Propos recueillis par Martin
Nouveau film, nouvelle rencontre: presque aussitôt après avoir vu R.I.F. - Recherches dans l'intérêt des familles, le polar dont j'ai parlé mercredi, j'ai eu la chance d'avoir un long échange téléphonique avec son réalisateur, Franck Mancuso. Je le remercie de s'être ainsi prêté au jeu. Merci aussi à Isabelle Sauvanon, qui m'a mis en contact avec lui, et à Roger Do Minh, qui a réalisé l'ensemble des superbes photographies de tournage qui illustrent la chronique d'aujourd'hui. Merci enfin à mon ami Philippe Joseph, au soutien technique de l'interview. Je vous laisse désormais la découvrir...
Après Contre-enquête, R.I.F. est le second film que vous réalisez. Comment est-il né ?
En tant qu'ancien flic, je n'ai pas besoin d'inventer des histoires policières. J'en ai suffisamment vécu, mes potes m'en ont assez raconté... je n'ai qu'à puiser dans mes souvenirs. Ce film-là, au départ, c'est une histoire réelle, qui commence comme ça et qui se déroule à peu près pareil. J'ai juste changé la fin pour faire quelque chose de plus cinématographique. C'était déjà la même façon de travailler pour Contre-enquête. Finalement, je n'ai pas d'idées préconçues. Je ne me dis jamais vraiment que je vais faire un film sur la vengeance ou la disparition, par exemple. Les choses peuvent juste venir de discussions que je peux avoir avec mes ex-collègues sur d'anciennes enquêtes.
C'est l'occasion d'en dire un peu plus sur votre carrière dans la police...
J'y ai passé vingt ans. J'ai d'abord travaillé dix ans à la brigade des stups du Quai des Orfèvres, où je faisais de l'infiltration. Ensuite, j'ai bossé cinq ans à la division anti-terroriste, notamment lors des attentats de 1995. J'ai fini par l'Office central de répression du banditisme, à chasser ceux qui braquaient les fourgons au lance-roquettes. On peut dire que j'ai fait des services assez pointus. Curieusement, mes films, ce ne sont pas des histoires que j'ai vécues personnellement.
Comment passe-t-on alors d'une carrière de policier de terrain au monde du cinéma ?
Pour moi, c'est d'abord lié au hasard d'une rencontre. J'ai fait la connaissance d'Yves Rénier en 1989: il tournait alors un Commissaire Moulin au Quai des Orfèvres. Lui s'est dit que notre rencontre n'était pas dû au hasard: il voulait depuis longtemps écrire un épisode qui parle d'infiltration. Amicalement, je suis un peu devenu son conseiller technique et, finalement, j'ai écrit un premier scénario avec lui. Après, ça a été l'enchaînement. J'ai rencontré Olivier Marchal, un flic qui bossait la nuit et qui voulait devenir comédien. Il écrivait aussi un peu et m'a demandé si je pouvais lire un scénario. J'ai accepté, je l'ai trouvé sympa et là-dessus, on en a écrit des dizaines pour Rénier. Le truc, c'est que, moi, j'étais toujours dans la police. C'est en 1999 que Rénier m'a demandé d'écrire un scénario pour le cinéma. J'en avais l'envie, mais pas forcément le temps: c'était autre chose que de la télé. Il a donc fallu que je me mette en disponibilité pendant six mois. Voilà comment Marchal et moi, on a écrit un synopsis pour 36, quai des Orfèvres. Même si c'est finalement Marchal qui l'a réalisé, c'est comme ça que je suis passé à l'écriture cinéma. Après, j'ai simplement continué. Et je me suis demandé ce que ça donnerait si j'écrivais tout seul, ce qui nous mène donc jusqu'à Contre-enquête.
Il reste des traces de ce passé dans la police, pas vrai ? Il paraît qu'au moment de retenir tel ou tel acteur, vous cherchez le possible flic en lui...
En fait, jamais je ne tiens compte de ce que je connais du comédien en question. Avant de confier un rôle de flic, je rencontre l'acteur concerné, je discute avec lui et je me demande si, en lui donnant une arme, il serait crédible au moment d'interpeller un mec. Il y a d'excellents comédiens qui, avec un flingue entre les mains, me feraient marrer. Je m'attache autant à la personnalité du lascar que du comédien en tant que tel, même si certains vous diront qu'un bon acteur peut tout jouer.
Et vos personnages, ce sont toujours des hommes...
Ouais, c'est vrai, mais franchement, dans les services auxquels j'ai appartenu, des femmes, il n'y en avait pas des masses. Ce n'est pas que je ne connaisse pas la nature humaine féminine, mais ça ne m'intéresse pas de me mettre à ce point dans la peau d'un personnage féminin. Je préfère faire parler les mecs, simplement parce que ça, je sais faire. Honnêtement, aujourd'hui, faire un film autour des femmes, je ne m'y vois pas. C'est juste que ça ne me fait pas envie, pas aujourd'hui en tout cas. Peut-être que ça viendra, hein ? Dans mon prochain film, déjà, les femmes seront un peu plus au centre de l'histoire.
