vendredi 30 juin 2023

Alger, année zéro

Un ami à moi jugeait le titre "pas très inspirant". Non ? Il se trouve que je pense exactement le contraire ! Ce sont bien ces trois mots qui m'ont d'abord attiré vers le désormais fameux Omar la fraise. Derrière cela, évidemment, le duo Reda Kateb / Benoît Magimel titillait fortement mon imagination ! Et je suis donc allé voir le film...

Omar est un malfrat français condamné (en son absence) à vingt ans de prison. Pourquoi la fraise ? Le film nous livre trois explications différentes et entretient ainsi la légende du gangster charismatique. Malgré tout, quand le récit commence, l'intéressé est en cavale méditerranéenne et s'ennuie ferme à Alger, pourtant présentée comme la ville d'origine des siens, censée donc lui être "confortable". Roger, son fidèle homme de main, invite Omar à faire profil bas. Avec l'argent qu'il a encore, il peut très vite prendre les commandes d'une entreprise de fabrication de biscuits et se faire un peu oublier. Reste que la respectabilité, ce n'est pas très excitant, au final. Surtout lorsque l'on constate qu'il y a d'autres gros poissons voleurs qui ont échappé aux filets dans le bocal dans lequel on a plongé. Partant de ce postulat, Omar la fraise est d'abord... une comédie ! Assez sanglante parfois, mais drôle, parce que décalée des standards.

Il serait toutefois dommage d'en rester à cette seule dimension. Grâce d'abord à un personnage féminin fort, le long-métrage s'enrichit d'autres thématiques. Il est aussi un portrait de la jeunesse algéroise et une évocation de ses difficultés sociales, relatives aux mutations d'un pays si proche de la France et pourtant (encore) si différent aujourd'hui - un sujet qui m'intéresse de plus en plus, pour tout dire. Retenez le nom de Meriem Amiar: cette actrice dont j'ignorais tout offre de son pays un visage nouveau, souriant, moderne et résolu. Omar la fraise est donc loin de n'être qu'un film de truands perdus dans un univers qui ne leur est pas familier. Et je tiens à souligner qu'il tient même du drame par certains aspects, malgré une fin ensoleillée. Certains comparent sa violence à celle d'un Tarantino. Graphiquement, cela se tient, mais je trouve cependant ici un sens souvent absent, à mes yeux, des oeuvres 100% geek dudit Quentin. Dès lors, la double nationalité du film lui va bien: oui, sa complexité joue en sa faveur. Inventif, ce cinéma-là est pour moi un vrai plaisir !

Omar la fraise
Film franco-algérien d'Élias Belkeddar (2023)

Quel kif ! J'en suis d'autant plus séduit que c'est aussi le premier film du réalisateur. J'ai surtout parlé du fond, mais la forme est très belle également ! Ce qui m'incite à défendre encore le travail des cinéastes algériens de notre époque, depuis Inland jusqu'à Houria, en passant par Le repenti ou L'Oranais (une liste non exhaustive, bien entendu). De mon côté, je voudrais bien découvrir aussi deux-trois classiques...

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En attendant d'y (re)venir...

Je vous encourage aussi vivement à aller lire la chronique de Pascale.

mercredi 28 juin 2023

La vie sauvage

Vous le savez, non ? Aujourd'hui, dans les cinémas français, un film sort avec Harrison Ford dans le rôle principal. J'en reparlerai, oui. Avant cela, un clin d'oeil avec la chronique du précédent long-métrage de l'acteur (qui va fêter ses 81 ans le 13 juillet): L'appel de la forêt. J'imagine que vous aurez pu lire le roman (éponyme) de Jack London !

Il est ici question d'un gros chien, élevé avec amour dans une famille riche du Sud des États-Unis. Nous sommes à la fin du 19ème siècle. Soudain, Buck est enlevé à son maître et conduit de force sur un sol qu'il n'a jamais foulé: le Yukon, territoire hostile du Grand Nord canadien. Son ravisseur le revend alors au propriétaire d'un traîneau chargé d'acheminer le courrier destiné à ceux qui cherchent de l'or jusqu'aux confins du monde connu - interprété, lui, par Omar Sy. Notre ami Harrison arrive (un peu) plus tard, en vieux type égaré après la mort de son fils et la rupture définitive d'avec sa femme. Sachez-le: L'appel de la forêt n'est donc pas un film très joyeux. Maintenant, je crois bon de souligner que le livre est encore plus dur. Cette adaptation cinéma n'est pas la première et a choisi d'insister sur le "retour à la nature" des êtres humains, mais aussi du chien ! Cette vision n'est pas inintéressante, mais un tantinet naïve, parfois. C'est-à-dire qu'elle prêtera aux animaux des sensations et attitudes très anthropomorphiques. Et je précise que je m'y attendais un peu...

