mardi 31 décembre 2013

Un étrange voyage

Jeudi dernier, j'avais laissé entendre que ma toute dernière chronique de l'année serait consacrée à une oeuvre idéale pour un réveillon. Après réflexion, j'ai opté pour un très grand classique du cinéma hollywoodien: Le magicien d'Oz. Tourné en studio, ce film restera aussi comme l'une de mes plus anciennes découvertes de 2013: il a été projeté pour la première fois aux États-Unis le 12 août 1939. Moins d'un mois plus tard, le 3 septembre, la France et l'Angleterre déclaraient la guerre à l'Allemagne. On a presque du mal à y croire...

Le magicien d'Oz ? Les producteurs du film nous préviennent d'emblée par l'intermédiaire d'un carton: leur travail s'adresse d'abord à ceux qui sont restés jeunes dans leur coeur. Adaptation d'un roman pour enfants, le long-métrage met en scène Dorothy (Judy Garland), fillette élevée par son oncle et sa tante, au plus profond du Kansas. Ennuyée par une voisine qui maltraite son chien, la demoiselle fugue... avant de bien vite rentrer chez elle. Elle est alors surprise par une tornade qui, en l'espace de quelques instants, la propulse dans un monde imaginaire peuplé de petits êtres, les Munchkins. Conseillée en ce sens par une (gentille !) sorcière, Dorothy prend alors la route vers Emerald City, la ville où elle pourrait bien rencontrer celui qui la ramènera chez elle. Cet étrange voyage lui offrira de faire connaissance avec d'autres personnages bienveillants: l’Épouvantail, l'Homme de Fer et le Lion Peureux. De quoi éviter bien des périls...

Je crois en avoir assez révélé sur le scénario. On dit que Le magicien d'Oz est le film le plus vu du cinéma américain. Les connaisseurs décrivent un tournage très coûteux et difficile. Plusieurs comédiens furent victimes d'accidents, l'une des actrices devant même rester hospitalisée quelques semaines après s'être sérieusement brulée. Techniquement, on évoque également des problèmes avec la couleur, l'intrigue jouant de fait sur une variation, avec des passages en sépia quand c'est la "vraie" vie de Dorothy qui est représentée à l'écran. Autre anecdote: si Victor Fleming demeure le seul à avoir été crédité réalisateur, plusieurs confrères l'ont précédé (ou suivi !). Le résultat vaut heureusement le détour: pour l'époque, les "effets spéciaux" paraissent d'une efficacité remarquable. L'aventure elle-même fleure bon le cinéma vintage et risque d'en laisser quelques-uns sur le bord du chemin. Il n'y a que vous pour savoir s'il vous plairait de la suivre.

Le magicien d'Oz
Film américain de Victor Fleming (1939)

Trois étoiles pour ma bonne impression sur le film et une demie supplémentaire pour honorer son statut d'oeuvre de référence: il faut admettre que le spectacle ne m'a pas emballé plus que ça. J'attendais autre chose, sans bien savoir quoi exactement. En fait, il me semble que le scénario s'adresse plutôt aux bambins. C'est si gentil ! D'ailleurs, et ce sera mon dernier mot, la MGM aurait en fait décidé de mettre le film en chantier pour répondre au triomphe, deux ans auparavant, du premier des Disney: Blanche Neige et les sept nains.

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74 ans plus tard, je ne suis pas le seul à avoir vu ce classique...
Aelezig en parle avec emphase sur "Mon cinéma, jour après jour". Quant à Phil Siné, il est moins enthousiaste (cf. sa "Cinémathèque").

Une anecdote étonnante, maintenant...
En 1939, Judy Garland reçut pour ce film une sorte d'Oscar spécial sous la forme d'une statuette dorée... de petite dimension. L'histoire dit même qu'elle la perdit ! Ce Academy Juvenile Award n'a consacré que douze récipiendaires seulement, entre les années 1934 et 1960.

Ah, un dernier détail sur la musique (oscarisée) du film...
On y entend pour la première fois le standard Over the rainbow.

lundi 30 décembre 2013

Jean, un tournant ?

De m'être offert le DVD de The artist m'a donné une idée: ne pas finir l'année sans avoir dit deux mots sur Jean Dujardin. Loin de ce succès phénoménal connu fin 2011 et début 2012, l'acteur me semble avoir traversé 2013 sur la pointe des pieds. Sa prestation dans Möbius valait peut-être mieux que le million de spectateurs réunis par ce film ambitieux. Nous verrons bien ce qu'en pense l'Académie des Césars fin février: j'ai pour ma part noté avec grand plaisir que la cérémonie serait animée par sa partenaire à l'écran, l'actrice Cécile de France.

Ceux qui ont vu le film se souviendront probablement de l'apparition burlesque de notre Jeannot national dans 9 mois ferme. Qu'attendre de lui, désormais ? Si les gazettes people ont fait état de sa rupture soudaine avec Alexandra Lamy, les cinéphiles, eux, l'attendent assurément au tournant. P'tit Jean est parti conquérir l'Amérique ! Depuis mercredi dernier, jour de Noël, il est à l'affiche du dernier film de Martin Scorsese, Le loup de Wall Street, où il incarne un banquier suisse - j'en reparlerai après l'avoir vu. Ensuite, en mars, on le verra avec George Clooney dans The monuments men - j'y reviendrai également dans quelques semaines. Je suis déjà assez curieux de voir comment il aura négocié ce virage et note que le cinéma français garde l'oeil sur lui: en 2014, il sera un juge engagé dans le combat contre le grand banditisme devant la caméra de Cédric Jimenez. L'occasion de retrouver son pote Gilles Lellouche. À suivre, donc...

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Et pour finir, je vous propose une petite citation...
J'ai eu l'occasion de lire quelques mots de Jean dans une interview récente. "Je ne peux pas me plaindre, affirmait-il. Ce serait indécent. Du moment que je me ressemble encore, que j'essaye de prendre aussi des projets qui me font peur, des choses que je ne sais pas faire, j'ai envie d'apprendre toujours. Toujours. Chaque année. Chaque tournage". À vrai dire, c'est tout le mal que je lui souhaite.

samedi 28 décembre 2013

En plein cauchemar

Le bonheur cinématographique repose entre autres sur la surprise. C'est un peu comme avec les gens dans la vraie vie, en fait. Découvrir qu'un artiste du septième art est capable de prendre à contre-pied l'essentiel de vos attentes pour vous emmener vers un registre nouveau pour lui, je trouve que c'est magique. Et je suis heureux d'avoir ressenti un peu de cette magie devant Le rêve de Cassandre. On a plus ou moins apprécié le choix de Woody Allen de tourner trois de ses films à Londres. Celui-là renforcera le respect que j'ai pour lui.

