Un mot d'abord pour féliciter Cédric: la réponse au concours de jeudi dernier était effectivement Docteur Jivago, film chroniqué ici il y a deux ans jour pour jour. Je n'en reparlerai pas aujourd'hui, mais il va sans dire que vous pouvez toujours le regarder: c'est à mes yeux l'un des chefs d'oeuvre du septième art. En ce lundi, la chronique concernera un autre grand film, La leçon de piano, le long-métrage qui valut à Jane Campion d'obtenir la première - et jusqu'à ce jour l'unique - Palme d'or décernée à une femme. C'était en 1993. Venue de Nouvelle-Zélande, cette oeuvre étonnante est aussi remarquable pour l'extraordinaire jeu développé par Holly Hunter, dans un rôle totalement muet. Pas facile d'être expressif dans ces conditions. J'ose l'écrire: la comédienne américaine s'en sort à merveille.
Je pense toutefois que, même s'il avait parlé, son personnage n'aurait pas été facile à jouer. Ada McGrath est une jeune femme écossaise, veuve et mère d'une petite fille. L'action se déroulant dans le courant du 19ème siècle, la situation ne dure pas: son père l'envoie à l'autre bout du monde et l'offre en remariage à un colon, Alistair Stewart. Pour tout bagage, quelques vêtements enfermés dans une malle et un très encombrant instrument de musique, qui va d'abord rester sur la plage. Le nouvel époux pas intéressé, il sera ensuite récupéré par un autre homme, un dénommé George Baines. La leçon de piano, c'est lui qui la prendra, faisant du clavier l'objet d'une indécente transaction. Pour récupérer son bien, Ada devra passer du temps avec lui. Les touches seront les "récompenses" improbables d'une liaison adultère... et au départ plutôt unilatérale.
Bien évidemment, la pauvre muette apparaît vite comme la victime de cette histoire, coincée qu'elle est entre un mari idiot et un amant malsain. La leçon de piano va toutefois bien au-delà du drame classique. Tous sont au fond des êtres très seuls. Du coup, et contre toute attente, l'héroïne va prendre goût au chantage que Baines met en oeuvre. En le comparant avec Stewart, elle finit par apprécier celui qui est tout de même son maître-chanteur, mais s'avère progressivement moins frustre qu'il n'y paraissait au début du film. C'est d'ailleurs bien tout l'intérêt du scénario: face à une situation absolument insolite, le caractère des personnages évolue ou, à tout le moins, nous apparaît sous un jour nouveau. La conclusion risque dès lors d'en surprendre plus d'un. Moi, je l'ai en tout cas appréciée. Rôles masculins, Harvey Keitel et Sam Neill sont inspirés, eux aussi. Que du bon ! Il est désormais possible qu'après l'avoir laissée quitter l'affiche des cinémas, je découvre prochainement une autre création de Jane Campion: Bright Star. Si c'est le cas, j'en reparlerais évidemment ici même. En conclusion, ce premier essai réussi m'amène à penser et à dire que c'est plutôt une agréable perspective.
2 commentaires:
La Leçon de Piano faisant partie de mon panthéon personnel, je suis revenue pour le plaisir sur la chronique de Martin que je n'avais jamais lue jusque-là. Très étonnée de n'y trouver - ni même dans les commentaires - une allusion à la colorimétrie si particulière, et surtout aux séquences finales.
Sans dévoiler la fin, je dirais avoir toujours conservé la désagréable impression que le réalisateur aurait pu s'épargner les dernières images. Celles-ci cassent pour moi une somptueuse construction après une scène sous-marine terriblement forte, symbolique, poétique. Et nous voici remontés à la surface, avec soulagement certes, mais au-delà d'une respiration salvatrice, fallait-il tomber dans une vision aussi matérialiste ?
Coucou Joss ! Content de lire ici ! Quelques réactions s'imposent...
- j'avoue que j'ai la pré-fin en tête, mais pas les toutes dernières images auxquelles tu fais référence. Je sais effectivement qu'il est question de remontée à la surface, mais...
- la colorimétrie est un peu outrée ici. C'est amusant que tu en parles, car je me disais justement que les photos que j'avais ajoutées à mon texte étaient trop bleutées.
- Le réalisateur ??? Jane Campion est la seule femme réalisatrice à avoir décroché la Palme d'or et tu en fais un réalisateur ??? Ce n'est pas très raisonnable.
Boutade à part, j'avais aimé ce film, il y a un peu plus de huit ans, déjà...
Peut-être l'auras-tu au cinéma au moment de sa sortie, toi ?
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