samedi 9 septembre 2017

Implacable

Combien de scénarios la vengeance a-t-elle nourris ? Un nombre incalculable, j'imagine, d'autant plus qu'elle peut aussi se démultiplier dans un seul et même film. Je vous propose de choisir La mariée était en noir pour illustrer mon propos aujourd'hui. C'est l'occasion également de retrouver Jeanne Moreau, après la promesse de lundi...

Dans La mariée était en noir, la grande dame est une jeune femme devenue veuve... le jour de ses noces. Le film explique par l'image  les circonstances du drame, que je me garderai bien de dévoiler ici. Au sujet de cette intrigue, François Truffaut, réalisateur, avait prié ses équipes de "ne pas la divulguer et de ne pas faire lire ce scénario qui n'est qu'un instrument de travail". On peut penser que le cinéaste prend le parti de son personnage, mais ce n'est pas sûr: sa mécanique m'est apparue beaucoup trop implacable. Il en résulte un vrai bon film de genre, assez peu bavard en vérité, où la tension monte lentement vers l'inexorable. Ce qui doit arriver arrive ! Pas de surprise, mais...

Le fait d'avoir un coup d'avance sur la plupart des protagonistes permet de rester rivé à l'écran, en se demandant tout au plus si le jeu de massacre annoncé va aller à son terme et, si oui, comment. Évidemment, de par sa position, le spectateur est voyeur. La caméra l'est aussi, qui filme sans état d'âme apparent les circonvolutions manipulatrices d'une femme devenue prédatrice, aux comportements rusés et d'une froideur insondable. C'est de cette façon que le cinéma peut parvenir à dépasser sa source littéraire - The bride wore black est d'abord un roman policier de l'écrivain américain William Irish. J'imagine qu'au vu de La mariée était en noir, certain(e)s parmi vous ne seront pas surpris de savoir qu'il a aussi inspiré Alfred Hitchcock. J'aime ce style et j'y reviendrai donc pour établir d'autres parallèles...

La mariée était en noir
Film français de François Truffaut (1968)

Je n'ai pas cité Alfred Hitchcock par hasard: officiellement, le maître du suspense était l'un des pères spirituels du cinéaste français. Aujourd'hui, même s'il se défend ouvertement de tout copier-coller véritable, il est permis de voir Quentin Tarantino comme un héritier malpoli, en relisant les scénarios des deux Kill Bill. Je vous avouerai que je kiffe plutôt les... Sueurs froides, Psychose et autres Frenzy !

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Et bien sûr, il y a d'autres amateurs...

Mon conseil du jour: aller lire "Chez Sentinelle" et "L'oeil sur l'écran".

6 commentaires:

Pascale a dit…

On peut kiffer davantage Hitchcock mais c'est indéniable qu'on est ici devant Kill bill de Truffaut même si Bill est multiple.
Bon je ne spoile rien...
Jeanne etzit glaçante dans ce film.

Martin a dit…

Ah ! Toi aussi, tu le trouves un peu hypocrite, QT, sur ce coup-là ?
Tout à fait d'accord pour dire que Moreau est ici glaçante. Le rôle le justifie pleinement.

Pascale a dit…

Ah non pas hypocrite pourquoi?

Martin a dit…

Hypocrite dans le sens où Quentin ne reconnaît pas la parenté de ce film à l'égard de "Kill Bill"...

Véronique Hottat a dit…

Merci pour le lien ! J'ai bien aimé ce film, et j'ai été surprise d'apprendre qu'il était aussi le film le plus mal aimé du réalisateur, qui regrettera de ne pas l'avoir tourné en noir et blanc et d'avoir donné à son actrice principal le rôle d'une "statue, d'une femme à la Cocteau". Mais cela lui allait bien aussi, à Jeanne !

Martin a dit…

Oui, c'est pour moi assez incompréhensible que ce film puisse être méjugé.
J'ai toutefois l'impression qu'aujourd'hui, il est quand même apprécié par beaucoup de ceux qui le connaissent.

C'est vrai qu'en noir et blanc, ça aurait eu une autre allure. Et peut-être un impact plus fort.