L'appel de la forêt
Film américain de Chris Sanders (2020)

Vous tenez vraiment à juger le film en fonction du livre ? D'accord. Notez bien alors que le bouquin, lui, est sorti en 1903. Les romans d'aventure de l'époque n'ont plus forcément la même aura aujourd'hui. L'aventure, elle-même, a changé (cf. La panthère des neiges). Autant ouvrir les horizons, je crois: Into the wild, The lost city of Z et Avalonia m'encouragent en tout cas à explorer diverses facettes...

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Pour en revenir à Jack London...

Il avait 27 ans quand son livre a été édité. Je crois me souvenir qu'ensuite, il a été très mal traduit en France. Une forme de trahison.

Et qu'aurait-il pensé de ce film ?
Personne ne peut le savoir, évidemment. Il faudra donc se contenter des regards de spectateurs-lecteurs, comme Lui ("L"oeil sur l'écran").

lundi 26 juin 2023

Un arrangement

C'est l'histoire de deux hommes qui n'auraient pas dû se rencontrer. Oui, mais voilà... ses petites combines finissent par conduire Franck au tribunal, où Julien, avocat de la défense, lui évite la prison ferme. Leur histoire commune aurait pu s'arrêter sur ces instants judiciaires. Mais il se pourrait bien que Julien, à son tour, ait besoin de Franck...

Julien a un souci: il n'arrive pas à avoir d'enfant avec sa femme Anna. Franck en a déjà eu cinq avec Meriem, qui est à nouveau enceinte. L'aisance financière des uns peut-elle favoriser l'adoption clandestine du bébé des autres, qui, du fait d'une situation précaire, n'envisagent guère le futur nouveau-né que comme une bouche de trop à nourrir ? Le sixième enfant a le mérite de poser la question sans tergiverser...
 
Résultat: le spectateur a le temps d'y réfléchir avant de répondre. L'intelligence du scénario est justement de se garder du manichéisme facile. Cela permet aussi aux comédien(ne)s d'exprimer leur talent avec un vrai brio: Sara Giraudeau, Judith Chemla, Benjamin Laverhne et Damien Bonnard constituent ici un quatuor des plus convaincants. Concis, cet opus n'est pas parfait, mais s'avère d'une belle justesse. C'est une vraie promesse, puisque c'est aussi le premier long-métrage du réalisateur - par ailleurs auteur de trois courts entre 2016 et 2018. NB: le film adapte Pleurer des rivières, un court roman d'Alain Jaspard publié aux éditions Héloïse d'Ormesson. Cette fois, vous savez tout...

Le sixième enfant
Film français de Léopold Legrand (2022)

Bon... j'aurais sans doute pu arrondir ma note pour saluer le casting. Finalement, j'en reste là en me disant que ce n'est déjà pas si mal. Vous l'aurez compris: pour nous parler du désir d'enfant, le film prend un chemin qui n'est pas DU TOUT celui du très farfelu Arizona Junior. Et, en somme, on se trouve presque à l'exact opposé de Ninjababy ! Sur la maternité, je suggère aussi Madre... ou Les bonnes manières.

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Un avis féminin, ça vous tente ?

Je vous propose de lire celui de Pascale. Et n'en ai pas trouvé d'autre.

samedi 24 juin 2023

Le pied en capes ?

Elles sont si nombreuses que Wikipédia leur consacre une page entière. Alexandre Dumas offrit lui-même une adaptation (théâtrale) à son roman Les trois mousquetaires - initialement publié en 1844 sous la forme d'un feuilleton dans le journal Le Siècle. Je veux croire que vous savez qu'une nouvelle version cinéma était sortie... en avril.

J'en parle avec retard, mais ce n'est que le 11 juin que j'ai vu ce film. Assez classiquement, il reprend la première partie de l'histoire littéraire: l'arrivée d'un jeune Gascon à Paris en 1627, sa motivation pour rejoindre les troupes du roi, sa rencontre (d'abord peu aimable) avec trois soldats expérimentés et les diverses aventures trépidantes qui s'ensuivront pour sauver une souveraine de la disgrâce publique. Que vous dire ? Les trois mousquetaires - D'Artagnan est un film réussi, étant donné qu'on ne s'ennuie pas une seconde devant l'écran. Ce constat positif doit beaucoup à la distribution: François Civil, Vincent Cassel, Romain Duris et Pio Marmaï forment une bande convaincante, à n'en pas douter. Avec eux, Louis Garrel, Vicky Krieps, Lyna Khoudri, Éric Ruf et Eva Green sont à l'aise dans leur costume ! Sans rien inventer, le long-métrage délivre la marchandise et dure juste ce qu'il faut pour donner envie de voir la suite (le 13 décembre).