Le fait est aussi que R.I.F. comporte un personnage féminin assez fort, un autre de petit garçon important lui aussi. Vous les choisissez comment, ces rôles secondaires ?
À vrai dire, pour moi, il n'y a pas véritablement de rôle secondaire. Certains sont moins mis en avant, c'est vrai, mais je me dis à chaque fois qu'il faut que je trouve le meilleur flic possible, la meilleure nana possible ou le meilleur plombier possible. Je rencontre donc absolument tous mes comédiens. Je refuse de passer par un directeur de casting qui en recevrait certains, dont, au final, je ne verrais que des vidéos ou des photos. Agir ainsi, pour moi, ce serait se priver de belles rencontres.
Mais le test du flic dont nous parlions, il ne marche pas avec tout le monde...
Non, bien sûr, mais vous savez, quand j'ai un comédien en face de moi, je n'essaye pas de le tester par rapport à la police. Je veux juste savoir à qui j'ai affaire. C'est très subjectif. C'est vrai que je suis, malgré tout, à la recherche de gueules que j'ai croisées pendant vingt ans. Certaines sont encore très présentes dans ma mémoire.
Cela dit, vous restez dans le registre de la fiction...
Oui, en étant aussi très ancré dans la vraisemblance. Je ne peux pas me permettre de raconter des conneries. Je n'en ai pas le droit non plus: le soir de l'avant-première de R.I.F. par exemple, il y avait plein d'anciens collègues flics. Parmi eux, Frédéric Péchenard, Martine Monteil, Noël Robin et FX Achard, respectivement aujourd'hui, directeur général de la police nationale, préfet de la zone de défense de Paris, sous-directeur du 36, quai des Orfèvres et chef de l'Office central de lutte contre le crime organisé. Franchement, en plus, ça ne m'intéresse pas de faire une totale fiction: je considère que, dans le domaine du polar en tout cas, c'est mieux de partir d'une histoire vraie.
Il y a d'autres films qui vous ont plu, dans ce registre ?
En fait, je n'ai pas de modèles. Mes références sont plutôt américaines ou anglo-saxonnes. Des types comme Michael Mann, Ridley Scott ou James Gray: s'il fallait citer rapidement quelques noms, ce sont ceux-là que je donnerais. Je les trouve très forts, et, étant un dévoreur de making of, je vois à quel point ils maîtrisent tout, à quel point ils s'impliquent dans leurs projets. Après, sans me jeter des fleurs, un film comme 36, quai des Orfèvres me paraît vraiment réussi. On a aussi de bons réalisateurs en France: un Schoendoerffer avec Scènes de crimes, un Tavernier avec L.627, un Pialat avec Police, un Beauvois avec Le petit lieutenant. On a aussi de très bons comédiens.
Et vous, après vos deux premiers films, avez-vous encore le sentiment de toujours apprendre votre métier de réalisateur ?
Complètement ! C'est vrai que je n'ai fait aucune école de cinoche et que j'ai appris sur le tas, en allant sur les plateaux. Je n'ai jamais eu de plan de carrière: c'est plus une succession de choses. Au début, alors que je n'aurais jamais pensé être réalisateur, j'avais toujours dans un coin de ma tête l'idée que c'était vachement bien de mettre en scène un truc qu'on a écrit. C'était sans doute un peu présomptueux: quand mes scénarios étaient mis en scène par quelqu'un d'autre, je ne pouvais pas m'empêcher de penser, de temps en temps, que je n'aurais pas fait comme ça. Sans dire que j'aurais fait mieux, hein ? Mais quand j'ai eu l'opportunité de mettre en scène, je me suis dit que j'aurais les moyens de faire ce que je voulais. Ou en tout cas que ça ne serait pas la faute d'un autre si je n'obtenais pas ce que j'espérais...
Et finalement, ce métier de cinéaste, il est plus dur que vous ne l'imaginiez ? Ou plus simple ?
En fait, c'est exactement conforme à ce que j'imaginais. Grâce à Rénier, je connaissais déjà toutes les étapes du boulot. On écrivait les scénarios ensemble, je participais souvent au casting, aux repérages... comme tout tournait toujours autour de la police, j'étais sollicité très souvent. Après, je ne participais pas au montage en tant que tel, mais je le voyais bosser avec son monteur et il arrivait qu'il me demande mon avis. C'est vraiment lui qui m'a tout appris du métier. Là, on ne parle que de la partie live. Après, dans chaque DVD, il y a les making of: j'aime vraiment ça et on y apprend aussi beaucoup de choses. Au fond, peut-être que c'est bien d'avoir fait une école, d'avoir été directeur photo ou comédien avant d'être réalisateur, mais je pense qu'il y a d'excellents cinéastes qui n'ont rien fait de tout ça. En France, c'est possible de faire ce boulot sans avoir fait d'école et, personnellement, je trouve ça génial.
Vous avez l'impression d'avoir progressé, entre vos deux films ?
