"Mais tu n'aimes pas Chabrol !"... ma chère maman avait bien raison quand elle m'a fait cette réflexion après que je lui ai parlé de L'enfer. Sauf que je pense en fait qu'il mérite (au moins) une seconde chance et qu'en l'espèce, c'est parce qu'il a repris un pré-scénario abandonné par Henri-Georges Clouzot que j'ai voulu y replonger. Allons-y allonso !
Paul Prieur a "tout pour être heureux", comme disent parfois les gens bien intentionnés. Il est le propriétaire d'un bel hôtel dans un joli coin de France, le mari d'une femme adorable et le père d'un petit garçon épanoui. Le revers de la médaille: il travaille TOUT LE TEMPS ! Quelques minutes suffisent à Claude Chabrol (et à François Cluzet dans le rôle) pour montrer que cela le fatigue, le stresse, le ronge. Pourtant, sûr de lui, Paul ne lève pas le pied. Sa panique véritable s'exprime autrement: dans le sentiment de jalousie toujours croissant qu'il entretient à l'égard de sa compagne, Nelly. Je vais vous le dire tout de suite: pour l'incarner, Emmanuelle Béart est formidable. L'intérêt du film est alors que les élucubrations de Paul y sont filmées au même titre que d'autres "tranches de vie". Dès lors, la tension monte: on se demande vite si son impression d'être cocu et moqué pour cela ne correspondrait finalement pas à... une sombre réalité. Une chose est sûre: l'amour ne s'accommode guère de ce doute permanent, dans un sens ou dans l'autre. Et Paul s'avère pathétique...
On dit qu'en voulant porter cette histoire à l'écran, Clouzot avait eu une ambition visuelle si forte qu'il finit par plomber son budget. Quelques spectaculaires plans subsistent de cette première mouture tournée dans les années 60, avec Romy Schneider et Serge Reggiani dans les rôles principaux. Quelque chose me dit que le film de Chabrol est d'abord un hommage à son aîné, mais aussi qu'il est plus modeste dans la construction technique des fantasmes morbides de L'enfer. Cependant, le film contient tout de même des scènes d'un érotisme trouble, mais aussi et surtout d'autres séquences, assez éprouvantes. L'idée qui s'est imposée à moi est clairement celle d'une échappée vers la folie, sans fondement ni espoir de retour: oui, c'est glaçant. En quelques occasions, il m'a semblé que l'écriture des personnages secondaires était un peu plus faible que le reste, à force d'archétypes un peu trop caricaturaux. Mais Béart et Cluzet, un coup de chapeau ! Leur engagement dans leur rôle m'a fait oublier les petits défauts pointés ici et là. Et c'est cela aussi qui peut définir le grand cinéma...
L'enfer
Film français de Claude Chabrol (1994)
J'ai cru voir que la réputation de cet opus était un peu faiblarde. Dommage: il affiche des qualités que je trouve assez convaincantes. Le projet Clouzot, lui, a fait l'objet d'un documentaire sorti en salles en 2009, et c'est bien entendu un film que j'aimerais voir, désormais. Avant cela, on peut se rappeler que la folie est un vrai et beau sujet de cinéma avec Une femme sous influence, Birdy ou 37°2 le matin.
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Pour en finir aujourd'hui...
Vous pourriez vous fier à un avis publié en duo: cf. "L'oeil sur l'écran".
