samedi 24 décembre 2022

En attendant la suite...

Dis donc ! C'est gentil de passer sur Mille et une bobines aujourd'hui ! Je vous préviens aussitôt: c'est la dernière chronique de l'année. Après un 2022 plutôt intense, je vais laisser ce brave blog inactif pendant les Fêtes et même un peu au-delà - une quinzaine de jours...

J'espère que vous passerez cette période en très agréable compagnie. Les cinémas sont ouverts... et pas seulement pour Avatar : La voie de l'eau, annoncé comme LE probable "carton" de la fin du millésime. L'heure du bilan, ici, n'a pas encore sonné: mes traditionnels tops arriveront en janvier, après mes billets sur mes ultimes découvertes filmiques de décembre (sur petit et grand écrans, comme d'habitude). D'ici là, prenez soin de vous ! Des bises à distance et à TRÈS bientôt !

mercredi 21 décembre 2022

Le force des liens

Je n'ai rien lu de très précis sur ce qui a amené Hirokazu Kore-eda, cinéaste japonais, à tourner son tout dernier film en Corée du Sud. Plaçant le réalisateur parmi mes préférés, je suis allé voir cet opus sans hésiter, en toute confiance, au lendemain de sa sortie en salles. Pas besoin de tergiverser: oui, Les bonnes étoiles m'a beaucoup plu !

Tout commence par une scène vraiment tragique: une jeune femme répondant au nom de So-young abandonne son bébé. L'enfant perdu tombe alors entre les mains de Sang-hyeon et Dong-soo, deux types d'apparence sympa, mais qui n'ont d'autre ambition que de revendre le nourrisson au couple le plus offrant. Oui, mais voilà ! La maman éprouve quelques remords et retrouve rapidement les deux hommes. Elle fait capoter une transaction possible et s'incruste dans l'existence des deux trafiquants, revendiquant le droit de prendre part au choix difficile de la famille d'accueil - et de partager le magot ainsi gagné ! Voilà... à partir de là, l'histoire connaîtra bien des rebondissements...

Si j'aime autant Hirokazu Kore-eda, c'est pour son bel humanisme. Scénariste et monteur de ses films, le Japonais affiche un respect manifeste pour ses personnages et, sans cacher leurs défauts petits et grands, conserve assez d'empathie pour ne jamais les condamner. Inversement, quand il évoque leurs qualités, il n'occulte pas leur part d'ombre. J'y vois une humilité et une sensibilité qui me conviennent. Dès lors, le choix d'un cadre coréen et non japonais me touche également - comme tout ce qui veut bien s'ouvrir vers l'étranger. Autant vous dire que j'ai fait le grand écart après mon film de lundi ! Une évidence: Les bonnes étoiles me correspond (beaucoup) mieux...
 
Comme d'autres opus du même réalisateur, il apporte des émotions contrastées. Pas de noirceur, non, mais pas de happy end non plus. J'apprécie que ces nuances ne soient pas seulement perceptibles qu'avec les dialogues, mais aussi avec les seules images. La musique ajoute parfois une couche inutile, mais là, je chipote gentiment. Encore une fois, j'ai apprécié ici certains plans fixes qui disent plus que de longues répliques - une mise en scène que j'imagine travaillée au cordeau, mais dont la précision me laisse très souvent admiratif. Oui, d'après moi, la performance des acteurs, souvent excellente d'ailleurs, en est sublimée. Pas d'exemple: je vous laisserai découvrir.

Question subsidiaire: Les bonnes étoiles est-il un nouveau sommet dans la carrière de Hirokazu Kore-eda ? Je ne l'affirmerai pas, non. Bien que je n'aie rien d'important à lui reprocher, je peux admettre que certains le jugent trop redondant par rapport à d'autres films précédents du même auteur. Je n'y vois toutefois aucune facilité. Sincèrement, je pense que c'est tout simplement un style unique. Pour ainsi dire: une signature. Je suis heureux de m'y "retrouver". Quelques minutes avant le début de ma séance, une dame profitait que la lumière de la salle soit encore allumée pour donner des infos sur l'univers du réalisateur. J'ai cru un instant faire partie d'un club d'initiés... et il m'a plu d'imaginer l'arrivée de nouveaux adeptes. Vivement le prochain film ! D'ici là, j'en verrai d'autres, sûrement. Comme vous l'aurez compris, celui-là, je vous le conseille, sans délai !

