Neil Armstrong n'est pas à la place attendue dans le vrai-faux biopic que Damien Chazelle lui consacre. Avec un bel aplomb, le scénario aborde le premier homme à avoir marché sur la Lune par sa face cachée. L'exploit de la mission Apollo 11, au matin du 21 juillet 1969, passe (presque) au second plan. Il est vrai que les faits sont connus...
Soyons clairs: cette incroyable aventure n'est sûrement pas négligée. D'aucuns reproche(ro)nt au film d'avoir osé éluder l'image du moment historique où l'astronaute plante le drapeau américain dans le sol lunaire. C'est vrai, mais est-ce grave ? À vrai dire, je ne le pense pas. First man démarre au début des années 60 et s'intéresse aux aspects humains de cette incroyable épopée, bien plus qu'à ses objectifs politiques. Il est alors bien difficile de ne pas tenir compte de l'audace des pionniers de la conquête spatiale. Beaucoup y ont laissé la vie. Aucun n'a réellement eu ce que l'on appelle "une existence ordinaire". Et dire qu'à l'époque, les avions n'avaient même pas encore un siècle !
First man revient constamment sur l'envers du décor: la confiance relative des équipes restées au sol, la volonté des pouvoirs publics américains d'aller plus haut, plus vite et plus loin que l'ennemi soviétique, la fierté légitime des familles, leur angoisse aussi. L'essentiel du propos du film repose justement sur cette dichotomie entre l'image héroïque de Neil Armstrong et la réalité de son quotidien auprès de sa femme et de ses enfants. C'est l'occasion de se souvenir que l'homme portait le deuil de sa fille, disparue à l'âge de deux ans. Annoncée dès le début du long-métrage, cette tragédie est le moteur noir du récit: elle replace aussitôt l'enjeu à un niveau très... "terrien".
Ce qui nous est présenté transcende donc les codes du blockbuster classique. Pour autant, rien à redire sur la forme: tourné sur pellicule et sans abuser d'effets spéciaux, le film comprend son lot de scènes spectaculaires et nous immerge en profondeur dans une autre réalité. C'est évidemment sur l'écran géant d'un cinéma que First man révèle toute sa puissance émotionnelle: il m'a très souvent pris aux tripes ! Les acteurs, concernés, ont l'immense mérite de ne pas surjouer. Ryan Gosling est très bon, sur un registre qui lui est assez familier. Claire Foy, que j'ai ainsi découverte, est parfaite en épouse-courage. Et j'ai apprécié de revoir Kyle Chandler, Jason Clarke, Ciaràn Hinds...
Autre point intéressant: le film nous montre - ou suggère - une partie de la contestation montant alors aux États-Unis tandis qu'une poignée d'ingénieurs travaillaient aux préparatifs de la grande expédition. Certaines séquences font ainsi écho à ce que peuvent être nos débats d'aujourd'hui quant à l'opportunité économique d'une telle démarche périlleuse, dans un pays où demeurent de lourdes inégalités sociales. First man ne relève sans doute pas du brûlot politique, mais il pose d'intelligentes questions pour titiller un peu notre bonne conscience citoyenne. Chacun y pensera... ou pas: on peut se contenter de faire un voyage à nul autre pareil. 138 minutes aller/retour: ça passe vite !
First man
Film américain de Damien Chazelle (2018)
Je ne serais pas très surpris de voir le film gagner quelques Oscars techniques en début d'année prochaine. Au petit jeu des parallèles cinéphiles, il s'inscrit, dit-on, dans la lignée de L'étoffe des héros. Pour la relation père/fille, il arrive qu'il soit comparé à Interstellar. Moins ludique que Seul sur Mars, il est sûrement aussi documenté. Certains plans m'ont rappelé ceux de... 2001: l'odyssée de l'espace !
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Vous êtes prêts à décoller vers d'autres cieux ?
Je vous laisse donc vous poser chez Pascale, Strum et Princécranoir. Vous pouvez aussi mettre le cap vers les pages de Tina ou Benjamin.
