lundi 20 juin 2016

Libres propos

Le caractère exigeant d'un certain cinéma d'auteur peut nous obliger parfois à nous accrocher pour suivre et apprécier le fruit du travail d'un réalisateur donné. J'ai vu L'académie des muses dans le cadre d'une soirée de mon association. À son sujet, le réalisateur lui-même parle d'expérience filmée - j'y reviendrai. Je me suis donc accroché...

Dans une université d'Espagne, un professeur italien de littérature enseigne la poésie à ses étudiant(e)s. Le féminin a une importance majeure: parce qu'il est sujet d'études, d'abord, et parce que ce sont essentiellement les femmes, jeunes ou non, qui coupent le discours magistral du pédagogue pour débattre avec lui, quitte à lui exprimer leur opposition. Hors les murs, le film et le propos rebondissent aussi dans l'appartement du professeur, dans sa voiture ou bien au café. Deux fois, ils s'évadent jusqu'en Italie, là où les philosophes antiques avaient placé la porte des Enfers, et auprès de bergers sardes. L'académie des muses parle presque sans interruption ! L'étrangeté du dispositif tient à ce qu'il n'est pourtant pas un documentaire. Chaque personne à l'écran joue son propre rôle, mais les dialogues sont totalement improvisés ! Par le presque hasard, on peut aborder quelques sujets forts tels l'amour, la jalousie, la parole, la création...

C'est sur la durée que je me suis laissé séduire. Je dois vous avouer que tout ne m'a pas "embarqué" de la même façon, mais j'ai été touché par un échange sur l'amour à distance, à l'heure des réseaux sociaux, puis, un peu plus tard, par le descriptif patient des bruits perceptibles dans la nature, après un petit numéro de chants polyphoniques. L'académie des muses est un film sensible, un travail qui s'assume même dans son imperfection picturale - j'y reviendrai aussi. Il enferme en lui quelque chose d'unique, dans le regard porté sur le monde extérieur, mais aussi bien sûr les hommes et femmes qui le composent. Faut-il vous le conseiller ? Je pense que oui. J'imagine qu'il n'est pas facile d'en entendre parler hors des festivals et cercles cinéphiles, même s'il est officiellement sorti le 13 avril. Avoir pu en débattre avec le réalisateur m'a permis de mieux cerner cette démarche atypique. Et mon émotion esthétique a fait le reste...

L'académie des muses
Film espagnol de José Luis Guerín (2015)

Donner une trame, libérer les dialogues, filmer et voir ce qui peut arriver: c'est un peu la démarche suivie ici. Du cinéma en liberté ! Dans le réemploi de personnages réels, j'ai vu un parallèle possible avec le A bigger splash de Jack Hazan (en moins composé, certes). Filmer un dialogue qui s'étire m'a aussi fait penser à La vie d'Adèle. Je voudrais désormais découvrir Pialat, mais je m'égare, peut-être...

4 commentaires:

Pascale a dit…

Un film et un propos qui rebondissent... effectivement, faut s'accrocher !
Là... je ne suis pas tentée :-)

Martin a dit…

Boïng boïng ! C'est un peu abscons ? Reviens demain, tu comprendras peut-être mieux... ou pas.

Pascale a dit…

Non non, c'est une expression qu'on entend 853 fois par jour et j'en peux plus :-)
Et c'est toi qui dis dès le début qu'il fallait s'accrocher à ce film, mais là... je préfère le laisser passer. Pas tentée du tout !

Martin a dit…

C'est ton droit le plus strict. À vrai dire, je pense que je ne serais pas allé le voir sans mon association.