mercredi 26 juin 2024

Mélodie d'amour ?

J'ai calculé mon coup: je voulais vous parler aujourd'hui d'un film-culte sorti dans les salles françaises il y a pile cinquante ans. Et j'ai choisi de le regarder au premier jour de ce mois de juin, un demi-siècle exactement après sa diffusion anticipée en Belgique. Je suis certain que certain(e)s d'entre vous ont déjà entendu parler... d'Emmanuelle.

Je voulais le découvrir l'année de ma cinquantième bougie: c'est fait. Sauf erreur, c'est la toute première fois que je présente un film érotique sur Mille et une bobines (et ce sera peut-être la dernière). Emmanuelle raconte l'histoire d'une jolie Française d'une vingtaine d'années, partie pour rejoindre son diplomate de mari en Thaïlande. Dans ce nouveau pays qui deviendra le sien, elle fait connaissance avec d'autres expatriées. Elles lui expliquent qu'il n'existe en fait qu'un moyen pour ne pas s'ennuyer à Bangkok: avoir des partenaires sexuels aussi nombreux que possible, hommes et femmes confondus. On croit la pauvre enfant choquée. La bougresse cache bien son jeu...

Que dire ? Cinq décennies plus tard, l'aspect subversif d'Emmanuelle est devenu kitsch: on mesure alors combien les moeurs ont changé. Notez bien qu'à l'époque de sa première diffusion, ce film dut batailler avec les censeurs, tout en finissant par rencontrer un succès colossal dans de nombreux pays... et, c'est vrai, pendant de longues années consécutives. En France, notamment, il devint même une attraction touristique et attira près de 8,9 millions de curieux dans les salles. Aujourd'hui, je parlerai volontiers d'un cinéma de l'ancien monde. L'actrice principale, Sylvia Kristel, n'eut qu'une carrière confidentielle dans d'autres registres, tourna quelques suites et y laissa des plumes. Dans le premier opus, déjà, la fausse ingénue jouit d'être violée ! Impossible pour moi d'y voir l'affirmation d'un quelconque féminisme. La "mélodie d'amour" que chante Pierre Bachelet lors du générique sonne comme de la publicité mensongère. Au temps pour la légende...

Emmanuelle
Film français de Just Jaeckin (1974)

C'est dingue: ce film est l'adaptation d'un roman écrit par une femme. Et il est aussi le plus gros succès du cinéma français des années 70. Je parlais d'un film-culte: une relecture devrait en sortir cette année. D'ici là, je vais sans nul doute passer à tout autre chose très bientôt. Pour l'année 1974, d'autres films - Alice n'est plus ici, Une femme sous influence, Les valseuses... - mériteront davantage d'attention !

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Et si vous tenez absolument à y revenir...

Ideyvonne avait rendu un bref hommage (posthume) à Sylvia Kristel. Mon étoile pleine du jour lui est aussi dédiée, en quelque sorte. L'autre illustrant la place du film dans la mémoire du cinéma français.

6 commentaires:

Pascale a dit…

Une horreur ce film qui brisa sans doute la carrière de Sylvia Krystel dont on ne put savoir si elle était une bonne actrice.
J'ai eu peur en attendant tes étoiles que je découvre à la fin de ma lecture.
Ouf, je crois que tu n'as jamais été aussi sévère.
Il y avait Alain Cuny je crois dans ce film. Il a touché le fond du ridicule et comme je ne l'ai jamais apprécié, j'ai beaucoup ri en voyant sa prestation grotesque.
Je vais aller voir qui était l'infortuné mari tiens.
Que cette m.... ait été écrite par une femme est surprenant, je ne m'en souvenais plus.
Quand on pense que Noémie Merlant va reprendre le rôle... j'ai du mal à imaginer la raison de ce remake. Comme je n'apprécie pas cette actrice, cela brisera peut-être son omniprésence :-) mais cela m'étonnerait... Il faudrait vraiment beaucoup trahir l'auteur pour détourner le propos de la jouissance du viol. Je me souviens d'une scène où elle est seule, nue au milieu d'une assemblée. Je ne me souviens si tous les participants lui passent dessus.
Quand on pense que ce film a tenu plusieurs années sur les Champs (l'époque où je vivais à Paris).
Belle image du pays et de Paris mais le film a fait beaucoup pour le commerce des fauteuils... Emmanuelle.

Martin a dit…

Merci de tout lire avant de regarder les étoiles: là, je n'ai pas fait de cadeau !

Cette pauvre Sylvia Kristel en a vraiment bavé par la suite. Elle est morte à 60 ans.
Le Monde lui a consacré une nécro qui permet d'en savoir davantage sur ce triste parcours.
Le lien: https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2012/10/18/sylvia-kristel-l-actrice-derriere-emmanuelle_1777449_3382.html

Effectivement, il y a Alain Cuny dans le film. Je préfère retenir "Les visiteurs du soir".

Pour ce qui est du remake avec Noémie Merlant, j'attends d'en savoir un peu plus avant de juger. Je sais que tu n'aimes pas beaucoup cette actrice.

Pascale a dit…

Evidemment je lis avant.

Je me souviens qu'à sa mort on avait découvert son chemin de croix, ses regrets. Grosse erreur que ce film.

Je n'aimais pas la grandiloquence et la voix de Cuny et effectivement pour moi aussi sa carrière aux visiteurs.
Je le revois aussi dans le rôle détestable du père de Camille Claudel... famille que je déteste (la mère et Paul) pour ce qu'ils ont fait à Camille.

Je ne juge pas, j'imagine. Et là j'imagine que ça va y aller de son féminisme. J'en mettrais ma main au feu (pas à couper quand même) et même je parierais, mais cela m'étonnerait que j'aille me faire mon idée. Me suis fait piéger récemment par un film (mauvais) aux millions d'entrées, pas deux... Je tiendrai bon.

Pascale a dit…

Pour Alain : Sa carrière se limite (voire s'arrête).

Martin a dit…

@Pascale (et Sylvia et Alain et Noémie):

Pour Sylvia, oui, le destin a été cruel. Cette époque ne pardonnait pas.
Pour Alain, je ne crois pas avoir un autre de ses films. Celui-là ne m'a pas donné envie.
Pour Noémie, oui, le film sera sans doute féministe. À voir (ou pas) comment il le sera.

Martin a dit…

@Pascale (et Alain encore):

Oui, j'avais compris que c'était un truc dans le genre que tu voulais dire.
Pour moi, de toute façon, la meilleure prestation de ces "Visiteurs", c'est celle de Jules Berry.

J'ai aussi chroniqué ce film, si jamais tu veux rebondir:
http://1001bobines.blogspot.com/2009/11/lautre-beaute-du-diable.html

Ah oui, quand même, ça fera bientôt quinze ans...