Un respect teinté d'admiration, pour le coup: dans cet opus britannique, Woody nous embarque dans l'histoire de deux frères, Ian et Terry. Lui qui a filmé d'innombrables quartiers bourgeois s'offre cette fois une incursion dans les milieux populaires. Le film démarre à peine que les deux frangins s'achètent un bateau, petit plaisir jugent-ils, mais vrai caprice d'adulescent, en réalité. Il sera bientôt question de dette excessive et d'absence de solutions pour la régler. Le rêve de Cassandre est en réalité un vrai cauchemar. À peine auront-ils humé l'air d'une vie meilleure que Ian et Terry devront revenir à la réalité de leur (petite) condition sociale. Pour se sortir sans dommage du bourbier financier, ils feront alors appel à un frère de leur mère, riche parmi les riches. Très mauvais choix: la décision les conduira plus bas encore - je vous laisse désormais voir pourquoi et comment. Brillante composition d'Ewan McGregor et Colin Farrell !

Si Woody m'a donc étonné en tricotant cette histoire, il me semble juste de dire qu'il ne renonce pas non plus à toutes ses habitudes. Certes, une fois n'est pas coutume, il a délaissé le jazz pour appuyer ses images et misé sur un compositeur et compatriote, Philip Glass. Le casting féminin, lui, reste dans la norme Allen: d'une beauté éblouissante et d'un talent affirmé. La petite nouvelle de service s'appelle Hayley Atwell, que les fans de séries ont peut-être découvert plus tard dans Les piliers de la Terre. Je retiens surtout la prestation de Sally Hawkins, personnage le plus pathétique du film, femme amoureuse en proie à la névrose de son mari, Don Quichotte combattant sans le savoir un moulin invisible. Vous trouverez peut-être mes explications quelque peu énigmatiques. Dont acte. J'espère avant tout vous donner envie de vous plonger dans ce récit vénéneux. Car c'est bien connu: bien mal acquis ne profite jamais...

Le rêve de Cassandre
Film anglo-américain de Woody Allen (2007)

Avant de s'offrir un petit tour en Espagne, le réalisateur new-yorkais était donc de passage à Londres pour trois films: Match point, Scoop et Le rêve de Cassandre. Des deux que je connais, c'est le dernier que je préfère. En attendant de retrouver la belle Scarlett Johansson dans le volet intermédiaire de cette non-trilogie, je vous invite à oser ce Woody différent des autres, tout à fait digne de l'école britannique du thriller. Il a certes quelques défauts, mais pas de quoi s'en priver.

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Est-ce que mon assertion finale fait l'unanimité ?
Non ! Elle et Lui de "L'oeil sur l'écran" sont moins emballés que moi. En revanche, on parle en bien du film sur "Le blog de Dasola". Plaisir aussi chez "Mon cinéma, jour après jour" et "Sur la route du cinéma".

jeudi 26 décembre 2013

Devoir grandir

L'esprit de Noël sur le blog ? Je vous jure que j'ai essayé de lui donner une certaine consistance. Seulement voilà, le moment venu, j'ai dû me rendre à l'évidence: j'ai très peu de films sur ce thème, fut-il traité sur un mode grinçant ou satirique. Rendez-vous ici même le 31 à midi pour un long-métrage spécial réveillon, mais aujourd'hui, on va se contenter d'une évocation de l'Amérique populaire: Summertime. C'est le tout premier film d'un dénommé Matthew Gordon. Il a obtenu le Prix du scénario au Festival du film américain de Deauville 2012.

Ne vous y trompez pas: Summertime n'a rien à voir avec le standard jazz écrit par George Gershwin - joie des titres en anglais différents des titres originaux ! Le héros du film s'appelle Robbie. Il a 14 ans. Vit seul avec une grand-mère muette et un demi-frère plus jeune. Parents disparus, même si la mère des deux garçons envoie encore une carte postale de temps en temps. Quand le film commence, il est l'heure des grandes vacances. Robbie, qui cache sa situation exacte aux profs de son école, vient d'être puni pour vol. On lui a expliqué qu'il devrait rédiger une dissertation pendant l'été pour être accepté au lycée. Comme si c'était sa priorité. Comme si ce môme perdu avait le temps de penser à autre chose qu'à sa survie. J'imagine bien que ça peut vous sembler plombant, présenté ainsi. J'ai pourtant vu dans ce récit un héritier des vieux romans américains sur les classes populaires. Le Monde citait Mark Twain. J'aurais dit John Steinbeck.

Je ne vais pas tout vous dire, juste qu'il n'y a qu'une demi-douzaine de personnages. L'intrigue rebondit une première fois après l'arrivée d'un grand frère. À vous de voir comment. Si vous avez l'occasion d'apprécier cette oeuvre de débutant, j'ose espérer que vous y serez sensibles. On peut, c'est vrai, passer à côté. Ne pas trouver d'intérêt particulier à la description très prosaïque d'une certaine misère sociale. Reste que les gamins de Summertime sont juste bluffants. William Ruffin, John Alex Nunnery ou Patrick Rutherford dans un rôle plus ingrat encore... ils débutent tous, sauf erreur, et se fondent pourtant parfaitement dans leurs rôles. Le mot qui décrirait au mieux leur prestation serait sans doute "sobriété". Sobre, j'ai en fait trouvé que tout le film l'était, à vrai dire. Le scénario tient en une heure dix. Beaucoup de choses sont dites ou montrées, pourtant, et la longueur paraît suffisante. La fin, elle, est belle, un peu triste et surprenante.

Summertime
Film américain de Matthew Gordon (2011)

On peut louer l'aspect presque artisanal de ce film, 100% indépendant parce que financé par les amis et la famille du réalisateur. Montant total des frais engagés: 300.000 dollars "à peine". Il me faudra essayer de retenir ce nom: Matthew Gordon. J'ose ici un parallèle timide avec le très beau Mud - Sur les rives du Mississippi. L'Amérique a bien autre chose à nous offrir que des blockbusters !

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Une ultime précision... à presque 17h00...

Avant cette fiction, Matthew Gordon a 15 ans de documentaires derrière lui. De quoi mieux cerner et apprécier sa façon de filmer.

Je ne suis pas le seul à aimer le film. À vérifier sur...

