dimanche 25 septembre 2016

Un piège ?

Clint Eastwood n'a jamais caché l'importance pour lui de sa rencontre avec Don Siegel. Les proies est la deuxième de leurs cinq oeuvres communes. Cette année-là, à la suite de son mentor, l'acteur passera lui aussi derrière la caméra pour la toute première fois. Je dois dire que j'avais depuis longtemps envie de découvrir le "film-transition"...

Les proies, donc: dans ce (faux) western, Clint est un sous-officier nordiste de la guerre de Sécession. Une certaine ambigüité plane quant à son implication réelle dans le conflit. Médecin, notre homme aime mieux exercer son métier, plutôt que faire la guerre. Logique. Seulement voilà, cette fois, c'est lui qui est blessé lors des combats. Une très jeune fille l'emmène se faire soigner dans un pensionnat isolé. Le voilà à la merci de quelques femmes... du camp ennemi ! Heureusement pour lui, il est plutôt séduisant, avec ou sans barbe. Comme d'habitude, je n'ai pas l'intention de vous dévoiler l'évolution du scénario. On dira que, face au chat, les souris ont du répondant...

Moi qui savais comment tout cela devait finir, je ne peux pas dire véritablement que le film m'a surpris. J'estime toutefois possible d'affirmer que notre ami Eastwood est un tantinet plus "vulnérable" que dans les grands westerns italiens qu'il avait tournés auparavant. Avec un sens consommé du décor, Don Siegel lui offre une aventure étonnante, aux allures de mauvais rêve. Est-ce parce qu'un homme tient la caméra ? Serait-ce plutôt parce que j'en suis un ? Il m'a semblé que Les proies m'embarquait dans son récit au travers du regard fiévreux de son personnage principal - d'où, à vrai dire une tension diffuse, mais bien réelle tout au long du métrage. Il me faut dire aussi que les actrices jouent très bien, qu'elles soient expérimentées comme Geraldine Page ou toutes jeunettes comme Pamelyn Ferdin. Une dernière petite précision: le film ne connut qu'un succès relatif après sa sortie. Ce n'est qu'avec les années qu'il a gagné en notoriété.

Les proies
Film américain de Don Siegel (1971)

Je le répète, ce n'est pas vraiment un western: l'action se déroule essentiellement à huis clos et les coups de feu échangés sont rares. Bref... j'ai plutôt aimé cette atmosphère ouatée, qui a pu inspirer l'ami Clint pour son propre premier film - Un frisson dans la nuit. Notez que, pour la première fois, Eastwood joue un personnage presque négatif. Comme un prélude à L'homme des hautes plaines...

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Une petite anecdote...

Don Siegel avait choisi Jeanne Moreau pour le premier rôle féminin. Un choix finalement rejeté par les producteurs d'Universal Pictures... 

Envie de retourner au pensionnat ?
Vous pouvez lire "L'oeil sur l'écran", ainsi qu'une chronique de Pascale.

4 commentaires:

dasola a dit…

Bonsoir Martin, j'avais été marquée (l'atmosphère est étouffante) par ce film où Clint Eastwood n'a pas le beau rôle. Il faut dire que face à toutes ces femmes, il a fort à faire. Il faut noter que l'actrice Elizabeth Hartman s'est suicidée en 1987 à 43 ans. Bonne fin d'après-midi.

Martin a dit…

Effectivement, c'est un film assez oppressant, sur le fond comme dans la forme. J'ai justement trouvé intéressant le fait que Clint Eastwood joue un peu à contre-emploi.

J'ignorais qu'Elizabeth Hartman s'était suicidée et je vois qu'elle a souffert de dépression toute sa vie. Le personnage que lui avait confié Don Siegel n'est pas franchement épanoui non plus...

Pascale a dit…

Je l'ai encore revu lorsqu'il est passé à la télé récemment.
C'est incroyable ce film. Le double... triple jeu de Clint est un régal qui se retourne contre lui. Et les filles proies se transforment en bourreaux. Il a du adorer se faire torturer.
Un frisson dans la nuit, j'adore aussi. Quelle victime ce Clint !

Martin a dit…

Moi, je l'ai découvert lors de son récent passage télé !

C'est vrai que voir Clintounet à contre-emploi a quelque chose de jouissif. Je suppose qu'à l'époque, il voulait encore prouver aux Ricains qu'il était capable de tout jouer. Sans forcément ménager l'image "testostérone" du cow-boy américain. Je note aussi qu'ici, il incarne, au départ, un soldat du "camp du bien". Je crois que c'est tout sauf anodin.