Oui. On apprend des choses à chaque fois. Sur Contre-enquête, j'étais beaucoup plus focalisé sur l'aspect technique de la chose, sans doute un peu au détriment des comédiens. Je ne dis pas que je les ai délaissés, mais simplement qu'il y a toujours un équilibre à trouver. Sur un premier film, ce n'est pas qu'on s'emmerde, mais on a un peu plus de mal à prendre son plaisir quand il est là. Pour moi, c'était plus évident sur R.I.F. et aussi parce que j'étais alors très bien entouré. Avec mes collaborateurs, on savait exactement ce qu'on allait faire: tout cela se travaille en amont. Plus serein par rapport à la technique, j'ai pu me concentrer davantage sur les comédiens. Il y a eu aussi une petite différence sur la mise en scène en tant que telle: Contre-enquête se déroule sur trois ans, R.I.F seulement sur trois jours. Je me suis dit que je pouvais utiliser la caméra à l'épaule: c'est davantage ce cinéma-là que j'aime et, cette fois, c'était mieux adapté à l'histoire que je racontais. Et il y a eu des moments où j'ai vraiment eu le sentiment de faire ce que je voulais et où tout se passait bien.
Et le résultat final, il vous satisfait donc davantage ?
Pour les raisons que je viens d'évoquer, j'ai l'impression que mon travail est plus abouti sur R.I.F. La mise en scène y est meilleure, même si je revendique aussi celle de Contre-enquête. C'est juste qu'aujourd'hui, je procéderais un peu différemment. En revanche, du côté du scénario, c'est celui de Contre-enquête que je trouvais plus fort. En fait, je pense que ce que certains ont pu apprécier dans R.I.F., c'est de pouvoir s'identifier, de se dire que ce que je montrais ne relevait pas d'un truc tordu. On a un certain réalisme, une simple conjonction d'événements, le genre d'événements qui fait que la vie, parfois, bascule dans le drame. Je crois d'ailleurs que c'est aussi ce qui a pu déplaire à d'autres, comme si le film n'était qu'un bon épisode de FBI portés disparus. Je préfère la première analyse, mais je peux entendre cette critique-là.
Votre prochain film, ce sera encore un polar ?
Oui. Un polar mythologique contemporain. Je ne peux pas vous en dire beaucoup plus pour l'instant. Pas de la science-fiction, parce que ça, je ne sais pas faire, mais une histoire étrange, disons. Avec une fin je crois inattendue, comme je les aime en tant que spectateur.
Vous avez choisi vos comédiens ?
Non, toujours pas. J'ai fait des propositions de casting à mon producteur: nous sommes d'accord. On fignole actuellement le scénario et on va très vite envoyer tout ça aux acteurs en question...
Un film qui ne serait pas du tout policier, ce serait dans vos cordes ?
Je pense, oui, mais pour l'instant, je n'en ai pas spécialement envie. Et puis, encore une fois, je ne me dis pas que je vais écrire sur tel sujet après en avoir terminé avec tel autre. Les idées me viennent comme ça et, pour l'instant, c'est beaucoup plus facile pour moi d'avoir un héros flic. Je sais par coeur comment un flic se comporte quand il est au travail, quand il est chez lui, quand il est en week-end avec sa femme. Si vous me demandez d'avoir pour héros un boulanger-pâtissier, ce n'est pas que ça ne m'intéresserait pas, juste que je ne saurais pas faire. Quand j'aurai fait le tour avec les policiers, peut-être bien que je ferai autre chose...
Le tour n'est donc pas encore fait...
Non, pas pour l'instant. J'ai encore quelques histoires policières en magasin.
Et en tant que spectateur, c'est quoi, votre genre de films ?
J'essaye en fait d'aller tout voir. Je sors très souvent au bout d'un quart d'heure ou 20 minutes, mais j'essaye d'aller tout voir. Quand j'ai un coffret de DVD pour les Césars, pareil: je pioche au hasard, je mets le film dans le lecteur et j'attends de voir. À peine si je jette un coup d'oeil sur la pochette. Les films, je ne les finis pas tous, mais je les commence tous. Il y a des films étonnants qui parviennent à me tenir en haleine jusqu'au bout, d'autres que j'apprécie pour leur beauté formelle. Un exemple, c'est Tony Scott: à part peut-être pour Spy game, où le scénario est superbe, on a d'abord là un faiseur d'images extraordinaire, un talent fou. Autre exemple: The tree of life de Terrence Malick. Quand je l'ai vu, j'ai failli partir au moment des dinosaures, mais je suis finalement resté. Malgré cette demi-heure, c'est un film qui m'a scotché, avec une lumière et des plans formidables. Sur le fond, j'en ai vu des meilleurs, mais ça reste un chef d'oeuvre sur le plan formel.
Et parmi les toutes dernières sorties, des choses vous ont-elles particulièrement emballé ?
Sincèrement, cinématographiquement parlant, mon dernier coup de coeur, c'est le Terrence Malick. Après, je reconnais volontiers que, généralement, ma préférence va au cinéma américain. À vrai dire, je ne suis pas allé au cinéma depuis un petit moment: on a tourné le film, on l'a monté et on a fait la promo. J'ai vu quelques films avec mon fils, mais des trucs comme La planète des singes ou Captain America, je les oublie dès que j'en suis sorti. Ce sont de bons divertissements, mais ce n'est pas ma came...
