jeudi 7 novembre 2013

Le choix d'un père

Si j'ai bien compté, Le goût du saké sera le 48ème film asiatique présenté sur le blog. C'est aussi la seconde fois que je vous parle d'une oeuvre de Yasujiro Ozu, un cinéaste dont je retiendrai désormais le nom en vue d'opportunités futures. J'évoque aujourd'hui sa toute dernière réalisation, sorti au Japon en 1962, soit un an seulement avant sa disparition, et en France seize années plus tard !

Sommairement, je peux vous dire qu'il est ici question d'un monsieur d'un certain âge, veuf et vivant avec ses deux plus jeunes enfants. Shuhei Hirayama se demande s'il n'est pas temps de marier sa fille...

Dans le Japon d'après la guerre, le scénario du film nous place donc devant la perspective d'une confrontation entre l'ancienne génération et les jeunes gens emportés par leur idée de la modernité. Il n'y a pourtant aucune violence, fut-elle verbale, dans Le goût du saké. Caméra posée au sol, Yasujiro Ozu filme un quotidien ordinaire, celui d'un homme confronté au changement et qui essaye tout simplement de prendre les bonnes décisions. Ceux qui s'attendent à un plaidoyer pour les vieilles traditions en seront pour leurs frais. Non sans humour parfois, le scénario nous montre d'abord un père aimant, disposé même à sacrifier une partie de son confort personnel pour le bonheur des siens. Pas de grande déclaration à attendre non plus. J'ai retrouvé ici la pudeur dans l'expression des sentiments que j'apprécie souvent au coeur du cinéma asiatique. L'immobilité du cadre suffit largement à impliquer le spectateur, témoin de quelques fragments d'intimité.

Le goût du saké est un film subtil et pudique. Il n'est pas interdit d'admirer la richesse de la galerie de personnages: les petits rôles eux-mêmes apportent quelque chose à ce qui nous est raconté. Partir ainsi à la découverte d'une culture bien différente de la nôtre demeure un bonheur dont je ne me lasse pas. Un petit temps d'adaptation est sans doute nécessaire, surtout que je ne crois pas qu'il existe de version française de ce long-métrage. Qu'importe ! Prise telle qu'elle est, l'oeuvre du maître Ozu est une vraie perle, susceptible d'ailleurs de trouver un écho dans nos ressentis occidentaux, même un demi-siècle après sa création. Les esthètes noteront aussi que ce sont des images en couleur que le cinéaste nippon leur a proposées. C'est tout sauf anecdotique, l'artiste restant dans les mémoires comme un grand nom du noir et blanc. J'espère avoir l'occasion de plonger un peu plus avant dans sa filmographie...

Le goût du saké
Film japonais de Yasujiro Ozu (1962)

Dans la liste des longs-métrages du cinéaste arrivés jusqu'en France comme dans celle des films que j'ai présentés, celui d'aujourd'hui arrive en second. Le premier est une splendeur: Voyage à Tokyo. Peut-être jugerez-vous qu'Ozu s'inspire de sa vie: après tout, il est resté célibataire et a longtemps vécu avec sa mère. Notez également que son premier film... parlant est diffusé chez nous depuis cet été seulement ! Il s'appelle Le fils unique et date de 1936. Il faudra bien que je découvre aussi le cinéma japonais d'avant-guerre. À suivre...

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En attendant, j'ai un aveu et une recommandation à faire...

Avant de rédiger ma chronique, j'ai pioché quelques informations utiles chez mes amis de "L'oeil sur l'écran". Je vous conseille vivement de faire un tour sur leur index: Yasujiro Ozu y est très souvent cité !

4 commentaires:

ChonchonAelezig a dit…

Bon à savoir. Parfois j'ai un peu peur du cinéma asiatique... non pas à cause de leurs films d'horreur, excellents, mais parce que leur culture est bien différente de la nôtre ; je me souviens par exemple n'avoir rien pigé à La princesse Mononoké (animation) qui fait référence à un tas de croyances et traditions... Il faut que je me lance !

dasola a dit…

Bonjour Martin, je me rappelle que c'est le premier film japonais que j'ai vu en salle. Il était resté inédit en France, cela avait été un événement. Bonne après-midi.

Cinéphile doux a dit…

Bonsoir. J'espère que tu poursuivras avec Ozu. Et que tu t'intéresseras à Mikio Naruse, mon cinéma de chevet.

Cinéphile doux a dit…

Mille pardon, je voulais dire mon cinéaste de chevet, bien sûr.

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