- "L'impossible blog ciné" (en version très courte !).
- "Sur la route du cinéma" (de façon plus explicite).
- "Le blog de Dasola" (au milieu d'autres oeuvres).

mardi 24 décembre 2013

Les enfants, sa muse

Je commencerai cette chronique en vous souhaitant à toutes et tous une très joyeuse fête de Noël. Au pied du sapin, j'ai beaucoup hésité cette année avant de choisir les oeuvres qui accompagneront la fin d'année sur Mille et une bobines. Au hasard d'une programmation télévisuelle inattendue, j'ai fini par découvrir Neverland, un joli film consacré à James M. Barrie, l'auteur écossais de Peter Pan (1911). Cette adaptation assez libre d'une histoire vraie a attiré mon regard grâce aux deux comédiens principaux: Kate Winslet et Johnny Depp.

Après visionnage, je confirme: nous tenons là un bon film de Noël. Inutile de vous répéter encore une fois que je suis un grand amateur du cinéma en costumes, pas vrai ? Sur ce plan, Neverland m'a offert une double dose de plaisir: la reconstitution de la Londres victorienne est splendide, mais le long-métrage nous propose aussi une excursion dans l'imaginaire de Barrie, qui ne manque pas d'attrait. Le Pays imaginaire ressuscité ultérieurement par les studios Disney prend ici des allures de paradis pour les petits et grands enfants. L'enfance justement, c'est le thème principal de l'intrigue qu'il nous est donné d'apprécier. On nous montre comment un auteur, créatif mais privé de succès, fait un jour la rencontre d'une famille - quatre garçons encore jeunes et leur mère, veuve depuis peu - et trouve finalement dans leur contemplation l'inspiration d'une oeuvre nouvelle. S'il est question d'amour parfois, le sentiment s'exprime beaucoup de pudeur.

Pas encore tombé dans l'auto-caricature à haute dose, Johnny Depp m'est apparu très touchant, dans ce rôle sensible. Kate Winslet l'honore d'un vis-à-vis parfait, si belle dans ses toilettes d'époque. Quant aux enfants de la distribution, ils jouent très bien leurs rôles respectifs et donnent à penser qu'ils constituent une authentique tribu fraternelle. Les cinéphiles noteront l'apparition d'un Dustin Hoffman barbu dans un petit rôle de directeur de théâtre. Bref, la distribution tient la route ! Un bémol en revanche pour le ton du film: l'idée originelle est bonne, mais il est dommage que le réalisateur ait choisi de forcer le trait sur l'aspect tragique de ce qui s'est réellement passé il y a un siècle. Très belle pourtant et primée d'un Oscar, la musique renforce cette impression désagréable que l'on cherche à nous faire pleurer. Quitte à cela, l'intrigue aurait peut-être gagné à se prolonger jusqu'à l'aube de la guerre. Une autre triste fin aux rêves d'enfant...

Neverland
Film anglo-américain de Marc Forster (2004)

De nationalité suisse, il semblerait que le réalisateur soit aujourd'hui l'un des bons "faiseurs" du cinéma anglo-saxon, sa carrière l'amenant sur des projets très variés - à voir dans mon index, un James Bond avec Daniel Craig et un film de zombies autour de Brad Pitt. Objectivement, le parcours de Johnny Depp est moins aventureux. Disons également que le film d'aujourd'hui confirme que je préfère ses "vieux" longs-métrages, comme Arizona dream par exemple. Pour Kate Winslet, revoyez Eternal sunshine of the spotless mind !

dimanche 22 décembre 2013

Question d'identité

J'étais largement passé à côté du phénomène Guillaume Gallienne. Pour commencer, je lui trouvais un air de Patrick Timsit, bizarre. Ensuite, bien que je l'aie remarqué dans plusieurs films, je ne voyais de lui que sa qualité de sociétaire de la Comédie-Française. Il m'est impossible d'expliquer pourquoi, mais je me méfiais de ce talent. Après bien des évitements, j'ai fini par me rapprocher en entendant parler de Les garçons et Guillaume, à table ! Et si je n'ai pas eu l'occasion de voir la pièce de théâtre, j'ai apprécié le film qui l'adapte.

Vous savez de quoi je parle, non ? Je crois qu'il faudrait faire preuve d'une sacrée inattention pour être parvenu à zapper ce long-métrage sorti fin novembre. À l'aube de la quarantaine, Gallienne y interprète son propre rôle, le rôle de sa vie, dira-t-on. Il joue aussi... sa mère. Les garçons et Guillaume, à table ! C'est ainsi, alors qu'il était enfant, que sa maman appelait ses trois garçons à l'heure du dîner. Absolument fasciné par cette grande bourgeoise, ledit Guillaume n'osait la reprendre et, même, se plaisait dans la peau d'une fille. Trouble identitaire qui, malgré une vraie souffrance, allait le conduire jusque sur les plus illustres planches nationales et, donc, sur l'écran géant d'innombrables cinémas. Illustration de ces années folles d'enfance compliquée, long chemin vers une prétendue normalité retrouvée, le film alterne joliment scènes dans un théâtre et images réinventées du passé révolu. Pour sa première oeuvre de réalisateur cinéma, Gallienne s'appuie sur quelque chose que, bien sûr, il connaît par coeur, mais fait montre d'une réelle maîtrise de l'outil caméra.

Chapeau ! Il est des transitions artistiques bien moins inspirées. Est-ce à dire qu'on tient là la comédie de l'année ? Je ne crois pas. Tenir les deux rôles est certes un vrai tour de force, mais il faut garder en mémoire que, sur scène, Gallienne jouait aussi l'ensemble des personnages secondaires - il n'y en avait peut-être pas autant. Soyons honnête sur ce coup-là: pour moi, le film n'est ni désopilant comme l'affirme Télérama, ni drôlissime comme le prétend Allociné. Je suis d'accord pour dire autre chose: sa grande qualité, c'est bien d'être touchant. Les garçons et Guillaume, à table ! vibre vraiment comme la vibrante déclaration d'amour d'un fils à sa mère, femme entre les femmes, qu'on quitte un jour, mais qu'on ne remplace jamais. Quand la question d'identité d'un enfant exposée ici trouve enfin une réponse, elle débouche sur une autre interrogation, cruelle et tendre à la fois. Il se sera alors passé moins d'une heure et demie pour résumer quelques années de vie. C'est assez pour se demander comment l'adulte va désormais... et vouloir le suivre encore un peu.

Les garçons et Guillaume, à table !
Film français de Guillaume Gallienne (2013)

Même si le processus comique du long-métrage s'appuie franchement sur le travestissement, il me paraîtrait très réducteur de le comparer avec d'autres films mettant en jeu l'ambivalence sexuelle. J'admets simplement que Certains l'aiment chaud m'amuse beaucoup plus. Précisons également qu'on est en tout cas bien loin de l'ambiance débridée - et théâtrale ! - de La cage aux folles. À vous d'en juger...

