Une chronique de Martin
Après lui avoir longtemps tourné autour, j'ai fini par "rencontrer" Tahar Rahim. Propulsé tout au sommet des espoirs du cinéma français depuis sa collaboration avec Jacques Audiard, le comédien est actuellement à l'affiche de Les hommes libres, fiction inspirée d'éléments historiques sur fond de seconde guerre mondiale. Le film d'Ismaël Ferroukhi s'intéresse au sort d'un jeune Algérien à Paris depuis 1939 et qui vit des revenus du marché noir. Surpris et arrêté par la milice, il échappe à la peine de mort quand il accepte d'espionner le recteur de la Grande Mosquée, soupçonné pour sa part de venir en aide à la résistance et à la population juive. Rien que ça !
Je n'ai pas l'intention d'alimenter le débat sur la véracité des faits présentés dans le film. Sur le plan strictement cinématographique, Les hommes libres illustre une tranche de vie, celle d'un homme étranger qui considère d'abord que la résistance n'est pas sa guerre, avant d'ouvrir les yeux sur la nécessité d'être solidaire et finalement de rejoindre le mouvement. La bande-annonce et l'affiche peuvent laisser penser à une oeuvre trépidante, portée sur l'action. La chose se présente autrement: l'essentiel du propos est porté par le texte des dialogues et ceux qui iront voir le long-métrage pour les scènes de coups de feu en seront pour leurs frais. Ce n'est pas plus mal.
Du côté des comédiens, Tahar Rahim n'a, assez paradoxalement, pas grand-chose à dire. L'acteur se tire bien, cela dit, d'une prestation toute en retenue, son expressivité parlant pour lui pour le rendre crédible - et ce même si j'ai trouvé son engagement un peu rapide compte tenu de la tiédeur de ses convictions initiales. Impeccable l'an passé en moine chrétien, Michael Lonsdale, lui, reste un acteur efficace et porte bien l'habit musulman. Quelques autres personnages auraient pu donner plus de relief au scénario, mais sont trop effacés pour emporter le morceau, je pense ainsi notamment à celui qu'interprète la belle Lubna Azabal. Il manque un petit quelque chose pour faire de Les hommes libres un grand film: son mérite premier restera la mise à la lumière d'un épisode méconnu de notre histoire.
Les hommes libres
Film français d'Ismaël Ferroukhi (2011)
Il a admis qu'il appréciait la comparaison, mais le réalisateur a dit aussi ne pas s'être directement inspiré de L'armée des ombres, grande référence du film de résistance à la française. Son travail particulier m'a fait songer à L'armée du crime, que je lui préfère, parce qu'il me semble plus explicite sur les états d'âme des citoyens ordinaires à l'heure de la lutte armée. Homme ordinaire que la force des choses contraint à l'action, Bourvil l'est dans Fortunat, oeuvre axée sur le mélodrame. Devant le film de ce jour, j'ai pensé à ceux de Rachid Bouchareb, Indigènes et Hors-la-loi, autres évocations récentes au cinéma de fragments oubliés de l'histoire de France.
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