Chers amis, je laisse la parole à Joss pour sa chronique mensuelle...
Treize ans qu'il est sorti, primé sous toutes les coutures. C'était le premier film indépendant écrit et réalisé par l'Américain Thomas McCarthy (tout comme cinq ans plus tard The visitor, qui obtiendra le Grand Prix du jury du Festival de Deauville). Et même si avant The station agent et après The visitor, d'autres longs-métrages lui ont valu de nombreux prix, celui-là m'a définitivement scotchée.
À peine trois ans qu'un ami me l'a fait connaître. Un scénario et un jeu d'acteurs qui en font pour moi l'une des meilleures comédies douces-amères. Depuis, je le regarde régulièrement et à chaque fois, j'y découvre quelque chose, comme une nouvelle pépite. J'ai toujours aimé les trains, les gares. Deux univers aux antipodes et pourtant indésolidarisables. Et au milieu, il y a ce film...
Lorsque son vieux patron black meurt d'une crise cardiaque, Finbar McBride perd à la fois son job (technicien en trains électriques) et son seul ami, mais il hérite d'une petite gare désaffectée du New Jersey, où il espère bien trouver la tranquillité, loin des mauvais quolibets d'ados et des regards d'adultes. Finbar est nain. En recevant les clés de ce no man's land, ses espoirs étaient grands, mais il se rend vite compte que la vie paisible et solitaire de ses rêves n'est pas gagnée. L'y attendent deux voisins impayables: Joe, jeune vendeur de hot-dogs italiens, et Olivia, artiste peintre quarantenaire et distraite. Improbable trio. Et quel trio !
C'est avec une dextérité sans nom que le réalisateur va manier son monde. Drôlerie, esprit, délicatesse autour d'une relation qui ne cessera de monter en puissance. Le cas de figure n'est pas rare, mais quand on vient d'hériter d'une gare, quand on installe son camion-snack dans un lieu de telle solitude (aucun train ne s'y arrête jamais) et quand on porte un lourd chagrin de mère, on nourrit aussi un cadre pour le moins atypique. Base suffisamment consistante pour ne pas offrir de spectaculaire, mais une trame de relation en duo ou trio toujours fortes, où chacun endosse plusieurs casquettes: parentale, filiale, amicale, amoureuse...
Lors de promenades le long de la voie ferrée en colonne d'Indiens ou en attendant le passage d'un train devant un banc, il y a de la volupté, celle de l'espérance d'un don de l'autre. Et derrière cette multitude de conjugaisons, c'est l'effet magnétique de Fin qui tire les ficelles. Bien involontairement, intensément. Une banalité déguisée, voilà ce qu'est ce scénario. Dense et léger à la fois pour déboucher sur le baiser furtif que donne à Fin la jeune Emily - déjà engagée avec un voyou sans attrait -, sur l'accablement de Joe obligé de cuisiner sans ail, ou encore sur le regard de Cleo, la petite fille noire et rondouillarde qui entre en contact avec Fin simplement en le suivant sur la voie ferrée.
Rien que des choses naturelles, mais jamais banales. Symbolique pleine d'humour comme la récurrence à tout bout de champ du cafe con leche, de la maladresse d'Olivia au volant, de l'insistance touchante de Joe ou même de l'obligation pour lui de se courber dans un camion tant il est grand (et Fin si petit). Rien que du calme et du profond. On attend joliment un revirement qui finalement ne s'impose pas. L'atmosphère y est déjà tellement chargée en charme pour tant de douleur rentrée. La tendresse y résistera-t-elle ?
Treize ans qu'il est sorti, primé sous toutes les coutures. C'était le premier film indépendant écrit et réalisé par l'Américain Thomas McCarthy (tout comme cinq ans plus tard The visitor, qui obtiendra le Grand Prix du jury du Festival de Deauville). Et même si avant The station agent et après The visitor, d'autres longs-métrages lui ont valu de nombreux prix, celui-là m'a définitivement scotchée.
Lors de promenades le long de la voie ferrée en colonne d'Indiens ou en attendant le passage d'un train devant un banc, il y a de la volupté, celle de l'espérance d'un don de l'autre. Et derrière cette multitude de conjugaisons, c'est l'effet magnétique de Fin qui tire les ficelles. Bien involontairement, intensément. Une banalité déguisée, voilà ce qu'est ce scénario. Dense et léger à la fois pour déboucher sur le baiser furtif que donne à Fin la jeune Emily - déjà engagée avec un voyou sans attrait -, sur l'accablement de Joe obligé de cuisiner sans ail, ou encore sur le regard de Cleo, la petite fille noire et rondouillarde qui entre en contact avec Fin simplement en le suivant sur la voie ferrée.