En tout cas, on n'a pas l'impression que la police vous manque beaucoup...
Franchement, quand on a fait un métier pendant vingt piges, ça ne vous manque pas. Ce que la police est en train de devenir ne me donne de toute façon pas envie d'y revenir. J'ai connu une autre époque où les magistrats nous faisaient confiance et où il fallait simplement leur rendre des comptes. Aujourd'hui, on doit demander l'autorisation pour serrer un voyou. Les flics de mon âge font ce qu'ils peuvent, mais je crois que la police ne les fait plus bander. Autre temps, autres moeurs, comme dirait l'autre. On ne peut d'ailleurs pas imaginer que la police reste la même pendant dix, vingt, trente ou quarante ans. Tout ça n'empêchera pas que le citoyen soit bien protégé, ne vous inquiétez pas. De mon côté, sauf pour ceux qui ont été mutés, je revois mes potes très régulièrement. La seule chose qui pourrait me manquer, c'est peut-être l'esprit de corps, la camaraderie: quand on monte au feu avec les mêmes gens pendant des années, on se confie nos histoires. C'est sûr que ça crée des amitiés qui n'existent pas dans le cinéma. On peut s'entendre très bien avec son équipe et ses comédiens pendant un tournage, mais on sait qu'après, ce sera fini: il est rarissime de pouvoir toujours travailler avec les mêmes. Le boulot est plus ou moins agréable, mais il n'est fait que de petits moments.
Vous pensez que le cinéma peut apporter quelque chose à la police, aujourd'hui ?
Oui, bien sûr et, de toute façon, les deux mondes sont étroitement liés. La police a toujours inspiré le cinéma. Réciproquement, il n'y a pas un service de police où il n'y ait pas une affiche type Steve McQueen dans Bullitt. C'est presque indissociable. Au-delà des affaires qui ont pu inspirer certains films, quand un mec comme Tavernier tourne L.627 et décrit les conditions de travail, ça fait pratiquement l'unanimité et c'est aussi grâce à un film comme ça que les flics sont mieux traités derrière. Avant, l'opinion publique ne savait pas que ça se passait comme ça dans certains commissariats. Raconter la police telle qu'elle est, sans idéaliser les choses ni les pervertir, ça ne peut faire que du bien. En général, raconter la vérité, c'est bénéfique pour tout le monde: ça fait de beaux films et ça peut rendre service.
On a quand même l'impression que c'est l'amour vache, parfois, entre le cinéma et la police. Non ?
Seulement quand les mecs qui font le film n'ont pas pris la peine de se documenter et racontent n'importe quoi. Comme beaucoup de gens, les policiers ne font pas un métier facile. C'est un métier objectivement cinématographique, les flics adorent qu'on parle des flics, mais ils n'aiment pas que les choses soient déformées. On n'a pas spécialement envie d'être considérés comme des héros, mais pas non plus que le job ne soit observé que par le petit bout de la lorgnette.
Dans vos films à vous, pour l'instant, c'est toujours à un flic qu'il arrive quelque chose. Démarche volontaire ?
Oui, bien sûr, c'est même mon point de départ. L'histoire originale de R.I.F. n'est pas arrivée à un flic, mais moi, j'ai voulu me demander ce qui se serait passé si ça avait été le cas. Contre-enquête, c'est l'affaire Patrick Dils et Francis Heaulme: je me suis demandé ce qui aurait pu survenir si le papa d'un des deux petits garçons avait été policier. Vous savez, on se projette toujours un peu dans ses histoires. L'avantage, pour moi, c'est que je maîtrise le sujet. L'inconvénient, c'est qu'on peut trouver ça un peu réducteur. D'autres que moi pourraient s'embarquer sur des terrains que je n'aborderai pas personnellement. En tout cas, personne ne pourra prétendre que mes scénarios ne tiennent pas la route, même si certains ont pu l'écrire. Ceux-là, ils feraient mieux de réviser leurs faits divers: ça ne leur ferait pas de mal...
Vous avez parlé de rencontres et d'opportunités. Y en a-t-il une que vous aimeriez pouvoir faire, dans ce milieu du cinéma ?
Non, je laisse faire le destin. J'ai certes saisi des opportunités, personne ne m'a forcé la main, mais je continue de laisser faire les choses. Ce qui doit se faire se fera. Je suis fataliste, dans le sens positif du terme. Cela ne veut pas dire qu'il faille simplement rester les mains dans les poches: je fais toujours tout ce que je peux pour parvenir à mes fins. Simplement, quand ça ne marche pas, par exemple quand un comédien n'accepte pas mon scénario et ne veut pas faire mon film, je me dis que ce n'est pas grave. J'en trouverai un autre et il sera encore meilleur. En général, jusqu'à présent, les faits m'ont plutôt donné raison.
Du coup, qu'est-ce qu'on peut vous souhaiter, pour la suite ?
