lundi 6 avril 2020

Pas si sauvage...

Il y a des chevaux, des hommes durs pour les monter et des flingues. Des feux de camp, des joueurs de cartes, quelques Indiens parfois. Avant tout cela, je note que, dans la logique des pionniers, le western met d'abord en scène de grands espaces (et oui, je l'aime pour cela). C'est bien une promesse d'évasion qui m'a attiré vers L'état sauvage !

Surprise: ce titre très bien trouvé dissimule un western francophone. Il a pour héros des Français, pris au piège de la Guerre de Sécession et que l'empereur Napoléon III a contraints à une stricte neutralité. Reste que le conflit risque de mettre à mal la position économique qu'ils ont acquise sur place, ce qui convainc Edmond et Madeleine d'embarquer avec leurs trois filles dans une très périlleuse traversée des grands espaces (les revoilà !) dans l'espoir de trouver un bateau pour rentrer à Paris. Las ! Plutôt intéressant sur le papier, le scénario ne tient pas réellement ses promesses. Après une première partie entièrement à huis-clos, que j'ai trouvée très étouffante, l'ouverture sur le monde extérieur ne permet pas au film de prendre son envol. Tout se passe un peu comme si le réalisateur lui-même ne savait pas réellement vers quoi emmener ses personnages. Il est vite manifeste que le cowboy choisi pour tenir lieu de guide aux exilés est poursuivi par une femme en colère, mais ça n'apporte rien de bien intéressant. Tout ce petit monde garde donc la main sur la bride. C'est un comble !

L'étonnant ajout d'une musique électronique et l'évocation du vaudou m'ont un temps laissé espérer qu'une certaine dimension onirique allait finir par prendre le dessus sur un récit disons plus classique. Peine perdue: L'état sauvage ne fait qu'effleurer cette déviation possible. La majorité des rôles principaux étant féminins, d'aucuns présentent le film comme féministe: pour moi, c'est loin d'être le cas. Le réalisateur dit que ses héroïnes fuient "un modèle qui les corsète dans un ample mouvement d'émancipation": je trouve qu'il exagère ! Que me reste-t-il ? Un casting pas transcendant, mais assez honorable quand même, où j'ai eu plaisir à voir Alice Isaaz et Déborah François. Autre bonheur pour les yeux: quelques plans inspirés, dans la neige notamment, ou encore dans la nuit, ce qui est d'autant plus méritoire que le tournage en extérieur a parfois eu lieu... par des températures largement inférieures à zéro. Je ressors de tout cela un peu frustré par le sentiment qu'il y avait mieux à faire avec les mêmes éléments et idées. Sans rancune ! Un autre western effacera ce pâle souvenir...

L'état sauvage
Film franco-canadien de David Perrault (2020)

Allez... je reste sur une note "correcte" pour saluer l'audace d'aborder le genre américain par excellence par le bout français de la lorgnette. Des westerns aussi secs, j'en ai vu des meilleurs: La dernière piste du côté des States, par exemple - ou Gold dans le cinéma allemand. Taper le mot "western" dans la barre de recherche du blog ramènera probablement d'autres bons titres à la surface. Je vous laisse juges...

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Et avant que vous ne repartiez au galop...
J'ajoute juste que Pascale a parlé du film (et ne l'a pas aimé du tout).

6 commentaires:

cc rider a dit…

Évoquer le western européen , en occultant l’Italie , ne nous laisse pas une surface d'investigation très importante. A part l'Allemagne et sa série des « Winnetou » , reste donc la France a et au delà de l' »État sauvage » et des « Frères sisters » déjà chroniqués dans ces pages par vos soins , de l'adaptation métaphysique du « Blueberry » de Jan Kounen je vous recommande tourné en 69 « Une corde un colt » de et avec Robert Hossein , avec une Michèle Mercier très éloignée du rôle de marquise qui fit sa renommée. Et si le western grec vous tente , je ne peux que vous conseiller «  Quand les colts sonnent le glas » de Nikos Foskolos, une rareté....

Pascale a dit…

J'ai vu le film dont parle ccrider (une corde, un colt). Une curiosité dans mon souvenir.

Quant à l'Etat sauvage, quelle calamité que ce film !
J'ai senti que ça virait vraiment au big n'importe quoi lors de la scène de bal sensée être très tendue. Elle s'éternise et finit par être ridicule.
Le féminisme a vraiment les épaules larges. Que fait l'héroïne principale à part transpirer à l'idée de se faire culbuter par le beau mercenaire qui s'avère être le pire couard.
Ridicule est le mot qui résume bien ce film je trouve.

Martin a dit…

@CC Rider:

Merci pour ces conseils français et grecs, dont je vais essayer de me souvenir.
En tout cas, il est clair pour moi qu'il ne faut pas enfermer le western en Amérique.
Les Italiens nous ont clairement montré la voie il y a quelques décennies. Pourvu que ça dure !

Martin a dit…

@Pascale:

Comme toi, je n'ai pas aimé la scène de bal et, d'une manière générale, tout se qui se passe à l'intérieur. Les scènes extérieures sont un peu meilleures, mais surtout du fait de la beauté des paysages... car l'histoire ne m'a vraiment pas intéressé - et je crois même en avoir oublié la plus grosse partie, ce qui est quand même craignos.

Quelle déception !
Le mot "calamité" va bien avec le western, tu ne trouves pas ?

Pascale a dit…

Et la scène où les vilains avancent au ralenti et ne se prennent aucune balle (dans un premier temps) ? Et le rôle de la méchante et sa scène de frotti frotta sous la lune ??? Et celle au bord de la falaise avec le saut de la mort d'Alice ?
Le réalisateur était sous l'emprise de drogues dures je pense.

Calamité, va bien avec Jane tu veux dire ? :-)

Martin a dit…

Oui, c'est exactement à cette "Calamity" que je pensais.

Pour ce qui est des scènes bizarres et/ou ridicules, c'est vrai qu'on est servi !
Cela dit, le frotti-frotta, j'y voyais une forme d'onirisme, ce que la suite n'a pas confirmé.