un Beyrouth déchiré par la guerre civile pour y monter une pièce emblématique: Antigone, de Jean Anouilh. Son espoir: pouvoir s'appuyer sur une troupe de comédiens locaux issus de l'ensemble des communautés habituellement considérées comme rivales (pour ne pas dire ennemies). Concrétiser cette utopie humaniste relève de la gageure, mais un premier groupe est constitué et donne de facto de bonnes raisons d'y croire. Je veux vous prévenir que rien ne sera simple, toutefois: dès les premières images, le film est très explicite sur les violences que le Liban subit au quotidien. Intelligemment, il ne désigne pas de responsable. Son personnage principal - qu'incarne un excellent Laurent Lafitte - n'y comprend rien. Le scénario, lui, montre des faits et n'en accuse personne. C'est fort !

Je dois admettre qu'au départ, je ne m'étais pas imaginé une histoire aussi puissante. L'est-elle parce qu'elle est issue de la littérature ? Chacun de vous en jugera selon ses convictions quant au pouvoir évocateur du cinéma. Je rappelle simplement ici que le long-métrage adapte le roman éponyme de Sorj Chalandon, aujourd'hui disponible au Livre de Poche et d'abord publié aux éditions Grasset, dès 2013. L'auteur, ex-reporter de guerre, ne témoigne pas d'éléments précis qu'il aurait découverts sur le terrain. Il a choisi la forme romanesque pour exprimer ce qui lui était trop douloureux pour être retranscrit dans un article de presse. De mon point de vue, le film rend ce récit quelque peu plus accessible, même s'il faut certes avoir le coeur plutôt solide pour apprécier Le quatrième mur à sa juste valeur. Argument positif: il ne cède rien au pathos et aux émotions "faciles". Appuyé sur de très bons acteurs, dont un Simon Abkarian au charisme toujours envoûtant, c'est en n'enjolivant rien que le film bouleverse. Suffisamment pour m'encourager à creuser le sujet. Avec des livres...

Le quatrième mur
Film français de David Oelhoffen (2025)

Oui, je monte jusqu'à la note presque maximale pour rendre compte de la claque ressentie à la vision de ce film (jusqu'à sa conclusion). Merci au réalisateur - dont j'ai aussi apprécié le Loin des hommes. J'imagine qu'il n'aura pas un grand succès et je trouve cela dommage. Bref... j'avais ressenti des émotions comparables avec Le déserteur. Et à l'époque, je citais aussi Nezouh - qui tient davantage de la fable.

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Pour être complet...

Vous pouvez lire la chronique de Pascale, presque aussi enthousiaste.

samedi 15 février 2025

Dans le grand bain

Nouveaux espoirs sociétaux ? Désenchantement et retour à la réalité ? Je crois encore manquer de recul pour bien cerner les années 1970. Cette décennie - qui m'a vu naître - me semble un peu moins joyeuse que sa devancière. C'est en somme dans cet état d'esprit interrogatif que j'ai découvert un film qui m'attirait depuis des lustres: Deep end.

Mike a 15 ans, un âge auquel les autres garçons se moquent de lui parce qu'ils supposent qu'il n'est encore jamais sorti avec une fille. Mike en fréquente pourtant une, Susan, qu'il sait un peu plus âgée que lui et qui l'accueille à la piscine où il a pu trouver un petit boulot. D'abord mal à l'aise, l'ado apprend le métier et tombe sous le charme de sa collègue, développant alors rapidement un ressentiment jaloux exacerbé à l'égard des diverses fréquentations masculines de la belle. Plutôt confiante, la jeune femme ne manque certes pas d'ambigüité...

Deep end construit en somme un double portrait et adopte un ton badin qui semble être celui de la naissance d'une prime amourette. Sauf que ce qui pourrait être positif dans cette histoire fait long feu. Le vieil établissement de bains qui sert de cadre aux personnages apparaît vite comme un lieu hostile, dont ils sont en fait prisonniers. Les couleurs vives de ses murs entretiennent quelque temps l'illusion d'un possible bonheur, mais c'est un drame qui se joue sous nos yeux. L'humour de certaines scènes n'atténue qu'en partie la dimension pathétique - voire tragique - de l'ensemble. Imaginé par un cinéaste polonais de 32 ans en quête de liberté, le film témoigne d'une époque de transition pour sa jeunesse. C'est la première fois que son auteur obtenait une reconnaissance internationale. J'en reparlerai sûrement !

Deep end
Film britannique de Jerzy Skolimowski (1970)

Il aura aussi fallu trouver des producteurs (et donc quelques acteurs) ouest-allemands pour financer ce projet, pour partie tourné à Munich. Présenté à la Mostra de Venise, il y avait rencontré un succès critique et public indéniable, avant d'étrangement disparaître des écrans jusqu'en 2011, date de sa restauration. La pauvreté de l'Angleterre évoque celle de Naked ou de Fish tank. À voir et revoir aujourd'hui...
 
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Pour finir, pas de liens, mais une anecdote...

Né à Londres en 1953, John Moulder-Brown, le jeune acteur principal de cet opus, donne la réplique à Jane Asher, de sept ans son aînée. Jusqu'en 1968, la comédienne fut la compagne de Paul McCartney. C'est pourtant Cat Stevens qui signe la chanson prémonitoire du film !

mercredi 12 février 2025

Enfermements

Elle s'appelait Mahsa Amini et aurait dû fêter son 23ème anniversaire le 20 septembre 2022. Iranienne, elle est morte quatre jours plus tôt d'une hémorragie intracérébrale, après avoir été arrêtée par la police des moeurs, à Téhéran. Motif: "le port de vêtements inappropriés". Les graines du figuier sauvage nous ramène à ce drame effroyable...

