Une chronique de Martin
Je suis sûr que vous n'auriez aucun mal à trouver le titre d'un film adapté d'un roman. Je croyais que Le passager de la pluie en était un, mais je me suis trompé. Constat surprenant, Sébastien Japrisot a fait les choses dans le sens inverse: il a écrit le scénario du film sorti en 1971, avant de l'utiliser pour base d'un livre publié en 1992. Tant pis pour mon image erronée du vieux couple cinéma-littérature !
Je vous dois l'entière vérité. Si j'ai regardé Le passager de la pluie lors de sa récente diffusion sur Arte, c'est d'abord pour le plaisir anticipé d'y retrouver la frimousse de Marlène Jobert. Je suis sûrement un peu trop jeune pour mieux connaître la filmographie intégrale de la jolie rouquine, mais je reste toutefois convaincu qu'elle ne doit pas être réduite à sa seule (vraie et belle) qualité de "maman d'Eva Green". La dame est pour moi une comédienne patrimoniale ! Au départ du film, donc, à peine attentive aux paroles de sa mère de cinéma jouée par une pimpante Annie Cordy, elle voit descendre d'un bus un homme mystérieux, porteur d'un sac rouge décoré aux armes d'une compagnie aérienne américaine. Rentrée dans sa villa provençale, délaissée par un mari jaloux et steward aérien, la belle sera... violée par l'inconnu, à peine quelques heures plus tard. Et le film de s'intéresser alors aux diverses conséquences de cet acte, au silence de la victime et aux motivations du criminel. Une curieuse partie d'échecs aux relents d'espionnage s'engage.
L'autre joueur s'appelle Charles Bronson. C'est aussi pour l'acteur américain que j'ai voulu voir le film. En dépit d'un accent étranger fort prononcé, il parle ici en bon français et compose efficacement son très ambigu personnage. C'est lui qui mène l'enquête. Chat sauvage plutôt que souris, il a l'allure menaçante de celui qui veut tout savoir sans rien révéler de ses propres informations. L'intelligence du film tient aussi à ce que Le passager de la pluie n'est pas qu'un banal thriller. Si un véritable suspense est maintenu de bout en bout, le long-métrage a aussi parfois des allures d'histoire d'amour ou de comédie. À tort ou à raison, j'y vois un style caractéristique des années 70 alors naissantes, que j'aime assez, d'ailleurs. Le petit air de polar à l'américaine transposé en Provence pourra aussi séduire les amateurs de cinéma international. Le film parvint de fait à séduire des publics variés: il fut même récompensé d'un Golden Globe américain et Marlène Jobert obtint un Donatello, l'équivalent des Césars en Italie. J'ai aussi apprécié la bande originale de Francis Lai et une certaine idée du rythme. On a certes fait mieux depuis, mais le long-métrage m'a plu de par son petit côté vintage.
Le passager de la pluie
Film français de René Clément (1970)
Sébastien Japrisot au cinéma, c'est aussi, du côté des polars toujours, le très chouette L'été meurtrier, avec un Alain Souchon éperdument amoureux d'Isabelle Adjani. Dans un genre et un style bien différents, c'est encore Un long dimanche de fiançailles, film sur la Première guerre mondiale dont je reparlerai un de ces jours. Aujourd'hui, pour compléter mon propos, je préfère vous renvoyer vers un autre thriller un peu vieilli, mais qui m'avait beaucoup plu quand je l'ai découvert: Seule dans la nuit, avec Audrey Hepburn.
2 commentaires:
Sur la belle et talentueuse Marlène, "comédienne patrimoniale", en effet :
http://lemiroirdesfantomes.blogspot.fr/2015/01/rouge-baiser-les-trois-vies-de-marlene.html?view=magazine
Belle, talentueuse et patrimoniale... nous sommes donc d'accord en tous points, Jean-Pascal.
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