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Pour vous aider à vous faire une idée sur la chose...
Vous pouvez aussi aller jeter un oeil sur d'autres blogs amis. Exemples: "Sur la route du cinéma" et "Liv/raison de films" donnent tous deux un avis positif, quand "Le blog de Dasola" est plus nuancé.

vendredi 20 décembre 2013

Au-delà du mystère

Au temps des origines du cinéma, elle a su inspirer les frères Lumière et Georges Méliès. Figure pivot de l'histoire de France, symbole national flatté et parfois sali, enfant extraordinaire d'un 15ème siècle désormais oublié, Jeanne d'Arc demeure la muse du 7ème art. J'avais une vraie curiosité à découvrir la vision sur grand écran du cinéaste français Philippe Ramos. Son film, Jeanne captive, avait été présenté à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes 2011. Sans grand retentissement et a priori sans grand succès par la suite.

Comme son titre l'indique, Jeanne captive s'intéresse à une période particulière de la vie de la Pucelle. Quand le film commence, elle est aux mains de Jean de Luxembourg, un notable bourguignon, proche des Anglais. Ce dernier s'apprête à la livrer aux armées hostiles au roi de France, moyennant le versement d'une prime de 10.000 livres. Épisode historique avéré: Jeanne saute d'une des tours du château proche de Compiègne où elle est retenue prisonnière et se blesse sérieusement. Avant de la vendre, il faut donc la remettre sur pied. C'est ce que raconte d'abord le long-métrage. Celle qui déclarait entendre des voix se mure alors dans le silence. Loin des exploits militaires dont la future sainte serait l'initiatrice, la caméra s'empare de son quotidien de détenue. Elle est la seule femme de cette histoire presque muette. Et il faut toute l'empathie d'un médecin ordinaire pour la comprendre encore dans ce tout dernier chapitre de sa vie...

Dans le difficile rôle de l'héroïne, Clémence Poésy peut être contente de sa prestation. Elle compose habilement un personnage de femme solitaire, comme égarée dans une certaine forme de mysticisme. J'aime cette idée que, un peu à l'image du Christ sur la croix, Jeanne puisse se sentir abandonnée par cette même force qui motivait jusqu'alors toutes ses actions. De femme de guerre, elle en redevient femme ordinaire, victime ordinaire d'un âge barbare, bien incapable désormais de sauver sa vie. Si Jeanne captive manque de moyens techniques et demeure un film imparfait, il s'avère assez intéressant pour ce qu'il montre de la relation de cette femme aux autres. Médecin, soldat, bourreau ou bien prédicateur: ceux qui vont croiser son ultime chemin s'en trouveront changés. Ensuite, au bord du fleuve où les cendres d'une jeune Lorraine auront été jetées, la vie pourra reprendre son cours ordinaire. Sans qu'il soit trop tard pour l'aimer...

Jeanne captive
Film français de Philippe Ramos (2011)

Cette Jeanne d'Arc est bien éloignée de celle de Luc Besson, apparue sur les écrans douze ans plus tôt. Je l'imagine également différente de celle de Robert Bresson, découverte en 1994. Je ne vous parle même pas des autres, chez Dreyer, Fleming ou Rossellini. J’espérais ressentir un peu plus d'émotion devant ce film, pour tout vous dire. Notez-le: j'ai quand même vu de belles choses. Au-delà du mystère...

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Le film n'a apparemment pas connu un succès remarquable...

Chez mes voisins, seule Pascale l'a vu ("Sur la route du cinéma").

mercredi 18 décembre 2013

Quand Disney s'active...

Un peu de patience, chers lecteurs: ma prochaine chronique de film arrive après-demain. En ce jour des sorties en salles, je souhaitais d'abord revenir sur une actualité cinéma relative au studio Disney. Une double actualité, même, qui, je l'espère, devrait vous intéresser.

À la toute fin de l'année dernière, déjà, j'avais évoqué ici la vente intégrale de la galaxie Lucas à la compagnie du défunt Walt. L'information n'a pas fait que des heureux et a donné des sueurs froides aux fans de la saga Star Wars, inquiets d'une cohabitation forcée entre Mickey et leurs propres héros, Luke Skywalker, Han Solo et consorts. On en sait plus, désormais: l'épisode 7 de la franchise sortira dans deux ans très exactement, le 18 décembre 2015. L'avez-vous reconnu ? C'est à J.J. Abrams que la production a confié la réalisation de ce nouvel opus. Un choix qui ne fait pas l'unanimité non plus, l'intéressé ayant bossé sur la série antagoniste, Star Trek. Personnellement, je lui accorde le bénéfice du doute. J'attends d'avoir quelques éléments sur le scénario pour me faire une première idée...

Et en attendant, justement, je note non sans un certain amusement que Disney a d'autres souris à fouetter. La firme doit en effet gérer un imprévu étonnant: un groupe de cinéastes amateurs s'est introduit sur ses deux sites américains pour y tourner... un film d'horreur ! "Nous entrions dans le parc avec sensiblement le même matériel qu'utilisent les gens pour leurs vidéos de vacances", expliquait crânement le réalisateur Randy Moore sur Arte il y a quelques jours. Quand j'ai entendu parler d'Escape from tomorrow à la télé, le groupe restait sans réaction, le film étant déjà diffusé dans quelques salles. J'ignore s'il parviendra jusqu'en France, mais ça parait envisageable. Il est déjà mentionné dans la grande encyclopédie Disney disponible sur Internet, présenté comme oeuvre "surréaliste et indépendante".   

lundi 16 décembre 2013

La femme qui chante

J'ai choisi un titre un peu énigmatique pour cette nouvelle chronique. C'est volontaire. Vous comprendrez si vous regardez Incendies. Encore vous faudra-t-il donc vous frotter à ce long-métrage québécois, candidat malheureux à l'Oscar du meilleur film en langue étrangère 2011, ainsi qu'au César du meilleur film étranger 2012. Autant vous dire que c'est un sacré coup de poing pour les âmes jugées sensibles ! Je trouve même des plus pertinents les critiques professionnels qui le présentent comme un genre de tragédie antique.