J'avais laissé passer ce long-métrage, couronné du Prix spécial du jury à Cannes, l'année dernière. Ce que je vous en ai dit en introduction n'est pas tout à fait juste: plutôt qu'à la mort de Mahsa Amini, le film s'intéresse aux manifestations (et autres répressions) qui ont suivi. Encore faut-il préciser qu'il aborde cette question assurément sensible par le prisme d'une famille. Le père, Iman, a été nommé enquêteur. Logiquement, sur sa lancée, il pourrait donc devenir juge d'instruction et, sans plus guère attendre, bénéficier d'avantages professionnels certains - un appartement de fonction plus spacieux, par exemple. Conséquence évidente: sa hiérarchie attend de lui un comportement irréprochable. Sa femme et ses filles, elles aussi, doivent s'inscrire dans cette logique étatique d'exemplarité. Convaincue du bien-fondé d'une telle ligne de conduite, la mère, Najmeh, la rappelle chaque jour à son aînée, Rezvan, soucieuse de son influence sur sa soeur, Sana. Inquiète aussi à l'idée que les deux ados puissent s'attirer des ennuis qui fragilisent la carrière de leur père. Ce qui fait monter la tension...
 
Déjà mis en prison et à chaque fois sous la menace de voir ses films censurés, le réalisateur vivrait à présent en exil, en Suisse. Il tourne dans la clandestinité: "Des solutions peuvent toujours être trouvées". D'après lui, "il ne fait aucun doute que la restriction et la suppression de la liberté d'expression ne peuvent être justifiées". Il s'est présenté dans de très nombreux festivals et y a témoigné de ses difficultés concrètes, pour recruter des acteurs et des techniciens, notamment. "Je ne suis pas le seul à en subir, lance-t-il. Mes collègues cinéastes sont soumis aux mêmes circonstances et à lourde pression des forces de sécurité". Cette constante oppression et le climat de paranoïa qu'elle engendre nourrissent bien sûr Les graines du figuier sauvage. Beaucoup de scènes se déroulent à huis-clos et utilisent le hors-champ d'une manière très intelligente. Le monde extérieur, lui, a un rôle-clé à la toute fin du métrage - il est de nouveau question d'enfermement. Des images d'archives redisent alors combien la liberté est précieuse !

Les graines du figuier sauvage
Film iranien de Mohammad Rasoulof (2024)

Avec quelque 615.000 entrées, ce long long-métrage - 2 heures 48 ! - rejoint le podium des plus gros succès du cinéma iranien en France. Le numéro 1 reste Une séparation (2011), que je conseille aussi. Autre "bon plan": Un homme intègre, mon premier Rasoulof (2017). L'existence même de ces films nous laisse une petite lueur d'espoir. Pour retrouver la poésie, je recommanderais Au travers des oliviers.
 
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Vous voulez comparer mon avis à d'autres ?

Bonne idée ! Je vous suggère de lire ceux de Pascale et Princécranoir.

lundi 10 février 2025

Une femme amoureuse

Je le rattraperai sans aucun doute, mais un film de Federico Fellini m'est passé sous le nez. C'est en conscience que j'ai négligé l'occasion de découvrir l'un des tous premiers opus du maestro Luchino Visconti. Finalement, mon envie de renouer avec le cinéma italien classique m'a fait choisir un long-métrage "tardif" de Vittorio de Sica. Perfetto !

Vous les aurez reconnus: Les fleurs du soleil (ou I girasoli en italien) réunit Sophia Loren et Marcello Mastroianni, deux des stars majeures du septième art en Italie. Antonio a gagné quelques jours de répit avant de partir faire la guerre quand Giovanna a accepté de l'épouser. Puis, pour rester encore auprès de sa belle, il fait mine d'être fou ! Démasqué, il est envoyé sur le front russe. Mais, une fois la paix revenue, il ne réapparaît pas. Convaincue qu'il est toujours en vie quelque part en terre étrangère, Giovanna part donc à sa recherche. Et, un matin, elle rencontre un ancien compagnon d'armes d'Antonio. Je ne vous en dirai évidemment pas plus sur ce qui se passe ensuite. Si le parcours des acteurs vous intéresse, vous pourrez toujours noter que Sophia Loren a reçu l'un de ses sept Donatello - l'équivalent italien des César - pour ce beau rôle. Logique: c'est bien elle que la caméra va accompagner avec le plus d'attention. Et comme je la comprends...

Rassurez-vous: Marcello Mastrioanni ne passe toutefois pas inaperçu. Le pourrait-il seulement ? Je suis sûr que non. Son inégalable talent justifie en tout cas qu'on s'intéresse aussi à son personnage. Je crois qu'avec ce film et comme sa partenaire, il a fait ici ses premiers pas d'acteur dans l'ex-Union soviétique - grâce aussi aux coproducteurs russes, je suppose. J'ai apprécié le regard (presque) documentaire que De Sica porte sur le pays, dirigé à l'époque par Léonid Brejnev. Honnêtement, j'ignore si sa sympathie avérée pour l'idéal communiste lui a valu d'être mieux accueilli que d'autres: certains d'entre vous m'éclaireront peut-être sur ce point. Je n'ai rien vu de très militant. Les fleurs du soleil reste à mes yeux un mélodrame très consensuel sur la forme, que la musique de Henry Mancini vient encore sublimer. Les protagonistes apparaissent parfois minuscules dans des plans d'ensemble dont l'esthétique peut évoquer celle des chefs d'oeuvre figuratifs de la peinture. J'ai en outre pris une petite leçon d'histoire. Et dès lors, je ne regrette pas d'avoir fait attendre Fellini et Visconti !

