Une chronique de Martin
Fête de la musique oblige, j'ai cherché à vous présenter aujourd'hui un film musical. Un ami à moi (hello, Benoît !) s'étonnait justement que je n'aie jamais vu Bird, la belle oeuvre de Clint Eastwood consacrée au jazzman Charlie Parker, des années de Dizzy Gillespie, Fats Domingo et Miles Davis. Un petit emprunt à mon cher parrain plus tard, j'ai eu l'occasion dernièrement de rattraper cette lacune. Admettons tout de suite que je n'écoute pas beaucoup de jazz...
Clint Eastwood, lui, est un amateur éclairé et un jazzman pratiquant ! Si j'en crois un livre que j'ai sur lui, ce film rend hommage à une de ses idoles, de près de dix ans son aîné. Objectivement, pas besoin d'être incollable sur la - courte - carrière de Bird: nous y plongeons aussitôt pour découvrir une personnalité tourmentée, qui doit faire face à la mort de son enfant. Le film s'ouvre sur le retour au foyer d'un père dépassé par les événements. En piteux état, Parker s'explique avec sa femme un soir d'orage et, un instant plus tard, dans la salle de bains, tente de se suicider. Secouru à temps, il prend finalement le chemin de l'hôpital psychiatrique, jusqu'à ce que son épouse refuse son enfermement. Finalement habituée aux névroses de son époux et toujours assurée de leur amour réciproque, Chan peut être le vrai premier personnage du long-métrage. Comme très souvent chez Clint Eastwood, les faits et gestes du héros sont abordés par la voie intime et, donc, le drame.
Le film dure deux heures et demie: autant vous dire que vous aurez largement le temps de bien connaître Charlie Parker et, sans doute, de le comprendre mieux. Je ne suis pas allé très loin pour vérifier l'absolue véracité de ce qui est présenté à l'écran, notant simplement qu'au générique, Chan est citée pour son "inestimable contribution". Après la disparition de Charlie au printemps 1955, elle a vécu jusqu'en 1999, se remariant avec un autre saxophoniste, Phil Woods, et venant habiter en France - Bird ne montre rien de cet après. Nouvelle parfaite reconstitution d'époque, le long-métrage concentre son propos sur ce début des années 50. Il laisse bien sûr une part capitale à la musique. C'est d'ailleurs ce qui a rendu le tournage particulièrement compliqué, Clint Eastwood s'avérant très déterminé à utiliser les enregistrements originaux. Il aura fallu dix-huit mois d'un travail acharné sur le son pour accomplir l'adaptation technique nécessaire. Le résultat fait du film l'une des oeuvres les plus abouties du genre, d'autant que, plastiquement, la photo est superbe. L'incroyable maîtrise des clairs-obscurs toujours chers au maître américain n'a malheureusement pas suffi à apporter au long-métrage le succès public. Le jeu de Forest Whitaker lui a tout de même valu un Prix d'interprétation cannois. Je suis du camp de ceux qui disent qu'une récompense comparable pour Diane Venora n'aurait pas été imméritée. Un vrai petit chef d'oeuvre... à reconsidérer d'urgence.
Bird
Film américain de Clint Eastwood (1988)
L'air de ne pas y toucher, le film est aussi une fresque sur l'Amérique et ce qu'elle était au sortir de la seconde guerre mondiale. Discrètement mais sûrement, Clint Eastwood dit deux-trois mots critiques sur les institutions, notamment de ces hôpitaux soucieux de "soigner" les malades par séances d'électrochocs - une réalité qu'on retrouvera dans L'échange. Autre piste: l'étude de la relation entre un homme noir et une femme blanche dans une société restée très strictement ségrégationniste. Coincé entre Le maître de guerre et La dernière cible dans la carrière eastwoodienne, Bird marque une rupture significative: c'est la toute première fois que l'acteur reste tout le temps derrière la caméra, concentré sur la réalisation. Raison supplémentaire pour le découvrir ou le revoir d'un autre oeil ?
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D'autres avis toujours précieux...
Pascale, de "Sur la route du cinéma", ne le présente pas exhaustivement, mais indique qu'elle en fait sa Palme d'or 1988. Rédacteurs de "L'oeil sur l'écran", Elle et Lui lui font un triomphe également. Vous voyez: je ne suis pas seul à l'évoquer avec ardeur !
Pascale, de "Sur la route du cinéma", ne le présente pas exhaustivement, mais indique qu'elle en fait sa Palme d'or 1988. Rédacteurs de "L'oeil sur l'écran", Elle et Lui lui font un triomphe également. Vous voyez: je ne suis pas seul à l'évoquer avec ardeur !
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