Les bonnes étoiles
Film sud-coréen de Hirokazu Kore-eda (2022)

Je me suis précipité pour voir le film et suis heureux de le défendre comme l'un des plus touchants de cette année finissante. J'ose dire que, dans ce monde souvent fou, ce calme et cette belle humanité font du bien. Et réveillent donc ma vieille envie d'un voyage au Japon. Heureusement que le cinéma est là pour tempérer mon impatience ! NB: d'autres pépites se cachent dans mon index "Cinéma du monde"...

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Et ailleurs, on en pense quoi ?

Pascale en a dit beaucoup de bien, deux jours à peine après la sortie. L'attente a été plus longue pour Dasola... mais l'avis positif, là aussi ! (MAJ - 6 janvier, 18h05: ajouts de liens vers Princécranoir et Strum).

lundi 19 décembre 2022

Une idée de l'enfer

Ils s'appellent Rocky, Money et Alex. Une nana, son copain, leur ami. Plus ou moins une vingtaine d'années. Américains, vivant à Detroit. Rêvant du lointain soleil de la Californie. Leur activité ? La cambriole. Leur cible ? 300.000 dollars planqués chez un ex de la guerre en Irak. Devenu aveugle. Qui a perdu sa fille. Et ne garde qu'un (gros) chien...
 
Dans sa langue d'origine, le long-métrage que j'évoque aujourd'hui s'appelle Don't breathe (Ne respire pas). Histoire de rendre le truc explicite pour mes compatriotes, il est sorti dans les salles françaises avec un sous-titre, La maison des ténèbres, un tantinet trompeur. Stooooop ! Je ne suis pas là pour chinoiser. Si vous avez le coeur solidement accroché, le film pourrait vous plaire (ou vous "convenir"). Bon suspense, dose de gore assumée, échos à la situation sociale d'une certaine Amérique pauvre: il y a de vraies qualités là-dedans. Des défauts, aussi: des personnages caricaturaux, une surenchère dans la violence et, contre toute attente, cinq minutes d'un épilogue inutile parce que du genre cul-cul-la-praline. À vous de voir (ou pas) de quel côté votre balance va pencher: pas d'unanimité possible autour d'un tel opus, il me semble. Mon avis ? Je l'ai trouvé efficace en pure mise en scène. Mais abusant d'un ton trop racoleur, parfois...

Don't breathe - La maison des ténèbres
Film américain de Fede Alvarez (2016)

Anecdote: originaire d'Uruguay, le cinéaste a travaillé avec Sam Raimi comme coproducteur, trois années après une première collaboration pour le remake d'Evil dead - un classique de l'horreur sorti en 1981. Sachez-le: Don't breathe ne raconte pas du tout la même histoire. D'aucuns le relient volontiers à Seule dans la nuit et/ou Panic room. Cela fait beaucoup de références, non ? Elles sont de valeurs inégales.

samedi 17 décembre 2022

Au féminin pluriel

Moins de 20%: pour l'heure, c'est la part des longs-métrages réalisés ou coréalisés par des femmes parmi l'ensemble de ceux que j'ai vus en 2022. C'est loin de la parité, à l'image de l'industrie du cinéma elle-même, mais la proportion est plus forte qu'au cours des années précédentes. Peut-être parce que je prête plus d'attention à ce sujet !