Les fleurs du soleil
Film italien de Vittorio de Sica (1970)

Un couple séparé par la guerre et un film qui gagne à être connu. Inévitablement, j'ai pensé au superbe Quand passent les cigognes. Dans les pays vaincus, le retour à la vie est toujours plus difficile. Cela nous a offert des perles de cinéma. Je vous rappelle humblement que le duo Loren / Mastroianni illumine Une journée particulière. Pour rire, mais pas que, Mariage à l'italienne reste aussi à conseiller.

samedi 8 février 2025

Very bof trip

Le Nouvel Hollywood, vous connaissez ? De la fin des sixties au début des années 80, aux États-Unis, des cinéastes ont pris un ascendant certain sur les studios et osé travailler sur des thématiques nouvelles comme la sexualité, la violence et la place des peuples amérindiens. Certains films ont dès lors connu le succès, d'autres un échec cuisant !

C'est bien malheureux pour Dennis Hopper, mais son deuxième opus en tant qu'acteur-réalisateur est à classer dans la seconde catégorie. Curieusement, cette véritable "sortie de route" est arrivée deux ans seulement après l'une des productions les plus rentables du cinéma made in USA: Easy rider, mis en boîte pour quelque 500.000 dollars et qui en aurait rapporté plus de 60 millions. Bref... film déroutant voire mal maîtrisé, The last movie n'a pas connu la même destinée. L'histoire ? C'est celle d'une grosse équipe de cinéma partie des States afin de tourner un western au Pérou, dans un village de la Cordillère des Andes. Cela sera difficile et même dangereux: la cohabitation avec la population locale connaîtra en effet bien des soubresauts. Pourquoi ? Et la faute à qui ? À vous de voir le film pour le découvrir. Pour ma part, j'ai trouvé l'expérience très amère: le mouvement constant, le montage alterné passé / présent et le vil comportement des personnages m'ont déplu. Et je n'ai pas compris grand-chose. Après coup, j'ai constaté que ce soi-disant film culte était peu aimé...

The last movie
Film américain de Dennis Hopper (1971)

Douze minutes avant que le nom du réalisateur de cet OFNI apparaisse... et plus de vingt avant le titre: je respecte la volonté d'inventer un cinéma différent, mais elle se heurte à mon sentiment d'incompréhension. Je ne retiendrai que quelques très belles images. Parmi les créations Nouvel Hollywood, je préfère La dernière séance et La porte du paradis. Et il m'en reste certes beaucoup à découvrir !

vendredi 7 février 2025

Sur la bonne voix

"C'est dommage que tu l'aies regardé en VF": une phrase que j'ai lue dernièrement sur le compte Insta d'une jeune cinéphile qui évoquait avec franchise ses réserves sur Indiana Jones et le temple maudit. Or, je ne suis pas certain de l'avoir jamais vu en version originale ! J'ai pensé que cela pouvait devenir le sujet d'une (brève) chronique...

Dans la très grande majorité des cas, je regarde les films étrangers dans leur(s) langue(s) d'origine (avec sous-titres, bien évidemment). Il m'arrive de choisir la version doublée quand je ne suis pas seul devant l'écran et/ou quand je retrouve un film que j'avais découvert en français - certains avaient d'excellents comédiens de doublage. Parfois, je me demande aussi comment certains films francophones peuvent être traduits (exemple: Les tontons flingueurs ci-dessus). J'ai un vague souvenir d'un séjour en Allemagne dans une famille d'accueil où j'avais vu une adaptation de Jean Cocteau, Les enfants terribles, dans la langue de Goethe. Ce qui était plutôt... surprenant.

Le 5 du mois dernier, de nombreux passionnés de cinéma en France ont rendu hommage au grand Benoît Allemane, qui venait de mourir quelques jours après avoir atteint l'âge de 82 ans. Ce comédien méconnu du grand public - un "fourre-tout" dans lequel je me place volontiers - arpentait les planches depuis 1963 et a fait une carrière d'acteur épatante, au théâtre, donc, mais aussi au cinéma, à la télé et même sur le Web. La photographie ci-dessus (© Nicolas Abraham) date de 2015 et le présente dans une autre des activités artistiques qui ont jalonné son parcours: celle de doubleur. Son superbe timbre grave lui aura notamment permis d'être, à près de 50 reprises, la voix française d'un très célèbre confrère américain: Morgan Freeman. Comme vous pourrez aisément le vérifier, il avait un talent rare ! Mais j'avais prévu de faire court, ce vendredi, et je me disperse. Bilan: il est très probable que je revienne sur ce sujet un autre jour...

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Et en attendant...

Je suis évidemment curieux de votre position dans ce débat VO/VF. Et, si vous avez aussi une anecdote pour le nourrir, partagez-la donc !

mercredi 5 février 2025

En être ou ne pas en être

Je vous assure que ce n'était absolument pas prémédité ! Il se trouve que j'ai pu voir, coup sur coup, deux films dans le monde du théâtre. Aujourd'hui: Le beau rôle. Une comédie sur une histoire d'amour contrariée par le fait que les amoureux travaillent dans deux milieux différents. Et aussi un regard - pertinent - sur la création artistique...

