Une chronique de Martin
C'est sûrement plus ou moins la même chose pour tout le monde. Parmi les innombrables raisons qui m'inciteront à pousser les portes d'une salle de cinéma, la nostalgie tient sa place et la défend vaillamment. Au-delà du plaisir pris devant un spectacle régressif, c'est je crois d'abord pour retrouver Harrison Ford que j'ai voulu voir Cowboys et envahisseurs. L'acteur fêtera ses 70 ans l'an prochain: je l'ai beaucoup aimé et il me fait plaisir de le revoir de loin en loin, même si c'est vrai qu'à présent, les limites de son jeu m'apparaissent beaucoup plus flagrantes qu'à l'époque de sa gloire. Bref...
Le héros de Cowboys et envahisseurs, c'est Daniel Craig, en fait. Délaissant provisoirement la panoplie de James Bond, le Britannique renoue avec la grande tradition du western, en jouant un cavalier solitaire... et sans nom ! Quand le film démarre, celui qu'on appellera Jake Lonergan a tout oublié de qui il était et de ce qu'il faisait allongé dans le désert, lesté d'un curieux bracelet. Quelques minutes plus tard, après avoir dessoudé des chasseurs de prime qui passaient par là, il aura récupéré un cheval, un chien et un chapeau, mais aussi et surtout assez de lucidité pour prendre la route sans attendre davantage. C'est ainsi qu'il débarquera à Absolution, petit village paumé et forcément poussiéreux, qu'il se créera quelques ennuis avec le fiston d'un propriétaire terrien du voisinage et que, du fond d'un convoi pénitentiaire, il assistera à l'attaque de... vaisseaux extra-terrestres et à l'enlèvement de quelques braves Américains sans défense. Le début des choses sérieuses, pour résumer.
Dans Cowboys et envahisseurs, il y a aussi une femme, mystérieuse et jouée par la jolie Olivia Wilde, mais je vous laisse la découvrir plus avant. L'important pour apprécier le film, c'est de ne surtout pas le prendre trop au sérieux. On appelle ça un crossover: la fusion volontaire de deux univers de fiction disparates afin d'y puiser matière à un troisième, hybride. C'est casse-gueule, mais le fait est qu'ici, ça marche plutôt bien. Il faut dire aussi que le film s'inspire d'une BD, ce qui a dû faciliter la tâche des scénaristes et permettre au réalisateur de se concentrer sur l'aspect spectaculaire de la chose. De ce point de vue, mission accomplie: les créatures qui débarquent sur notre pauvre planète sont assez convaincantes, dans le genre féroce et visqueux. Les scènes d'action ne manquent pas, ce qui fait qu'on ne s'ennuie guère. Enfin, si, un peu... une fois qu'on a compris le principe, certains passages traînent un peu en longueur. D'autres sont aussi plombés par une morale très américaine. On pouvait l'anticiper, mais j'aurais apprécié plus d'originalité sur ce point.
Cowboys et envahisseurs reste un bon film d'action pour le repos des neurones. Comme je l'ai suggéré, il lui manque peut-être juste un peu de fantaisie, voire de folie. L'univers dépeint n'est certes pas une coquille vide, mais reste d'une épaisseur relative. Il ne faut pas trop en demander: c'est comme ça qu'on peut passer un bon moment. Quant à Harrison Ford, même si on peut regretter qu'il n'étende plus sa panoplie d'expressions, il s'offre un personnage de vieux briscard sympa, un peu ambigu parfois et qui aurait sans doute gagné à avoir un peu plus de noirceur. Daniel Craig, lui, incarne bien le héros classique, sans peur et sans reproche: il joue très correctement, mais n'éclabousse tout de même pas l'écran d'un talent hors-norme. Disons que, pour un Anglais, se couler aussi bien dans les oripeaux d'un mec de l'Ouest, c'est un signe de bonne maîtrise de son art. Maintenant, j'en arrive à me demander ce qu'il manquerait au film pour être une totale réussite: trois fois rien, sans doute, un peu plus de corps, probablement. Oui, c'est ça: le plat est bon, il est copieux, mais la sauce, elle, aurait mérité d'être un peu plus corsée.
Cowboys et envahisseurs
Film américain de Jon Favreau (2011)
Je n'ai pas vu Iron Man, le film qui a fait connaître le réalisateur. Partie remise. En attendant donc de l'évaluer dans un autre domaine, j'ai envie de dire que ce nouvel opus reste un spectacle honorable, mais que j'ai vu mieux cette année. Si le True grit des frères Coen semblait renouer avec la tradition, c'est pour moi Rango qui mérite la Palme du western décalé 2011. À voir si d'autres prétendants débarquent sur nos écrans, quitte à encore renouveler le genre.
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