Il me faut vous dire sans plus attendre que le film s'inspire d'une pièce de théâtre du même nom, oeuvre de Wajdi Mouawad, dramaturge canado-libanais. Le texte primitif, lui, puise son propos dans la vie d'une dénommée Souha Bechara - Wikipedia explique tout en détails. Pour en revenir au film, maintenant, j'indique qu'il nous met d'abord en contact avec Jeanne et Simon, deux jeunes Québécois de Montréal qui viennent de perdre leur mère. Au moment de prendre connaissance des dernières volontés de leur parente, ils découvrent avec stupeur qu'elle leur a confié une toute dernière tâche: retrouver leur père et leur frère pour ensuite remettre à chacun une lettre. Problème: Jeanne et Simon, jumeaux, étaient jusqu'alors persuadés que leur père était mort avant leur naissance. Pire, ils ignoraient totalement qu'ils avaient un frère. Incendies s'attache donc aux pas d'adultes sommés de regarder en arrière pour y retrouver une trace effacée. Le chemin les mènera jusqu'au Moyen-Orient. Le scénario reste muet sur la destination précise. L'intrigue demeure universelle.

Au-delà de la marche d'un pays en guerre, c'est bien à une famille qu'on nous propose de nous intéresser. Pour cela, il faut vite prendre garde de ne pas se laisser décrocher: mère et fille, les personnages féminins du film se ressemblent un peu. Dès lors, sauf à être particulièrement attentif, le montage, alternance d'événements passés et de scènes du présent, peut certes dérouter de prime abord. À ceux qui s'adapteront à ce dispositif narratif, Incendies apportera toutefois une bonne dose d'émotion. Il me paraît impossible d'appréhender ces images sans jamais frémir devant ce qu'elles disent du monde d'aujourd'hui. L'intelligence du récit tient à ce que le film parvient à conserver une certaine neutralité, parce qu'il ne fustige aucune appartenance nationale, politique ou religieuse. L'essentiel n'est pas là: je redis que, plutôt que d'idées, il est surtout question des destinées d'hommes et de femmes relativement ordinaires, pris dans la tourmente d'événements sur lesquels ils n'ont aucun contrôle. Vous en tremblerez sûrement encore bien après la révélation finale...

Incendies
Film canadien de Denis Villeneuve (2010)

Jetez un oeil à la programmation du cinéma près de chez vous: il est possible que vous y retrouviez Prisoners, le premier film américain du même Denis Villeneuve. Je découvre ce cinéaste: il vous faudra attendre avant que je puisse vous parler du reste de sa filmographie. D'ici là, n'hésitez pas à consacrer un peu de votre temps à ce film tourné sur la quête des origines. Je n'en vois pas d'autre qui puisse véritablement lui être comparé. Je suis preneur de vos suggestions !

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D'accord, je comprends que vous ayez besoin d'autres avis...

Je vous propose donc de faire un tour sur "L'impossible blog ciné". Autres options: "Le blog de Dasola", "La cinémathèque de Phil Siné" ou encore "Sur la route du cinéma". Il ne vous reste plus qu'à cliquer !

samedi 14 décembre 2013

Sa profonde conviction

Sommes-nous seuls dans l'univers ? Certains se persuaderont que oui. D'autres imaginent que ce n'est pas possible. Je n'ai pas d'avis tranché sur la question. Elle est toutefois au coeur du film dont je voudrais vous parler aujourd'hui. C'est un ami (salut, Jean-Mi !) qui m'a donné envie de le regarder. Contact me plaît moins qu'à lui. Le personnage central est pourtant intéressant: passionnée par la science astronomique depuis qu'elle est toute petite, Eleanor Ann Arroway écoute les échos spatiaux dans l'espoir d'y détecter... quelque chose.

Et, un bruit différent, c'est précisément ce qui survient un jour ! Partant de là, notre femme savante ne cesse de répéter urbi et orbi que l'humanité vit un moment historique et qu'il convient dès lors d'offrir aux chercheurs la possibilité de poursuivre leur exploration pacifique du cosmos. Dans le même temps, l'opiniâtre miss Arroway tente aussi de se positionner comme une bonne candidate au voyage interstellaire. Je vous passe les détails explicatifs et le jargon technique qui vient un peu embrouiller le scénario: Contact demeure avant tout un portrait à la gloire de Jodie Foster, actrice principale que j'ai connue meilleure dans d'autres rôles. Je regrette en fait que, parti pour nous offrir un tour dans l’infiniment grand, le long-métrage reste bêtement cloué au sol. Je crois qu'il y avait bien mieux à faire.

Que manque-t-il finalement pour que ça décolle ? Trois fois rien. Peut-être bien un traitement plus franc de la grande interrogation fondamentale énoncée au départ et des réponses qu'y apportent la foi religieuse et l'approche scientifique. Contact ouvre des pistes intéressantes, mais tout se passe comme s'il ne fallait surtout vexer personne. Il aurait aussi été possible de faire du professeur Arroway une pionnière des temps modernes, sans véritable attache affective terrestre, prête à tout pour découvrir un nouvel horizon et repousser ainsi les frontières d'une vie par trop étriquée. Las ! Tout semble plutôt la retenir, a fortiori à la toute fin du film, quand il s'avère qu'elle ne parvient finalement pas à dépasser sa profonde conviction pour développer un argumentaire solide. Tout ça est fort frustrant...

Contact
Film américain de Robert Zemeckis (1997)

Bien foutu et plutôt bien joué, le long-métrage n'est pas méprisable. Je ne suis pas entré dedans, voilà tout. Il n'est de fait pas impossible que son âge y soit pour quelque chose. Je m'en passe, en règle générale, mais cette fois, un peu d'effets spéciaux aurait pu faire monter la mayonnaise. Quitte à voir un film désormais un peu ancien avec un mystère planant autour de la vie extraterrestre, je vais continuer à vous conseiller Abyss. Et ne pas dire un mot de plus...

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Outre Jean-Mi, d'autres internautes ont aimé le film...

J'en veux pour preuve la chronique sur "Mon cinéma, jour après jour".

jeudi 12 décembre 2013

Sur la touche

Je l'ai déjà dit, non ? Il y a certaines bandes annonces qui me font fermer les yeux. Non pas que le spectacle me soit désagréable: il est cependant des films que j'aime découvrir sans autre information préalable que ce que je peux avoir lu dans les journaux. J'ai gardé mes yeux ouverts devant la bande-annonce d'Inside Llewyn Davis. Incroyable mais vrai: je me suis surpris... à frissonner ! Il me semble me souvenir que c'est la musique qui m'a fait réagir ainsi. L'excitation de voir arriver un nouveau film des frères Coen a titillé ma patience !