Le 8 mars, j'avais mentionné quelques réalisatrices dont les travaux récents m'avaient plu. Certaines vraies "pionnières" du septième art mériteraient que je les cite (comme je l'ai fait pour Alice Guy Blaché). Clairement, j'ai l'impression d'un très vaste sujet, en me demandant comment m'y pencher en rendant cela intéressant. Je crois en fait que, dans un tout premier temps, je continuerai parfois à l'expliciter quand je verrai un film réalisé par une femme - bien que j'aimerais que personne ne juge cela comme une incongruité ou une anomalie. Détail amusant: j'ai failli confondre Kamir Aïnouz, la cinéaste évoquée jeudi, avec le réalisateur brésilien Karim Aïnouz, connu comme auteur du superbe - et très féministe - La vie invisible d'Euridice Gusmão. C'est après quelques recherches complémentaires que j'ai alors fini par découvrir que Karim et Kamir étaient en réalité frère et soeur. Raison de plus, je trouve, pour couper court à toutes les idées reçues.

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Et la photo ?

J'ai choisi un portrait de Mary Pickford (1892-1979), une grande dame du cinéma muet et amie de Charlie Chaplin. J'espère avoir l'occasion d'en parler plus en détails... dès l'instant où je la connaîtrai mieux ! Généralement, elle est avant tout citée comme actrice et productrice.

jeudi 15 décembre 2022

Vers la liberté ?

Je n'ai pas assez de recul pour savoir si c'est une véritable tendance. J'ai toutefois l'impression qu'un nombre croissant de films s'intéresse à la "condition féminine". C'est le cas de Cigare au miel, sorti l'année dernière et que j'ai pu rattraper sur une chaîne télé très récemment. Un film franco-belgo-algérien assez riche. Le premier d'une cinéaste !

Selma, 17 ans, vit encore chez ses parents - d'ascendance kabyle - lorsqu'elle entre dans une prestigieuse école de commerce parisienne. Lors du concours d'entrée, la jeune femme a dû expliquer aux profs en quoi elle se pensait unique: elle a dit être double, aussi française qu'algérienne. Une posture difficile à tenir face aux clichés racistes d'une partie de ses camarades... et à la culture de ses parents. Bourgeois installés, ces derniers ne soutiennent pas forcément Selma dans toutes ses envies d'être d'abord  une femme libre, de son temps. Cigare au miel est bien, lui, un film de son époque. Une fiction ancrée dans le réel et portée par Zoé Adjani (la nièce d'Isabelle). Convaincante, la jeune actrice joue avec un talent et un engagement manifestes, ce qui permet d'atténuer les quelques défauts du film. Avec elle, des personnages secondaires bien écrits, dont les parents joués par Amira Casar et Lyes Salem, impeccables. Le scénario rappelle des événements du début des années 90 et évoque l'histoire algérienne sans faux semblant. Et malgré une fin un peu expéditive...

Cigare au miel
Film franco-belgo-algérien de Kamir Aïnouz (2021)

Pas incontournable, mais intéressant, ce film est-il passé inaperçu ? D'après mes sources, il n'a généré qu'à peine 6.700 entrées payantes dans les salles françaises. Je tiens à vous assurer qu'il mérite mieux ! Si c'est l'Algérie qui vous intéresse, je vous conseillerais également d'apprécier Papicha, sans doute plus explicite sur la réalité du pays. Autres pistes à suivre: L'Oranais et Le repenti. Une liste à enrichir...

lundi 12 décembre 2022

Ce bon vieux Steven

J'ai du mal à réaliser que Steven Spielberg va avoir 76 ans dimanche. C'est sans anticiper sur cet anniversaire et après une longue attente que j'ai choisi de regarder l'important documentaire que la chaîne américaine HBO lui a consacré en 2017. Au programme: 45 années d'une épopée de cinéma, de Duel (1971)... au Bon gros géant (2016).

