vendredi 29 juin 2018

Condamné à attendre

Une fois n'est pas coutume, je vais vous parler aujourd'hui d'un film que j'ai découvert en avant-première: Zama. Il sortira sur les écrans français le 11 juillet prochain. Mon association l'a diffusé en clôture d'un festival organisé, lui, par un groupe d'anthropologues spécialistes des Caraïbes et de l'Amérique latine - un partenaire depuis mai 2016 !

Sans vraiment nous donner de repères spatiaux et temporels, Zama nous embarque vers ce qui serait aujourd'hui une zone frontalière entre l'Argentine et l'Uruguay. Encore placé sous domination espagnole, le territoire est de ce fait administré par un gouverneur royal, assisté par divers fonctionnaires, représentant la Couronne. Diego de Zama est l'un d'eux. Voilà de très longues années qu'il attend une lettre qui le libérerait de ses obligations et lui permettrait donc d'enfin rentrer chez lui, en Europe. On comprendra alors assez vite que, dans cette fin de 18ème siècle reconstituée, l'organisation sociale repose avant tout sur la discipline et l'acceptation (forcée) d'une hiérarchie basée sur les privilèges d'une classe minoritaire. N'attendez aucune évolution: mon film du jour s'avère très statique...

Petite précision: ce long-métrage est aussi l'adaptation d'un classique de la littérature argentine, oeuvre du romancier Antonio Di Benedetto parue en 1956. D'une indéniable beauté plastique, il m'a un peu déçu pourtant, dans la mesure où il est parfois un peu abscons. Il se peut qu'une meilleure connaissance de l'Argentine et de l'Amérique latine en général permette toutefois de mieux l'appréhender - le riche débat qui a suivi la projection me laisse en tout cas l'imaginer. Je regrette d'être un peu passé à côté, mais c'est ainsi: rien de catastrophique. Diffusé dans pas mal de festivals, Zama reçoit un accueil chaleureux dans son pays, avec onze nominations aux Prix Sud, l'équivalent argentin des César (entre autres). Je souhaite que mon opinion mitigée ne vous décourage pas de le voir si le sujet vous intéresse. Difficile à appréhender, le film m'a quand même offert un voyage comme on n'en fait pas souvent. Y retournerai-je, alors ? Peut-être...

Zama
Film argentin de Lucrecia Martel (2017)

C'est le dixième long-métrage d'Argentine présenté sur ce blog. Parfois, il m'a rappelé Jauja, qui conduisait aussi en terra incognita. Vu qu'il est ici question d'attente (et de source littéraire), Le désert des Tartares m'est venu à l'esprit, mais je précise que je n'ai pas vu le film que Valerio Zurlini a tiré du roman éponyme de Dino Buzzati. Face à un fleuve, j'ai aussi songé à Dead man et... Apocalypse now !

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Avec nos amis anthropologues, j'ai vu...

- Voix off / Christian Jimenez / 2015 / Chili,
- Los nadie / Juan Sebastien Mesa / 2016 / Colombie,
- Siembra / Angela Osorio et Santiago Lozano / 2016 / Colombie.

6 commentaires:

Pascale a dit…

Ben si tu découragés un peu et on ne comprend pas bien de quoi il s'agit... le gars attend de retourner en France ? Parfois lennui edt bien représente au cinéma :-)
A ce titre je te recommande le très beau et très lent Les caprices d'un fleuve.
Tes références donnent plus envie.
Je t'encourage à voir l'hypnotique Désert des Tartares et à écouter la chanson de Brel Je m'appelle Zambra (de memoire...) que ta note m'évoque.

Pascale a dit…

En fait il sappelle Zangra...
Quelle chanson !!!
https://youtu.be/xubaBNKhW-A

Martin a dit…

@Pascale et le cinéma:

Je m'auto-cite, tu permets ? "Voilà de très longues années qu'il attend une lettre qui le libérerait de ses obligations et lui permettrait donc d'enfin rentrer chez lui, en Europe". Chez lui, ce serait plutôt en Espagne...

Merci pour tes encouragements... et désolé de t'avoir un peu découragée pour ce film.

Tout à fait d'accord avec toi pour dire que l'ennui peut être un très bon sujet de cinéma.

Martin a dit…

@Pascale et le grand Belge:

Je ne connaissais pas cette chanson de Jacques Brel. Merci pour le découverte.
Il me semble qu'elle correspond mieux aux Tartares qu'à mon "Zama" du jour, cela dit.

Pascale a dit…

Oui j'ai bien lu. Donc de mémoire les Caprices du fleuve de et avec le super Giraudeau évoquait ça, l'attente, lennui...
Ben oui l'Espagne donc.

C'est le Désert en chanson en effet.

Martin a dit…

Bon… tout ça fait que j'ai deux films à ajouter à ma liste des "à voir". Merci !