lundi 16 novembre 2020

Ne pas avaler

Hunter a - terrible expression ! - "tout pour être heureuse": un mari aimant, une maison au bord d'un lac, des beaux-parents accueillants et généreux. Pourtant, malgré tout cela, elle se sent seule et fragile. Pire: tombée enceinte, elle développe une lourde névrose, si sévère qu'elle pourrait devenir un danger pour elle ET pour les autres. Ouille !

Sorti à la mi-janvier, Swallow est le tout premier long de son auteur. Il est littéralement transcendé par la prestation d'une comédienne expérimentée, mais relativement méconnue: Haley Bennett, 32 ans. C'est un film intéressant, mais bien sûr pesant, puisque la caméra colle aux pas d'une desperate housewife sans rien cacher des suites de son mal-être. Sobre et intense à la fois, le récit se découpe en fait en deux parties (d'importance équivalente): la première fait de nous les témoins muets d'une lente chute dans la dépression, la seconde montrant ensuite une héroïne déterminée à en identifier les causes invisibles et profondes. Pas vraiment du cinéma de divertissement...

"Détail" important: la maladie dont souffre Hunter existe réellement. J'ai appris que le réalisateur s'était inspiré de sa propre grand-mère pour donner vie à ce personnage atypique, son actrice principale participant elle aussi à son élaboration, sur la base d'influences personnelles. C'est peut-être bien ce qui rend Swallow si crédible ! Violemment crédible, dirais-je même, car les couleurs désaturées réinventent un univers connu, tout nous entraînant dans un ailleurs angoissant. Le propos est très moderne, autour d'enjeux féministes tout à fait contemporains. Et dans nos vraies vies ? "Les choses commencent à aller mieux, juge Haley Bennett. Il y a de plus en plus de femmes qui parviennent à se faire entendre". Pour elle, le film raconte justement "l'histoire d’une femme qui parvient à s'émanciper d'un système patriarcal et à retrouver le contrôle d'elle-même". Autant le dire: il s'adresse aussi aux hommes. Et ne les ménage pas...

Swallow
Film franco-américain de Carmelo Mirabella-Davis (2020)

Le sujet a de quoi faire peur, sincèrement, mais le traitement narratif au cordeau nous offre un bel exemple de cinéma brut. Répétons-le: Haley Bennett nous offre une prestation mé-mo-rable ! Si la dépression est un sujet de cinéma qui vous intéresse, je crois que vous aurez du mal à dénicher un film plus âpre que Melancholia. Cela dit, du côté mâle, Le complexe du castor est
"solide", lui aussi !

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Vous n'êtes pas nécessairement convaincus ?

Bon. Peut-être aurez-vous envie d'étudier les arguments de Pascale...

4 commentaires:

Pascale a dit…

Ah quel film ! J'avais été bouleversée par le sort de Hunter, Poupée parfaite sous emprise. La scène au restau où on lui demande son avis sans attendre la réponse est très cruelle. Les parents et le mari sont des monstres.
L'actrice est exceptionnelle et le film très malaisant.
Mais effectivement pour décrire la dépression Melancholia est indépassable puisqu'elle ne donne lieu à aucun comportement déviant commi ici.
Je ne me souviens plus du Complexe du Castor.

Pascale a dit…

Ton lien vers Melancholia est tout naze.

Martin a dit…

@Pascale et le film:

C'est sûr que ce n'est pas un film confortable. Et l'actrice est exceptionnelle !
Kirsten Dunst ne l'était pas moins dans "Melancholia". Peut-être son meilleur rôle.

Martin a dit…

@Pascale et le lien:

C'est réparé ! Merci de me l'avoir fait remarquer.