Henri, comédien, joue à chaque fois dans les pièces mises en scène par Nora, sa compagne. Dès lors, quand la jeune femme monte Ivanov de Tchekhov, elle compte à nouveau sur lui pour être le personnage principal. Henri n'a pas dit non, mais problème: il a aussi l'opportunité de faire ses tous premiers pas au cinéma. Je vous laisserai découvrir comment il le dit à Nora, qui s'inquiète aussitôt... pour son spectacle.

Un acteur peut-il être simultanément en tournage et en répétitions ? S'engager dans un projet de longue haleine aux côtés d'une personne aimée conduit-il à une vraie trahison si on ne va pas "jusqu'au bout" ? Le beau rôle pose finement ces deux questions quasi-existentielles. Elles nourrissent un scénario qui est donc d'abord celui d'une comédie. C'est à mi-parcours que le ton se fait plus grave, sans que le film sombre pour autant dans le drame, cela dit. Je l'ai trouvé intelligent. Divertissant, bien ficelé et pile de la bonne durée pour convaincre ! Victor Rodenbach, réalisateur, signe son premier long, bien conseillé par sa compagne à lui, Pauline Peyrade, une talentueuse quasi-quadra que je connaissais en tant qu'autrice de théâtre. Vous aurez remarqué qu'une "doublette" du même genre est réunie à l'écran, Nora et Henri étant respectivement incarnés par Vimala Pons et William Lebghil. Tous deux inspirés, ils affichent même une complémentarité idéale. C'est en fait pour eux que j'ai voulu voir le film. Je ne suis pas déçu...

Le beau rôle
Film
français de Victor Rodenbach (2024)
Enfin un long-métrage mieux écrit qu'une franchouillardise lambda ! J'oserai même dire qu'il y a quelques très belles scènes de cinéma dans ce premier opus du jeune auteur (diplômé de la Fémis en 2012). Attention, un spoiler: certains l'ont perçu comme un lointain héritier des comédies de mariage de Hollywood, telles que New York - Miami ou Joies matrimoniales, par exemple. J'essayerai d'en voir d'autres...

lundi 3 février 2025

Ce soir au théâtre

Je le crois tout à fait sincère, mais je dis aussi que Quentin Dupieux est un "petit malin". J'apprécie et admire parfois ce drôle de cinéaste pour la concision de son propos, ainsi que pour son côté insaisissable. Est-ce un style ? Ou bien un nouveau système, si personnel soit-il ? Sincèrement, je suis intéressé et me pose la question à chaque fois...

Faute de trouver une réponse, je me concentre sur l'aspect ludique des créations de notre ami QD (à prononcer Kiou Di, pour la blague). Prenez Yannick, par exemple. Cet homme qui interrompt une pièce de théâtre de boulevard pour réclamer un spectacle qui le coupe enfin de ses idées moroses... oui, je le trouve incongru et plutôt amusant. Auprès de quelques amis artistes, j'ai - mieux - compris ce que l'art dit vivant comporte de risqué - et je sais que certains spectateurs expriment parfois leur désapprobation au milieu d'une représentation. Faire un film d'une heure cinq minutes là-dessus ? Oui, bonne idée ! Et même quand, après avoir été chassé de la salle, il fait demi-tour, monte sur scène armé d'un flingue et rédige un texte pour l'imposer finalement aux acteurs, ce Yannick m'apparaît crédible et dérisoire. Sauf que je suis quand même un peu gêné aux entournures, disons. Dupieux ne choisit pas de camp et j'ignore ce qu'il veut dire, au juste.
 
Quand je dis "petit malin", c'est parce qu'en disposant des indices contradictoires, Quentin Dupieux semble autant critiquer l'institution culturelle que moquer une partie du public. Il est tout à fait possible que je me prenne trop la tête et que je gagnerais à regarder ses films après avoir un peu mieux débranché mon cerveau 100% analytique. Avec Yannick, c'est vrai: je reste sur une impression assez mitigée. Et, sur le plan formel, je suis tout de même très largement conquis. La brièveté du film - une constante chez le cinéaste - est un plaisir qui se conjugue intelligemment avec celui des saynètes très étirées. On n'est pas pris pour des idiots, au contraire: des pièces de puzzle apparaissent et on nous laisse juger de comment elles s'emboîtent. Objectivement, ce cinéma-là reste franchement hors du commun ! C'est pourquoi, malgré mes réserves, je reste fidèle à son créateur. Qui trouve ici deux bons alter ego en Raphaël Quenard et Pio Marmaï.

Yannick
Film français de Quentin Dupieux (2023)

Ma note est sévère, mais témoigne sans doute du caractère urticant de certaines séquences du film (et de sa fin ?). Une comparaison m'apparaît possible avec Money Monster ou Cowboy - à vous de voir. Comme je l'ai écrit, je ne remets pas en cause la sincérité de l'auteur qu'est Dupieux. Je dirais juste qu'ici, il oublie vite deux protagonistes importants, Blanche Gardin et Sébastien Chassagne. Rien de grave...

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Sur la blogosphère, on en parle beaucoup...

Je vous renvoie donc aux chroniques de Pascale, Dasola, Princécranoir et Strum, ainsi qu'à celle d'Elle et Lui. Des avis (globalement) positifs.

samedi 1 février 2025

Dansons, maintenant !

Il faudra qu'un jour, je me penche plus longuement sur les liens professionnels qui ont pu unir (ou unissent encore) les professionnels du cinéma français à leurs homologues italiens. J'ai regardé Le bal début janvier - un exemple de coproduction italo-algéro-française. Une triple nationalité qui en a fait un film "à part". C'est une qualité !