Peut-être de continuer à écrire des sujets qui touchent le public. Contrairement à ce que certains ont pu écrire à l'époque de la sortie de Contre-enquête, je ne fais pas de films politiques. Je fais du cinéma comme j'aimerais en voir. Pour l'instant, c'est du polar et j'espère juste que ça peut permettre aux gens de s'impliquer pendant une heure et demie, de se sentir proche d'un personnage. J'aime à penser qu'ils ressortent au moins avec le sentiment d'avoir bien dépensé les dix euros de leur place de cinoche.
Après Contre-enquête, R.I.F. est le second film que vous réalisez. Comment est-il né ?
En tant qu'ancien flic, je n'ai pas besoin d'inventer des histoires policières. J'en ai suffisamment vécu, mes potes m'en ont assez raconté... je n'ai qu'à puiser dans mes souvenirs. Ce film-là, au départ, c'est une histoire réelle, qui commence comme ça et qui se déroule à peu près pareil. J'ai juste changé la fin pour faire quelque chose de plus cinématographique. C'était déjà la même façon de travailler pour Contre-enquête. Finalement, je n'ai pas d'idées préconçues. Je ne me dis jamais vraiment que je vais faire un film sur la vengeance ou la disparition, par exemple. Les choses peuvent juste venir de discussions que je peux avoir avec mes ex-collègues sur d'anciennes enquêtes.
C'est l'occasion d'en dire un peu plus sur votre carrière dans la police...
J'y ai passé vingt ans. J'ai d'abord travaillé dix ans à la brigade des stups du Quai des Orfèvres, où je faisais de l'infiltration. Ensuite, j'ai bossé cinq ans à la division anti-terroriste, notamment lors des attentats de 1995. J'ai fini par l'Office central de répression du banditisme, à chasser ceux qui braquaient les fourgons au lance-roquettes. On peut dire que j'ai fait des services assez pointus. Curieusement, mes films, ce ne sont pas des histoires que j'ai vécues personnellement.
Comment passe-t-on alors d'une carrière de policier de terrain au monde du cinéma ?
Pour moi, c'est d'abord lié au hasard d'une rencontre. J'ai fait la connaissance d'Yves Rénier en 1989: il tournait alors un Commissaire Moulin au Quai des Orfèvres. Lui s'est dit que notre rencontre n'était pas dû au hasard: il voulait depuis longtemps écrire un épisode qui parle d'infiltration. Amicalement, je suis un peu devenu son conseiller technique et, finalement, j'ai écrit un premier scénario avec lui. Après, ça a été l'enchaînement. J'ai rencontré Olivier Marchal, un flic qui bossait la nuit et qui voulait devenir comédien. Il écrivait aussi un peu et m'a demandé si je pouvais lire un scénario. J'ai accepté, je l'ai trouvé sympa et là-dessus, on en a écrit des dizaines pour Rénier. Le truc, c'est que, moi, j'étais toujours dans la police. C'est en 1999 que Rénier m'a demandé d'écrire un scénario pour le cinéma. J'en avais l'envie, mais pas forcément le temps: c'était autre chose que de la télé. Il a donc fallu que je me mette en disponibilité pendant six mois. Voilà comment Marchal et moi, on a écrit un synopsis pour 36, quai des Orfèvres. Même si c'est finalement Marchal qui l'a réalisé, c'est comme ça que je suis passé à l'écriture cinéma. Après, j'ai simplement continué. Et je me suis demandé ce que ça donnerait si j'écrivais tout seul, ce qui nous mène donc jusqu'à Contre-enquête.
Il reste des traces de ce passé dans la police, pas vrai ? Il paraît qu'au moment de retenir tel ou tel acteur, vous cherchez le possible flic en lui...
En fait, jamais je ne tiens compte de ce que je connais du comédien en question. Avant de confier un rôle de flic, je rencontre l'acteur concerné, je discute avec lui et je me demande si, en lui donnant une arme, il serait crédible au moment d'interpeller un mec. Il y a d'excellents comédiens qui, avec un flingue entre les mains, me feraient marrer. Je m'attache autant à la personnalité du lascar que du comédien en tant que tel, même si certains vous diront qu'un bon acteur peut tout jouer.
Et vos personnages, ce sont toujours des hommes...
Ouais, c'est vrai, mais franchement, dans les services auxquels j'ai appartenu, des femmes, il n'y en avait pas des masses. Ce n'est pas que je ne connaisse pas la nature humaine féminine, mais ça ne m'intéresse pas de me mettre à ce point dans la peau d'un personnage féminin. Je préfère faire parler les mecs, simplement parce que ça, je sais faire. Honnêtement, aujourd'hui, faire un film autour des femmes, je ne m'y vois pas. C'est juste que ça ne me fait pas envie, pas aujourd'hui en tout cas. Peut-être que ça viendra, hein ? Dans mon prochain film, déjà, les femmes seront un peu plus au centre de l'histoire.
Le fait est aussi que R.I.F. comporte un personnage féminin assez fort, un autre de petit garçon important lui aussi. Vous les choisissez comment, ces rôles secondaires ?
À vrai dire, pour moi, il n'y a pas véritablement de rôle secondaire. Certains sont moins mis en avant, c'est vrai, mais je me dis à chaque fois qu'il faut que je trouve le meilleur flic possible, la meilleure nana possible ou le meilleur plombier possible. Je rencontre donc absolument tous mes comédiens. Je refuse de passer par un directeur de casting qui en recevrait certains, dont, au final, je ne verrais que des vidéos ou des photos. Agir ainsi, pour moi, ce serait se priver de belles rencontres.