Chapeau bas, donc, au réalisateur, mais aussi à ses producteurs français, belges, espagnols et allemands ! Je ne pointe aucun défaut rédhibitoire dans cet opus 2023. S'il faut absolument que je relève quelques points "faibles", je pourrais en citer deux: 1) des combats parfois trop peu lisibles, la caméra étant alors passablement secouée et 2) des personnages un rien effacés, alors même que j'espérais qu'ils soient tous considérés avec la même attention. Chipotages ! J'ajoute donc que j'ai vraiment bien aimé l'aspect "brut de décoffrage" des séquences initiales, où il n'est nullement question de propreté impeccable pour le premier protagoniste, sitôt descendu de cheval. Côté public, le succès semble au rendez-vous, bien soutenu il est vrai par une critique professionnelle plutôt bienveillante (pour une fois). C'est peut-être aussi parce que Les trois mousquetaires - D'Artagnan conserve tout le long assez d'aplomb pour introduire des touches d'humour et de modernité dans le récit, sans forcer la dose toutefois. Bref, si la suite est du même tonneau, je serais pleinement satisfait !

Les trois mousquetaires - D'Artagnan
Film français de Martin Bourboulon (2023)

Deux bémols = une demi-étoile en moins: j'espère bien que la suite annoncée en fin d'année permettra d'arrondir ma note vers le haut. Avant cela, je vous suggère de découvrir Les trois mousquetaires dans leur version américaine de 1948, pour le moins virevoltante. Toujours au rayon capes et épées, Capitaine Blood et Scaramouche offrent des alternatives appréciables ! Si vous aimez les classiques...

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Et pour prolonger le plaisir...

Vous pourrez lire d'autres avis chez Pascale, Dasola et Princécranoir.

jeudi 22 juin 2023

Nouvelle partie

Ceux parmi vous qui fréquentent peu ou prou l'univers des jeux vidéo savent qu'il existe des personnages "figurants". Ils sont certes utiles au développement du scénario, mais ne peuvent pas être incarnés. Non sans autodérision, Ryan Reynolds a endossé un rôle de ce type dans Free Guy, un blockbuster récent, très coloré et (plutôt) original.

Guy se réveille tous les matins pour faire la même chose que la veille. Il revêt une chemisette bleue, souhaite le bonjour à son poisson rouge, attrape un café au bar du coin et file rejoindre son guichet d'employé de banque. Il n'a qu'un ami: Bud, le vigile qui, comme lui, reste bien sage quand un malfrat déboule pour emporter la caisse. Chose qui arrive chaque jour, jusqu'à ce que Guy tombe amoureux d'une fille de son quartier et découvre... qu'il peut devenir un héros. J'en ai assez dit, je crois, et quelques connaissances des mondes vidéoludiques seront sûrement bienvenues pour savourer ce Free Guy à sa juste valeur. Un bon point: l'intrigue est de fait plus complexe que je n'avais pu le supposer de prime abord, sur fond de plagiat industriel. Ensuite, c'est à vous de savoir si vous digérez le popcorn. Je veux insister: je vous parle bel et bien d'une grosse machinerie américaine, avant tout taillée pour plaire aux geeks en tous genres. Tout cela est à prendre au premier degré, sans trop en demander. Lors d'une soirée de grosse fatigue, ce "truc" a bien su me di-ver-tir !

Free Guy
Film américain de Shawn Levy (2021)

Quatre étoiles: j'ai décidé d'être généreux et je vais donc l'assumer. D'après ce que j'ai lu, le jeu vidéo a désormais dépassé le cinéma quant à l'argent qu'il permet de générer. Voir des personnages virtuels débouler sur les écrans s'inscrit dès lors comme une suite logique. Amateurs du genre, vous avez forcément vu Ready player one, non ? Parfait: essayez donc Pixels, Scott Pilgrim ou Les mondes de Ralph !

lundi 19 juin 2023

Une belle inattendue

J'aimerais disposer d'un livre qui référence l'ensemble des rencontres entre telle actrice et tel acteur sur les divers plateaux de tournage. Qui pourra m'éclairer ? J'ignore si Sophia Loren et Marlon Brando s'étaient déjà croisés avant leur duo de La comtesse de Hong Kong. Je voulais voir ce film, car c'est le dernier réalisé par Charlie Chaplin !

À 78 ans, l'éternel vagabond a abandonné sa canne et son chapeau mou. Il ne porte plus son emblématique moustache et se contente d'une apparition (fugace) dans le costume impeccable de l'employé d'une compagnie de croisière. L'histoire ? Un jeune diplomate américain est monté à bord d'un bateau pour rejoindre son poste d'affectation. Il découvre alors une femme cachée dans sa cabine ! Vous l'aurez compris: il s'agit bel et bien d'une passagère clandestine. Sur cette base, le film adopte vite le ton badin d'une comédie boulevardière. Mais pas seulement: il est question d'une héroïne glamour, certes, mais tout à fait dépourvue de papiers en règle. Charlie Chaplin ayant un temps été privé de son passeport américain et d'un retour possible aux États-Unis, La comtesse de Hong Kong apparaît sous un jour nouveau - et même si l'idée date des années 30. Le tournage a eu lieu en Angleterre, dans les studios de Pinewood. Comme vous le remarquez, l'image est en couleurs: un cas unique dans la filmo du réalisateur. Cet opus ne manque donc pas d'intérêt...