Le principal défaut de Spielberg - le film - vient de son caractère univoque: parents, amis et collaborateurs, l'ensemble des témoins donne du réalisateur l'image d'un vrai génie doublé d'un mec bien. Sincèrement, cela ne m'a pas dérangé: je suis largement d'accord avec cette double description. Et si je trouve parfois ce cher Steven trop sentimentaliste, pas de problème: je le crois tout à fait sincère dans son intention de s'adresser au public le plus large possible. Affirmer qu'il a gardé une part de son âme d'enfant n'a rien d'original en soi, mais je pense que c'est vrai et qu'il le revendique lui-même. Alors, pourquoi regarder ce documentaire ? Pour connaître l'homme en-dehors du cinéma et pour comprendre à quel point son inspiration créatrice est imbriquée dans ce qu'il est. C'en est vraiment touchant ! J'ai compté: il me reste huit longs-métrages du cinéaste à découvrir. Sans compter le prochain, attendu en février 2023. To be continued...

Spielberg
Documentaire télé américain de Susan Lacy (2017)

Quatre étoiles... et je n'ai pas d'autres films à comparer avec celui-là. Il faudrait que je me remette à ma quête d'intégrale, déjà évoquée sur ce blog (un peu après la fin du premier des confinements COVID). Je suis de fait de la génération "enfants de Spielberg": j'assume. Impossible toutefois, à ce jour, de me rappeler mon film-découverte. Pour compenser, je souhaite qu'il puisse en réaliser encore beaucoup !

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Une double précision...
Le film montre aussi Spielberg avec ses pairs - Lucas, De Palma, Scorsese ou Coppola, notamment - au tout début de sa belle carrière. Sans oublier son travail de producteur, évoqué assez succinctement...

Et un rappel pour finir...
Trois fictions de ce cher Steven sont sorties après le documentaire. J'ai nommé Pentagon papers, Ready player one et West Side story !

samedi 10 décembre 2022

La non-famille

Autant le dire: je n'ai jamais lu le moindre livre de Christine Angot. J'ai tout d'abord eu du mal à supporter l'attitude erratique de l'autrice lors des (rares) plateaux télé qui me sont tombés sous les yeux. Certaines critiques m'ont ensuite paru très salées ou insultantes. C'est alors que j'ai enfin pu voir Un amour impossible. J'avais hâte...

Le roman éponyme, sorti en 2015 chez Flammarion, a reçu un accueil enthousiaste dans certains médias et vraiment rude auprès d'autres. Selon Wikipédia, il se serait vendu à quelque 150.000 exemplaires. Une petite précision: en bien ou en mal, Christine Angot est réputée pour ses autofictions. Je n'ai  pas cherché à démêler le vrai du faux devant le film, mais je dois vous dire que cette histoire de femme m'a vraiment "embarqué". Virginie Efira y est pour beaucoup: le rôle de la mère de la romancière lui permet de déployer toute sa palette de jeu. Elle passe, sans difficulté apparente, du visage resplendissant de la femme passionnée à la triste mine de celle qu'on a délaissée. Cela dit, Un amour impossible est en fait un titre en trompe-l'oeil. L'héroïne tragique de ce terrible récit ne subit pas la seule violence révélée par le film (et le bouquin, je suppose). La clé de l'intrigue réside dans la grande ambiguïté d'un père que Niels Schneider incarne avec une force et un aplomb que je ne lui connaissais pas jusqu'alors. Bon ! Je préfère tenir secret ce que vous pourriez déjà avoir deviné...

Un amour impossible
Film français de Catherine Corsini (2018)

Quelle histoire ! Et quel beau film ! Je m'attendais à quelque chose d'assez puissant, mais pas véritablement à ce que j'ai vu, au final. Résultat: j'ai désormais bien envie de m'offrir le roman, à l'occasion. Et pourquoi pas un diptyque maternel avec La promesse de l'aube ? Le cinéma offre mille autres visages à celles qui donnent la vie. Exemple: je me souviens avec une grande émotion de Valley of love !

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Il me semble que la blogosphère a plutôt apprécié le film...

Vous pouvez en juger en parcourant les avis de Pascale, Dasola et Lui.

mercredi 7 décembre 2022

Son dernier voyage

Je sais la peine causée par la mort de Gaspard Ulliel aux admirateurs de la jeune garde du cinéma français. Il me reste objectivement beaucoup de ses films à découvrir. Je commence aujourd'hui par la fin en évoquant le dernier: Plus que jamais, que j'ai très vite eu envie d'aller voir. Et même si cela s'annonçait plutôt du genre dramatique...

