Une chronique de Martin
Le constat m'a plu: avant Michel Hazanavicius, le dernier réalisateur français à avoir trusté les récompenses cinématographiques s'appelle Roman Polanski, un autre de nos compatriotes d'origine étrangère.
Et, comme l'a fait son glorieux "successeur", il a voulu se tourner vers un artiste ! La différence, c'est qu'il s'est inspiré d'une histoire vraie: Le pianiste raconte comment Wladyslaw Szpilman, interprète polonais de grand talent, a survécu lors de l'occupation de son pays par les troupes nazies, entre 1939 et 1945, et alors même qu'il était juif. Pour faire simple, c'est la sombre histoire du ghetto de Varsovie qui est ici contée, à hauteur d'homme. Une oeuvre coup-de-poing.
Deux choses me paraissent essentielles à une bonne compréhension du film. La première, c'est qu'il s'inspire directement du récit autobiographique du véritable Wladyslaw Szpilman. Roman Polanski n'a pas puisé la matière de son film dans une quelconque élucubration romanesque: Le pianiste a réellement existé et même survécu jusqu'en 2000. Il a bel et bien trouvé le moyen de se cacher et donc d'échapper à la déportation qui a causé la mort de toute sa famille. Deuxième élément important: c'est un point commun qu'il partage avec Roman Polanski. Le réalisateur n'était encore qu'un enfant quand il a connu sensiblement la même situation, dans le ghetto installé à Cracovie pour sa part. Cette "expérience partagée" apporte une force peu commune à un film déjà rude. Je l'ai vu récemment pour la seconde fois, le coeur serré et la peur au ventre. Il illustre parfaitement l'aspect presque aléatoire de la barbarie. Les Juifs méritent-ils seulement d'être prisonniers ? Un jour oui, l'autre non.
Je vous laisse consulter les pages dédiées: vous pourrez y retrouver l'intégralité des récompenses venues consacrer le film - entre autres une Palme d'or, sept Césars et trois Oscars. Car, s'il est bien évident qu'il s'inspire de faits réels, Le pianiste demeure une grande oeuvre de cinéma. Le choix intelligent de Roman Polanski aura été d'offrir de grands rôles à des comédiens méconnus: mis à part Adrien Brody, qui touche ici à l'excellence, je ne connais aucun autre acteur ! Conséquence: même au deuxième regard, le long-métrage m'embarque immédiatement vers le ghetto et ne relâche son étreinte qu'au moment du générique final. Je souligne d'ailleurs qu'il entre presque aussitôt dans le vif du sujet, à l'occasion d'un concert interrompu par un bombardement. Je n'ai pas de surprise à préserver ici, mais je tiens à rester évasif sur le scénario. Il faut lire le livre comme un témoignage et le long-métrage comme son illustration. Avant, peut-être, d'aimer Chopin comme remède à l'horreur absolue.
Le pianiste
Film franco-polonais de Roman Polanski (2002)
Précision importante, je crois: le long-métrage a aussi pu compter sur des producteurs britanniques et allemands. Je n'ai pas souvenir d'avoir vu beaucoup d'autres films aussi forts sur la Shoah. Documentaires exceptés, s'entend. La liste de Schindler est encore le premier titre qui me vient à l'esprit, mais j'en garde des images (un peu) moins rudes à supporter. Pour revivre le sort de la Pologne lors de la seconde guerre mondiale, je vous recommande le Katyn d'Andrzej Wajda, malheureusement méconnu. Ou pour retrouver Adrien Brody dans un autre drame, en reporter-photographe engagé lors d'un conflit armé, l'âpre Harrison's flowers, d'Elie Chouraqui.
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Si vous voulez lire un autre avis...
Les rédacteurs de "L'oeil sur l'écran" ont chacun publié le leur.
1 commentaire:
D'accord sur tout ! Mais, comme tu évoques le livre, je ne saurais trop conseiller de le lire en parallèle au film. Malgré un ton un peu "clinique", le livre apporte plus de précision sur la progression de l'histoire et, à mon avis, permet de mieux saisir l'ensemble.
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