La comtesse de Hong Kong
Film britannique de Charlie Chaplin (1967)

Ma conclusion vous paraît en demi-teinte ? Elle l'est, c'est vrai. Objectivement, l'homme derrière la caméra a fait BEAUCOUP mieux. Cela dit, ce film parlant reste honorable et parsemé de saillies burlesques particulièrement délectables. Un vrai bonbon de cinéphile ! C'est normal de l'évaluer à l'aune de La ruée vers l'or, Les temps modernes ou Le dictateur, mais pas toujours juste. À vous de voir...

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Et si vous hésitez encore...

Le double avis de "L'oeil sur l'écran" pourra vous aider à vous décider.

samedi 17 juin 2023

L'héritier

À l'origine de la saga, il y eut six romans, sortis entre 1977 et 1980 sous la plume de Jean Van Hamme. Un travail que l'écrivain belge adapta ensuite en vingt bandes dessinées, éditées de 1990 à 2015 avec Philippe Francq. Le cinéma, lui, a connu Largo Winch fin 2008. Et pour moi, il est comme un lointain souvenir remonté à la surface...

Largo Winch
- le film - fera peut-être hurler les puristes des débuts. Mon avis ? Cette grosse production soutenue par des producteurs français, belges et... hongkongais n'a rien de vraiment déshonorant. L'histoire est celle d'un anonyme, adopté par un homme d'affaires richissime quand il était bébé, et qui hérite un beau jour de l'empire industriel de "Papa", sous prétexte que ce dernier a été assassiné ! Nous voilà alors propulsés avec lui dans un action movie trépidant qui, sans avoir les moyens d'un blockbuster américain, s'inscrit résolument dans la lignée d'un James Bond ou d'un Jason Bourne. Destinations exotiques, jolies filles et explosions: la panoplie complète du héros indestructible (et qui va d'ailleurs aussitôt s'affirmer comme tel). Résultat: tout cela ne risque pas de faire grand mal à vos neurones...

Largo Winch
Film français de Jérôme Salle (2008)

Tomer Sisley m'a convaincu dans le personnage: c'est l'essentiel, non ? J'étais plutôt content de revoir quelques autres visages familiers comme Mélanie Thierry, Kristin Scott Thomas ou encore Gilbert Melki. Malgré les clichés XXL, j'ai donc passé un assez bon moment. Aujourd'hui, les trucs du genre La mémoire dans la peau ou Skyfall ont pris un bon coup de vieux. Autant en rire: voyez Action Jackson !

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Et maintenant, si vous y tenez absolument...

Vous pouvez aussi lire les avis (tranchés) de Pascale, Benjamin et Lui.

jeudi 15 juin 2023

Un brave garçon

J'ai parfois été injuste avec Clovis Cornillac. Je ne suis pas capable d'expliquer pourquoi, mais je le trouvais "limité". J'ai l'impression désormais qu'il est un acteur correct et un réalisateur très sincère. Beaucoup jugeront ces qualités insuffisantes. Je m'en accommode. Elles font de lui ce que j'appellerais un "honnête artisan du cinéma"...

Dans C'est magnifique !, Clovis devient Pierre, un jeune apiculteur dont les parents meurent dans un accident: un arbre géant s'écrase sur leur chalet. C'est alors que le brave garçon découvre qu'il a été adopté et qu'il est l'héritier d'un modeste appartement situé à Lyon. Problème: il n'y est jamais allé et ignore TOUT des codes de la ville. Allez savoir... sa rencontre avec Anna, joli personnage féminin cabossé par la vie, pourrait bien améliorer (réparer ?) les choses. Changer leur destin ? Peut-être aussi, mais de manière inattendue. Dans une imagerie un peu kitsch, le film enferme une histoire sensible traitée de manière tout à la fois plutôt sérieuse et poétique. Avec notamment une idée géniale: l'effacement de certaines couleurs devant les émotions fortes que va traverser le protagoniste principal !

C'est magnifique !
Film français de Clovis Cornillac (2022)

Bel effet de surprise avec cette fable improbable, mais d'une douceur réconfortante. Je n'ai rien dit d'Alice Pol, actrice souvent dénigrée pour son talent discret et qui s'avère parfaitement à sa place ici. D'aucuns y voient une réminiscence d'un cinéma français populaire dans la veine d'Amélie Poulain - la comparaison se tient, c'est vrai. Avec 174.726 entrées, mon film du jour n'a pas eu le même succès...

