samedi 10 novembre 2018

Saddam dépouillé

J'ai souvent admiré cette faculté du cinéma américain à s'emparer presque en temps réel de l'histoire du pays pour la transformer illico en matière première scénaristique. Bon... j'ai fait le calcul: huit ans ont passé entre la fin de la Guerre du Golfe et la sortie sur les écrans du film que j'évoque aujourd'hui, Les rois du désert. C'est allé vite...

Gates, Barlow, Elgin et Vig servent donc dans l'armée américaine quand les troupes irakiennes envahissent le Koweït. Des circonstances précises de cet acte de guerre, nous ne verrons rien, puisque le film commence au moment où le conflit s'arrête, d'où une fête dantesque organisée par les GI. L'argument du film n'est pas là: il tient plutôt aux ambitions des quatre larrons précités, découvreurs d'une carte censée les entraîner vers des lingots d'or appartenant au dictateur qu'ils ont contribué à ridiculiser, militairement parlant. On fermera les yeux sur le fait que la trouvaille vient d'un rouleau de papier caché... entre les fesses d'un prisonnier ennemi. Ah, quelle subtilité !

De fait, Les rois du désert ne donne pas exactement dans la finesse. La caméra elle-même virevolte un peu trop pour être honnête. Traiter d'un conflit majeur sur le ton de la comédie peut donner un film intéressant entre de bonnes mains, mais, en l'espèce, je dois avouer que ce choix m'a plutôt mis mal à l'aise. Une question de morale ? Peut-être. Une fois admise l'idée (un peu dingue) que George Clooney, Mark Walhberg, Ice Cube et Spike Jonze puissent ainsi déambuler entre les dunes, on peut certes s'en amuser, ainsi que de la manière dont est décrite la relation entre le gros de la troupe et les médias. Reste que, derrière tout ça, les Irakiens sont négligés: le scénario choisit d'en faire soit des mercenaires sans scrupule, soit des brebis égarées au milieu d'une meute de loups. Et il ne tient finalement qu'aux valeureux Américains qu'ils s'amendent et/ou soient sauvés. Mouais... tout ça est peu too much pour que je l'avale sans sourciller !

Les rois du désert
Film américain de David O. Russell (1999)

Peut-être ai-je pris au sérieux un récit qui n'en demandait pas tant. En réalité, la mise en scène ne m'a pas spécialement aidé à entrer dans le délire: plutôt que devant un film de cinéma, on se croirait parfois face à un clip vidéo... sans que cela soit d'un grand intérêt. Pour rire avec George Clooney soldat, Les chèvres du Pentagone m'apparaît un meilleur choix. Ou alors, solution B: il y a In the loop...

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Et maintenant, pour la défense du film...
Je vous suggère d'aller faire un tour sur la Kinopithèque de Benjamin.

8 commentaires:

dasola a dit…

Bonjour Martin, pas vu et pas tentée du tout. J'en ai marre des films de guerre faits par des gens qui n'ont jamais combattu. Bonne fin d'après-midi.

Martin a dit…

Hello Dasola. Je comprends ton point de vue, même si ton argument est étonnant !
S'il fallait se passer de ces films, on en raterait quelques très bons, je suppose.

Bref... en attendant, celui dont je parle aujourd'hui n'est vraiment pas folichon.
C'est vraiment la manière dont il présente les populations civiles qui m'a mis mal à l'aise.

Laurent a dit…

Hello Martin...j'avais cru comprendre que ce film s'inspirait fortement du classique "De l'or pour les braves". A te lire, il est plusieurs coudées en-dessous.

Pascale a dit…

J'avais beaucoup aimé moi. Ça commence comme une farce. Je suis neanmoins d'accord avec toi... l'emplacement de la carte on sen serait passé...
Mais ils sont en plein désert on voit donc bien la vie d'un village qui y est situé et comment les irakiens sont terrorisés et maltraités.
Il y a une terrible scène d'interrogatoire aussi il me semble avec notre Saïd.
Et l'arrivée des 4×4 rutilants me semblent réaliste.
Une guérilla en plein désert.
Il y a aussi le parcours d'une balle et les dégâts dans le corps humain qui m'a bluffée.
La rédemption peut être facile des pieds nickelés qui finissent par ne plus rigoler du tout et la longue scène finale très angoissante m'ont touchée.
Un très bon film pour moi, surprenant, plutôt unique en son genre et que j'aurais plaisir à revoir.

Et heureusement qu'il ne faut avoir tué personne pour parler de serial killers sinon beaucoup de nos réalisateurs adorés seraient sous les verrous :-)

Martin a dit…

@Laurent:

Salut Laurent ! Ce que tu dis est possible, mais je n'ai pas eu l'occasion de comparer.
Cela dit, étant donné que "De l'or sur les braves" figure dans ma collection, ça se fera un jour !

Martin a dit…

@Pascale:

Merci de ce contrepoint argumenté, Madame, et total respect pour ton regard.
Ce que tu dis est vrai, mais je n'ai pas aimé l'opposition "méchants Irakiens" et "gentils GI".

J'ai trouvé au film une esthétique de clip vidéo, une vision rigolote de la guerre.
Sur le terrain, à mon avis, c'était beaucoup moins marrant. J'ai pris ça très (trop ?) au sérieux.

De mon point de vue, David O. Russell a fait bien mieux ensuite.

Pascale a dit…

Il y avait aussi de très gentils irakiens dans ce film. Celui qui guide le groupe. Et les américains sont cupides et pas des pix nobel d'intelligence... la journaliste est très antipathique.
Une vision rigolote ? Il mavait terrifiée ce film même si ça commençait comme une blague. Je n'ai pas ri longtemps...
Mais bon ma vision du film est assez ancienne.
J'ai revu De l'or pour les braves. Très mal vieilli il me semble.

Martin a dit…

Oui, mais la bande à Clooney, ça a juste l'air de braves gars sauveurs du monde.
Mais peut-être que je n'étais pas sensible au second degré, ce jour-là. C'est possible.