Paul Prieur a "tout pour être heureux", comme disent parfois les gens bien intentionnés. Il est le propriétaire d'un bel hôtel dans un joli coin de France, le mari d'une femme adorable et le père d'un petit garçon épanoui. Le revers de la médaille: il travaille TOUT LE TEMPS ! Quelques minutes suffisent à Claude Chabrol (et à François Cluzet dans le rôle) pour montrer que cela le fatigue, le stresse, le ronge. Pourtant, sûr de lui, Paul ne lève pas le pied. Sa panique véritable s'exprime autrement: dans le sentiment de jalousie toujours croissant qu'il entretient à l'égard de sa compagne, Nelly. Je vais vous le dire tout de suite: pour l'incarner, Emmanuelle Béart est formidable. L'intérêt du film est alors que les élucubrations de Paul y sont filmées au même titre que d'autres "tranches de vie". Dès lors, la tension monte: on se demande vite si son impression d'être cocu et moqué pour cela ne correspondrait finalement pas à... une sombre réalité. Une chose est sûre: l'amour ne s'accommode guère de ce doute permanent, dans un sens ou dans l'autre. Et Paul s'avère pathétique...
On dit qu'en voulant porter cette histoire à l'écran, Clouzot avait eu une ambition visuelle si forte qu'il finit par plomber son budget. Quelques spectaculaires plans subsistent de cette première mouture tournée dans les années 60, avec Romy Schneider et Serge Reggiani dans les rôles principaux. Quelque chose me dit que le film de Chabrol est d'abord un hommage à son aîné, mais aussi qu'il est plus modeste dans la construction technique des fantasmes morbides de L'enfer. Cependant, le film contient tout de même des scènes d'un érotisme trouble, mais aussi et surtout d'autres séquences, assez éprouvantes. L'idée qui s'est imposée à moi est clairement celle d'une échappée vers la folie, sans fondement ni espoir de retour: oui, c'est glaçant. En quelques occasions, il m'a semblé que l'écriture des personnages secondaires était un peu plus faible que le reste, à force d'archétypes un peu trop caricaturaux. Mais Béart et Cluzet, un coup de chapeau ! Leur engagement dans leur rôle m'a fait oublier les petits défauts pointés ici et là. Et c'est cela aussi qui peut définir le grand cinéma...
L'enfer
Film français de Claude Chabrol (1994)
J'ai cru voir que la réputation de cet opus était un peu faiblarde. Dommage: il affiche des qualités que je trouve assez convaincantes. Le projet Clouzot, lui, a fait l'objet d'un documentaire sorti en salles en 2009, et c'est bien entendu un film que j'aimerais voir, désormais. Avant cela, on peut se rappeler que la folie est un vrai et beau sujet de cinéma avec Une femme sous influence, Birdy ou 37°2 le matin.
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Pour en finir aujourd'hui...
Vous pourriez vous fier à un avis publié en duo: cf. "L'oeil sur l'écran".
4 commentaires:
Ah bon, tu n'aimes pas Chabrol ?
Celui-ci n'est pas son meilleur cela dit.
Mais Emmanuelle et François sont grandiosement troublant(e) et pathétique si je me souviens bien.
Jai vu le docu, il est formidable.
Il serait sans doute plus exact de dire que je n'aime pas l'image que j'ai de Chabrol. Vague souvenir adolescent d'une caméra cynique planté au coeur de la bourgeoise de province pour décrypter des comportements qui ne m'intéressaient pas. C'est pour cela que je dis qu'il mérite une seconde chance: ce dont je me souviens date un peu et vaut sans doute que j'y revienne.
Ce film-là est loin d'être un chef d'oeuvre, mais c'est un assez bon suspense et la fin laisse pantois. J'ai effectivement aimé la prestation du duo Béart / Cluzet (bons choix pour ces rôles). Je me dis qu'Henri-Georges Clouzot aurait fait mieux avec ce matériau scénaristique, mais au fond, je n'en sais rien Du coup, j'ai très envie de voir également le documentaire dès la prochaine occasion.
Ah ok, je comprends mieux.
Chabrol ado c'est pas l'idéal.
La version Clouzot était soumise à ses humeurs, caprices et exigences au rythme de ses insomnies, si je me souviens bien.
Navré d'avoir raté "Madame Bovary" à la téloche la semaine dernière.
Je vais essayer de ne pas louper le Clouzot si d'aventure il est rediffusé...
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