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Et mes voisins de blog, ils disent quoi ?

J'ai au moins trouvé une vision très positive chez "L'oeil sur l'écran".

mercredi 14 juin 2023

Quatorze millions

Pas eu beaucoup de temps pour voir des films, ces derniers temps ! C'est pourquoi je vous propose une brève chronique autour du succès considérable de l'année dernière: Avatar - La voix de l'eau, bien sûr. Sorti il y a pile poil six mois, le film a terminé sa carrière française après avoir généré pas moins de 14.000.573 entrées. Impressionnant.

C'est bien simple: aucun autre film n'était parvenu à faire mieux depuis 2009 et la sortie... d'Avatar premier du nom. On peut se dire que James Cameron a gagné son pari, malgré son (relatif) manque d'audace dans la construction d'un scénario des plus attendus. Dépassera-t-il son propre triomphe avec l'épisode 3, dont la sortie s'annonce déjà pour les fêtes de la fin de l'année 2024 ? Nous verrons. Sans attendre, je fais ce constat: le plus américain des réalisateurs canadiens place un troisième film dans le top 10 de notre box-office national, tous millésimes confondus. Du côté des grosses recettes mondiales, il pointe aux 2ème et 3ème rang, avec 2,7 et 2,3 milliards de dollars. Vous avouerez que c'est plutôt une belle performance ! Franchement difficile à rééditer, pour le coup. Une affaire à suivre...

lundi 12 juin 2023

Au voleur !

Il me semble que Hollywood ne fait plus guère aujourd'hui de films comme Haute voltige, sorti à la veille de l'an 2000. On craignait alors une gigantesque panne informatique liée au changement de millénaire et... il ne s'est rien passé qui tienne de l'apocalypse (tant redoutée). C'était avant le 11-Septembre - un autre temps, pour les États-Unis...

À cette époque, Catherine Zeta-Jones avait tout juste trente ans. Sans que cela étonne quiconque, elle pouvait être la vedette féminine de l'un des derniers opus de Sean Connery, proche des soixante-dix. Associée à son personnage pour voler des objets aussi précieux qu'extrêmement protégés. Une tromperie: le scénario plaçait la belle en mission, mandatée par une compagnie d'assurances soucieuse d'enfin mettre le grappin sur un gentleman cambrioleur assez efficace pour duper toutes les polices du monde (y compris le FBI, of course)...

Qu'ajouter ? Haute voltige est un divertissement pur. Son pouvoir d'attraction repose presque entièrement sur ses deux têtes d'affiche. Elle est très jolie, lui toujours aussi charismatique: l'alchimie opère pour peu que l'on se moque de vraisemblance ou de profondeur narrative. Pour être clair: tout - ou presque - est ultra-prévisible. Kuala Lumpur, dans le décor, apporte même une touche "exotique" que je considère assez typique des films pop corn de cette époque. Replacé dans son contexte, celui-là passe encore. Avis aux amateurs !

Haute voltige
Film américain de Jon Amiel (1999)

J'ai tout dit: débranchez votre cerveau... ou passez votre chemin ! J'insiste: tout cela fleure bon le produit standardisé de l'industrie hollywoodienne florissante, mais reste relativement sympathique. D'aucuns ont fait un parallèle avec La main au collet, un Hitchcock mineur et azuréen, tout à la gloire du duo Grace Kelly / Cary Grant. Perso, je préfère la cambriole en solo (Le voleur) ou trio (Bandits)...

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Et si vous alliez voir ailleurs ?

Je suis assez d'accord avec Benjamin, mais il est plus sévère que moi. Vous verrez: lui trouvait déjà le film dépassé il y a plus de douze ans !

vendredi 9 juin 2023

Sur les routes

Bon... et si j'en revenais enfin au grand cinéma italien ? Je suis ravi de le faire avec un immense classique, La strada, découvert en copie restaurée dans l'une de mes salles de prédilection. Du pur bonheur ! Non que le film soit drôle, mais il y a là beaucoup de choses de nature à emporter mon plaisir de cinéphile. Et, mieux, à l'alimenter encore...

Gesolmina est la plus âgée des filles survivantes d'une famille pauvre. Pour garder de quoi nourrir les autres, sa mère la vend à un artiste forain qui avait déjà "recruté" sa grande soeur: Zampanò, un rustre. Ensemble, le duo mal assorti va dès lors arpenter les routes de l'Italie d'après-guerre pour gagner sa pitance et, peut-être, quelques lires supplémentaires. Mais cette vie itinérante accable vite Gesolmina ! Seule sa rencontre avec Il Matto, un funambule solitaire, la réconforte et, un temps, la transporte, mais cette "trêve" est de courte durée. Récompensé à la Mostra et aux Oscars, La strada est un drame véritable, qui connut en son temps un beau succès critique et public. Aujourd'hui encore, il reste le dixième plus grand succès du cinéma italien en France (et le premier de tous les films de Federico Fellini). D'après ce que j'ai pu lire, le maestro abordait avec lui un virage créatif et s'éloignait ainsi du néoréalisme. D'aucuns lui ont reproché...