César du meilleur film en 1984, un prix partagé avec le À nos amours de Maurice Pialat, Le bal est en fait l'adaptation cinématographique du spectacle éponyme du Théâtre du Campagnol, une institution privée du Sud parisien. Neuf femmes et onze hommes se regroupent pour danser et le spectateur est invité à reconnaître dans leurs pas plusieurs épisodes de l'histoire de France. C'est tout à fait évocateur pour qui a au moins quelques notions sur l'arrivée au pouvoir du Front populaire, l'Occupation, la Libération ou encore Mai-68, par exemple. Une petite précision: plus ou moins longues, les différentes saynètes se succèdent dans l'ordre chronologique, de simples photos sur le vif venant s'intercaler entre deux chorégraphies du film, sans paroles. Complète réussite ? Je ne suis pas aussi catégorique, à vrai dire. Mais j'ai assurément vu un vrai film de cinéma, avec quelques clins d'oeil amusants au septième art (et particulièrement à Jean Gabin). J'ai également apprécié les ruptures de ton, de la comédie burlesque assumée au drame discret. Et depuis, le temps a poursuivi sa route...

Le bal
Film italo-algéro-français d'Ettore Scola (1983)

Envie d'un diptyque ciné ? Je vous suggère Splendor du même Scola. Il se dit que, tombé malade pendant le tournage, le maître italien placé derrière la caméra avait vu Le bal lui échapper (en partie). L'Académie lui a toutefois remis son César de la meilleure réalisation. Point amusant: le film était aux Oscars sous sa bannière algérienne. Bon... je préfère Que le spectacle commence - opus 100% américain.

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Un contrepoint ?

Vous découvrirez une critique négative sur le site "L'oeil sur l'écran". Avec aussi un commentaire en réponse à l'un des défenseurs du film.

vendredi 31 janvier 2025

Quelque chose a survécu...

Je termine aujourd'hui mon intense mois de janvier "bloquesque" avec une suite: Aliens, le retour. Pour information, si j'ai un intérêt certain pour les quatre premiers épisodes de la saga, c'est notamment parce qu'ils ont chacun... un réalisateur différent ! Après le numéro 1 mis en scène par Ridley Scott, place donc à James Cameron, 32 ans...

Attention: si vous ignorez tout de cet univers et qu'il vous attire pourtant, le mieux est, je crois, de vous lancer avec le film de 1979 et/ou de lire ma chronique précédente. C'est bon ? Je résume vite fait en indiquant que, seule survivante de l'attaque d'un gros cargo spatial par un extraterrestre dégueulasse, Ellen Ripley (Sigourney Weaver) s'est plongée dans un sommeil profond pour ENFIN revenir sur Terre...

Aliens, le retour est la suite directe du premier volet, à l'image près. Quand l'héroïne se réveille de son coma volontaire, elle apprend vite qu'elle a dormi 57 ans. Le consortium qui l'employait jadis - en 2122 - existe toujours et a colonisé la planète hostile où elle avait débarqué. Mais il a perdu tout contact avec les familles installées par ses soins. Vous l'aurez deviné: Ellen Ripley est chargée de retourner sur place pour comprendre, accompagnée d'une escouade de marines bourrins et surarmés, prêts à éradiquer tout fléau qui viendrait à se présenter. Voilà donc toute la troupe partie pour un nouveau jeu de massacre. Pour ma part, j'ai vraiment aimé la suivre au fin fond de la galaxie. Tout ce qui va arriver est très prévisible, mais la virtuosité technique du film en fait encore une remarquable référence de science-fiction près de quarante ans après sa sortie. Très typés, ses personnages sont souvent charismatiques - Ellen Ripley en tête, bien entendu. Enrobé de la musique de James Horner, c'est un bien beau cadeau. Même certains effets un peu "old school" conservent un charme fou...

Aliens, le retour

Film américain de James Cameron (1986)

La Cinémathèque française a eu raison de consacrer une exposition au réalisateur canadien, qui signait là l'un de ses tous meilleurs opus. Une version longue livre quelques clés sur le thème de la maternité. Côté SF, Abyss et son voyage sous-marin gardent un peu d'avance dans mon Panthéon de cinéma, toujours dominé par l'inégalable E.T. ! Pour citer au moins un film plus récent, je dirais Blade runner 2049.

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Allez, une anecdote personnelle...
Il se trouve que j'ai eu un jour le privilège de suivre une conférence de Stan Winston, crédité ici comme réalisateur de la deuxième équipe et chargé des effets spéciaux. Je ne savais pas du tout qui il était ! Et, avec le recul du temps, je comprends mieux ceux qui l'admirent...

Et pour conclure, quelques liens utiles...
Ils vous renverront vers le blog d'Ideyvonne ou celui de Benjamin. Vincent, lui, était réservé sur Cameron. Il s'en est justifié posément. 

jeudi 30 janvier 2025

Un autre monde (ou pas)

J'ai, il y a peu, lu des choses très insultantes sur Adèle Exarchopoulos. Et, en prime, une affirmation selon laquelle elle n'aurait aucun talent ! J'en suis resté tout ébaubi, tant j'apprécie cette actrice. Et je suis content d'avoir pu voir Planète B, où elle joue l'un des deux rôles principaux. NB: l'autre a été attribué à la Suissesse Souheila Yacoub...

