lundi 29 février 2016

Une jeune égarée

Samedi, je vous avais promis de revenir aujourd'hui avec un film allemand. Ce n'était pas tout à fait juste: le premier long-métrage que je souhaite évoquer cette semaine est germano-australien ! Après, une chose est sûre: il se passe bel et bien en Allemagne. Soyons précis: Lore a pour décor le Reich vaincu, au printemps 1945.

Est-ce parce qu'elle s'est convertie au judaïsme que la réalisatrice australienne Cate Shortland s'est intéressée à cette très sombre page de l'histoire européenne ? Je ne le sais pas et ne peux donc l'affirmer. Je suis toutefois en mesure de témoigner de ce que j'ai vu: un film dont l'intrigue tourne autour des cinq enfants d'un dignitaire nazi, abandonnés par leurs parents aussitôt après le suicide d'Adolf Hitler. Lore est le titre du long-métrage et le prénom de l'aînée de la fratrie. Si ce début de scénario m'a attiré, c'est que je me suis toujours senti proche des Allemands que j'ai connus et que je me demande souvent comment un peuple peut se reconstruire avec la culpabilité de crimes aussi abominables. Problème: ici, on tourne autour de la question sans jamais vraiment l'aborder et on nous montre tout autre chose...

C'est un peu dur exprimé ainsi, mais je le pense en ces termes: Lore ne tient pas vraiment ses promesses. L'adolescente qui joue le rôle principal s'en tire bien, comme d'ailleurs les autres jeunes acteurs. Pour moi, ce qui est déplorable, c'est que l'intrigue s'intéresse surtout aux premiers émois ambigus que cette femme encore toute jeune ressent quand sa route croise celle d'un garçon présenté comme juif. Franchement, parfois, ça m'a mis mal à l'aise: j'ai jugé peu crédible qu'une gamine élevée par un Nazi puisse ressentir une attraction quelconque pour un porteur d'étoile jaune. Il m'a par ailleurs semblé que le film était "encombré" de plans peu inspirés - personnages filmés au ralenti, échappées improbables sur les espaces naturels parcourus par le petit groupe, caméra tenue à l'envers pour faire joli. Tout ça a fini par entraver mon émotion. J'ai cru qu'elle revenait légèrement à la fin, mais c'est resté faiblard. J'en suis assez frustré !

Lore
Film germano-australien de Cate Shortland (2012)

Trois étoiles: une pour les jeunes acteurs, une autre pour l'idée générale du scénario et une troisième pour l'ouverture d'esprit constatée chez cette cinéaste australienne - que je ne connaissais pas jusqu'alors. Maintenant, si vous tenez absolument à voir un film consacré à l'après-Hitler en Allemagne, je conseille plutôt Phoenix. Autre piste très intéressante à mes yeux: Le labyrinthe du silence.

----------
Mon avis n'est pas forcément partagé...

Pascale avait donné une note honorable au film (sans en dire plus). Quant à Sentinelle, vous pourrez voir qu'elle en parle plutôt en bien.

4 commentaires:

Pascale a dit…

Comme toi malgré une belle prestation de la jeune actrice, j'étais restée sur ma faim et n'avait pas pris ou eu le temps d'en parler à l'époque. Sachant qu'avec ***, ce sont des films que je reverrais volontiers...

**** que je reverrai c'est sûr,

***** que je revois dans la foulée ! ex. The Revenant.

Véronique Hottat a dit…

Merci pour le lien Martin. Je me souviens effectivement d'un film déconcertant, dans la mesure où il dévie de ce qu'on aurait pu penser être sa trajectoire. Mais j'ai suivi le réalisateur sans trop de mal dans ce qu'il me proposait, le voyant du coup comme une sorte de conte macabre pour enfants. On peut donc être fortement déçu si on en attendait autre chose, comme le traitement des conséquences de la fin de la croyance à une idéologie ou la culpabilité transmise par héritage. Pour finalement se retrouver dans une sorte de conte... mais il se trouve que j'adore les contes , je n'ai donc eu aucun mal à m'embarquer dans cette nouvelle voix que me proposait Cate Shortland. Et j'en garde encore un bon souvenir. Ceci dit, je comprends bien ce qui t'a gêné, mais sans que cela porte conséquence en ce qui me concerne.

Martin a dit…

@Pascale:

Personnellement, je ne pense pas le revoir. On ne sait jamais, mais ça ne me tente pas. Merci toujours de tes précisions quant à ton système de notation - plus complet que le mien.

Martin a dit…

@Sentinelle:

Ta façon d'interpréter le film est intéressante, ma foi. Je confirme que je n'avais pas cette attente. J'avais imaginé plutôt qu'on nous parlerait de la manière dont des enfants doivent faire face à la lâcheté des adultes, avec en complément un possible sentiment de culpabilité. Je n'ai rien trouvé de cet ordre. Et, plus que macabre, je dois dire que j'ai trouvé l'histoire assez glauque.

Cela étant, d'autres interprétations sont possibles, en effet, et la réalisatrice a bien le droit d'avoir souhaité délivrer un autre message que celui que je pensais trouver. Il est possible d'ailleurs que je sois mal à l'aise parce qu'à côté de cette dimension fantasmagorique, le scénario s'appuie sur des événements très concrets. Ce ne serait pas la première fois que je ressens ça vis-à-vis d'un film traitant du nazisme - la dernière fois, c'était avec "Inglourious basterds" de Quentin Tarantino.