Je suis finalement retourné au cinéma quinze jours après sa sortie. L'impression favorable venue des premières images s'est confirmée. Je l'exprime donc: Inside Llewyn Davis est l'un des plus beaux films que j'ai vus cette année. Son personnage principal est un guitariste de la scène folk américaine, à l'aube des années 60. Souvent fauché comme les blés, il a jadis enregistré un 33 tours qui n'a guère marché et gagne quelques pauvres dollars en jouant dans un club. Il attend d'illusoires jours meilleurs en dormant nuit après nuit sur le canapé d'un couple de pseudo-amis. Il semblerait que même la chance s'écarte de lui pour offrir ses services à d'autres, sans aucun souci d'équité. Bref, Llewyn bouge souvent, mais n'avance jamais. Il reste inexorablement sur la touche. Les Coen ont l'habitude de ces paumés d'entre les paumés, mais ici, ils dévient un peu de leur démarche habituelle: leur héros n'est pas crétin. Il a juste du mal à s'en sortir.

C'est notamment en cela que, malgré ses gros défauts, il m'a paru touchant. Voir ce jeune mec s'accrocher vaille que vaille à son rêve musical et faire des kilomètres pour rencontrer l'impresario vedette supposé faire décoller sa carrière, ça m'a ému, oui. Il paraît si vrai ! Et si moderne, aussi ! Combien d'adultes et adolescents tardifs ont-ils comme lui poursuivi un idéal sans se ranger à ce qui est prétendument plus sage ? On a tous en nous quelque chose de Llewyn. C'est en tout cas porté par ce sentiment que j'ai apprécié le film. Inside Llewyn Davis m'a aussi semblé techniquement irréprochable. La musique compte bien sûr beaucoup dans cette impression: il faut saluer le choix des Coen de filmer les morceaux en entier. Les acteurs chantent eux-mêmes et c'est vibrant ! Les frangins et leurs équipes ont également un superbe boulot de reconstitution et réuni un casting de rêve. Bref, je dis qu'ils ont bien mérité leur Grand Prix cannois !

Inside Llewyn Davis
Film américain d'Ethan et Joel Coen (2013)

J'ai le sentiment d'oublier quelque chose d'important, mais tant pis ! Vous découvrirez le reste par vous-mêmes: ce n'est pas plus mal ainsi. Pendant la projection, je pensais à classer les films des frères Coen selon leur qualité - celui d'aujourd'hui serait alors placé haut dans mon panthéon personnel... et provisoire. Je me souviens également de deux grands films musicaux vus cette année, aux styles et enjeux tout à fait différents: Sugar Man et Alabama Monroe.

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Vous connaissez la chanson ?
Vous savez donc pouvoir trouver d'autres avis sur le film sur les blogs ciné. J'en ai lu, moi, sur "Le blog de Dasola", "Liv/raison de films", "Sur la route du cinéma" et "La cinémathèque de Phil Siné". À vous !

mardi 10 décembre 2013

Magique et mélancolique

Il peut y avoir quelque chose d'assez formidable à être encore étonné par quelqu'un qu'on croyait connaître. Alors que son ultime film sortira dans les salles au début de l'année prochaine, je me suis laissé surprendre par Hayao Miyazaki autour d'une oeuvre de plus de 20 ans. Certes, j'avais cherché à éviter toute information sur Porco Rosso. Cela dit, alors que le vieux maître japonais m'avait habitué aux fables mythologiques et/ou écologistes, il montre ici une toute autre facette de ses grandes facultés, ainsi qu'une culture historique très étendue.

Porco Rosso - le cochon rouge, en italien - est un personnage atypique: un pilote d'hydravion, rescapé de la première guerre mondiale, qui gagne sa vie comme chasseur de primes aérien. Parvenir à rendre crédible ce point de départ, c'est le premier signe du talent d'un créateur. Pour ma part, je suis non seulement entré tout de suite dans cette histoire, mais j'ai par ailleurs très vite oublié qu'il s'agissait d'un dessin animé. Et quel dessin animé, mes enfants ! Même adulte, il est difficile de ne pas s'émerveiller devant ce style inimitable et reconnaissable entre tous. En fait, Hayao Miyazaki aime ce qu'il crée et ça se voit ! Je suis trop peu connaisseur de l'aviation pour vous en dire plus, mais il est sûr que le maître s'est documenté. Et, de fait, ce n'est jamais au détriment du plaisir et de l'émotion...

Ce petit miracle sur pellicule s'incarne parfaitement dans son héros. L'intrigue nous offre de frissonner grâce aux valeurs chevaleresques défendues par ce dernier, mais désormais dépassées, comme conçues pour un autre temps. Et vu que Porco Rosso parle aussi d'engagement et d'amour, il enferme en lui beaucoup de mélancolie - ce que vient d'ailleurs sublimer un magnifique générique final et la petite scène cachée derrière. Vous noterez que je n'ai rien dit des personnages "secondaires" du film. Si j'ai choisi de mettre des guillemets, c'est bien parce qu'ils ne le sont pas vraiment, secondaires. Improbables parfois, ils sont en revanche tous humains. Le pilote à face de cochon a deux femmes dans sa vie: celle qui espère son retour sur la terre des hommes et celle qui répare son avion. Mais il vole en solitaire...

Porco Rosso
Film japonais de Hayao Miyazaki (1992)

Je reviens à mon titre: ce film est magique et mélancolique. Alchimie parfaite entre l'émerveillement premier et un arrière-plan historique plus sombre - l'intrigue parle de la montée du fascisme, notamment. D'après moi, c'est sûrement l'oeuvre la plus adulte du vieux senseï. Elle préfigure peut-être ce que sera Le vent se lève, qui sortira donc cet hiver pour évoquer paraît-il d'autres avions... et Hiroshima. Avant que je ne vous en reparle, vous retrouverez d'autres Miyazaki sur ce blog. Je place Porco Rosso parmi les meilleurs. Mes préférés demeurent toutefois Le voyage de Chihiro et Ponyo sur la falaise.

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Ce que vous pouvez faire aussi pour prolonger le plaisir...
C'est aller lire l'avis (très positif) publié du côté de "L'oeil sur l'écran".

dimanche 8 décembre 2013

Pirates des Caraïbes

Errol Flynn ne comptait que quelques rarissimes et brèves apparitions à l'écran quand Michael Curtiz, face au désistement de l'acteur choisi initalement, lui offrit le premier rôle de Capitaine Blood. Le film marqua le vrai début d'une collaboration fructueuse, les deux hommes ayant travaillé de concert à douze reprises en tout. Je vous parle aujourd'hui d'une oeuvre commune qui a marqué l'histoire du cinéma. En effet, elle constitue également l'un des premiers longs-métrages parlants consacrés à la piraterie. Johnny Depp n'a donc rien inventé...

