jeudi 2 février 2023

Des revenants

Ciel ! J'ai eu la chance de faire un petit séjour à Vienne (en Autriche) et je viens de réaliser que c'était il y a bientôt... quatorze ans. J'aurais aimé en revenir avec trois-quatre DVD, mais je me souviens de mon incapacité à en trouver - on m'avait proposé un Spiderman ! Tout cela pour dire qu'en janvier, j'ai ENFIN revu un film autrichien...

Je ne suis certes pas le dernier à penser d'abord à Michael Haneke quand on évoque l'Autriche, mais j'en ai été content de me pencher sur le travail d'un autre réalisateur: Stefan Ruzowitzky (né en 1961). Son tout dernier film, Hinterland, a des producteurs dans son pays d'origine, de même qu'en Allemagne, au Luxembourg et en Belgique. Précision, si besoin: dans la version originale, les protagonistes s'expriment en allemand. Le scénario nous invite à nous intéresser d'abord à un groupe de soldats - vaincus - de la Première guerre mondiale. Nous sommes au début des années 20: ces pauvres bougres viennent d'en terminer avec de longs mois de captivité en Russie. Personne ne les attend en héros: l'empire dont ils étaient les gardiens n'est plus. Il a cédé sa place à une République fragile, où anarchistes, communistes et proto-nazis battent le pavé. Cet "arrière" que le titre évoque est presque plus difficile à vivre que le front ! En tout cas pour le personnage principal, Peter Berg, qu'une série de meurtres vient vite impliquer. Les victimes ? Ses anciens compagnons d'armes.

Je n'ai pas envie de vous raconter par le menu cette histoire criminelle. Pas envie non plus d'explorer la noirceur du film, en partie compensée par un beau personnage féminin (de médecin légiste !). Hinterland m'a fait forte impression avec ces deux éléments, oui. Pourtant, je veux souligner que c'est pour ce qu'il dit de l'après-guerre qu'il m'a le plus intéressé. Mon histoire familiale fait que j'ai une idée du sentiment d'incompréhension qui pouvait animer les rescapés français lorsque, après 1918, ils ont pu revenir chez eux. Dans le film d'aujourd'hui, les survivants m'apparaissent encore plus déphasés. Leurs défaites militaires les ont éloignés de leurs compatriotes restés à couvert. Et l'Histoire, désormais, semble devoir s'écrire sans eux ! Pour symboliser leur mal-être ou leur névrose, Stefan Ruzowitzky réinvente une Vienne expressionniste, dont chaque mur est déformé. L'effet est saisissant et, bien évidemment, décuplé sur grand écran. Le comble, c'est que le film semble être passé relativement inaperçu. De quoi m'inciter à regarder les réseaux de distribution de plus près...

Hinterland
Film autrichien de Stefan Ruzowitzky (2021)

Mon premier film vu au cinéma en 2023 aura donc mis plus d'un an pour arriver jusqu'en France, dans des conditions sûrement difficiles. J'imagine qu'il n'est plus en salles, désormais, mais c'est un titre digne d'être retenu pour son exploitation future télé / DVD / VOD. L'aspect "serial killer" est commun, mais son arrière-plan historique vaut le coup d'oeil. Comme pour Frantz. Ou encore Les gardiennes...

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Un mot pour finir...

Je dédie ce texte à Pascale, qui a parlé du film deux fois, ici et . Sans son "insistance", il est probable que je serais passé à côté. Salutations aussi à Dasola, qui a également apprécié ce long-métrage.

8 commentaires:

Pascale a dit…

Ah le plaisir que tu me fais.
Si j'ai réussi à convaincre une personne, ça me va.
De l'importance de parler des films quand ils sont encore en salle (dit la relou) ;-)
Rien sur l'acteur de folie ?
En tout cas, merci pour ta confiance.
Et maintenant, direction Les faussaires du même réalisateur.
Un film tout aussi impresssionnant, TRÈS fort dans un autre genre qui m'avait fait découvrir August Diehl.

J'aimerais aller à Vienne voir si l'ombre d'Orson traîne toujours dans les rues et si on y entend un air de cithare à pleurer...

mais je souviens

dasola a dit…

Bonjour Martin, un film étonnant qui sort du lot. Dommage qu'il n'ait pas été mieux distribué. Les Faussaires est aussi un film à voir. Bonne journée.

Martin a dit…

@Pascale :

Cela me fait plaisir de te faire plaisir ! Je suis bien content d'avoir rattrapé le film au vol.
Je n'ai rien dit de l'acteur, c'est vrai. Peut-être que je décernerai mes Prix d'interprétation en fin d'année.
Avant cela, comme Dasola et toi me le suggèrent, j'aimerais bien voir un autre film du même réalisateur. Pas gagné...

PS : coquille corrigée, merci !

Martin a dit…

@Dasola :

Effectivement, le film sort du lot. La mise en scène est particulièrement remarquable.
Je vais me mettre en quête d'autres occasions de mieux connaître ce réalisateur. Merci pour la suggestion !

Pascale a dit…

Je reverrai le film (Les Faussaires) à mon retour et je peux te le prêter.
Tu me donneras ton adresse parce que tu as la bougeotte et je n'ai que l'ancienne.

Martin a dit…

Merci de cette proposition. J'suis toujours inquiet avec les envois de ce type...

Pascale a dit…

Ah.

Martin a dit…

Oui. Un peu peur que le DVD s'égare à l'aller ou sur le chemin du retour.
En tout cas, merci pour ta proposition. Je vais chercher un moyen de le voir autrement.