Entendons-nous bien: j'admire la manière dont nos voisins transalpins ont, dès le milieu des années 40, raconté leur pays et les ravages subis après deux décennies d'un fascisme triomphant. Il me semble que La strada s'inscrit dans cette veine, même si les personnages charrient avec eux une part de rêve, préservée de la sombre réalité. L'équilibre est subtil et, à mon humble avis, bâti sur les contraires. Face à une héroïne fragile, la brutalité des hommes paraît inéluctable et s'avérera fatale. La paix est revenue, mais le destin frappe encore. C'est pathétique, oui, et c'est beau, grâce aussi à trois comédiens inspirés et d'abord à Giulietta Masina, d'une ampleur chaplinesque. Anthony Quinn et Richard Basehart lui offrent de fait une réplique parfaite, chacun dans son registre, l'un brute épaisse, l'autre clown désespéré. La mise en scène, elle aussi, est absolument impeccable. Certains ont parlé de road movie... et je ne leur donnerai pas tort. Avec, en prime, la partition de Nino Rota, on touche alors au génie. 69 ans plus tard, je vous dirais qu'il est encore temps de s'en réjouir !
 
La strada
Film italien de Federico Fellini (1954)

Comme quelques autres, ce film semble devoir traverser le temps sans vieillir dans son propos, ni perdre de sa puissance émotionnelle. Autant l'écrire sans hésiter: sa restauration est une vraie bénédiction pour les amoureux du cinéma populaire, dans sa vision la plus noble. L'Italie recèle bien entendu d'autres pépites, de Rome, ville ouverte aux "paumés" de Larmes de joie. Il me reste des trésors à découvrir !

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Et pour finir...

J'avoue que j'attends mon ami Eeguab au détour de cette chronique. D'ici là, vous aurez peut-être (re)lu les avis de Dasola, Strum et Lui...

jeudi 8 juin 2023

La bonne voie

Les plus fidèles d'entre vous s'en souviendront: les colonnes de ce blog ont parfois été ouvertes à d'autres plumes passionnées de cinéma. C'est ainsi que mon amie Joss y a publié une trentaine de chroniques entre juin 2016 et décembre 2018. Celle que je présente aujourd'hui revient sur un petit film qu'elle avait déjà évoqué: The station agent.

Fin hérite d'une ancienne gare désaffectée et en fait son lieu de vie. Lui qui rêve de tranquillité doit déchanter: le vendeur d'un food truck voisin tient absolument à être son ami et, pire, une femme distraite manque de le renverser avec sa voiture... deux fois en une journée ! L'aurez-vous deviné ? Les trois personnages finiront par sympathiser. Mieux: le scénario nous suggère qu'une jeune et jolie bibliothécaire pourra devenir la quatrième membre du trio. Il faut bien admettre que The station agent ne raconte rien de vraiment extraordinaire. Seule originalité: le personnage principal ne mesure qu'un mètre 34. On peut prendre le film comme une ode au respect de la différence. Ou des différences, plutôt, car chaque protagoniste a quelque chose d'un peu cabossé (que les autres, du coup, pourront dès lors réparer). Bonne nouvelle: les acteurs sont attachants. Les amateurs de séries retrouveront Peter Dinklage, le Tyrion Lannister de Games of thrones. Les autres - Patricia Clarkson, Michelle Williams et Bobby Cannavale - n'ont pas à rougir. Bilan: ce petit film témoigne d'une belle humanité !

The station agent
Film américain de Tom McCarthy (2003)

J'ai désormais pu rendre son DVD à Joss ! Je ne suis pas convaincu qu'il soit facile de dénicher ce long-métrage, mais sa grande humilité joue clairement en sa faveur. Un joli moment de cinéma, en somme. Filmer ainsi l'Amérique ordinaire n'est pas donné à tout le monde. Kelly Reichardt (Old joy) et Chloé Zhao (Nomadland) y sont arrivées autour de scénarios un peu plus riches. J'y reviendrai... un autre jour.

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Pour plus de détails...

Je vous recommande désormais d'aller (re)lire la chronique de Joss. Cela ne vous suffit pas ? Allez voir chez Dasola et Lui, tant qu'à faire !

mercredi 7 juin 2023

Le retour des Galactiques

C'est sans empressement - mais avec plaisir - que j'ai fini par renouer avec l'univers Marvel en allant voir Les gardiens de la galaxie vol. 3. Rappel: les deux premiers épisodes sont déjà chroniqués sur ce blog. La formule, elle, reste (presque) inchangée: on suit les aventures pétaradantes d'un groupe de justiciers interstellaires, contre LE MAL !

