samedi 18 juillet 2015

D'autres marmots

Promesse tenue: je vous reparle ce samedi de Manoel de Oliveira. Lors de la soirée-hommage organisée par mon association, le choix du film s'est porté sur Aniki Bóbó, le tout premier long-métrage réalisé par le cinéaste portugais, après une dizaine d'années consacrées au format court - et deux apparitions comme acteur. Autant le dire sans délai: j'ai vraiment apprécié cette programmation.

À Porto, sa ville natale, De Oliveira nous invite à une rencontre touchante avec une petite bande de gamins des classes populaires. Parmi eux, deux garçons, Carlitos et Eduardo, l'un réservé, l'autre déjà fanfaron, tous deux amoureux de la même petite, Teresinha. Nous sommes alors en 1942 et le Portugal, qui traverse la guerre mondiale dans une position d'État neutre, subit pourtant une dictature militaire (elle ne sera renversée qu'en avril 1974). Les insouciances enfantines saisies par la caméra se teintent d'une certaine gravité quand Carlitos vole une poupée pour l'offrir à son aimée, un peu avant d'être accusé d'être le seul responsable d'un accident presque mortel pour son "rival". Lors du débat associatif qui a suivi la projection d'Aniki Bóbó, certains ont pensé à une allégorie de la vie des adultes.

Pour ma part, sans me soucier des possibles invraisemblances présentées par le film, j'ai pris plaisir à le recevoir au premier degré. J'y ai vu des enfants bons acteurs, sans esbroufe ou expression outrancière, visiblement heureux et amusés de jouer la comédie. Autre source de contentement: j'ai senti dans la mise en scène quelques pas-si-lointaines influences du muet, certaines séquences pouvant aisément être lues comme un héritage du cinéma burlesque des années 30, à l'image de celui de Charles Chaplin par exemple. Désolé de ne pas pouvoir être plus précis: mes connaissances demeurent trop lacunaires pour que je sois plus affirmatif. J'aimerais tout de même vous convaincre qu'Aniki Bóbó, film rare, vaut encore qu'on s'y intéresse de près, 73 ans après sa sortie. Sa tendresse manifeste à l'égard de ses jeunes personnages, c'est du bonheur ! Quelques éléments autobiographiques ont été repris dans le scénario.

Aniki Bóbó
Film portugais de Manoel de Oliveira (1942)

Si vous vous posez des questions sur le titre, je dois vous préciser qu'il s'agit des premiers mots d'une comptine que les enfants chantent plusieurs fois - au moins trois, il me semble - dans le film. Maintenant, pour comparer ce long-métrage avec un autre, je crois que le titre qui s'impose est La guerre des boutons, apparu en salles vingt ans plus tard ! À voir aussi, un court de Truffaut: Les mistons.

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Pour finir, une petite anecdote historique...

Après ce tout premier essai, Manoel de Oliveira dut attendre 1963 pour signer son deuxième long-métrage (Le mystère du printemps). Victime de la censure, il s'exila un temps en Allemagne et y apprit l'usage de la couleur, ainsi que diverses autres techniques de cinéma.

2 commentaires:

Pascale a dit…

Tu donnes bien envie dis donc.

Martin a dit…

Tant mieux ! C'est fait pour ! Je pense que le film pourrait te plaire. J'espère donc que tu auras l'occasion de le découvrir.