Soyons clairs: cette incroyable aventure n'est sûrement pas négligée. D'aucuns reproche(ro)nt au film d'avoir osé éluder l'image du moment historique où l'astronaute plante le drapeau américain dans le sol lunaire. C'est vrai, mais est-ce grave ? À vrai dire, je ne le pense pas. First man démarre au début des années 60 et s'intéresse aux aspects humains de cette incroyable épopée, bien plus qu'à ses objectifs politiques. Il est alors bien difficile de ne pas tenir compte de l'audace des pionniers de la conquête spatiale. Beaucoup y ont laissé la vie. Aucun n'a réellement eu ce que l'on appelle "une existence ordinaire". Et dire qu'à l'époque, les avions n'avaient même pas encore un siècle !
First man revient constamment sur l'envers du décor: la confiance relative des équipes restées au sol, la volonté des pouvoirs publics américains d'aller plus haut, plus vite et plus loin que l'ennemi soviétique, la fierté légitime des familles, leur angoisse aussi. L'essentiel du propos du film repose justement sur cette dichotomie entre l'image héroïque de Neil Armstrong et la réalité de son quotidien auprès de sa femme et de ses enfants. C'est l'occasion de se souvenir que l'homme portait le deuil de sa fille, disparue à l'âge de deux ans. Annoncée dès le début du long-métrage, cette tragédie est le moteur noir du récit: elle replace aussitôt l'enjeu à un niveau très... "terrien".
Ce qui nous est présenté transcende donc les codes du blockbuster classique. Pour autant, rien à redire sur la forme: tourné sur pellicule et sans abuser d'effets spéciaux, le film comprend son lot de scènes spectaculaires et nous immerge en profondeur dans une autre réalité. C'est évidemment sur l'écran géant d'un cinéma que First man révèle toute sa puissance émotionnelle: il m'a très souvent pris aux tripes ! Les acteurs, concernés, ont l'immense mérite de ne pas surjouer. Ryan Gosling est très bon, sur un registre qui lui est assez familier. Claire Foy, que j'ai ainsi découverte, est parfaite en épouse-courage. Et j'ai apprécié de revoir Kyle Chandler, Jason Clarke, Ciaràn Hinds...
First man
Film américain de Damien Chazelle (2018)
Je ne serais pas très surpris de voir le film gagner quelques Oscars techniques en début d'année prochaine. Au petit jeu des parallèles cinéphiles, il s'inscrit, dit-on, dans la lignée de L'étoffe des héros. Pour la relation père/fille, il arrive qu'il soit comparé à Interstellar. Moins ludique que Seul sur Mars, il est sûrement aussi documenté. Certains plans m'ont rappelé ceux de... 2001: l'odyssée de l'espace !
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Vous êtes prêts à décoller vers d'autres cieux ?
Je vous laisse donc vous poser chez Pascale, Strum et Princécranoir. Vous pouvez aussi mettre le cap vers les pages de Tina ou Benjamin.
10 commentaires:
Jolis arguments.
Le plantage de drapeau ne m'a pas manqué. Bravo de l'évoquer. Nous ne sommes pas américains, Damien Chazelle non plus ça doit jouer. J'ai parfois l'impression qu'ils dorment dans leur drapeau tant ils en sont amoureux.
L'interprétation ronchon sans nuances de Ryan m'a parfois agacée.
Je n'ai pas aimé qu'il (SPOILER) jette le bracelet de sa fille. J'ai pensé à la mère... dont d'ailleurs on met le chagrin complètement de côté comme si elle remplacait un enfant par un autre.
Je n'ai pas aimé les relations entre les femmes. Elles sonnent faux. Ces moments sont toujours gnangnan.
Mais c'est un film différent quoique froid. Il ne fera sans doute pas partie de mon indispensable top. Toi si, si j'en juge ton incroyable étoilage.
ll m'a comme d'habitude manqué l'émotion.