Nous sommes à Grenoble, en 2039. Des militants écologistes radicaux poursuivent une lutte armée contre les institutions et entreprises accusées de violer les accords de Paris sur l'atténuation et l'adaptation contre les changements climatiques, avec pour règle de conduite absolue de ne tuer personne - et donc de ne s'en prendre qu'aux biens. En face, la répression policière est forte et, un jour, un groupe d'activistes se retrouve soudain enfermé dans une prison virtuelle ! Dans le même temps, dans la réalité, une jeune réfugiée irakienne cherche une solution pour faire renouveler le QR Code qui lui permet de travailler comme femme de ménage et donc de rester en France. Science-fiction ? Hum... Planète B est plutôt un film d'anticipation. Rien ne dit que la France aura évolué ainsi dans quinze ans. Technologiquement et même politiquement, je continue de me dire que le pays n'en arrivera pas à un tel niveau de destructuration sociétale. Mais il est clair aussi que cette menace existe à mes yeux ! Et c'est bien entendu pour cela que le film m'a fait forte impression...

Sur le plan formel, tout n'est pas parfait, mais je ne suis pas certain qu'il aurait été utile d'augmenter le budget pour des rendus visuels encore plus spectaculaires. Planète B est aussi un film de décors. Peut-être saurez-vous reconnaitre certains lieux où il a été tourné. Grenoble en est un, mais il y en a d'autres et notamment un littoral méditerranéen - du côté du Var, sauf erreur (ou oubli) de ma part. C'est l'occasion de saluer le bon travail effectué lors des repérages. Autre atout du film: sa bande-originale, aussi futuriste qu'immersive. Je retiendrai qu'elle a été écrite par Bertrand Bonello, le cinéaste niçois, dont j'ignorais jusqu'alors la faculté de composition musicale. Mon bilan sera donc largement positif, avec un bémol pour le montage alterné, un peu trop télévisuel pour moi. Rien de rédhibitoire... ouf ! C'est un grand plaisir de voir que le cinéma de genre "à la française" continue de se développer et, je veux le souligner, que des femmes s'emparent de plus en plus de sujets longtemps réservés aux hommes. Même si l'égalité suppose de ne pas s'endormir trop vite sur l'acquis...

Planète B
Film français d'Aude Léa Rapin (2024)

Aïe ! Avec une sortie le 25 décembre sur 108 écrans, ce long-métrage intéressant n'avait clairement pas toutes les chances de son côté. Résultat: 20.776 pauvres entrées en première semaine d'exploitation. Il est vrai aussi que l'idée d'un futur sombre peut refroidir des ardeurs cinéphiles, au risque de zapper Bienvenue à Gattaca ou Blindness. N'oublions pas la mélancolie, une émotion forte dans Never let me go.

mercredi 29 janvier 2025

Catastrophe en vue ?

Vous en souvenez-vous ? L'année a commencé un mercredi, le jour officiel pour la sortie des nouveaux films dans les salles de cinéma. C'est ainsi que, dès le lendemain, j'ai pu aller voir un long-métrage millésimé 2025, Un ours dans le Jura, attiré par sa bande-annonce. La nouvelle réalisation du trublion Franck Dubosc vaut bien le détour !
 
Je laisse à d'autres le soin de vous détailler ses références probables et assumées, à commencer par mon film préféré des frères Coen. L'histoire ? Michel gère (mal !) une sapinière avec sa femme, Cathy. Un jour, voulant éviter un plantigrade sur la route, il perd le contrôle de son véhicule et cause la mort accidentelle d'un couple d'inconnus. Paniqué, il rentre alors chez lui sans rien faire. Et en parle à Madame.
 
Revenus sur les lieux du drame, elle et lui trouvent... deux millions d'euros dans le coffre de la voiture des défunts. Ce qu'ils cachent aussitôt à un ami gendarme, chargé d'une enquête sur des migrants. Bon, j'estime que j'en ai largement assez dit: Un ours dans le Jura reste une comédie, mais d'un style peu attendu pour Franck Dubosc. L'acteur-réalisateur s'est bien entouré: il forme ainsi un très bon duo avec l'excellente Laure Calamy. Arrive ensuite un Benoît Poelvoorde d'une sobriété rare et franchement très convaincant en enquêteur suspicieux et mono-parent d'une adolescente pour le moins revêche. Notez que je passe volontairement sur d'autres détails du scénario. Sans crier au chef d'oeuvre, c'est clair: j'ai passé un vrai bon moment devant ce spectacle, sans rien trouver à redire sur sa mise en scène. Pas sûr de savoir trouver d'autres comédies françaises aussi efficaces dans un avenir proche ! Mais je tiens au moins un bon mètre-étalon...

Un ours dans le Jura
Film français de Franck Dubosc (2025)

Le film des frères Coen ? C'est bien entendu Fargo, une comparaison logique bien que plutôt abusive, tout de même. Passons: le film d'aujourd'hui possède assez de qualités pour se suffire à lui-même. Réputé lourdingue, Franck Dubosc casse un peu cette image médiocre et, au cinéma, semble s'être amélioré depuis Tout le monde debout. Sur son thème, il m'amuse plus que La chute de l'empire américain !

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Et qu'en pensent donc mes petits camarades ?

Pascale et Dasola se réjouissent pleinement après avoir vu le film. Quant à Princécranoir, il émet des réserves, mais s'est amusé aussi...

dimanche 26 janvier 2025

2024, mes préférences

Chaque année, c'est la même chose: de nombreux médias cinéma publient leur top du millésime écoulé. Des blogueurs font de même. De mon côté, je finis les chroniques des films vus lors de l'année civile en question avant d'en proposer un classement. Certains opus sortis en décembre, vus en janvier, sont donc écartés (ou "reportés").

