jeudi 16 avril 2015

Un monde à eux

Lino Ventura a 48 ans et Alain Delon approche de ses 32 printemps quand ils tournent ensemble Les aventuriers. Dans ce film traversé par un esprit de jeunesse, une mannequin canadienne s'intercale entre eux, qui n'a pas soufflé sa 24ème bougie: Joanna Shimkus deviendra, une dizaine d'années plus tard, l'épouse de Sidney Poitier. Mais n'allons pas mélanger chronique cinéma et information people...

Les aventuriers, c'est d'abord l'histoire de deux copains, d'un âge différent, mais d'une ambition commune: Roland le mécano et Manu le pilote d'avion rêvent plus ou moins d'une autre vie. Par un hasard dont il ne faut pas forcément dire qu'il est heureux, les deux amis apprennent qu'une épave repose au fond de l'Atlantique, quelque part au large du Congo. Le plongeur qui mettrait la main dessus s'emparerait du même coup du fabuleux trésor qu'elle est censée contenir. D'abord hésitants, les deux compères s'embarquent, emportant avec eux Laetitia, une jeune artiste qui passait par là. Outre une affection teintée d'ambigüité, un certain sentiment d'échec unit ces trois (beaux) personnages. Je crois que c'est ce qui explique qu'on s'attache à eux. En 1967, certains s'y sont sûrement reconnus...

Plus de vingt ans avant sa rénovation et 23 avant l'arrivée du jeu télévisé éponyme, le film nous donne à voir un Fort Boyard submergé par la végétation. Je ne dirai pas pourquoi, car cela m'amènerait nécessairement à dévoiler la fin de l'histoire. Je peux souligner simplement que Les aventuriers est moins naïf qu'il n'y paraît d'abord. D'un certain point de vue, c'est presque un long-métrage nostalgique. Le fait est que ses deux personnages principaux regrettent quelque chose qu'ils n'ont finalement qu'à peine effleuré. Bientôt cinquante ans plus tard, ce récit porte logiquement la marque de son temps. Cet aspect suranné le rend somme toute sympathique. Assez bien joué, rythmé et "dépaysant", il a accédé au rang envié d'oeuvre-culte pour une partie du public. À voir... au moins une fois.

Les aventuriers
Film français de Robert Enrico (1967)

Si cette production sort du lot, c'est aussi pour la musique très sixties de François de Roubaix, artiste maudit, puisque décédé d'un accident de plongée à 36 ans seulement. Côté cinéma, on peut retrouver ici quelque chose de Classe tous risques (la plume de José Giovanni ?). Plutôt en quête de liberté que voyous, Roland-Lino et Manu-Alain bâtissent leur monde à eux, un peu comme Butch Cassidy et le Kid...

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Si ça vous tente, vous pouvez aussi partir à l'aventure...

Sur "Mon cinéma, jour après jour", Chonchon dit tout son admiration pour le film. Vous lirez aussi une autre chronique chez Princécranoir

4 commentaires:

cc rider a dit…

A ma connaissance Delon et Ventura sont ensemble à l'affiche dans seulement 3 films.
""Le chemin des écoliers", "les aventuriers" et "le clan des siciliens".
a noter ,dans "le clan de siciliens" ils n'ont qu'une scéne ensemble au tout début du film qui se limite à une seule réplique. Etonnant pour ces deux grandes stars des années 60/70

Martin a dit…

Je note. Je n'ai vu aucun des deux autres films. Merci pour ce complément, CC Rider.

princécranoir a dit…

Quand le voltigeur Delon fredonne l'air de Laetitia sur les harmonies de François de Roubaix (le samouraï, le vieux fusil, que du bon), le film est touchant. La musique est le seul vrai trésor de cet étalage d'exotisme au rabais.

Martin a dit…

"Étalage d'exotisme au rabais" ? Fichtre ! Je te trouve bien sévère, l'ami, sur ce coup-là. Si on se replace dans le contexte de 1967, je trouve que le film dit quelque chose de l'esprit jeune de l'époque. Aujourd'hui, j'admets que tout ça a vieilli, mais tout de même...

Cela étant dit, je suis assez d'accord avec toi sur la musique.