mercredi 23 février 2011

Trois regards sur l'après

Une chronique de Martin

Il faut croire que je m'étais emballé. En relisant les appréciations publiées ici et là sur le dernier film de Clint Eastwood, je constate que je m'étais trompé en les imaginant toutes négatives. Non, non. Aucune n'est réellement dithyrambique, mais la plupart demeurent plutôt nuancées. Ouf ! Le cinéaste pour lequel j'ai le plus d'admiration ne s'est pas fait "descendre". Je suis heureux de pouvoir éviter de m'inscrire à contre-courant, pour tout dire. Si Au-delà n'est assurément pas sa meilleure réalisation, j'en suis sorti en me disant qu'à défaut de quasi-perfection, il y avait là une indéniable sincérité de la part de ce vieux monsieur qu'est mon idole aujourd'hui. Objectivement, il tire parfois un peu trop sur la corde sensible, mais je ne pense pas que ce soit par calcul. Je peux tromper, mais je crois au contraire que c'est de manière purement naturelle. Instinctive. Parce que c'est tout simplement ainsi qu'il ressent les choses.

Voilà, c'est ça: Au-delà me semble être un beau film instinctif. Même si vous ne l'avez pas encore vu, et même si vous n'avez pas l'intention de le voir, je suppose que vous n'aurez pu éviter la promo bulldozer qui entoure désormais chaque nouveau projet eastwoodien. Personnellement, sur la base de la confiance que je prête systématiquement à Monsieur Clint, j'avais voulu en savoir le moins possible, bien déterminé de toute façon à m'offrir la séance cinéma. Bref. Pour tout de même cadrer un peu, disons que le film aborde ouvertement la thématique de la mort autour de trois personnages: une jeune journaliste française qui a survécu au tsunami, un ouvrier américain qui souhaite oublier son don de médium, et un enfant anglais qui vient de perdre son frère jumeau. Trois destins éclatés qui vont finir par se réunir, mais pas de manière aussi approfondie qu'on peut l'imaginer d'abord. Je vous laisse le découvrir seuls.

Je l'ai dit, je le répète: tout n'est pas parfait dans Au-delà. Le film m'a pourtant plu. Si les violons et la guitare sèche de la bande originale, elle-même composée par Clint Eastwood, rajoutent parfois une couche sucrée un peu inutile, certains passages m'ont à l'inverse bouleversé et notamment les scènes inaugurales, quand la mort frappe deux fois dans toute son injuste froideur. Aborder le drame de plein fouet, le rendre bien visible à l'écran, c'est une bonne part de ce qui me plaît dans le classicisme de la réalisation: savoir dire les choses sans faux semblant ou atermoiement. J'admets volontiers que ça ne saurait suffire: encore faut-il que les comédiens soient crédibles. Pour ne parler que des trois principaux, je dirais que oui, globalement, le contrat est respecté. Matt Damon n'en fait pas énormément dans le démonstratif, mais justement, c'est exactement ce qu'il fallait, il me semble, son rôle me paraissant réellement imposer cette retenue. Cécile de France n'est pas toujours au top, mais je ne la blâme pas: c'est son premier film à l'échelle internationale et elle a elle-même traduit un texte illustrant le regard sur la France d'un "Yankee". Le plus épatant à mes yeux reste incontestablement le petit George McLaren, qui parvient à exprimer un deuil considérable, en somme trop grand pour lui. Qu'importe alors si l'ensemble ne fait pas l'unanimité, qu'importe s'il reste un peu d'outrance dans le propos: moi, j'ai ressenti une certaine empathie pour ces trois personnages. Et c'est exactement ce que j'espérais.

Au-delà
Film américain de Clint Eastwood (2010)
Coïncidence ou destin, c'est troublant: pour lancer une comparaison de ce film avec un autre, je voulais vous suggérer de voir ou revoir La chambre du fils, long-métrage que j'avais pour ma part découvert... un an jour pour jour auparavant ! Très concrètement, l'une et l'autre de ces deux propositions de cinéma posent la question du deuil, sans réellement apporter de réponse à l'interrogation lancinante: comment s'en sortir ? L'une et l'autre s'achèvent pareillement sur une petite note d'espoir. Overdose de guimauve ? Peut-être. Message de réconfort, dirais-je, pour ma part. Sans honte à avouer ce que vous avez sûrement déjà saisi: j'ai plutôt aimé ça.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Je suis entièrement d'accord avec toi Martin. Bon Monsieur, comme tu l'appelles, n'est peut-être pas mon idole, il fait partie des grands bonhommes pour qui j'ai un immense respect. Je connais plus le réalisateur que l'acteur, et chacune de ses réalisations m'a soufflée. Et là, mais tu le sais déjà, je trouve que le film est loin d'être parfait. Et c'est dommage, car avec un tel sujet, le film aurait pu être génial (si j'ose dire, car on parle quand même de mort et de deuil). Les parties américaines et anglaises m'ont convaincues (le petit garçon anglais m'a littéralement bouleversée, Matt Damon est très juste dans ce rôle de medium). Par contre la partie française... Pouah, nul. Mal joué, pas convaincant, parfois surjoué. Bref, j'ai pas du tout adhéré. Et que dire que la fin... Une dose de mièvrerie si peu eastwoodienne, je trouve. Film ultra perfectible, et quand j'entends ici et là qu'il mérite un Oscar, je mets un gros veto bien rouge. En revanche, c'est un film à voir, ne serais-ce que pour la réflexion qu'il peut susciter, les interrogations.
Silvia

Anonyme a dit…

Monsieur Clint of course