Hélène souffre d'une fibrose pulmonaire idiopathique. Son système respiratoire fonctionne de plus en plus mal. Son espoir de survie repose uniquement sur la vague perspective d'une double greffe. Lasse de rester enfermée chez elle, la jeune femme se lie d'amitié avec un blogueur norvégien, lui aussi atteint d'une grave maladie. Une relation platonique qui l'incite à entreprendre un dernier périple vers les fjords et la nature, au grand désarroi de Mathieu, son mari. Que dire ? Plus que jamais n'est bien évidemment pas un film rigolo. Par la grâce du duo Vicky Krieps / Gaspard Ulliel, c'est un beau film triste que j'ai aimé pour cela, pour sa pudeur, oui, et sa délicatesse. C'est aussi un film d'amour, évidemment, que ses deux interprètes principaux rendent crédible et bouleversant. Bien qu'omniprésente sous ces latitudes nordiques, la lumière est d'une douceur apaisante. Face aux images, j'ai adopté sans peine une posture contemplative...

La réalisatrice dit avoir conçu "un film sur une femme qui s'émancipe en acceptant de mourir comme elle le veut". Au-delà de son réalisme cru, Plus que jamais s'autorise parfois de brèves incises poétiques bienvenues: la caméra saisit des oiseaux marins survolant les vagues. Ces pauses dans la narration, très belles, permettent de souffler entre deux scènes difficiles. Il y a en outre quelques petites touches d'humour dans ce récit tendu, principalement liées au léger décalage entre ce qu'Hélène imaginait de la Norvège et la réalité de l'existence dans ce pays si différent du nôtre. Il serait plus que tentant ensuite d'embarquer sur un bateau - ou de faire un très long voyage en train - pour aller y voir de plus près, sans attendre qu'il ne soit trop tard. Avant de céder à cette tentation, je voulais ajouter que la fin de vie n'est pas abordée ici sous un angle macabre. Je ne sais pas dire comment je percevrai les choses une fois que tout cela aura "infusé" dans mon esprit, mais je veux croire que je serai ravi d'en reparler. Auparavant et quitte à me répéter, j'insiste sur le talent des acteurs !

Plus que jamais
Film franco-germano-luxembourgo-norvégien d'Emily Atef (2022)

Une longue liste de nationalités, mais tout se tient dans cet opus international, tourné en français et en anglais. Même si le contexte peut expliquer ce ressenti, je dirais que j'y ai aimé Gaspard Ulliel comme jamais auparavant. Vicky Krieps, elle, confirme l'impression favorable qu'elle m'avait laissée avec le très beau Serre moi fort. Autour du deuil, je conseille aussi Mia madre et/ou Vers l'autre rive.

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Et si jamais vous vouliez rester encore un peu...

Je vous encourage à revenir sur la chronique de Pascale, citée lundi.

lundi 5 décembre 2022

Une mère

Rappel: Mahsa Amini, 22 ans, est morte dans un hôpital de Téhéran après avoir été contrôlée par la police pour "port de vêtements inappropriés". Les émeutes qui ont suivi ce drame ont ramené l'Iran sur le devant de la scène internationale - et ce de la pire des façons. Impossible pour moi de l'oublier en vous présentant Juste une nuit...

Feresteh est étudiante. Ses parents vont passer une soirée chez elle avant d'aller rendre visite à un cousin. Seul problème: la jeune femme leur cache qu'elle a un enfant, né tout juste deux mois auparavant. Or, si elle parvient à dissimuler biberons, jouets et couches culottes auprès de ses voisines solidaires, elle peine à identifier quelqu'un pour garder le bébé. Avec une amie de son âge, la voilà donc lancée dans une course rapide contre le chronomètre et l'opprobre familial ! Juste une nuit témoigne d'un épouvantable obscurantisme social. Pourtant, il s'agit bien d'un film du 21ème siècle. Il me faut préciser qu'il est interdit de diffusion dans son pays d'origine. Il me semble que c'est au Festival de Berlin que l'on doit sa venue jusqu'en Europe. On ne dira jamais assez l'importance de ces événements de cinéma...

