jeudi 15 novembre 2012

Hitchcock en France ?

Je dois l'admettre: le dernier film de François Ozon a quelque chose d'un classique hitchcockien. Quand Fabrice Luchini affirme que celui qui écrit une histoire doit savoir surprendre son lecteur, on peut entendre une déclaration d'intention à l'usage du spectateur. Film pétri de littérature, Dans la maison instaure un suspense intéressant. Pourtant, le point de départ reste banal: Germain, prof de français dans un lycée ordinaire, réclame de ses élèves le récit écrit de leur dernier week-end. Il obtient un torrent de banalités et...

Contre toute attente, une copie sort du lot. Claude Garcia, le jeune qui l'a écrite, ne se fait pas remarquer en cours. Son devoir raconte avec une bonne dose d'ironie sa détermination à s'inviter dans la vie d'un de ses camarades. Elle se termine par un "À suivre..." frustrant pour le lecteur ! Germain y décélérait bien un soupçon de perversité, mais il est trop pris par l'admiration subite qu'il porte à la maturité littéraire de Claude. À partir de là, Dans la maison avance au rythme des épisodes écrits par le lycéen. Une atmosphère étrange s'installe doucement mais sûrement, d'autant que le long-métrage abolit petit à petit la frontière de la réalité et de la fiction. Ce qui est montré happe notre attention et, comme Germain le suggère également, nous fait nous demander à plusieurs reprises ce qui va advenir. Fabrice Luchini l'affirme: "Une bonne fin, c'est celle qu'on n'a pas vu venir, et dont on se dit pourtant qu'elle n'aurait pas pu être différente". Fort de ce critère, le film est assez réussi. Un tantinet trop sentencieux, ai-je trouvé, mais formellement assez impeccable.

Pour autant, je n'ai pas totalement mordu à l’hameçon. Constat cruel pour le réalisateur et ses acteurs: j'ai même regardé ma montre pendant la projection, à deux reprises. Claude Garcia m'a semblé fasciné par le vide. Dans la maison, il ne se passe pas grand-chose d'intéressant, en réalité. Imaginaires ou réels, les événements s'enchaînent sans réelle passion. Une fois mis en place le mécanisme voulu par François Ozon, le film paraît parfois un peu répétitif. Honnêtement, je me suis de fait demandé où tout cela pouvait mener, mais sans enthousiasme démesuré. J'ai vu un long-métrage intelligent, certes, mais assez froid également, comme si finalement le fond comptait moins que la forme. Aussi réussi soit-il, l'exercice de style me laisse sur ma faim. Les comédiens ne me semblent pas devoir être mis en cause. Par bonheur, Fabrice Luchini laisse exister son jeune partenaire et, face à pareil monstre sacré, Ernst Umhauer s'en sort bien. Emmanuelle Seigner, Denis Ménochet et d'autres comme Kristin Scott Thomas aussi. Il m'aura manqué un peu de folie.

Dans la maison
Film français de François Ozon (2012)

Trois étoiles pour mon impression générale et une demie supplémentaire afin de souligner l'intelligence du propos. Adapté d'une pièce de théâtre, le film est lui-même très écrit, trop peut-être pour être vraiment emballant. Je trouve Pedro Almodovar meilleur dans ce genre d'ambiance. Et pour retrouver un ado capable d'imposer un suspense éprouvant, je vous recommanderais plutôt Ezra Miller dans We need to talk about Kevin. Si vous préférez rester entre adultes, ce sera Robert de Niro dans Les nerfs à vif...

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Ce que je vous recommande maintenant...

C'est de croiser les opinions ! Pascale, de "Sur la route du cinéma", donne elle aussi son avis sur le film. Dorénavant, j'ai décidé de citer également les chroniques publiées sur "Le blog de Dasola". Gardez aussi un petit clic pour lire l'avis paru sur "L'impossible blog ciné" !

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