samedi 13 septembre 2025

Le temps d'un été

Incroyable mais vrai: j'ai bien failli passer à côté de mon film du jour simplement parce qu'à sa sortie, je trouvais son titre très moche. Sandrine Kiberlain l'a réalisé et dit avoir voulu "s'exprimer autrement" que comme actrice, exauçant un rêve longtemps jugé inaccessible. Elle parle de légitimité. D'une histoire "valant le coup". Voyons cela...

Une jeune fille qui va bien
: de quoi camper un personnage singulier. Difficile d'ailleurs de ne pas s'y attacher, voire même de s'y identifier. Irène, 19 ans, arpente les rues de Paris avec l'enthousiasme naturel de sa jeunesse et les mille envies qui lui sont associées. Son groupe d'amis et elle ne rêvent que d'une chose: entrer au Conservatoire. Chaque jour, inlassablement, ces adolescents et jeunes adultes répètent donc L'Épreuve, comédie en un acte de Marivaux (1740). Cela se passe pour le mieux, en apparence, mais c'est l'été 1942 ! Toute à son insouciance, Irène en a  presque oublié qu'elle est juive...

Moche ou pas ? Vous jugerez. Une jeune fille qui va bien: un titre conçu en trompe-l'oeil. Je veux ici saluer l'audace d'une mise en scène fondée sur ce qu'elle ne montre pas: cette menace à peine perceptible et pourtant constante pour l'héroïne du récit. Pas de croix gammée visible à l'écran, pas de cris, pas de rafle... juste une génération remplie d'espoirs et qui vit (presque) normalement en ces heures sombres. Le contraste avec ce qu'on imagine de la réalité quotidienne de la vie à cette époque est évidemment un fort vecteur d'émotions. J'ai envie de retenir le meilleur: en dépit de quelques maladresses largement pardonnables à une cinéaste débutante, Sandrine Kiberlain fait mouche. Certaines idées sont très belles - je pense aux lunettes pour voir flou et à un premier baiser donné dans le noir, notamment. J'ai vu un beau film et des acteurs convaincants: Rebecca Marder, André Marcon, Françoise Widhoff, Anthony Bajon... merci ! Et bravo !

Une jeune fille qui va bien
Film français de Sandrine Kiberlain (2022)

Rebecca Marder a finalement été nommée au César du meilleur espoir féminin, mais il me semble que l'accueil réservé à ce long-métrage est resté plutôt froid (à peine 161.303 entrées dans toute la France). Il est vrai, comme je l'ai lu, que le récit est ténu. Je vous renvoie vers un chef d'oeuvre - Le jardin des Finzi Contini - pour le sujet. Autre option: La chambre de Mariana, une merveille de cette année.

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Et pour vérifier que mon film du jour ne fait pas l'unanimité...

Vous pouvez lire la chronique de Pascale et celle de "L'oeil sur l'écran".

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