Mais le test du flic dont nous parlions, il ne marche pas avec tout le monde...
Non, bien sûr, mais vous savez, quand j'ai un comédien en face de moi, je n'essaye pas de le tester par rapport à la police. Je veux juste savoir à qui j'ai affaire. C'est très subjectif. C'est vrai que je suis, malgré tout, à la recherche de gueules que j'ai croisées pendant vingt ans. Certaines sont encore très présentes dans ma mémoire.
Cela dit, vous restez dans le registre de la fiction...
Oui, en étant aussi très ancré dans la vraisemblance. Je ne peux pas me permettre de raconter des conneries. Je n'en ai pas le droit non plus: le soir de l'avant-première de R.I.F. par exemple, il y avait plein d'anciens collègues flics. Parmi eux, Frédéric Péchenard, Martine Monteil, Noël Robin et FX Achard, respectivement aujourd'hui, directeur général de la police nationale, préfet de la zone de défense de Paris, sous-directeur du 36, quai des Orfèvres et chef de l'Office central de lutte contre le crime organisé. Franchement, en plus, ça ne m'intéresse pas de faire une totale fiction: je considère que, dans le domaine du polar en tout cas, c'est mieux de partir d'une histoire vraie.
Il y a d'autres films qui vous ont plu, dans ce registre ?
En fait, je n'ai pas de modèles. Mes références sont plutôt américaines ou anglo-saxonnes. Des types comme Michael Mann, Ridley Scott ou James Gray: s'il fallait citer rapidement quelques noms, ce sont ceux-là que je donnerais. Je les trouve très forts, et, étant un dévoreur de making of, je vois à quel point ils maîtrisent tout, à quel point ils s'impliquent dans leurs projets. Après, sans me jeter des fleurs, un film comme 36, quai des Orfèvres me paraît vraiment réussi. On a aussi de bons réalisateurs en France: un Schoendoerffer avec Scènes de crimes, un Tavernier avec L.627, un Pialat avec Police, un Beauvois avec Le petit lieutenant. On a aussi de très bons comédiens.
Et vous, après vos deux premiers films, avez-vous encore le sentiment de toujours apprendre votre métier de réalisateur ?
Complètement ! C'est vrai que je n'ai fait aucune école de cinoche et que j'ai appris sur le tas, en allant sur les plateaux. Je n'ai jamais eu de plan de carrière: c'est plus une succession de choses. Au début, alors que je n'aurais jamais pensé être réalisateur, j'avais toujours dans un coin de ma tête l'idée que c'était vachement bien de mettre en scène un truc qu'on a écrit. C'était sans doute un peu présomptueux: quand mes scénarios étaient mis en scène par quelqu'un d'autre, je ne pouvais pas m'empêcher de penser, de temps en temps, que je n'aurais pas fait comme ça. Sans dire que j'aurais fait mieux, hein ? Mais quand j'ai eu l'opportunité de mettre en scène, je me suis dit que j'aurais les moyens de faire ce que je voulais. Ou en tout cas que ça ne serait pas la faute d'un autre si je n'obtenais pas ce que j'espérais...
Et finalement, ce métier de cinéaste, il est plus dur que vous ne l'imaginiez ? Ou plus simple ?
En fait, c'est exactement conforme à ce que j'imaginais. Grâce à Rénier, je connaissais déjà toutes les étapes du boulot. On écrivait les scénarios ensemble, je participais souvent au casting, aux repérages... comme tout tournait toujours autour de la police, j'étais sollicité très souvent. Après, je ne participais pas au montage en tant que tel, mais je le voyais bosser avec son monteur et il arrivait qu'il me demande mon avis. C'est vraiment lui qui m'a tout appris du métier. Là, on ne parle que de la partie live. Après, dans chaque DVD, il y a les making of: j'aime vraiment ça et on y apprend aussi beaucoup de choses. Au fond, peut-être que c'est bien d'avoir fait une école, d'avoir été directeur photo ou comédien avant d'être réalisateur, mais je pense qu'il y a d'excellents cinéastes qui n'ont rien fait de tout ça. En France, c'est possible de faire ce boulot sans avoir fait d'école et, personnellement, je trouve ça génial.
Vous avez l'impression d'avoir progressé, entre vos deux films ?
Oui. On apprend des choses à chaque fois. Sur Contre-enquête, j'étais beaucoup plus focalisé sur l'aspect technique de la chose, sans doute un peu au détriment des comédiens. Je ne dis pas que je les ai délaissés, mais simplement qu'il y a toujours un équilibre à trouver. Sur un premier film, ce n'est pas qu'on s'emmerde, mais on a un peu plus de mal à prendre son plaisir quand il est là. Pour moi, c'était plus évident sur R.I.F. et aussi parce que j'étais alors très bien entouré. Avec mes collaborateurs, on savait exactement ce qu'on allait faire: tout cela se travaille en amont. Plus serein par rapport à la technique, j'ai pu me concentrer davantage sur les comédiens. Il y a eu aussi une petite différence sur la mise en scène en tant que telle: Contre-enquête se déroule sur trois ans, R.I.F seulement sur trois jours. Je me suis dit que je pouvais utiliser la caméra à l'épaule: c'est davantage ce cinéma-là que j'aime et, cette fois, c'était mieux adapté à l'histoire que je racontais. Et il y a eu des moments où j'ai vraiment eu le sentiment de faire ce que je voulais et où tout se passait bien.