Bien évidemment, de nos jours, les aventuriers de cape et d'épée parvenus à traverser les ans vivent des aventures plus spectaculaires. Il n'empêche: j'ai de l'affection pour ce cinéma d'un autre temps. Qu'importe la modernité tapageuse: bien qu'il soit évident que le film a essentiellement été tourné en studio, le réel talent des techniciens pour sublimer décors, costumes et accessoires me remplit d'aise. Autre "détail" agréable: Capitaine Blood a pour héros un homme ambigu, médecin à l'indépendance d'esprit chevillée au corps, devenu esclave pour avoir refusé de se soumettre à l'autorité d'un juge corrompu. Un voyage à fond de cale et quelques péripéties militaires plus loin, voilà notre homme passé dans la joyeuse amicale des frères de la côte, chef respecté de ses amis et compagnons d'infortune. Attentif aux paradoxes, le spectateur moderne s'interrogera peut-être sur la légitimité réelle de ce parcours. Rien d'obligatoire, à vrai dire.

Autant monter à bord et profiter pleinement du spectacle ! Je défie quiconque d'être tout à fait insensible au charme de cette petite perle du Hollywood vintage, passée tout près de l'Oscar, parait-il. L'épatant dans tout ça, c'est l'âge des protagonistes: Errol Flynn n'a que 26 ans et sa partenaire, la belle Olivia de Havilland, à peine 19. Je précise que Capitaine Blood est l'un de ses premiers films à elle aussi, en fait le quatrième, sauf erreur de ma part. Jeunesse triomphante ! Sorti pour les fêtes de Noël 1935, le film est un grand succès populaire. Délicieuse anecdote: un peu plus d'un an plus tard, en février 1937 précisément, il fait l'objet d'une adaptation... sur les ondes radiophoniques, les principaux comédiens reprenant alors leur rôle pour une version parlée de 60 minutes. Autres temps, autres moeurs. J'imagine que certains passeront devant le film sans se retourner. Dommage: hisser la grand voile, ça offre toujours de belles émotions.

Capitaine Blood
Film américain de Michael Curtiz (1935)

Curtiz, Curtiz... ce nom vous dit quelque chose ? Normal, les amis ! C'est celui du réalisateur de Casablanca, rien de moins. 24 films s'intercalent entre les deux oeuvres, bien que la seconde soit sortie dès 1943 ! J'aurai tout loisir de vous parler d'autres opus du cinéaste. J'imagine que certains pourront s'inscrire dans une lignée stylistique et scénaristique, mais je ne veux pas trop préjuger, juste citer L'aigle des mers comme une escale possible. Et hardi, moussaillons !

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Notez que ceux qui resteront au port ont de la lecture...

Je leur propose en effet d'attendre la marée chez "L'oeil sur l'écran".

Un dernier mot pour les amoureux de la culture vidéoludique...
Sans véritable rapport apparent, en 1988, la société française Exxos lance un jeu vidéo baptisé L'arche du Captain Blood. Une histoire d'extraterrestres, en partie mise en musique par Jean-Michel Jarre.

...et, datée du lundi 9 décembre, à 20h15...

La conclusion ultime de cette chronique pour répondre à la question de Chouguy en section commentaires: oui, cette Olivia de Havilland est bien la même que celle qui joue dans Les naufragés du 747. Aujourd'hui, je ne peux pas dire grand-chose de plus sur ce film sorti en 1977: je ne l'ai jamais vu. Un petit tour sur Wikipedia m'apprend qu'il s'agit d'un film-catastrophe de Jerry Jameson, autour d'un avion. Avec aussi Jack Lemmon, Christopher Lee et Joseph Cotten ! Précisons enfin qu'Olivia de Havilland vit toujours: elle a 97 ans.

jeudi 5 décembre 2013

Chasse aux diamants

Aujourd'hui, un film passé tout près des cinq étoiles, récompense réservée aux longs-métrages que j'aime depuis longtemps et revois toujours avec le plaisir de la première fois. Je ne sais trop dire pourquoi j'ai amputé Un poisson nommé Wanda d'une petite partie de ce trophée très rarement décerné. Peut-être parce que je connais presque par coeur la version française de cette comédie britannique. C'est en tout cas ce que je me suis prouvé en la regardant à nouveau après au moins six années d'abstinence. C'est toujours un vrai régal.

Résumons. Wanda n'est pas que le nom d'une espèce océanique élevée en aquarium, c'est aussi et surtout celui d'une Américaine sexy débarquée à Londres pour commettre un casse de grande ampleur. Autour d'elle, il y a Otto, crétin qui lui sert d'amant tout en feignant d'être son frère, Ken, bègue et ami des animaux, et George, cerveau supposé de l'opération. Oui mais voilà: rapidement, pour une raison que vous découvrirez dans le film, ce dernier est arrêté par la police et c'est alors Archie, son avocat, qui entre dans la partie. Le scénario multiplie ensuite les chassés-croisés entre les personnages et propose un vaste choix d'entourloupes. Le rythme impeccable d'Un poisson nommé Wanda fait qu'on ne s'ennuie pas un instant - sauf à trouver ça débile, bien sûr, mais je ne vous ai rien dit, vous comprendrez aisément en profitant de cet humour explosif, mais jamais méchant.

Côté acteurs, on atteint des sommets. La jolie Jamie Lee Curtis, fille de Tony, rayonne en toute immoralité. Les mecs ? Deux joyeux drilles et ex-Monty Python: Michael Palin et John Cleese. Je n'enlèverais rien au talent du premier, mais le second est un véritable monument burlesque, une parfaite caricature d'Anglais, dans le pur style victorien, psychorigide au départ et tout à fait excentrique ensuite. J'imagine déjà que je reverrai un jour Un poisson nommé Wanda pour le seul plaisir de la version originale. Il faut dire que les gags reposent largement sur l'opposition anglo-américaine, chaque camp en prenant d'ailleurs pour son grade. Néanmoins, c'est l'Américain Kevin Kline qui doit garder le meilleur souvenir du film: ce qu'il a fait d'un rôle d'idiot lui a valu l'Oscar, décerné par... trois de ses confrères britanniques, à savoir Michael Caine, Sean Connery et Roger Moore !