Les hiérarchies sont-elles pertinentes ? De cela aussi, le petit monde cinéphile discute régulièrement. Cette année encore, j'en fais une. Elle est évidemment aussi subjective que partielle: c'est le jeu ! Précision: en salles, je n'ai vu "que" 60 longs-métrages, hors reprises. Voici donc ce que j'en retiens pour un (copieux) top de l'année 2024...

1. Le déserteur
Dani Rosenberg / Israël
Toujours brûlant d'actualité, ce film pacifiste d'un artiste israélien m'est apparu exempt de tout manichéisme. L'histoire de ce garçon incapable de faire la guerre est fictive, oui. Et d'une terrible beauté...

2. L'innocence
Hirokazu Kore-eda / Japon
Le harcèlement à l'école. Le lourd poids des traditions séculaires. L'affection entre deux enfants. La solitude et l'espoir ténu d'en sortir. Quel film encore du réalisateur palmé d'or en 2018 ! À voir, à revoir !

3. Moi capitaine
Matteo Garrone / Italie
Des images sordides de ce que doivent vivre de nombreux migrants africains. Mais aussi de la poésie. Et de la force. Une bonne claque pour nos consciences occidentales trop endormies. Sans polémique...

4. Pendant ce temps sur Terre
Jérémy Clapin / France
Sous couvert de science-fiction, une très belle histoire de deuil fraternel, offerte par un réalisateur quinqua qu'il serait bon de suivre. Peut-être est-il déjà un fer de lance du cinéma de genre, en réalité...

5. Le roman de Jim
Arnaud et Jean-Marie Larrieu / France
Dites, Arnaud et Jean-Marie, c'est quoi, être père ? Les frangins adaptent fort délicatement le roman de Pierric Bailly et donnent envie de le lire. Karim Leklou est touchant (comme d'hab' !) et bien entouré.

6. Rosalie
Stéphanie Di Giusto / France
La lauréate du César du meilleur espoir féminin millésime 2023 poursuit sur sa belle lancée avec ce film sensible sur une femme velue. Nadia Tereszkiewicz s'inscrit doucement dans mon Panthéon...

7. Jusqu'au bout du monde
Viggo Mortensen / Canada - Danemark - Mexique
Avis à ceux qui en doutent encore: non, le western n'est pas mort. Cela rime et cela se vérifie une nouvelle fois, avec cette histoire d'allure classique, superbement mise en scène. Oui ! Et Vicky Krieps...

8. Sans Coeur
Nara Normande et Tião / Brésil
Voyage en terre presque inconnue et retour des images plein les yeux après la projection de cette merveille lusophone. Son atout majeur: s'ancrer dans le réel sans s'interdire une dose de fantastique. Waouh !

9. L'étoile filante
Dominique Abel et Fiona Gordon / France - Belgique
D'aucuns jugent ce style à la Tati (ou Kaurismäki) des deux cinéastes passé de mode. Ou carrément obsolète. C'est plus qu'injuste, dis-je. Mercis et bravos pour eux qui mêlent le drame, la comédie et le rêve.

10. Vampire humaniste cherche suicidaire consentant
Ariane Louis-Seize / Canada
Serait-ce le plus sanglant des films tendres ? Hum... plutôt l'inverse. Décalé et mignon comme tout, cette improbable bluette adolescente mériterait bien qu'on se réveille la nuit ! Pour rigoler, entre autres...

11. Ni chaînes ni maîtres
Simon Moutaïrou / France
Dans un monde et une France souvent à cran sur les questions raciales, ce long-métrage documenté est une bonne première marche à franchir pour "comprendre" l'esclavage. Et la fin... vous mettra KO !

12. Enys Men
Mark Jenkin / Grande-Bretagne
Ne cherchez pas à tout analyser ! Ou plutôt: faites-vous votre idée ! C'est sans doute le premier message de ce film complètement dingue. Une île pour un voyage immobile, empli de mystères. Et sans retour ?

En y repensant, je me dis que beaucoup de ces films évoquent l'idée de vivre libres, selon nos propres codes et dans une société humaine qui accepte la diversité dans toutes ses dimensions. Je constate aussi que c'est d'ailleurs l'un des grands messages que délivre le numéro 1 du box-office national, Un p'tit truc en plus ! Cela me donne envie d'ajouter six "mentions" à cette liste de douze: Anora, Civil war, Emilia Pérez, En fanfare, Vingt dieux et enfin La zone d'intérêt. J'ai donc retenu 18 longs-métrages en tout (30% de mes découvertes).

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Et maintenant, si vous voulez prolonger le débat...

La section commentaires est ouverte à vos remarques (ou questions). Les tops de Pascale, Dasola, Vincent et Benjamin aussi, je présume. Quant à mon premier film de 2025, il va arriver ! Mercredi prochain...

samedi 25 janvier 2025

Un regard sur 2024

Voilà... j'en ai terminé avec les films que j'ai vus l'année dernière. Place maintenant à un (premier) petit bilan, tout à fait subjectif ! L'occasion de revenir sur certains longs-métrages diffusés en salles. J'ai aussi prévu une liste de mes préférences: j'y reviens dès demain. En attendant, voici donc quelques indicateurs autres, pour le plaisir...

Du côté français...

Un peu plus de 181 millions de tickets vendus: c'est le bon chiffre atteint dans les salles de notre pays, l'an passé. Les exploitants notent que ce niveau rejoint presque celui de l'avant-Covid. La France fait figure d'exception et voit la fréquentation de ses cinémas portée par sa production nationale, avec notamment les succès remarquables d'Un petit truc en plus (photo / premier du box-office à 10,8 millions d'entrées) et Le comte de Monte Cristo (2ème à 9,3 millions), désignés en porte-drapeaux avant L'amour ouf (5ème à 4,9 millions). J'espère des triomphes comparables - voire supérieurs - courant 2025.

