Je vous ai parlé en avril de deux films israéliens. Six autres ont été présentés en sélections parallèles lors du dernier Festival de Cannes. Celui que je veux évoquer aujourd'hui vient d'un artiste en résidence à la Cinéfondation, l'institution de Gilles Jacob destinée à identifier quelques nouveaux jeunes talents du cinéma mondial. Sous son titre simplissime, Le policier cache une oeuvre d'une intelligence formelle rare, appréciable. C'est un long-métrage limpide et sombre à la fois. Limpide dans son déroulement, sombre dans ce qu'il exprime, en fait.
Actrice française exilée volontaire en Israël, Sarah Adler, 36 ans mercredi prochain, assurait il y a peu, sur la Croisette, que le cinéma israélien ne saurait se réduire à un commentaire sur l'état du pays. Question: Le policier aborde-t-il une autre thématique ? Pas sûr. L'intrigue tourne d'abord autour d'un groupe de flics, dont la spécialité est la lutte contre le terrorisme. Yaron, le personnage du titre, n'a que peu de différences avec ses collègues et entretient avec eux l'amitié virile des combattants légitimes. S'il se distingue, c'est juste parce qu'il va bientôt être père - il demande d'ailleurs à sa femme d'éviter d'en parler ouvertement, par pure superstition. Le film s'intéresse ensuite à Nathanaël, Shira et Oded, un groupe de jeunes pétris d'intentions révolutionnaires. Ils écrivent et s'efforcent d'apprendre par coeur un discours pseudo-égalitaire, prétendu support idéologique de l'attentat qu'ils fomentent. Je vous laisse découvrir comment ce scénario se noue et se dénoue. J'ai parlé d'intelligence formelle: le montage ne cesse de retarder la confrontation attendue.
Est-ce que cela suffit à faire un bon film ? Je dirais: à vous de voir. Nadav Lapid, le réalisateur, montre en tout cas que l'ennemi d'Israël n'est pas toujours palestinien - la "révélation" vient d'ailleurs choquer certains des personnages, si ce n'est également l'antihéros lui-même. Une chose est certaine: s'il ne justifie pas la violence, le long-métrage s'écarte radicalement d'un manichéisme ordinaire. Les représentants de la loi ont leurs petits et gros défauts: leur fameuse solidarité professionnelle, par exemple, s'efface bien vite quand leurs méthodes sont contestées. Par ce propos, le cinéaste-scénariste s'assure donc un joli (premier) coup: il lui a notamment valu le Prix spécial du jury international du festival de Locarno, en 2011. Cet intéressant travail peut également s'analyser comme la violation d'un tabou, son auteur indiquant que le thème de la fracture sociale est longtemps resté absent des médias de son pays. Le policier nous offre une occasion d'appréhender Israël autrement - ce n'est pas sa moindre qualité. Certains ont estimé que sa construction rendait le film un peu bancal.
Le policier
Film israélien de Nadav Lapid (2011)
Ceux qui s'intéressent aux aspects techniques du cinéma auront noté que le chef-monteur est une femme, Era Lapid, mère du réalisateur. Son style donne vite l'impression d'un enfermement: l'intrigue avance tout droit vers une inexorable et sanglante conclusion, sans effacer pourtant une réelle tension dramatique. La froideur du tout maintient une distance, comme dans The killer inside me. En moins racoleur.
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Et vu par d'autres, ça donne quoi ?
Pascale ("Sur la route du cinéma") a beaucoup aimé. Phil Siné simplement apprécié, avec un autre regard (cf. sa "Cinémathèque).
Actrice française exilée volontaire en Israël, Sarah Adler, 36 ans mercredi prochain, assurait il y a peu, sur la Croisette, que le cinéma israélien ne saurait se réduire à un commentaire sur l'état du pays. Question: Le policier aborde-t-il une autre thématique ? Pas sûr. L'intrigue tourne d'abord autour d'un groupe de flics, dont la spécialité est la lutte contre le terrorisme. Yaron, le personnage du titre, n'a que peu de différences avec ses collègues et entretient avec eux l'amitié virile des combattants légitimes. S'il se distingue, c'est juste parce qu'il va bientôt être père - il demande d'ailleurs à sa femme d'éviter d'en parler ouvertement, par pure superstition. Le film s'intéresse ensuite à Nathanaël, Shira et Oded, un groupe de jeunes pétris d'intentions révolutionnaires. Ils écrivent et s'efforcent d'apprendre par coeur un discours pseudo-égalitaire, prétendu support idéologique de l'attentat qu'ils fomentent. Je vous laisse découvrir comment ce scénario se noue et se dénoue. J'ai parlé d'intelligence formelle: le montage ne cesse de retarder la confrontation attendue.
Est-ce que cela suffit à faire un bon film ? Je dirais: à vous de voir. Nadav Lapid, le réalisateur, montre en tout cas que l'ennemi d'Israël n'est pas toujours palestinien - la "révélation" vient d'ailleurs choquer certains des personnages, si ce n'est également l'antihéros lui-même. Une chose est certaine: s'il ne justifie pas la violence, le long-métrage s'écarte radicalement d'un manichéisme ordinaire. Les représentants de la loi ont leurs petits et gros défauts: leur fameuse solidarité professionnelle, par exemple, s'efface bien vite quand leurs méthodes sont contestées. Par ce propos, le cinéaste-scénariste s'assure donc un joli (premier) coup: il lui a notamment valu le Prix spécial du jury international du festival de Locarno, en 2011. Cet intéressant travail peut également s'analyser comme la violation d'un tabou, son auteur indiquant que le thème de la fracture sociale est longtemps resté absent des médias de son pays. Le policier nous offre une occasion d'appréhender Israël autrement - ce n'est pas sa moindre qualité. Certains ont estimé que sa construction rendait le film un peu bancal.
Le policier
Film israélien de Nadav Lapid (2011)
Ceux qui s'intéressent aux aspects techniques du cinéma auront noté que le chef-monteur est une femme, Era Lapid, mère du réalisateur. Son style donne vite l'impression d'un enfermement: l'intrigue avance tout droit vers une inexorable et sanglante conclusion, sans effacer pourtant une réelle tension dramatique. La froideur du tout maintient une distance, comme dans The killer inside me. En moins racoleur.
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Et vu par d'autres, ça donne quoi ?
Pascale ("Sur la route du cinéma") a beaucoup aimé. Phil Siné simplement apprécié, avec un autre regard (cf. sa "Cinémathèque).
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