Et le résultat final, il vous satisfait donc davantage ?
Pour les raisons que je viens d'évoquer, j'ai l'impression que mon travail est plus abouti sur R.I.F. La mise en scène y est meilleure, même si je revendique aussi celle de Contre-enquête. C'est juste qu'aujourd'hui, je procéderais un peu différemment. En revanche, du côté du scénario, c'est celui de Contre-enquête que je trouvais plus fort. En fait, je pense que ce que certains ont pu apprécier dans R.I.F., c'est de pouvoir s'identifier, de se dire que ce que je montrais ne relevait pas d'un truc tordu. On a un certain réalisme, une simple conjonction d'événements, le genre d'événements qui fait que la vie, parfois, bascule dans le drame. Je crois d'ailleurs que c'est aussi ce qui a pu déplaire à d'autres, comme si le film n'était qu'un bon épisode de FBI portés disparus. Je préfère la première analyse, mais je peux entendre cette critique-là.
Votre prochain film, ce sera encore un polar ?
Oui. Un polar mythologique contemporain. Je ne peux pas vous en dire beaucoup plus pour l'instant. Pas de la science-fiction, parce que ça, je ne sais pas faire, mais une histoire étrange, disons. Avec une fin je crois inattendue, comme je les aime en tant que spectateur.
Vous avez choisi vos comédiens ?
Non, toujours pas. J'ai fait des propositions de casting à mon producteur: nous sommes d'accord. On fignole actuellement le scénario et on va très vite envoyer tout ça aux acteurs en question...
Un film qui ne serait pas du tout policier, ce serait dans vos cordes ?
Je pense, oui, mais pour l'instant, je n'en ai pas spécialement envie. Et puis, encore une fois, je ne me dis pas que je vais écrire sur tel sujet après en avoir terminé avec tel autre. Les idées me viennent comme ça et, pour l'instant, c'est beaucoup plus facile pour moi d'avoir un héros flic. Je sais par coeur comment un flic se comporte quand il est au travail, quand il est chez lui, quand il est en week-end avec sa femme. Si vous me demandez d'avoir pour héros un boulanger-pâtissier, ce n'est pas que ça ne m'intéresserait pas, juste que je ne saurais pas faire. Quand j'aurai fait le tour avec les policiers, peut-être bien que je ferai autre chose...
Le tour n'est donc pas encore fait...
Non, pas pour l'instant. J'ai encore quelques histoires policières en magasin.
Et en tant que spectateur, c'est quoi, votre genre de films ?
J'essaye en fait d'aller tout voir. Je sors très souvent au bout d'un quart d'heure ou 20 minutes, mais j'essaye d'aller tout voir. Quand j'ai un coffret de DVD pour les Césars, pareil: je pioche au hasard, je mets le film dans le lecteur et j'attends de voir. À peine si je jette un coup d'oeil sur la pochette. Les films, je ne les finis pas tous, mais je les commence tous. Il y a des films étonnants qui parviennent à me tenir en haleine jusqu'au bout, d'autres que j'apprécie pour leur beauté formelle. Un exemple, c'est Tony Scott: à part peut-être pour Spy game, où le scénario est superbe, on a d'abord là un faiseur d'images extraordinaire, un talent fou. Autre exemple: The tree of life de Terrence Malick. Quand je l'ai vu, j'ai failli partir au moment des dinosaures, mais je suis finalement resté. Malgré cette demi-heure, c'est un film qui m'a scotché, avec une lumière et des plans formidables. Sur le fond, j'en ai vu des meilleurs, mais ça reste un chef d'oeuvre sur le plan formel.
Et parmi les toutes dernières sorties, des choses vous ont-elles particulièrement emballé ?
Sincèrement, cinématographiquement parlant, mon dernier coup de coeur, c'est le Terrence Malick. Après, je reconnais volontiers que, généralement, ma préférence va au cinéma américain. À vrai dire, je ne suis pas allé au cinéma depuis un petit moment: on a tourné le film, on l'a monté et on a fait la promo. J'ai vu quelques films avec mon fils, mais des trucs comme La planète des singes ou Captain America, je les oublie dès que j'en suis sorti. Ce sont de bons divertissements, mais ce n'est pas ma came...
En tout cas, on n'a pas l'impression que la police vous manque beaucoup...