Il arrive parfois que les films iraniens qui parviennent jusqu'à nous soient un peu caricaturaux, car destinés à émouvoir les bonnes âmes occidentales. Pour être franc, je ne crois pas que Juste une nuit puisse se voir reprocher une telle ambivalence. Sa relative aridité formelle plaide plutôt pour l'idée d'un long-métrage saisi sur le vif. J'ignore tout des conditions du tournage, mais j'imagine volontiers qu'il doit être difficile de faire ce type de cinéma en Iran aujourd'hui sans s'attirer les foudres des autorités. D'où, en fait, mon soutien discret à ces artistes - et techniciens - qui prennent de gros risques pour s'exprimer. Je n'ai pas vu un film superbe, mais une oeuvre sensible qui, à bien y regarder, véhicule une forme de revendication silencieuse. Rien que pour cela, je vous encourage à la découvrir. Dans le rôle principal, la nièce du réalisateur côtoie des comédiens non-professionnels. Je n'ai pas constaté de fausse note dans leur jeu !

Juste une nuit
Film iranien d'Ali Asgari (2022)

En 2011, c'est l'épatant Une séparation qui avait un temps tenu lieu de porte-étendard du cinéma iranien en France: le film avait attiré plus de 976.000 spectateurs en salles - un record qui tient toujours. Ma proposition d'aujourd'hui n'a pas la même intensité, mais reste pertinente pour qui s'intéresse à ce qui peut se passer sur le terrain. Je vous suggère aussi Les chats persans et/ou Un homme intègre...

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Pour finir, un renvoi d'ascenseur...

Je veux dire que c'est à Pascale que je dois la découverte de ce film.

vendredi 2 décembre 2022

À corps perdu

Pourquoi le nier ? J'ai un gros faible pour Fernandel. Sa seule présence aura dès lors suffi à me motiver pour regarder L'armoire volante. Même si elle ne casse pas des briques, cette comédie d'après-guerre possède assez de qualités pour proposer un divertissement honnête. J'ajoute qu'avant de la regarder, je n'en avais JAMAIS entendu parler !

Modeste percepteur de son état, Alfred Puc partage un appartement avec Mme Lobligeois, sa vieille tante. Laquelle refuse obstinément d'écouter les consignes de prudence de son neveu: malgré une météo exécrable, elle compte bien effectuer un aller-retour Paris-Clermont afin de récupérer quelques affaires laissées à son ancien domicile. Problème numéro 1: elle décède subitement sur le chemin du retour. Problème numéro 2: les déménageurs décident d'enfermer son corps dans l'un des meubles qu'ils doivent transporter jusqu'à la capitale. Problème numéro 3: leur camion est volé sitôt arrivé à destination. Décidément, rien ne se passe normalement dans cette folle histoire ! S'agit-il bien d'une comédie ? L'air constamment ahuri de Fernandel contribue à le faire croire, mais L'armoire volante a un côté macabre que bien d'autres films de l'acteur n'ont pas. Ce qui est réjouissant. Musique et mise en scène évoquent parfois les films muets du courant expressionniste allemand. Résultat: on tremble, oui, mais en riant. Sitôt après la guerre, je suppose que les Français en avaient besoin...
 
L'armoire volante
Film français de Carlo Rim (1948)

J'ai passé un bon moment avec cet OFNI imaginé par un réalisateur dont j'ignorais tout jusqu'alors - l'ami d'un certain Marcel Pagnol. Parmi mes (p)références, ce sont Les valeurs de la famille Addams qui dominent au rayon des farces lugubres depuis bientôt 30 ans. D'aucuns vous parleront de Delicatessen, qui s'inscrit au patrimoine français dans le registre bizarre. Si vous avez d'autres suggestions...