Du côté étranger...

Pas de véritable surprise: les neuf autres places du top 12 "national" sont prises par de grosses productions américaines, issues d'univers préexistants. Et je n'ai pas envie de les citer en détail aujourd'hui ! Vous connaissez mon intérêt pour le cinéma venu d'autres pays, non ? Tous supports confondus, les films ni francophones ni anglophones comptaient pour un gros quart de mes découvertes de l'année 2024. Paradoxe: en salles, j'ai loupé les trois plus gros succès sur ce critère particulier, soit Il reste encore demain (photo / Italie), Les graines du figuier sauvage (Iran) et La salle des profs (Allemagne). Ouille...

Du côté "familier"...

Vice-versa 2 (photo), Dune - Deuxième partie, Bob Marley, Monsieur Aznavour... je n'ai assurément pas boycotté ces suites officielles ou biopics relativement consensuels, membres du top 20. J'assume, tout en regrettant la frilosité des producteurs, exploitants et spectateurs. L'intérêt même d'aller en salles alors que cette offre dite "de masse" débarque de plus en plus vite et dans une forme resplendissante dans nos salons pose encore et toujours question. Triste constat: l'un des cinémas de ma ville a fermé au printemps dernier... et son local reste inoccupé à ce jour ! Un très vaste sujet...

Du côté nouveau (et féminin)
...
Là, je dois admettre que je sèche un peu: je n'ai pas fait de stats détaillées sur les premiers films et réalisations de femmes en 2024. Mais les sujets des premiers pas au cinéma et des représentations féminines m'intéressent toujours. Je les fusionne parfois pour essayer de savoir comment et grâce à qui l'art s'invente et peut se renouveler. C'est un autre très vaste sujet ! Le relatif succès critique et public d'un film comme Vingt dieux (photo) me réjouit à 200%, par exemple. Et j'espère que le handicap va avoir plus de visibilité sur les écrans. Mais ne mélangeons pas tout et reparlons-en plutôt... au fil de 2025 !

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Une précision que je crois utile...

Les chiffres que je cite dans cette rétrospective datent de mercredi. Si vous en avez trouvé d'autres, n'hésitez surtout pas à m'en aviser ! Ma chronique d'il y a six jours sur James Cameron m'a servi de leçon. Je n'écarte pas l'idée que les statistiques aient pu légèrement évoluer.

vendredi 24 janvier 2025

London calling

Je voulais passer le soir de la Saint-Sylvestre avec un grand classique. Or, chez mes parents, impossible de voir le Chaplin espéré. Ma mère sait mon affection pour Audrey Hepburn: après le très bon dîner concocté par ses soins, elle a proposé que l'on regarde My fair lady. Un film musical hollywoodien en plan B ? Une remarquable suggestion !

Nous sommes à Londres, au début du 20ème siècle. Eliza Doolittle vend des fleurs dans la rue. Un père éboueur, une mère déjà morte. Le hasard la place sur le chemin d'un grand professeur d'université spécialiste de la phonétique: Henry Higgins, joué par Rex Harrison. Cet arrogant personnage fait un pari avec un ami: il  effacera l'accent populaire d'Eliza et lui permettra dès lors d'accéder à la haute société. Au vu de la seconde photo ci-dessous, vous imaginerez la suite. Adapté d'une grande comédie musicale elle-même inspirée d'une pièce de George Bernard Shaw (Pygmalion), My fair lady prend son temps et dure presque trois heures. Une véritable référence (pour le genre) !

Évidemment, ce que le film dit de la condition féminine à l'époque apparaît franchement suranné aujourd'hui, pour ne pas dire atroce. Mais voir - ou revoir - le film en 2024-25 a au moins un intérêt historique et s'avère aussi plutôt amusant. Toute cette démesure artistico-technique (costumes, décors de studio, chansons...) possède quelque chose de délicieusement rétro, un charme résolument vintage dont Audrey Hebpburn est - à l'évidence - l'inégalable ambassadrice. Elle n'eut certes pas d'Oscar pour ce rôle, mais le film lui-même décrocha huit statuettes, en ce temps pas si lointain où l'Académie séparait encore les longs-métrages noir et blanc de ceux en couleur. Pas de doute: My fair lady est une bonne pub pour le Technicolor. D'ailleurs, pas d'équivoque non plus: la marque apparaît au générique. Je me dis donc que le cinéma n'a jamais cessé d'idolâtrer ses icônes. Et faudrait-il désormais lui reprocher ? Sincèrement, je ne crois pas...

My fair lady
Film américain de George Cukor (1964)

Pas d'affection démesurée pour cet opus, mais une vraie tendresse. Malgré les clichés, le duo Hepburn / Harrison fonctionne très bien. Cukor, lui, était peut-être un peu plus mordant avec Hantise (1944). J'ai l'impression qu'il a su évoluer avec son temps - ce sera à vérifier ! En attendant, vous pourrez retrouver d'autres films de cet "âge d'or" hollywoodien sur le blog. Le must ? Chantons sous la pluie, dès 1952.

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Et ailleurs sur la Toile...

Vous dénicherez deux hommages récents d'Ideyvonne: tout en images d'abord, puis pour un anniversaire. Et ce billet de "L'oeil sur l'écran"...