dimanche 15 mai 2016

Une virée viticole

J'étais resté sur ma soif avec le dernier film du duo Delépine-Kerven. J'ai donc ouvert d'autres bouteilles avant d'aller goûter la cuvée 2016. Conclusion: sans se hisser à la hauteur des grands crus, Saint Amour paraît moins bouchonné que son prédécesseur. Ce millésime manque juste de longueur en bouche, même s'il se montre parfois gouleyant...

Avec son ami Thierry, Bruno fait chaque année la Route des vins. Seulement, quand d'autres visitent les domaines, ce brave paysan doit, lui, se contenter d'écumer les stands du Salon de l'agriculture. Pendant qu'il picole, son père, de son côté, s'efforce de faire connaître son exploitation - un élevage de bovins. Inquiet de l'avenir prédéterminé d'un héritier de la terre, Bruno a le fantasme d'un destin différent, où il pourrait agir selon ses seules envies. Et Saint Amour d'évoquer, avec d'ailleurs une certaine délicatesse, la précarité sociale de ceux qui vivent et travaillent dans nos campagnes. Le cinéma français ne s'y intéresse guère, ce qui rend la démarche intéressante.

Sans ironie ou condescendance, Saint Amour est un film à hauteur d'homme, drôle parfois, mais pas seulement. C'est également un film en mouvement, puisque, bientôt, le père décide d'embarquer le fils dans un road trip improvisé et possiblement salutaire. Il importe peu alors que, dans la vraie vie, Gérard Depardieu et Benoît Poelvoorde aient seize ans d'écart: on y croit et, en fait, c'est tout ce qui compte. Je suis moins convaincu en revanche par les différentes péripéties que le scénario leur fait traverser. Chemin faisant, leurs rencontres successives les rapprochent toujours de femmes, assez différentes les unes des autres, mais finalement complémentaires. Les hommes placés au regard de l'éternel féminin: c'est bien souvent pathétique. Heureusement, quelques scènes dévoilent une inspiration poétique insoupçonnée chez les anciens trublions du Groland, ce qui tire alors l'ensemble vers le haut. L'avenir partagé pourrait s'avérer souriant...

Saint Amour
Film français de Benoît Delépine et Gustave Kervern (2016)

Les étapes du voyage de Bruno et son père forment autant d'étapes sur un improbable parcours initiatique. C'est je crois cette structure de film à sketchs qui m'a empêché d'entrer à 100% dans leur histoire. J'ai préféré La vache ou d'autres des opus des deux réalisateurs comme Louise-Michel et Le grand soir. Et j'aime encore davantage la singularité - et la profonde humanité - de leur ami Bouli Lanners...

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Une précision sur ces dames...
Le casting féminin a moins de visibilité, mais il a fort belle allure. Exemple: Solène Rigot, Izïa Higelin, Ana Girardot et Andréa Ferréol. Céline Salette décroche le rôle le plus important et Chiara Mastroianni passe en coup de vent. Saint Amour n'est en rien un "film féminin"...

Envie d'un autre verre ?
Vous pouvez aussi aller trinquer chez Pascale et Dasola. À vot' santé !

4 commentaires:

eeguab a dit…

Benoît Delépine, qui est d'ici, est venu le présenter lors de sa sortie. J'ai eu l'oocasion d'animer la soirée. Le film a plu dans l'ensemble mais il est vrai qu'ici beaucoup de gens le connaissent personnellement.Je l'ai plutôt aimé sauf la fin(obsession de la paternité traitée un peu en farce). Même si la relation père-fils est l'un des ressorts de Saint Amour.

Pascale a dit…

Ah ben tu vois j'avais préféré le cru précédent moi !

Martin a dit…

@Eeguab:

Oh ! Quelle chance d'avoir pu animer une soirée avec Benoît Delépine ! J'avais pour ma part eu l'opportunité d'interviewer le monteur du duo à propos de son travail sur un autre de leurs films, "Le grand soir". Chouette souvenir !

Je suis assez d'accord sur ce que tu dis de la fin et de l'importance de la relation père-fils dans cette histoire. J'ai d'ailleurs trouvé que le duo Depardieu / Poelvoorde fonctionnait bien.

Martin a dit…

@Pascale:

Tous les goûts sont dans la nature. Houellebecq en roue libre, je suis assez peu client. Vivement le prochain !