Rien que des choses naturelles, mais jamais banales. Symbolique pleine d'humour comme la récurrence à tout bout de champ du cafe con leche, de la maladresse d'Olivia au volant, de l'insistance touchante de Joe ou même de l'obligation pour lui de se courber dans un camion tant il est grand (et Fin si petit). Rien que du calme et du profond. On attend joliment un revirement qui finalement ne s'impose pas. L'atmosphère y est déjà tellement chargée en charme pour tant de douleur rentrée. La tendresse y résistera-t-elle ?
14 commentaires:
Bonjour Joss (et bonjour Martin),
Je n'ai encore jamais vu un film de Tom McCarthy, alors qu'il avait fait beaucoup parler de lui après "The visitor". Et je viens de me rendre compte qu'il est le réalisateur du film "Spotlight", qui a eu de bonnes critiques, mais qui n'est pas du tout mon genre de film. Je prends note de ce premier film, qui finalement me tente le plus à première vue. Peut-être parce que j'aime aussi beaucoup les gares et les trains (petit hommage au peintre Paul Delvaux au passage). Bref, tu m'as convaincue Joss, tant The Station Agent semble vraiment avoir tout pour me plaire :)
Merci pour ce commentaire, Sentinelle. Joss te répondra peut-être après moi.
Je n'avais pas réalisé non plus que Thomas (alias Tom) McCarthy était le réalisateur de "Spotlight" ! Il me semble finalement qu'il a fait des choses assez variées, dans une carrière assez discrète jusqu'alors. Mais tant mieux ! J'aime aussi les cinéastes américains qui ne font pas de bruit et qui ont de vraies fulgurances créatives.
Et c'est toujours sympa de prendre un artiste à ses débuts pour mesurer le chemin parcouru, non ?
Je suis enchantée de voir ce billet ! The station agent est un petit film méconnu que j'avais énormément aimé. Il mérite le détour. Bravo Joss !
Voilà un commentaire qui devrait faire plaisir à Joss ! Merci à toi, Chonchon !
Etant donné que j'ai énormément aimé The Visitor et Spotlight, je compte bien rattraper celui-ci !! :D
Bonsoir Martin,
J'ai vu le film et je l'ai beaucoup aimé ! Merci encore pour cette découverte. Je vais tenter son film qui suit, et que j'avais noté depuis longtemps.
@Tina:
Un de ces jours, "The station agent" devrait être mon premier McCarthy. On aura donc peut-être l'occasion prochaine d'en reparler ici ou chez toi.
@Sentinelle:
C'est Joss qu'il faut remercier ! Pour ma part, je dois encore découvrir le film, grâce à notre amie qui m'a prêté le DVD. J'en redirai alors un mot.
J'ai lu et j'ai trouvé ça " le loin de la voie ferrée" :-)
ça donne envie en tout cas. Qui sont les autres acteurs ?
Hop, coquille corrigée, merci pour ton attention ! Les autres acteurs que Peter Dinklage, tu veux dire ? Patricia Clarkson, Michelle Williams, Bobby Cannavale... pas de grandes stars.
Comme je m'intéresse depuis peu à Games Of Thrones j'avais reconnu Peter... J'aime bien Pat et Michelle.
Désolée pour la "coquille", je ne veux pas vexer. J'aime qu'on me fasse remarquer les miennes mais tout le monde n'est pas forcément de cet avis.
Aucun problème ! Tu as bien fait de me signaler cette coquille.
Et, effectivement, pour qui regarde Games of thrones, Peter est très reconnaissable !
Vraiment contente que The station agent ait fait l'unanimité. Malgré tout, on est ouvert à tous les ressentis - le propre de l'échange - , y compris les coquilles d'étourderie dans le texte. Martin est réactif et corrige vite. Ce serait presque un devoir entre nous de se dire les choses (merci Pascale). En revanche, "le loin de la voie ferrée" me plairait bien dans un autre contexte (de la poésie dans la bévue !!). Personnellement, j'ai au moins revu une fois chaque acteur secondaire dans un autre film. Dans ce casting, ils ont vraiment leur place. J'attends avec impatience l'avis de Martin.
Amitiés à tous.
Joss
Hé hé... je suis réactif, moi ? Bon, admettons.
En tout cas, je suis très content de l'accueil que nos amis ont réservé à ta chronique.
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