Cette fois, la bande affronte principalement un généticien fou embarqué dans la reconstitution d'une Terre débarrassée de ses êtres imparfaits. Le plus important est ailleurs: dans l'attaque préalable d'un autre "méchant", Rocket, le raton-laveur du groupe des "gentils", est gravement blessé. Le scénario s'intéresse plutôt à ce personnage charismatique qu'aux tribulations de ses potes: il n'en reste pas moins que Star-Lord, Groot, Drax, Mantis, Gamora et Nébula sont encore là. Deux heures et demie durant, vous n'aurez pas le temps de souffler entre deux scènes: Les gardiens de la galaxie vol. 3, c'est de l'action continue et de la pyrotechnie permanente. Un grand film à pop corn...

Une évidence: pour prendre la mesure de ce spectacle, il faut le voir sur un écran digne de ce nom... et donc au cinéma ! Je sais bien que, Marvel appartenant à Disney, le film atterrira sur sa plateforme VOD d'ici quelques mois. N'empêche: Les gardiens de la galaxie vol. 3 devrait sans doute paraître un peu fadasse sur la petite lucarne. Quitte à voir un film de super-héros, je tiens à signaler également que celui-là a été mis en scène par un réalisateur souvent présenté comme l'un des plus créatifs de tous ceux qui s'intéressent à ce genre d'histoires. Celles et ceux qui connaissent déjà la saga se souviennent qu'elle est rythmée par quelques tubes pop/rock des années 70 et 80. C'est le cas encore une fois et c'est une chouette cerise sur le gâteau. Ami(e)s allergiques, attention toutefois au léger risque d'indigestion !

Les gardiens de la galaxie vol. 3
Film américain de James Gunn (2023)

Si cet univers ne vous est pas familier, je vous conseillerais plutôt d'attaquer avec le premier - qui est d'ailleurs le meilleur des trois. Ensuite, libre à vous d'enchaîner: les histoires sont indépendantes. Franchement, je trouve ça beaucoup plus fun que certains Marvel comme l'atroce Iron Man 3 ou encore le correct Ant-Man et la Guêpe. Je n'exclus donc pas de voir d'autres adaptations de comics, un jour...

lundi 5 juin 2023

Au bord du gouffre

Un jeune procureur prend ses fonctions dans un petit village turc. D'emblée, il rappelle à deux notables qu'il n'est ni légal, ni concevable de chasser le sanglier jusque dans les étroites rues de la bourgade. Mais comment imposer le respect d'un code pénal à une population engoncée dans ses traditions ? C'est la question de mon film du lundi !

Enfin... pas tout à fait: si Emre le juriste se heurte immédiatement aux moeurs de ses nouveaux concitoyens, c'est visiblement aussi parce qu'il a soudain mis les pieds dans un monde très corrompu. D'autres sont comme lui venus à Yalnikar et en sont repartis ensuite sans avoir su mettre fin aux dérives de ce territoire en vase clos. Sous un soleil accablant, Burning days illustre le possible égarement d'un homme dont, en quelque sorte, le combat est perdu d'avance. Venu de Turquie et soutenu toutefois par des producteurs d'horizons divers, le long-métrage a bien sûr eu maille à partir avec la censure. Dans son pays, c'est pour sa prétendue apologie de l'homosexualité que les autorités ont réclamé le remboursement des financements accordés. Histoire, sans doute, de décrédibiliser le véritable propos...

C'est incontestable: deux hommes émergent au coeur de l'intrigue. Dont acte. Mais il est clair aussi que le miroir ainsi tendu à la Turquie d'Erdogan renvoie un reflet bien peu flatteur ! Je lisais récemment dans Courrier international que le film a été tourné dans la région centrale de Konya, réputée à la fois conservatrice et nationaliste. Burning days exploite à merveille ce décor aride, parcouru de dolines impressionnantes - le manque d'eau est un enjeu majeur du scénario. Que vous dire alors ? À l'image du personnage principal, j'ai suffoqué d'un bout à l'autre du métrage... soit deux bonnes heures en apnée. Aucun regret, au contraire: les quelques petites longueurs ressenties lors des premières scènes m'ont finalement laissé avec le sentiment d'être moi-même englué dans des sables mouvants, sans vrai espoir d'en ressortir indemne. La fin, elle, paraît ouvrir une (petite) porte. Elle m'a étonné. Le mieux est de vous laisser juger de son réalisme...

