jeudi 10 octobre 2013

Chimère

Depuis le temps que l'on parle de son renouveau, je finis par me dire que le western ne sera pas resté bien longtemps absent des écrans. Celui qui va nous occuper aujourd'hui a ceci d'original qu'on y cause allemand plutôt qu'anglais et que sa tête d'affiche est une femme. Avec six autres personnes, Emily Meyer s'engage dans une expédition à cheval vers le Nord du Canada, à destination de Dawson, ville minière du Klondike, avec la certitude d'une bonne fortune retrouvée. Ainsi débute Gold, sans explication préalable. J'aime ce côté radical.

Réalisateur allemand d'origine turque, Thomas Arslan s'intéresse presque logiquement à ce qui est aussi l'histoire d'une émigration massive. Si ce que je l'ai entendu dire est vrai, six millions d'Allemands auraient jadis quitté le Vieux Continent pour un Eldorado nord-américain. Selon Wikipedia, un peu plus d'un Américain sur huit se dit aujourd'hui d'ascendance germanique - ce qui représenterait quand même 42,8 millions de personnes ! Gold en dit finalement assez peu sur leur motivation: il y a là un homme marié qui a laissé sa famille derrière lui pour lui revenir riche, un couple de cuisiniers motivés par l'idée d'ouvrir son restaurant, un journaliste-photographe chargé de rédiger un article sur le périple... autant de profils distincts qui offrent à l'expédition des allures d'auberge espagnole. On s'attend vite à ce que tout déraille et, de fait, bien que l'héroïne se rapproche d'un dénommé Carl Böhmer, éleveur de chevaux, le projet s'enlise...

Je préfère ne pas vous révéler les difficultés que le groupe des sept va devoir affronter. Le titre de ma chronique suffirait à vous donner une indication de ce qui va advenir de ses espoirs. Je me dois d'insister sur un point: Gold n'est pas franchement un film d'action. Les choses qui s'y passent nous incitent plutôt à la contemplation qu'au frisson - dans les majestueux décors naturels de la Colombie britannique, on finit par se demander aussi où conduit le chemin. Quand l'expédition croise un pionnier muet et solitaire, en train apparemment de revenir sur ses pas, ce quasi-fantôme semble confirmer à lui seul que la destination est presque inatteignable. Apprécier cette ambiance n'est pas chose facile, le long-métrage n'offrant que peu de prises et se démarquant assez significativement des codes du genre. "Tout ça pour ça", diront certains. Il peut sembler frustrant de suivre ces personnages à peine esquissés. C'est un choix.

Gold
Film allemand de Thomas Arslan (2013)

Dans de nombreux textes que j'ai lus depuis, deux comparaisons reviennent presque systématiquement. Le long-métrage d'aujourd'hui est ainsi très souvent assimilé à La dernière piste, autre western d'allure un peu sèche que j'ai prévu d'évoquer très prochainement. Parce que sa bande originale repose sur des riffs de guitare électrique, certains critiques le placent aussi en face de Dead man. Moi, deux ans après Blackthorn, je me dis que le renouveau du genre passe plutôt par l'Europe. Tout en restant sensible à l'idée inverse...

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Il semble que le public français se montre assez sceptique...

Le jour où je suis allé voir le film, j'ai moi-même hésité. Nous étions une dizaine dans la salle, dont quelques Allemands, apparemment. Finalement, je ne regrette pas le prix de mon ticket et je n'ai pas fait ce "voyage au bout de l'ennui" dont parlait une critique parcourue quelques heures avant. De ce film, vous lirez une autre chronique positive sur "Le blog de Dasola". Comme quoi, les goûts et couleurs...

3 commentaires:

dasola a dit…

Rebonjour Martin, et non, je ne suis pas ennuyée une minute. Dans ce film, il se passe plein de choses. Je recommande une fois de plus.

Eeguab a dit…

De l'avis de Dasola.

Martin a dit…

C'est noté, Eeguab. J'en profite pour saluer notre amie commune.