lundi 9 janvier 2017

Voir Venise et...

Je l'ai sans doute déjà dit: David Lean reste connu comme l'homme derrière la caméra de plusieurs grosses productions hollywoodiennes. C'est mérité évidemment, mais c'est aussi réducteur, car le cinéaste britannique a d'abord fait carrière en Europe. Je vais vous parler aujourd'hui de l'oeuvre qui tient lieu de jonction entre ces périodes...

Dans Vacances à Venise, Katherine Hepburn, femme seule, découvre la Sérénissime dans la peau d'une touriste américaine. Elle croise d'abord quelqu'un dans le train, qui lui dit deux mots de la diversité des aspects de la ville. Plutôt qu'une gondole, elle choisit d'emprunter un bateau-bus pour rejoindre sa pension. Là, plutôt que de suivre aveuglément les conseils de ses nouveaux voisins, elle flâne d'abord selon sa propre inspiration, ce qui la conduira bientôt... à rencontrer un antiquaire particulièrement séduisant. Je vous laisserai découvrir par vous-mêmes la suite de ce portrait de femme. C'est peu de dire que le film a vieilli, mais il est resté assez subtil (et drôle, parfois)...

En entamant cette escapade dans la Cité des doges, je craignais surtout de tomber sur un film "carte postale", comme il est simple pour un pro du cinéma d'en réaliser un, en maîtrisant la technique. Fort heureusement, David Lean n'est pas seulement un illustrateur. Bien entendu, il n'hésite pas à parsemer son film d'images superbes pour nous ouvrir au rêve, mais il n'en oublie pas pour autant de tenir fermement la barre de son scénario. Vacances à Venise se révèle finalement bien plus mélancolique qu'il n'y paraissait de prime abord. Honneur à Rossano Brazzi, bel acteur italien emporté par la fougue. Pour un grand duo, c'est l'évidence même: il faut deux grands acteurs.

Vacances à Venise
Film américano-britannique de David Lean (1955)

Puisque j'ai vu plusieurs de ses grosses productions, je suis content désormais de connaître aussi ce film, le premier réalisé par le maître pour le compte d'un studio américain. Bien sûr, le regard qu'il porte sur la fière ville de la lagune s'en ressent. On reste toutefois bien loin du lyrisme de Mort à Venise ou, plus récemment, de la douce poésie de La petite Venise. La cité lacustre révèle ses mille et un visages... 

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Pour finir, une anecdote personnelle...
Dans l'un de mes films-cultes, à savoir The fisher king, un clochard magnifique pleure dans les bras de Jeff Bridges son désarroi profond de ne pas être Katherine Hepburn et de ne pas aller à Venise. Je sais pourquoi, maintenant - et cette scène-là me paraît encore plus belle !

Sans oublier enfin l'avis d'autres cinéphiles...
Chonchon évoque le film, mais il ne l'a visiblement pas emballée. Quant à Ideyvonne, elle offre l'une de ses fameuses galeries d'images.

12 commentaires:

eeguab a dit…

Hello Martin. Joli film, ce Summertime, avec juste ce qu'il faut d'exotisme en ces années cinquante. Venise au cinéma c'est au moins 200 films, je pense, et de toutes sortes.

Pascale a dit…

Je l'ai revu, trouvé daté et vieillot:-)
mais Venise !!! Je ne compte le nombre de fois j'y suis allée. Je ne sais si je pourrai/oserai y retourner.

Martin a dit…

@Eeguab:

Effectivement, je suppose que la Sérénissime a dû inspirer bien des cinéastes ! Et c'est bien compréhensible…
"Vacances à Venise" est un film qui m'a plutôt plu, même si, sur le fond, il m'est apparu très largement dépassé.

Martin a dit…

@Pascale:

Moi, si j'en avais l'opportunité, je n'hésiterais pas. Il faut d'ailleurs que je fasse ça un jour.
Venise a un côté intemporel, mais il est clair que la comparaison avec le film ne doit plus tenir !

Anonyme a dit…

Comme on pouvait s'y attendre, Venise est bien filmée par David Lean (sans qu'il parvienne évidemment à restituer la beauté inouïe de la plus belle ville du monde), mais il y a dans ce film comme une contradiction entre l'ampleur de la mise en scène et l'intimité du drame personnel vécu par le personnage de Katherine Hepburn, qui m'a empêché d'y adhérer pleinement. Un film triste et étrange ce Summertime.
Strum

Martin a dit…

Je trouve quand même que, sur le plan de l'image, c'est un travail très soigné.
C'est vrai que le ton est moins badin que je ne l'avais imaginé. C'est même plutôt sombre, dans le fond.

Anonyme a dit…

C'est sûr, Lean soigne toujours ses plans et ses images.
Strum

ideyvonne a dit…

Par ce film, Lean permet à tous ceux qui ne connaissent pas Venise de se plonger dans cette atmosphère unique ! Et j'affirme même, pour y avoir été plusieurs fois, que la Venise d'aujourd'hui (habitants et touristes non compris) est identique à celle du film !
Personnellement, lors de ma 1ère visite, je me suis étonnée à penser que j'étais dans un tableau de Renoir... Je n'avais pas encore vu le film de Lean à l'époque ;)
En tout cas, encore une belle oeuvre pour ce réalisateur de génie !!!

Martin a dit…

@Strum:

Ce sera encore plus flagrant par la suite, dans ses grosses productions.
Je me demande même si ce n'est pas précisément la qualité qu'Hollywood a le plus apprécié chez lui.

Martin a dit…

@Ideyvonne:

Il faut décidément que je me décide à aller passer quelques jours à Venise !
En attendant, David Lean est un guide tout à fait appréciable à mes yeux… et pour d'autres destinations aussi.

eeguab a dit…

Hello Martin. Je viens de le revoir et je le trouve délicieux, et d'une certaine profondeur sur deux mondes qui se rencontrent. De jolis plans, le gardenia, la chaussure rouge au dancing. On n'échappe pas aux clichés. Personne ne peut y échapper surtout à Venise, la Sérénissime mais aussi la "clichissime". Mais tu sais que je récuse l'expression de film qui a vieilli ou qui est dépassé. Le film est des années cinquante. Il respire les années cinquante comme un tableau impressionniste respire la fin du XIXème ou comme un film de Sautet respire les seventies. Et c'est très bien ainsi. A bientôt.
P.S. Je suis allé à Rome, Florence, Pise, Naples, Catane, Syracuse, Bologne, Ferrare, mais jamais à Venise.

Martin a dit…

Hé ! J'aime bien quand tu remontes le temps et le fil de mes chroniques !
Malgré les clichés, je ne vois rien de désagréable dans ce film, moins lumineux que je l'avais imaginé.

Je ne reviendrai pas sur le concept de film vieilli. C'est vrai que c'est absurde (ou mal exprimé).
En revanche, je suis presque envieux de tes séjours italiens. Je finirai peut-être par te rattraper...