lundi 9 novembre 2009

Au-delà du mur

Ce pourrait être la question du jour: où étiez-vous il y a tout juste vingt ans ? Pour ma part, je ne m'en souviens pas du tout, mais certainement pas à Berlin. J'y suis allé quelques années plus tard, côté est, accueilli deux ou trois semaines chez une femme célibataire vivant avec ses deux jeunes enfants. Je me souviens y avoir regardé un vieux film français en noir et blanc (Les enfants terribles ?) avant de discuter avec cette dame des avantages et inconvénients de la réunification des deux Allemagnes. Question que pose aussi Good bye Lenin, un film que j'aime beaucoup et que j'ai revu récemment, dans l'idée de le chroniquer aujourd'hui, en ce jour anniversaire de la Chute du Mur. L'intrigue: Alex, un jeune Berlinois, participe à un défilé dans les rues de la capitale de la République démocratique allemande pour réclamer un peu de liberté. Octobre 1989: le jeune homme est pris dans une manifestation qui dégénère, bastonné et embarqué par la police... sous les yeux de sa mère, militante au coeur tendre. Conséquence: ladite maman, sous le choc, a une attaque et tombe dans le coma. Elle se réveille quelques mois plus tard, quand la frontière entre les deux Allemagnes n'existe plus de fait, quelques semaines avant qu'elle n'existe plus "tout court". Alex, qui sait devoir lui éviter un choc émotionnel trop brutal, va tout mettre en oeuvre pour lui laisser croire que rien n'a changé...

Good bye Lenin est une comédie, mais pas seulement. Il y a beaucoup de douceur dans cette histoire: celle du fils pour sa mère, et réciproquement. Ce genre de bons sentiments pourrait laisser avec un arrière-goût de guimauve, mais il n'en est rien. C'est probablement parce que le réalisateur - Wolfgang Becker - a également ajouté à sa recette une petite dose d'ironie, en écartant d'emblée toute réelle méchanceté. En fait, le long métrage offre aussi une sympathique occasion de revoir ses leçons d'histoire. Quelques-uns des événements de cette période décisive sont décrits de manière assez explicite: je pense notamment à l'arrivée massive des entreprises de l'Ouest sur le marché est-allemand, les débats multilatéraux sur la parité des deux monnaies, la victoire symbolique d'une équipe d'Allemagne unie à la Coupe du monde de football 1990, entre autres. Ce qui est agréable, c'est que ce n'est pas un cours magistral. Ceux qui connaissent ou se souviennent de ces moments auront quelques repères, tandis que les autres, eux, ne seront jamais vraiment largués. Disons que, sur ce ton parfois gentiment moqueur, le scénario expose quelques-uns des problèmes qui se sont posés à nos voisins et amis allemands. Le tout est parsemé (relevé !) d'une très légère pincée de nostalgie, mais qui ne fait en rien l'apologie du système aujourd'hui disparu. Non, vraiment, rien n'est vraiment politique ici: il s'agit plutôt d'un léger arrière-plan sociétal.

Je l'ai dit et le répète donc: Good bye Lenin est une comédie. Entendons-nous bien: on n'y rit pas à chaque scène, mais on sourit beaucoup. Je pourrais dire qu'il y a aussi quelque chose qui ressemble à de l'auto-dérision dans tout ça, et je n'exclus pas que le réalisateur ait transféré un peu de ce qu'il était alors dans son personnage principal. Germanophile convaincu - et pratiquant à la fin des années 80 ! -, j'aime aussi beaucoup ce film pour le simple fait qu'il est allemand. Reconnaissez-le: ce n'est pas souvent qu'une production d'outre-Rhin débarque sur nos écrans. Celle-là est d'ailleurs portée par de très bons acteurs, juste dans le ton de ce qu'ils racontent. Daniel Brühl campe un Alex tout de réserve et de détermination mélangées. Katrin Sass, la maman, est très convaincante elle aussi, que ce soit quand elle doit jouer, au gré des instants, la femme affaiblie par la maladie ou la partisane amie des plus modestes. Objectivement, je n'ai pas tous les noms en tête, mais soyez sûrs que les deux petites heures du métrage vous permettront également de découvrir toute une kyrielle de comédiens, dans des seconds rôles franchement bien écrits et aussi bien interprétés. La bande originale, signée Yann Tiersen, a amené certains critiques à parler d'un Amélie Poulain allemand. Je trouve que c'est un peu réducteur, le film n'ayant d'ailleurs rien de particulièrement onirique, et étant même plutôt empreint de réalisme. Enfin, voyez vous-mêmes, en VO si possible ! Je pense sincèrement que vous n'aurez pas à le regretter.

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