Franchement, quand on a fait un métier pendant vingt piges, ça ne vous manque pas. Ce que la police est en train de devenir ne me donne de toute façon pas envie d'y revenir. J'ai connu une autre époque où les magistrats nous faisaient confiance et où il fallait simplement leur rendre des comptes. Aujourd'hui, on doit demander l'autorisation pour serrer un voyou. Les flics de mon âge font ce qu'ils peuvent, mais je crois que la police ne les fait plus bander. Autre temps, autres moeurs, comme dirait l'autre. On ne peut d'ailleurs pas imaginer que la police reste la même pendant dix, vingt, trente ou quarante ans. Tout ça n'empêchera pas que le citoyen soit bien protégé, ne vous inquiétez pas. De mon côté, sauf pour ceux qui ont été mutés, je revois mes potes très régulièrement. La seule chose qui pourrait me manquer, c'est peut-être l'esprit de corps, la camaraderie: quand on monte au feu avec les mêmes gens pendant des années, on se confie nos histoires. C'est sûr que ça crée des amitiés qui n'existent pas dans le cinéma. On peut s'entendre très bien avec son équipe et ses comédiens pendant un tournage, mais on sait qu'après, ce sera fini: il est rarissime de pouvoir toujours travailler avec les mêmes. Le boulot est plus ou moins agréable, mais il n'est fait que de petits moments.
Vous pensez que le cinéma peut apporter quelque chose à la police, aujourd'hui ?
Oui, bien sûr et, de toute façon, les deux mondes sont étroitement liés. La police a toujours inspiré le cinéma. Réciproquement, il n'y a pas un service de police où il n'y ait pas une affiche type Steve McQueen dans Bullitt. C'est presque indissociable. Au-delà des affaires qui ont pu inspirer certains films, quand un mec comme Tavernier tourne L.627 et décrit les conditions de travail, ça fait pratiquement l'unanimité et c'est aussi grâce à un film comme ça que les flics sont mieux traités derrière. Avant, l'opinion publique ne savait pas que ça se passait comme ça dans certains commissariats. Raconter la police telle qu'elle est, sans idéaliser les choses ni les pervertir, ça ne peut faire que du bien. En général, raconter la vérité, c'est bénéfique pour tout le monde: ça fait de beaux films et ça peut rendre service.
On a quand même l'impression que c'est l'amour vache, parfois, entre le cinéma et la police. Non ?
Seulement quand les mecs qui font le film n'ont pas pris la peine de se documenter et racontent n'importe quoi. Comme beaucoup de gens, les policiers ne font pas un métier facile. C'est un métier objectivement cinématographique, les flics adorent qu'on parle des flics, mais ils n'aiment pas que les choses soient déformées. On n'a pas spécialement envie d'être considérés comme des héros, mais pas non plus que le job ne soit observé que par le petit bout de la lorgnette.
Dans vos films à vous, pour l'instant, c'est toujours à un flic qu'il arrive quelque chose. Démarche volontaire ?
Oui, bien sûr, c'est même mon point de départ. L'histoire originale de R.I.F. n'est pas arrivée à un flic, mais moi, j'ai voulu me demander ce qui se serait passé si ça avait été le cas. Contre-enquête, c'est l'affaire Patrick Dils et Francis Heaulme: je me suis demandé ce qui aurait pu survenir si le papa d'un des deux petits garçons avait été policier. Vous savez, on se projette toujours un peu dans ses histoires. L'avantage, pour moi, c'est que je maîtrise le sujet. L'inconvénient, c'est qu'on peut trouver ça un peu réducteur. D'autres que moi pourraient s'embarquer sur des terrains que je n'aborderai pas personnellement. En tout cas, personne ne pourra prétendre que mes scénarios ne tiennent pas la route, même si certains ont pu l'écrire. Ceux-là, ils feraient mieux de réviser leurs faits divers: ça ne leur ferait pas de mal...
Vous avez parlé de rencontres et d'opportunités. Y en a-t-il une que vous aimeriez pouvoir faire, dans ce milieu du cinéma ?
Non, je laisse faire le destin. J'ai certes saisi des opportunités, personne ne m'a forcé la main, mais je continue de laisser faire les choses. Ce qui doit se faire se fera. Je suis fataliste, dans le sens positif du terme. Cela ne veut pas dire qu'il faille simplement rester les mains dans les poches: je fais toujours tout ce que je peux pour parvenir à mes fins. Simplement, quand ça ne marche pas, par exemple quand un comédien n'accepte pas mon scénario et ne veut pas faire mon film, je me dis que ce n'est pas grave. J'en trouverai un autre et il sera encore meilleur. En général, jusqu'à présent, les faits m'ont plutôt donné raison.
Du coup, qu'est-ce qu'on peut vous souhaiter, pour la suite ?
Peut-être de continuer à écrire des sujets qui touchent le public. Contrairement à ce que certains ont pu écrire à l'époque de la sortie de Contre-enquête, je ne fais pas de films politiques. Je fais du cinéma comme j'aimerais en voir. Pour l'instant, c'est du polar et j'espère juste que ça peut permettre aux gens de s'impliquer pendant une heure et demie, de se sentir proche d'un personnage. J'aime à penser qu'ils ressortent au moins avec le sentiment d'avoir bien dépensé les dix euros de leur place de cinoche.
1 commentaire:
Vachement intéressant ! Bravo pour ces interviews, Martin, vraiment tu n'as rien à envier aux "pro" !
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