Une chronique de Martin
Beaucoup d'appelés et peu d'élus: depuis que l'Académie des Oscars attribue un prix au meilleur film en langue étrangère, le cinéma japonais reste souvent à l'écart des récompenses. Après avoir glané trois statuettes d'honneur dans les années 50, les artistes cinéastes de l'archipel sont restés bredouilles jusqu'en 2009 et la consécration de Yojiro Takita, réalisateur de Departures. Je viens de découvrir cette oeuvre. Son héros, Daigo Kobayashi, est un jeune violoncelliste dont l'orchestre, faute d'un vrai succès, a subitement été démantelé.
Franchement surpris, le musicien doit revendre son instrument et, avec sa femme, il quitte la ville pour s'installer là où vivait sa mère. Pour démarrer une nouvelle vie, Daigo répond à une petite annonce pour un emploi d'aide aux voyages. Alors qu'il pense qu'il va vendre des croisières et escapades touristiques, il découvre que l'entreprise qui l'a recruté est une société de... pompes funèbres, spécialisée dans la toilette de personnes plus ou moins fraîchement décédées. Departures n'est pourtant pas un film d'humour noir: s'il comporte effectivement quelques moments amusants, il relève de la comédie de moeurs et propose d'abord un panorama décalé de la société japonaise contemporaine. Suivre l'ex-violoncelliste devenu apprenti croque-mort n'est pas drôle avant tout: le scénario s'intéresse beaucoup plus à ses états d'âme qu'à la cocasserie des situations. C'est de fait ce qui rend le long-métrage intéressant, sinon poignant.
Departures tient aussi du parcours initiatique. Son héros n'a pas eu beaucoup de chance dans la vie: même si son épouse se montre compréhensive et patiente avec lui, il traîne un boulet, une névrose liée à un père déserteur du foyer conjugal et à une mère trop tôt disparue. C'est contre ces deux fantômes que Daigo lutte constamment au cours du film, son drôle de métier lui offrant refuge dans une sorte d'accomplissement spirituel, inattendu et salvateur. Je vous laisse désormais découvrir comment le jeune homme évoluera pour devenir un autre lui-même: il y a là quelque chose d'assez universel, l'esprit japonais se manifestant de temps à autre par une certaine pudeur de ton. Une histoire fine et réconfortante.
Departures
Film japonais de Yojiro Takita (2008)
Par l'immobilité du cadre et la sobriété de la mise en scène, le film m'a rappelé l'extraordinaire Voyage à Tokyo. La comparaison s'arrête là: le long-métrage d'aujourd'hui est un gentil mélo, qui ne restera probablement pas aussi longtemps au sommet du panthéon cinématographique mondial. Dans la série des oeuvres récentes venues tout droit du Japon, je lui ai d'ailleurs préféré Still walking.
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