Une chronique de Martin
L'histoire de Cowboy sort en droite ligne de la rubrique des faits divers. Au début des années 80, un jeune Belge prend un bus d'enfants en otage pour dire à la télé combien il lui est difficile d'avoir à vivre dans la société. À partir de cette drôle d'histoire vraie, le scénario du film s'intéresse à Daniel Piron, un journaliste qui, 25 ans plus tard, a l'idée de réunir l'ensemble des protagonistes de l'époque pour un reportage sur leur (supposée) réconciliation. L'enquêteur cherche en fait à aller mieux, avec les autres sans doute, mais d'abord avec lui-même. C'est donc à une comédie un peu aigre que Benoît Mariage nous convie. Le drame y affleure sous l'ironie.
Porté par l'espoir du changement, Cowboy repose assez largement sur les frêles épaules de Benoît Poelvoorde. Vous le savez peut-être: le comédien joue souvent ce rôle du brave type un peu perdu ou mal à l'aise dans la vie, ce personnage qui lui ressemble en fait beaucoup. Dans tout son désarroi, il est ici magnifique: que ce soit dans la fulgurance de ses paroles et l'expression de ses silences, toujours, il parvient à susciter un profond sentiment d'empathie. Point plus qu'appréciable, l'éclat de sa prestation ne ternit pas celle de ses partenaires de jeu. Au contraire, la distribution est un régal de justesse, de Gilbert Melki chien fou désormais la bride sur le cou à François Damiens caméraman moins crétin que prévu, en passant par Julie Depardieu épouse à la compassion éprouvée. Que des bons.
Est-ce seulement possible de tout changer simplement en le désirant ardemment ? Cowboy apporte à la question existentielle une réponse ambiguë, rappelant aussi combien il est important de ne pas laisser les autres sur le bord du chemin. D'une drôlerie franchement absurde par moments, Daniel Piron est surtout touchant, limite pathétique parfois. Le film de cathartie qu'il s'échine à tourner lui échappe doucement, mais son acharnement à aller jusqu'au bout laisse entendre que c'est lui qui en a le plus besoin. Il suffit de se souvenir de ses propres états d'âme pour savourer cette quête, avec la mer pour horizon. Douce-amère, la toute dernière scène laisse espérer qu'il y a peut-être encore un peu de lumière au bout du tunnel.
Cowboy
Film franco-belge de Benoît Mariage (2007)
Le réalisme cru du film et ses outrances m'ont évoqué Mammuth, l'oeuvre décalée du duo Kervern-Delépine. Si Benoît Mariage affirme ne pas forcément avoir trouvé en Benoît Poelvoorde son alter ego face caméra, il me paraît clair que le long-métrage est vraiment lié par toutes ses fibres à son comédien. Comédien que j'apprécie vraiment de plus en plus et que je vous recommande encore une fois d'admirer dans Les émotifs anonymes, sorti en début d'année. J'attends avec impatience sa prochaine prestation écorchée vive.
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