L'Etoffe des héros n'est ni dépassé ni atteint pour moi.
Merci.
Damien Chazelle est franco-américain: il a les deux nationalités et se sent citoyen des deux pays.
Sur le film...
Ryan est un peu monolithique, c'est vrai, mais je crois que cela correspond plutôt bien au personnage.
Je ne trouve que les conversations féminines sonnent faux. Je pense qu'elles sont, peut-être, un peu fausses.
Top ou pas, j'ai ressenti une émotion. Certes, c'est une atmosphère froide. Il est question de deuil, après tout.
C'est vrai que j'y suis allé voir avec mes étoiles. Je me demande toujours si cela sert vraiment, ces notations...
Je ne savais pas pour Damien. Merci
Pour Ryan... j'ai aimé certains moments. Lors de son "entretien" d'embauche ou de la conférence de presse, j'apprécie son attitude, sa façon directe, précise et froide de répondre. C'était manifestement un taiseux. En dehors de ça il aurait quand même pu prendre quelques expressions... sa douleur m'aurait sans doute plus atteinte. Sur les photos réelles il semblait souvent très souriant. Même les non officielles.
Je pense qu'on est d'accord pour les femmes. Elles sont stéréotypées, gentilles, compréhensives et solidaires ça se limite à ça. Leurs conversations toujours d'une platitude !!! dans ce genre de films.
Pour TES étoiles, je ne les regarde qu'après avoir lu. 9,9 fois sur 10 je me trompe sur ce que tu mets par rapport à ce que tu as écrit. On en a deja parlé :-)
J'ai failli retirer les miennes il y a un certain temps. Il y a eu une émeute lors de mon référendum ;-))) Je sais que certains se passent de lire et ne regardent que les étoiles :-(((
Bon retour aux affaires cinéphiliques Martin. Je n'ai pas probablement pas aimé le film autant que toi mais j'ai été sensible à l'histoire (dire une dernière fois adieu à une morte sous couvert d'exploit spatial, d'où cette approche subjective, centrée sur un personnage) et aux scènes dans l'espace qui sont très réussies. Merci pour le lien !
@Pascale:
De rien. Je trouve ça chouette, cette double culture, d'autant qu'il l'exploite bien et intelligemment.
Pour les étoiles... j'hésite moi aussi à les enlever et à faire plus court sur les films qui ne m'emballent pas.
Tout système de notation est imparfait et, c'est vrai, cette fois, j'y suis allé FORT (et non pas "voir"). J'assume !
On verra bien ce que ça donne en fin d'année du côté des tops. Ils ne correspondent d'ailleurs pas toujours aux étoiles.
@Strum:
Merci, l'ami ! Je vois que nous sommes d'accord en tout point, malgré tes bémols.
Je dois dire que je me suis totalement immergé dans le film dès la toute première scène dans l'avion d'essai.
Javais traduit le fort je sais ce que c'est que d'avoir un appareil bilingue. Je crois qu'on l'a déjà évoqué:-)))
Mon top à moi correspond aux étoiles.
Là où elles sont placées la disparition de tes étoiles gêneraient sans doute moins que les miennes.
Les chatouilles m'ont mise à terre...
Pour le coup, je crois que j'ai plutôt fait une faute de frappe. L'essentiel est d'être "décryptable".
Les étoiles, on va dire qu'elles sont en sursis. Au moins jusqu'à la fin de l'année. On verra ensuite.
"Les chatouilles" ? Peut-être j'irai le voir, mais je n'en ai pas très envie pour le moment.
J'aurais aimé me sentir plus impliquée dans cette histoire qui parfois m'a touchée mais certainement parce qu'on ne peut pas se sentir totalement à côté d'une histoire de deuil. Mais trop trop long et Ryan trop trop taiseux à force.
Je comprends parfaitement. Cela dit, au-delà de l'émotion, l'épopée spatiale vaut le détour.
Damien Chazelle aurait sans doute pu faire plus court s'il n'était pas entré dans les détails "scientifiques".
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