Burning days
Film turc d'Emin Alper (2023)

Mon quatrième opus de cette nationalité et mon second du cinéaste ! Le dépaysement n'est pas total, mais la plongée dans le quasi-inconnu aussi intéressante qu'éprouvante, au gré d'une situation (complexe) qui semble devoir toujours s'aggraver pour le premier protagoniste. C'était aussi le cas dans El reino, avec un héros moins sympathique. L'Iran sous tension se visite avec Le client et/ou Un homme intègre.

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D'autres avis sur le film du jour ?

Oui ! Vous pourrez le retrouver chez Pascale, Dasola et Princécranoir.

dimanche 4 juin 2023

Adèle...

Le hasard l'a voulu: j'ai passé plus d'une semaine sans voir de cinéma après avoir entendu les déclarations très enflammées d'Adèle Haenel pour annoncer son retrait des plateaux de tournage. Il est possible que j'y revienne: bien que je ne partage pas tout à fait les opinions radicales de la désormais ex-comédienne, je salue ce qu'elle a réalisé.

Elle va manquer, je crois, et j'espère donc que sa force d'engagement portera d'autres fruits - qu'ils soient artistiques ou non. La manière dont certain(e)s lui tombent dessus me hérisse. J'y vois un symbole des clivages de notre société abîmée et le reflet d'une autre forme d'extrémisme, foncièrement défavorable, elle, aux libertés et droits chèrement acquis au fil du temps - et d'abord par les Révolutionnaires de 1789. Un vaste sujet qui nous éloigne du septième art, c'est vrai. J'y reviendrai avec d'autres films d'Adèle ! Commentaires appréciés...

vendredi 2 juin 2023

La bataille d'Alger

C'est l'évidence même: le cinéma est un art du mensonge. Je l'admire pour sa capacité à nous embobiner et à évoquer des protagonistes prétendument historiques, qu'il met en scène pour notre seul plaisir. Ainsi l'héroïne de La dernière reine n'est-elle peut-être qu'invention. Est-ce très important d'être au clair sur ce point ? Je ne le crois pas...

1516. Zaphira coule des jours heureux et insouciants dans un palais algérois, tout en regrettant que Salim Toumi, son mari et le sultan local, lui préfère Chegga, son autre épouse. Le film montre d'emblée que la situation est plus tendue qu'il n'y paraît: de fortes troupes espagnoles assiègent la ville et, bientôt, les hommes s'embarquent pour une bataille à l'issue incertaine. Le soutien armé d'une cohorte emmenée par le chef corsaire Aroudj Baba-Oruç - alias Barberousse - leur offre cependant la victoire. Reste ensuite à maintenir la paix. Comment ? Depuis la coulisse du pouvoir, c'est ce que le film détaille. J'ai parlé de Shakespeare mercredi: il pourrait avoir écrit le scénario. Je dois toutefois dire que La dernière reine est tout d'abord un film d'une grande beauté, qui nous transporte sans mal dans son époque lointaine grâce à ses somptueux décors et costumes - on s'y croirait. Cette magnificence est sans doute ce qui m'a attiré en premier lieu...

Malgré la violence des hommes, c'est une femme qui donne le tempo de ce (premier) long-métrage venu d'Afrique du Nord. Son existence reste contestée avec véhémence par certains spécialistes, qui jugent que les affabulations du récit lui retirent aussitôt toute pertinence narrative. Je ne suis pas de cet avis: bien au contraire, le caractère romanesque du personnage m'a vraiment convaincu de m'y intéresser. En cinq actes, La dernière reine nous raconte l'histoire d'une femme qui entend garder auprès d'elle l'homme qu'elle aime et sauver l'enfant qu'ils ont eu ensemble. Ce double sujet est très moderne, finalement. L'enjeu politique de l'intrigue n'est certes pas anodin: il vient relever d'une touche épique une oeuvre qui, selon moi, est d'abord intimiste. C'est en ce sens que j'ose vous dire qu'il s'avère presque subsidiaire. Cela ne m'a pas empêché de faire quelques recherches sur l'histoire réelle de cette période troublée. Mais je ne l'ai fait qu'après coup ! C'est une bonne façon de prolonger le plaisir de la séance de cinéma. Vous savez que le septième art a aussi le mérite d'ouvrir des portes...

La dernière reine
Film algérien de Damien Ounouri et Adila Bendimerad (2023)

Oui, un homme et une femme ont créé ce long-métrage épatant ! Mieux: si Damien Ounouri reste derrière la caméra, Adila Bendimerad assure aussi la tête d'affiche, aux côtés notamment de Dali Benssallah et Nadia Tereszkiewicz. C'est un vrai bonheur de cinéphile, pour sûr. J'aimerais le rapprocher d'un film chinois: L'empereur et l'assassin. J'imagine que je n'en ai pas fini avec la référence shakespearienne...

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En attendant d'autres comparaisons...

Je vous laisse lire les opinions de Pascale et Dasola sur l'opus du jour.