Cette histoire reste sûrement gravée dans la mémoire de tous ceux qui ont connu Nice dans les années 70. Résister au temps qui passe, c'est le propre de tout ce qui est inattendu, nouveau, rocambolesque aussi. Un beau jour de 1976, le directeur d'une banque niçoise découvre que sa salle des coffres a été attaquée. Certains sont encore intacts, la majorité à vrai dire, mais ceux qui ont été forcés laissent les malfaiteurs à la tête d'un butin colossal. La surprise est d'autant plus grande que les braqueurs ont creusé un long tunnel pour forcer la banque par le dessous. Pour cela, et comme l'indique le titre du film dont je vous parle aujourd'hui, ils ont d'abord dû emprunter Les égouts du paradis. Avec, pour devise et signature, la phrase restée célèbre de leur leader: "Ni arme ni violence et sans haine".
Légèrement remanié, le titre a inspiré celui d'un film sorti récemment, avec Jean-Paul Rouve. L'expression, elle, est donc d'abord également celle du braqueur en chef, un photographe, ancien de la guerre d'Algérie tendance OAS, Albert Spaggiari. Auteur ensuite d'un bouquin sur ce que les journaux ont appelé le casse du siècle, l'homme est mort en cavale. Arrêté, il s'était enfui du bureau du juge d'instruction de manière tout aussi mémorable, décidant de sauter d'une fenêtre du palais de justice pour atterrir sur une voiture et filer à l'arrière d'une moto pilotée par un de ses complices, garé en bas ! Les égouts du paradis, le film, illustre cet épisode, resté d'autant plus célèbre à Nice que, dit-on, le propriétaire du véhicule endommagé avait été indemnisé. Mais aussi parce qu'ensuite, l'avocat de Spaggiari, Jacques Peyrat, ancien maire de Nice, avait prétendu un temps que le complice n'était autre que le champion moto Christian Estrosi, l'homme qui l'a depuis battu aux élections municipales. Notez que la version cinéma s'arrête juste au moment de la fuite et n'évoque pas cette drôle de salade niçoise.
Logique, en somme: le film a été tourné en 1979, et dès lors presque "à chaud", par José Giovanni, un ancien taulard reconverti cinéaste. Le scénario est donc pour le moins brut de décoffrage, si j'ose dire en la circonstance. On pourrait même sûrement l'envisager comme une forme de salutation respectueuse à celui que d'aucuns considèrent comme héros, une sorte de Robin des bois des temps modernes. J'espérais autre chose. Les égouts du paradis restent fidèle au titre choisi et montrent surtout le creusement des tunnels sous le Paillon, qui, après de longs jours de travail, a permis l'attaque de la banque. Du coup, la pellicule sent un peu la naphtaline: tout cela manque finalement beaucoup de dynamisme. Cette réserve étant formulée, je précise que je ne doute pas que le film puisse plaire malgré tout, témoignage certes moins austère qu'un procès verbal. Première rôle, Francis Huster ne cabotine pas (encore ?) trop. Par ailleurs, il est toujours assez agréable de voir de "vieux" acteurs dans leur prime jeunesse, à l'image ici de Jean-François Balmer.
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