Un poisson nommé Wanda
Film britannique de Charles Crichton (1988)

Monteur dans les années 30 et 40, puis metteur en scène de cinéma entre 1944 et 1964, l'homme de télévision qu'était aussi Crichton sortait d'une période de 24 ans sans s'être consacré au grand écran quand il tourna ce petit chef d'oeuvre comique, son tout dernier film. Huit ans plus tard, la troupe Curtis / Kline / Cleese / Palin fut réunie pour Créatures féroces, que j'aimerais revoir, même si j'en garde aujourd'hui un souvenir moins drôle. Faire rire est un art difficile. Autodérision et jusqu'au boutisme sont à mon avis ses deux moteurs. Sur ce point au moins, les Anglais ont souvent, je crois, tout compris.

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Un de mes voisins de blog aime aussi le film...
Sa chronique de "L'oeil sur l'écran" vous l'expliquera mieux que moi.

mercredi 4 décembre 2013

Un signe du cygne

La venue récente de mes parents à la maison m'a permis de revoir avec eux un film enregistré à leur intention: Black swan. J'invite celles et ceux d'entre vous qui ne connaissent pas ce thriller urbain sur fond de Tchaïkovski à se reporter aux liens de fin de chronique. Après déjà deux avis publiés sur Mille et une bobines, je préfère éviter de me répéter et je crois intéressant... de parler d'autre chose.

Un mot sur l'actrice principale du film, Natalie Portman, donc. L'année prochaine, la belle fêtera les 20 ans de sa première apparition cinéma. C'était dans Léon, de Luc Besson, un premier rôle déjà. Discrète entre deux épisodes de la franchise Thor, la jolie trentenaire a eu un enfant avec l'un de ses partenaires à l'écran, le chorégraphe français Benjamin Millepied. Les gazettes qui font commerce d'infos prétendument croustillantes parlent d'ailleurs d'une installation prochaine dans notre beau pays. En attendant, Natalie tourne toujours et sera notamment à l'affiche du prochain Terrence Malick. Après ce Knight of cups, on l'annonçait aussi dans un western américano-britannique, Jane got a gun, mais le projet semble battre de l'aile actuellement. À 33 ans, Natalie pourrait bien également livrer son premier long-métrage personnel, A tall of love and darkness. L'adaptation d'un livre d'Amos Oz, vendu à 28 millions d'exemplaires.

Aujourd'hui, je voulais aussi vous parler de Darren Aronofsky. Inutile de regarder en arrière: si vous souhaitez connaître sa carrière détaillée, l'index des réalisateurs recense quatre de ses cinq films sortis à ce jour - les quatre plus récents, en fait. Désormais, il est lancé dans un projet pharaonique: Noé, un film sur le personnage biblique. C'est une production dont il parle depuis six ans et un héros qui le fascine paraît-il depuis l'enfance. Le rôle principal a été confié à Russel Crowe, après que Michael Fassbender et Christian Bale ont été pressentis. Je ne suis pas fan de l'Australien, mais je surveille quand même le tournage d'un oeil discret, intéressé par le cinéaste. Le long-métrage est attendu pour le 28 mars aux États-Unis, le 9 avril en France, dates sujettes à modification selon Wikipedia. Il semble en effet que le projet ait pris de retard, même si une première bande annonce et une affiche circulent actuellement sur le Net. À suivre...

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Black swan, c'est un film souvent cité sur les blogs tels que...
- "Sur la route du cinéma".
- "La cinémathèque de Phil Siné".
- "Mon cinéma,  jour après jour".
- "L'impossible blog ciné".
- "Le blog de Dasola".

Et c'est donc aussi un Oscar pour Natalie Portman...
Mille et une bobines en a d'abord parlé sous la plume de Moko-B. Après quoi, j'ai pris le relais avec ma propre chronique.

lundi 2 décembre 2013

Affaire de coeur

Créance de sang est loin d'être le meilleur film de Clint Eastwood. C'est dit. Bien qu'inspiré d'un roman de Michael Connelly, ce thriller est beaucoup trop convenu pour rivaliser avec les meilleures oeuvres du maître. Clintounet y joue très sagement un agent du FBI temporairement rangé des filatures pour cause d'infarctus. L'admirateur transi que je suis saura l'admettre franchement: le coup de ce Terry McCaleb devenu détective privé pour reprendre du service n'a rien de crédible. Et, ô désarroi ! La suite est du même tonneau.

Imaginez un peu: si, après les tergiversations d'usage, la légende vivante accepte de venir en aide à une femme, c'est parce qu'il a compris qu'il était porteur... du coeur de sa soeur. Créance de sang est un titre cohérent, présenté ainsi. Vous vous doutez sûrement que, dans cette situation, le gars ne reste pas débiteur bien longtemps. L'intrigue, elle, recycle à l'envi tous les poncifs du genre: héros solitaire, flics incompétents, tueur au mobile extravagant, femmes mêmes-pas-fatales réduites au rang de faire-valoir. La participation d'Anjelica "Morticia" Huston m'avait laissé espérer plus de noirceur. Avec quelqu'un d'autre qu'Eastwood derrière la caméra, je me dis alors que j'aurais eu envie de zapper. Reste le plaisir coupable d'arpenter les sentiers battus d'un réalisateur respecté. Rien de très excitant.

Il faut plonger loin dans les accessits de la 59ème Mostra vénitienne pour trouver la trace d'un trophée venu récompenser le film. Il faudra quand bien même apprécier la toute dernière apparition de Clint Eastwood dans la peau d'un flic. Un conseil: si vous tombez dessus prochainement, ne regardez pas les bonus du DVD, qui dévoilent paraît-il le nom de l'assassin ! Personnellement, voyant l'heure tourner sans apparition de personnage marquant, je n'ai pas attendu longtemps avant de tout comprendre (ou presque). Je conclurai donc en disant que ce long-métrage, élément mineur d'une filmographie aux succès divers et nombreux, m'aura simplement permis d'accomplir un pas de plus vers l'un de mes buts: avoir vu la totalité des films de mon idole. Créance de sang ? Je devrais vite l'oublier.

Créance de sang
Film américain de Clint Eastwood (2002)

Jeff Daniels (deuxième photo) méritait sans doute mieux, lui aussi. Au rayon des semi-déceptions, le long-métrage serait en fait le voisin de deux films plus anciens: Les pleins pouvoirs et Jugé coupable. D'Eastwood, j'ai quasiment vu tout ce qui a suivi, à l'exception notable du film tourné aussitôt après: Mystic river, pour lequel Clint est - sagement ? - resté derrière la caméra. Je vous en reparlerai probablement tôt ou tard. Vous dire aussi que mon coeur à moi bat toujours plus fort devant Impitoyable ou Sur la route de Madison.